WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Le Cameroun dans la coopération sécuritaire internationale: le cas de l'EIFORCES (2008-2022)


par Claudel Elian EDINA ONOMO
Université de Yaoundé 1 - Master 2023
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

B- Les fondements conjoncturels de la naissance de l'EIFORCES « du dehors »

La naissance de l'école internationale des stratèges de sécurité d'Awae au Cameroun trouve sa raison d'être dans les différentes crises sécuritaires que vit le monde. Dans un monde de plus en plus interconnecté où le principe de frontière à tendance à disparaitre pour céder place au village planétaire, tous les acteurs sont conviés afin de construire un espace d'épanouissement prospère et stable. Le Cameroun a répondu à ce défi à travers la création de l'EIFORCES. En mettant sur pied cet établissement, les autorités camerounaises veulent apporter des réponses aux situations crisogenes extérieures. Dans cette réflexion, l'accent est mis sur la présentation de ces crises sécuritaires du dehors.

1. Les attentats du 11 septembre 2001 : la riposte contre le terrorisme

Le 11 septembre 2001, le monde vit un évènement historique qui va changer le cours de l'histoire. Il s'agit des attentats perpétrés sur le sol américain par dix-neuf terroristes appartenant à Al Quaida. Ces derniers vont prendre d'assaut quatre avions de ligne37. Deux de

35

ces avions auront pour cible les tours jumelles du World Trade Center à New York. Ils vont s'écraser sur le centre de la puissance économique américaine. Un autre de ces avions s'écrase sur le pentagone à Washington, bâtiment abritant le quartier général des forces armées américaines. Le quatrième échoue au niveau de la maison Blanche siège de la présidence américaine, lieu incarnant la puissance de la politique et la diplomatie américaine. Ces attentats portent un coup à l'orgueil des Etats Unis et à l'ordre mondial. Au lendemain de la deuxième guerre mondiale les Etats Unis héritent de la lourde responsabilité de protéger et préserver la sécurité mondiale.

Les terroristes choisissent une heure haute symbole dans le quotidien des américains pour attaquer ces édifices incarnant le Soft-power américain38. Il s'agit de 9 heures sur la côte Est des Etats Unis et 15 heures en Europe39. L'objectif est d'installer la psychose auprès de la communauté américaine et internationale. Ceci grâce à l'effet communicationnel. En effet, au moment où les faits se déroulent, les téléspectateurs vivent en direct l'effondrement des tours jumelles, la remise en question de l'hégémonie américaine et de l'ordre mondial. La communauté internationale se mobilise pour barrer la voie à cet ennemi. Il s'agit des groupes terroristes.

L'entrée en scène de cet acteur a suscité des vives mobilisations auprès des autorités américaines et de la communauté internationale. Pour ralentir les effets néfastes du terrorisme, les acteurs mondiaux remettent la sécurité au centre du débat. L'on passe de la sécurité domestique auxiliaire de la sécurité intérieure à une sécurité allant au-delà des frontières. La nouvelle approche sécuritaire devient proactive. Désormais, les moyens sont mis en oeuvre afin d'anticiper tous les actes terroristes. Parmi ces outils d'anticipation des actes terroristes, il y' a la création de structures d'encadrement sécuritaire. C'est le cas de l'école internationale camerounaise d'Awae qui oeuvre pour un renforcement des capacités en matière de lutte contre le terrorisme. Ce renforcement des capacités s'effectue dans un environnement pédagogique hautement coopératif (coopération policière).

Le Cameroun très attaché aux valeurs de paix et de solidarité internationale, va créer une école de sécurité internationale dont le but est, de former des experts dans le champ sécuritaire afin d'anticiper sur des menaces sécuritaires et terroristes. Les dirigeants camerounais en créant l'EIFORCES ont à coeur de répondre aux problèmes sécuritaires qui frappent le monde. La création de cette école trouve sa raison d'être dans d'autres faits

38 Une expression employée comme synonyme de politique d'influence (économique, culturelle, idéologique) initiée par l'Etat américain.

39 A. Bernard, " Le 11 septembre ", p. 3.

36

marquants de crises sécuritaires perturbant la stabilité du monde en général et l'Afrique en particulier. C'est le cas des crises sécuritaires qu'a vécu la Côte d'Ivoire. Le Cameroun sous l'égide des Nations Unies a eu à déployer ses forces de sécurité dans ce pays ami. Les autorités camerounaises en dehors de l'envoi d'un contingent ont pensé apporter une solution aux crises sécuritaires internationales.

2- Les crises ivoiriennes : L'urgence d'une amélioration de la gouvernance sécuritaire

Les crises ivoiriennes sont les fruits des causes structurelles et conjoncturelles. L'analyse des mobiles structurels, fait évoquer les pesanteurs historiques. Il est question à ce niveau de la configuration politico-administrative héritée de la période coloniale40. Pendant cette période, les colons lors du processus d'installation des administrations avaient privilégié les zones permettant l'écoulement aisé des produits de premières nécessités aux périphériques. Le maillage administratif et économique coloniale en Côte d'Ivoire est plus accentué à Abidjan au détriment du nord du pays41.

Cette implantation donne suite à des disparités. Elles sont observables au niveau infrastructurel. Certaines zones sont plus émancipées que d'autres. Et la présence de l'Etat est à travers ses services publics est inexistante. En Côte d'Ivoire, le Sud du pays se développe considérablement par rapport au Nord du pays. A ces disparités administrative-économique, il faut ajouter le processus d'étatisation survenu avant la construction d'un sentiment d'appartenance à une même entité territoriale42. Après l'obtention de sa souveraineté la construction d'un sentiment d'appartenance se fait autour du président Boigny. Avec la réouverture démocratique, l'adoption d'une constitution démocratique a amplifié les tensions latentes dans le pays. Néanmoins, le pays va connaitre la tenue d'une élection présidentielle.

Les résultats de celle-ci vont reconduire au pouvoir le président sortant. Il n'ira pas au terme de ce mandat car en 1993 il décède. Son successeur est le Président de l'Assemblée Nationale Henri Kona Bédié a la charge de terminer le mandat et d'organiser une élection. Ce fut le cas en 1995 lorsqu'il organise la deuxième élection à l'ère du multipartisme. Cette dernière est tachée de plusieurs irrégularités et se tient dans un climat violent. Néanmoins, le nouveau pouvoir va tenir les commandes du pays jusqu'en 1999. Date à laquelle le pays fait face à un coup d'état orchestré par un groupe de soldats.

40 N. Labonté," La guerre civile en côte d'Ivoire : L'influence des facteurs économiques, politiques et identitaires", Mémoire en Droit, Université de Laval, 2006, p. 73.

41 Ibid.

42 Ibid.

37

En décembre 1999, un groupe militaire déclarant faire partie d'une mission onusienne en Centrafrique réclamant leurs primes prendre d'assaut la télévision et la radio nationale ivoirienne. Le lendemain de cette prise d'assauts sur la télévision nationale, le général Guéi annonce le délogement de Bédie comme Président et de son gouvernement43. Les commandes du pays vont être assurées par le comité national du salut dont le général Guéi est le meneur. Ce comité dit vouloir balayer la maison. Cela suppose préparer un terrain propice pour la tenue d'une l'élection transparence.

Passant de la parole à l'acte, une élection a lieu le 22 septembre 2000. Au lendemain de l'élection, la commission électorale annonce le candidat de FPI en tête des résultats de cette élection. Le général Guéi candidat à cette élection dans une annonce télévisée discrédite les résultats de la commission électorale. Refusant de céder le pouvoir au candidat du FPI. Face à cette situation des mobilisations menées par les militants du FPI avec le soutien de certains éléments des forces de défense et de sécurité donnent lieu au délogement du général Guéi. Ces manifestations coutent la vie à 76 personnes à Yopougon44.

Le candidat du FPI Laurent Gbagbo est rétabli dans ses droits par la cour suprême. Il accède un pouvoir dans un environnement otage de plusieurs tensions. Ces tensions vont déboucher le 19 décembre 2002 sur une tentative de coup d'état qui va muter en une rébellion armée. Les rues d'Abidjan connaissent le 19 septembre 2002 une fusillade. Orchestré par un groupe de mutins de l'armée régulière ayant pour leader Soro Guillaume. Ce mouvement de mutins fustige le délestage que vivent les populations du Nord45. Cette crise politico-militaire va déboucher sur une division ethno-politique. Le Nord du pays musulman est soupçonné de soutenir la rébellion et le sud semble très proche du pouvoir.

Cette division ethno-politique va mettre de l'huile au feu. Le pays vit une balkanisation territoriale dans laquelle la rébellion occupe les deux tiers du territoire46. Les populations hors zone du contrôle de l'Etat sont victimes de plusieurs atrocités de la part des rebelles.

La détérioration sécuritaire que la Cote d'Ivoire vit à travers cette crise politico-militaire suscite l'attention de la communauté internationale. Pour une sortie de crise la France va convoquer les différentes parties à Marcoussis en janvier 2003. Les clauses de cette rencontre ne sont pas respectées par les différentes parties. Ce qui conduit à la rencontre d'Accra en juillet 2004. L'implémentation de ces accords semble impossible dans un

43 N. Labonté, "la guerre civile...", p. 37.

44 RAIDH, "Cote d'Ivoire : une décennie de crises graves non encore punis ", Freedom House, p. 10.

45 Ibid.

46 Ibid

38

environnement sujet à la violence. Les forces de sécurité ivoiriennes sont dans l'incapacité de garantir la sécurité sur l'ensemble du territoire47. Les troupes françaises sur le sol ivoirien demandent le soutien d'un contingent onusien. L'arrivée de ce dernier n'a pas pu garantir la mise en place du processus de paix48.

Les crises ivoiriennes soulèvent le débat sur la capacité des forces de sécurité africaines à faire face aux problèmes sécuritaires. Dans le cas d'espèce l'on voit une armée victime d'un schisme en interne. Au problème d'encadrement et formation sécuritaire donc souffre l'armée ivoirienne, s'ajouter l'éternel débat sur l'inefficacité des missions de Maintien de la Paix de l'ONU en terre africaine. Les autorités camerounaises décident de créer un établissement sécuritaire. Ce dernier a pour mission de former les administrateurs sécuritaires nationaux et étrangers dans les domaines de la sécurité intérieure et extérieure. L'Afrique francophone connait un déficit chronique de ces forces de sécurité dans les Opérations de Maintien de la Paix des Nations Unies. Or, la majeure partie des opérations onusiennes en Afrique se tiennent en zone francophone. Les Etats africains sont ainsi interpellés à réajuster les politiques sécuritaires afin de faciliter une présence plus conséquente des acteurs sécuritaires et civils aux OMP.

3- La minorisation policière francophone aux OMP : l'EIFORCES instrument de revitalisation

Au lendemain de la guerre froide le conseil de sécurité des Nations Unies va se réajuster face à la généralisation des conflits intra-étatiques en Afrique. Ces conflits causent la dilatation de l'Etat central provoquant une détérioration de la sécurité intérieure, extérieure et expose la population à divers types de souffrances. Pour remédier à cette situation l'ONU va faire recours au chapitre VII sur le droit humanitaire pour concevoir une nouvelle génération des opérations de Maintien de la Paix. Dans le désir de mettre les acteurs sécuritaires africains au coeur des mécanismes de résolution de leurs conflits et afin de leur permettre d'acquérir l'expérience.

L'ONU va se déployer sur les zones conflictogenes africaines ceci grâce à ses casques blues et de ces experts civils. Les forces de sécurité africaines prennent part à cette activité. Dans l'intervalle 1989 à 1994, le nombre de casques bleus d'origine africaine est équivalent à 10.000 hommes. Ils sont majoritairement issus des Etats d'Afrique anglophone49. A savoir

47 M.E. Owona Nguini, " la Cote d'Ivoire entre paix et guerre", Enjeux n° 22 Janvier-mars , 2005, p. 3.

48 Ibid.

49 B. Traore, "L'Afrique dans les opérations de Maintien de la Paix : Evolutions d'une participation de plus en plus importante", Bamako, Rev hist archéol afri (Godo Godo), 2012, p. 6.

39

Ghana (1780), Zambie (1307) et le Kenya (1099). Pour pallier à ce gap sécuritaire, plusieurs initiatives sont mises en place par les acteurs africains et internationaux.

La France sous l'égide des Nations Unies lance un programme de renforcement des capacités des forces africaines en 199450. Ce programme vise à rebooter le niveau capacitaire des forces africaines dans le domaine du Maintien de la Paix. Il est question de faire des africains les garants des opérations de Maintien de la Paix dans leur continent. Et pour ça le REMCAP leur fournit des compétences nécessaires dans la conception, l'opérationnalisation des missions de Maintien de la Paix. A travers le projet Recamp la France apporte un appui aux Etats africains en matière de démocratie, du respect des droits de l'Homme et de partage d'expertise stratégique militaire et policière51. Le Cameroun au travers de son Centre de Perfectionnement aux Techniques de Maintien de l'Ordre (CPTMO) créé en 2000 bénéficie de ce programme. Il devient une école nationale à vocation régionale. Permettant la formation de plusieurs éléments de gendarmerie (sous-officiers et officiers) au maintien de l'ordre. Cette école en quelques années d'existence va contribuer largement au rehaussement capacitaire des forces de sécurité d'Afrique et particulièrement d'Afrique francophone.

En juillet 2004 alors qu'a lieu une cérémonie de remise des épaules aux stagiaires du CPTMO présidé par le Secrétaire d'Etat à la Défense en Charge de la Gendarmerie Nationale, l'ambassadeur des Pays Bas louant les efforts du Cameroun, va émettre l'idée de création d'une structure policière plus grande. L'idée émise par le diplomate des Pays Bas sera débattue par des officiers de gendarmerie camerounais outillés dans les domaines du maintien de l'ordre et de la paix. Les participants discutent sur une possible création d'un établissement d'une grande envergure permettant l'amélioration de la gouvernance sécuritaire au Cameroun, en Afrique et dans le monde.

Après une période de stagnation des débats en 2006, le Ministre Délégué en Charge de la Défense met sur pied un groupe interministériel en charge de maturer le projet de création d'un centre international assurant la formation sécuritaire de plusieurs acteurs policiers, gendarmes africains et étrangers52. Les travaux sont assurés par le Général de brigade OBAMA Isidore. Les intervenants appartenaient à plusieurs services ministériels. Entre autre : les experts du Ministère des Relations Extérieures, les membres du Secrétariat Général

50 L. Moneuse, Infanterie, "Améliorer notre modèle de « formation des formateurs » du PMO : le Recamp rénové, une piste sérieuse pour compléter l'offre français", 6e BIMa, Edition : avril 2020, p. 27.

51 B. Yangono Houmkimi, "L'évolution de l'intégration sous régionale en Afrique Centrale de l'AEF à la CEMAC 1919-2017 : permanences et mutations", Mémoire en Histoire, Université de Yaoundé I, 2019, p. 92.

52 Issa Modibo, 38 ans, Chef bureau informatique et reprographie à l'EIFORCES, Awae, le 07 mars 2022.

40

à la Présidence de la République du Cameroun, les Experts de la Délégation Générale à la Sureté Nationale et du Ministre de la Planification et de l'Aménagement du Territoire.

Les attentes à l'égard de cette structure sont énormes. Les acteurs nationaux et internationaux souhaitent s'appuyer sur cette structure pour drainer un nombre important des acteurs francophones de la CEEAC vers une grande participation aux OMP53. Le projet de création de l'EIFORCES a été accompagné par une élaboration des textes garantissant le bon fonctionnement de la structure. L'exposé sur les contours juridiques et normatifs encadrant l'EIFORCES aura lieu dans les lignes suivantes.

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Nous voulons explorer la bonté contrée énorme où tout se tait"   Appolinaire