Le Cameroun dans la coopération sécuritaire internationale: le cas de l'EIFORCES (2008-2022)par Claudel Elian EDINA ONOMO Université de Yaoundé 1 - Master 2023 |
I- LES FONDEMENTS STRUCTURELS ET CONJONCTURELS DE LA CREATIONDE L'EIFORCES La création de l'EIFORCES repose sur plusieurs facteurs d'ordres structurels et conjoncturels. A. Les fondements structurels de la création de l'EIFORCES (1980-2008)S'agissant des déterminants historiques de la création de l'EIFORCES, ils sont de deux ordres à savoir : les dynamiques sécuritaires endogènes et les connexions internationales. La conception du « dedans et dehors » qu'évoque Pélagie BELOMO3 dans sa thèse de Doctorat a fortement contribué à la naissance de l'école internationale des forces de sécurité. La création de l'école des stratèges civil-sécuritaire de l'Arrondissement d'Awae au Cameroun nait au lendemain de plusieurs crises sécuritaires internes. L'encadrement sécuritaire lors de ces crises avait été critiqué par la communauté nationale et internationale, cest ainsi un regard rétrospectif est posé sur les lacunes policières camerounaises dans les Opérations de Rétablissement de l'Ordre et du Maintien de l'Ordre sur le territoire national. 1. La crise économique du milieu des années 1980 détonateur des crises socio-politiques au Cameroun (1970-1991) Après une longue stabilité de l'industrie commerciale du pétrole entre 1960-1970. Cette tranquillité va être perturbée par le premier choc pétrolier survenu en 1970 et les Etats Unies se tournent vers les pays du Moyen Orient. Pour cause l'augmentation de la demande du pétrole par les américains. Au moment où ces derniers abandonnent le système de Bretton-Woods4. Cela va provoquer la dévaluation du dollar, monnaie des échanges commerciaux à l'échelle internationale5. La dévaluation du dollar débouche sur la diminution des revenus du pétrole. La chute des recettes du pétrole va rencontrer une vive opposition des pays exportateurs. Une opposition qui conduit à la première hausse du prix du baril de pétrole. 3 P.C. Belomo Essono, "Sécurité et ordre politique Cameroun : entre dynamiques internes et connexions internationales ", Revue africaine des relations internationales, Vol. 12, n° 12, 2009, pp. 39-80. 4 C'est un système établi en 1994 par Harry Dexter White adjoint au secrétaire américain du trésor. Il s'adosse sur trois piliers : le Fonds Monétaire international, la Banque mondiale, l'accord général sur les tarifs douaniers et du commerce internationale. 5 R. Taoufik et Benabdallah, "Impact des chocs pétroliers sur les économies africaines : une enquête empirique", Mémoire de Master en Sciences Economiques, Ecole Polytechnique de Tunis ,2005, p. 16. 27 Les effets du premier choc pétrolier ont amplifiés par une autre hausse du prix du baril de pétrole. Cette deuxième augmentation du prix du baril de pétrole survient en 19736, en représailles au soutien apporté à l'Etat d'Israël par les (USA, le Portugal) lors de la guerre du Kippour. Les Etats arabes de l'OPEP décident d'augmenter le prix du baril du pétrole de 70%, tout en diminuant la production de 25 %. Cela dure cinq mois mais c'est largement suffisant pour provoquer une crise économique. Inflation, stagnation des économies des pays exportateurs de pétrole sont les conséquences de ce premier choc pétrolier. Pour remédier aux effets néfastes de ce choc pétrolier des mesures sont prises par les Etats exportateurs du pétrole. Il s'agit de réduire leur demande en pétrole et de renouer avec d'autres sources énergétiques. A peine, la mise en place des mécanismes de sortie de crise sont enclenchés qu'un autre choc pétrolier fait face. Entre 1974 et 1978, l'Etat Iranien est en proie à deux types de crises socio-politiques. Suite à la décision de l'Arabie Saoudite de baisser sa production journalière d'un million de baril. Cette décision donne vie à la révolution islamique en Iran. Au niveau de ses frontières, il est en guerre avec l'Irak. Les deux Etats sont des grands producteurs de pétrole ce qui, inquiète les Etats consommateurs du pétrole. Ils décident d'augmenter leur demande en pétrole. L'objectif est de faire des réserves pour se mettre à l'abri d'un autre choc pétrolier. Malheureusement, les deux crises que vit l'Iran vont conduire à la chute de la production du pétrole. La diminution va entrainer la hausse du prix du baril du pétrole. Désormais, il faut débourser 39 dollars américains pour le baril ; en autonome 1979,7 il passe à 40 dollar. Une nouvelle crise fait son apparition. La croissance mondiale connait une chute sévère, elle passe de 3,4% en 1979 à 1% à 1980, le commerce international passe de 6,1% à 3,2%. Le taux d'inflation qui était déjà à 8,9% en 1979 passe à 1 3,5% en 19808. C'est le début d'une crise économique mondiale. Agissant en système de vase communicante, la crise à des répercussions sur l'économie camerounaise. Une économie extravertie et calquée sur le modèle français, le Cameroun fixé la parité de sa monnaie Franc CFA au Franc français9. En septembre 1995 lors de la signature du plaza portant sur la diminution de la valeur du dollar, cette dévaluation du dollar a un effet de chaine, elle diminue de la valeur du Franc français et du Franc CFA. Cet effondrement des prix marque la fin de la période faste de l'économie camerounaise entre 6 https://www.cvce.eu/obj/han_appel_le_choc_petrolier_et_ses_consequences_fr_afe99e1a-5633_45f6_9859, consulté le 12 juillet 2022, 12 h 38minutes. 7 https://www.dejonghe-finance.com, consulté 12 juillet 2022, à 14 h 28minutes. 8 P. Artus, A. d'Autune, als, Les effets d'un prix du pétrole élevé et volatil, Paris, 2010, p. 13. 9 M. J. Abena Etoundi, " la planification économique au Cameroun aperçu historique (1960-2000)", Thèse de Doctorat en Histoire, Université de Yaoundé 1, 2008, p. 384. 28 1960 à 1978. L'économie camerounaise connait une brutale récession dans tous les secteurs productifs. Cette récession met le pays dans une situation d'illiquidité. Les activités économiques globales et le tarissement des recettes d'origine pétrolière du budget spécial de l'Etat ont facilité la baisse des recettes budgétaires de 16 pourcent entre 1986-87. Conduisant à l'instauration des programmes d'ajustements structurels. La crise que vit le Cameroun est officiellement annoncée par le président de la république va provoquer une explosion importante du taux de chômage. Le taux de chômage passe de 7,3l % en 1980 à 24,6 % à 1990. Les jeunes scolarisés sont les plus affectés par cette crise. Ils sont estimés à 40 %. La crise économique combinée avec l'application des programmes d'ajustements structurels permettent également une crise sociale énorme. La crise sociale du logement se matérialise par la naissance des quartiers salubres, des bidonvilles où l'Etat est absent. Cette déstructuration économique se tient en pleine période de confiscation du droit à la revendication. Incapable de s'exprimer publiquement les populations camerounaises se surchauffent et attendent impatiemment le jour où ils pourront s'exprimer. Le 19 décembre 1990 est un jour historique au Cameroun, il sonne la réouverture démocratique du Cameroun. Cette réouverture juridique est portée par la proclamation des lois dite des libertés et d'associations10. Ces lois viennent abroger l'ordonnance du 12 mars 1962 sur la répression de la subversion. Après son passage à l'Assemblée Nationale en session baptisée « session des libertés »11. Au lendemain de ces révisions juridiques, le Cameroun réengage son processus de démocratisation. Le pays opte pour un modèle multipartite de type intégral12. Cette ouverture démocratique permet également la montée en puissance des revendications politiques et sociales. La naissance de plusieurs partis politiques donne l'opportunité à la population de pouvoir s'exprimer. Les rues de Yaoundé et Douala sont prises d'assauts par des manifestants réclamant l'amélioration des conditions de vie. C'est le début d'un cycle d'insécurité interminable13 et les dispositifs étatiques de sécurisation des populations et des biens apparaissent comme fortement grippés, inopérants et surtout 10 Loi n° 90-46 décembre 1990. 11 Cameroun tribune, "Années de braise" : Le Cameroun comme un roseau, 06 novembre 2017. 12 F. P. Ebenda, "Les ententes politiques progouvernementales au Cameroun à l'ère du multipartisme : essai d'analyse sociohistorique des initiatives du Rassemblement Démocratique du Peuple Camerounais (RDPC) entre 1992 et 1997 ", Mémoire de master en Histoire, l'Université de Yaoundé I, 2015, pp. 2-3. 13 C. Seignobos, "Le phénomène zargina dans le nord du Cameroun. Coupeurs de route et prises d'otages, la crise des sociétés pastorales mboro ", Afrique contemporaine, n° 239, 2011, p. 37. 29 débordés14. Face à l'incapacité de l'Etat d'assurer la sécurité sociale et alimentaire, Des groupes armés en quête de ressources de survie se vulgarisent dans le territoire15. C'est le cas au niveau des frontières camerounaises ou se développe une industrie de la criminalité. Pour cause, l'Etat camerounais n'a pas installé des administrations sécuritaires nécessaires pour garantir sa présence dans son espace frontalier. 2- Le conflit frontalier Cameroun- Nigéria: La politique frontalière attentiste du Cameroun Les frontières représentent généralement pour tous les Etats des espaces névralgiques 16 . Cette sensibilité implique la mise en place d'un dispositif sécuritaire conséquent afin de protéger le territoire contre d'éventuelles tentatives de déstabilisation venant d'un Etat tiers ou de bandes armées ayant des bases arrières hors de l'espace national. Le Cameroun a dérobé à cette exigence lors de son accession à la souveraineté internationale. Le non transfert des compétences de l'Etat dans les zones périphériques facilite l'installation d'une industrie criminelle dans ces zones. Face à la politique sécuritaire frontalière camerounaise incolore et insidieuse17, la période allant de 1960 à 1982 est caractérisée par une gestion à l'improvisation permanente des frontières camerounaises. Malgré la création en 1985 d'un organisme spécialisé de gestion des frontières par le Cameroun, l'opérationnalisation est tiède. Les frontières camerounaises ne semblent pas bénéficiées d'une grande importance des programmes d'aménagements territoriaux18. L'ex-Ministre et homme politique Adamou Ndam Njoya résume la politique frontalière attentiste du pouvoir de Yaoundé en ces propos : Quand la commission des frontières avait été créée, il y'a plus de 25 ans, j'avais dit qu'il fallait aller occuper le terrain. A l'époque, on avait peur, on croyait que les Nigérians utiliseraient les routes et les infrastructures créées par nous pour nous envahir facilement. C'est un raisonnement fallacieux. Il faut occuper notre terrain. Il faut des fonds spéciaux pour les frontières19. La politique frontalière attentiste camerounaise provoque une grande porosité des frontières matérialisée par l'absence d'infrastructures publiques (hôpitaux, écoles, postes de 14 Y. A. Chouala, "Conjoncture sécuritaire, champ étatique et ordre politique au Cameroun : éléments d'analyse anthropo-poliste d'une crise de l'encadrement sécuritaire et d'un encadrement sécuritaire de crise ", Polis, 2008, p. 2. 15 Y. A. Chouala, "Conjoncture sécuritaire, champ, p. 2. 16 E. Sourna et Loumtouang, "Darak et la problématique de sécurisation des frontières internationales du Cameroun (1985-2010)", Annales de la Faculté des Arts, Lettres et Science Humaine, Université de Ngaoundére, 2012, p. 13. 17 Ibid. 18 H. Abdouraman, "Le conflit frontalier Cameroun-Nigéria dans le lac-Tchad : les enjeux de l'ile de Darak, disputée et partagée", Cultures et Conflits, n° 72, 2008, p. 33. 19 F. Bambou, " Bakassi : Comment Paul Biya abandonne les frontières", La Nouvelle Expressions, 18 aout 2006. 30 police et de gendarmerie). Cette porosité des frontières camerounaises facilite une intrusion des trafiquants et des combattants de mouvements insurrectionnels20. Cette politique laxiste du Cameroun donne des envies hégémonies à son voisin Nigéria. L'armée fédérale viole unilatéralement les frontières camerounaises en 1981. Cette violation de l'espace territorial camerounais provoque une crise diplomatique entre les deux Etats21. Suite à un accrochage entre les forces de défense camerounaises et nigérianes survenu lorsqu'une flottille de l'armée nigériane viole les eaux territoriales camerounaises. L'armée camerounaise riposte farouchement à cette agression mais elle est impuissante à une immigration massive de la population provenant des Etats voisins en proie à des crises internes entre (1960-1982)22. La sous-région est victime d'une déliquescence des systèmes institutionnels, politiques et géographiques. A la fin des années 1970 et au début des années 1980 le lac Tchad est victime d'un assèchement intense. Le lac passe de 23 000 km2 à 2 000 km223 provoquant une vaste migration des pécheurs nigérians en terre camerounaise au détriment du respect des frontières interétatiques entre le Cameroun et le Nigéria. Ces pécheurs s'installent sur l'ile de Darak et forment une trentaine de villages pour une population estimée à 70.000 habitants24. Ils développent des activités commerciales dans la zone. A cette crise géographique s'ajoute les crises politiques dans les Etats voisins qui offrent une opportunité aux entrepreneurs de la criminalité de développer une industrie de la drogue, du trafic d'armes etc.25. Le Cameroun qui ne dispose pas d'un véritable maillage sécuritaire et donc l'absence institutionnelle est fortement ressentie, va devenir une base arrière à ces agents du crime. Cette délocalisation de la criminalité va transformer les iles Bakassi et Darak en sanctuaires du crime. La non fiabilisation des zones de Darak et de Bakassi par le Cameroun a permis une installation massive des nigérians. Ces derniers bénéficient des richesses qu'offre la zone. C'est le cas de Darak où plus de 90 % de la population est d'origine nigériane et pratique la pêche en territoire camerounais26. L'ile de Darak est la plaquette tournante du commerce du poisson. L'abandon de la zone par le Cameroun permet l'installation de l'administration nigériane dans le territoire camerounais pour contrôler l'activité commerciale qui s'y déroule. 20 E. Sourna, Loumtouang, als," Darak et la problématique de sécurisation", p. 112. 21 Ibid. 22 Ibid. 23 J. V. N. Ebodé, "Structuration de la puissance continentale : l'Afrique occidentale hors- jeu" ; Diplomate Hors Série, n° 12, 2010, p. 4. 24 Ibid. 25 H. de Prince Pokam, Le Cameroun à l'épreuve de l'insécurité en Afrique Centrale depuis le nouveau millénaire, paris, L'Harmattan, 2008, p. 24. 26 Ibid. 31 Cela s'effectue le 17 mai 1987 lorsque le Nigéria hisse son drapeau sur le territoire camerounais. Un programme expansionniste est mis en place par les autorités nigérianes pour s'emparer d'une trentaine d'iles camerounaises 27 . En guise de réactions les autorités camerounaises saisissent l'ambassadeur Nigérian au Cameroun le 11 avril 1994. Abuja affirme sa paternité sur l'ile de Darak. Il décide d'enlever et de remplacer les chefs locaux camerounais de la zone par des chefs nigérians. D'un côté, une fois de plus l'Etat hégémoniste nigérian viole la souveraineté du territoire camerounais28. De l'autre côté l'impuissance du pouvoir de Yaoundé à garantir la sécurité au niveau de sa frontière. Le remaillage territorial de la frontière camerounaise par l'administration nigériane conduit à l'instauration d'une politique de pillage et de rente par les forces nigérianes. A travers une fixation exorbitantes des taxes infligées
aux camerounais. Derrière cette Des reformes vont se suivre, toutes dans l'optique d'assurer la présence de l'Etat dans toute l'étendue du territoire camerounais. Il s'agit de la restructuration de la commission nationale des frontalières le 27 juillet 2001 par le Président Biya 29 . Le président en restructurant cette commission a pour objectif de la rendre plus dynamique et opérationnelle. Deux jours plutôt le président signait un décret réorganisant la Gendarmerie Nationale. Ici également l'objectif est d'assurer un maillage sécuritaire conséquent dans toute l'étendue du territoire. Après la reconnaissance de la paternité du Cameroun en 2002 à la suite de la décision de la Cour Internationale de Justice. Le pouvoir érige Darak le 24 janvier 2004 en chef-lieu du département du Logone-et-Chari. Cette mesure entre en droite ligne dans la théorie administrative qui consiste à rapprocher les institutions des administrés30. Durant cette crise frontalière l'Etat camerounais a montré des carences au niveau sécuritaire. Conscient des lacunes capacitaires de ses administrateurs sécuritaires. Il opte apporter une réponse structurelle à ce problème. La solution vient du décret du 22 mai 2008 portant création de l'école internationale des forces de sécurité. Cette école a pour mission de rehausser le niveau stratégique, tactique et opérationnel des forces de sécurité intérieure camerounaises. 27 H. Abdouraman, "Le conflit frontalier Cameroun-Nigéria dans le lac Tchad : les enjeux de l'ile de Darak, disputée et partagée ", Cultures et Conflits, 2008, p. 8. 28 Ibid. 29 Ibid 30 Ibid. 32 3- La grève de la faim de février 2008 : le manque de justesse opérationnelle des forces de sécurité camerounaise En février 2008, les rues camerounaises sont prises d'assaut par des jeunes. Ces derniers protestent contre « la vie chère »31. Cette situation vient rompre avec une période de stabilité intérieure qu'a connu le pays depuis la fin du processus de ré-démocratisation effectué au prix du sang entre 1990 et 1993. En effet, les camerounais dans leur grande majorité depuis la mise en place des directives du FMI (Fond Monétaire International) survenues à partir de 1983 vivent dans la précarité. L'opérationnalisation des programmes d'ajustements structurels conduit à des licenciements important, ce qui donne lui à une paupérisation à grande échelle32. A cette paupérisation, il faut ajouter l'incapacité de l'Etat à garantir l'accès aux services publics aux couches sociales les plus défavorisées (hôpitaux, logements, sécurité sociale etc...). Ces problèmes structurels ont permis la montée en puissance d'une violence latente. L'augmentation du prix du carburant en février 2008 a été l'occasion pour le magma (violence latente) de prendre la forme manifeste. Suite à la hausse du prix du carburant en février 2008 la plus part des ménages camerounais vont se retrouver face à des situations insolubles33. Car cette augmentation a entrainé la flambée du prix des autres produits. Pour attirer l'attention des décideurs politiques, quatorze organisations syndicales des transporteurs urbains et interurbains suivies par le syndicat national des transporteurs et conducteurs de mototaxis lancent un préavis de grève illimité en fin du mois de février 2008. Cette grève va paralyser les grands centres urbains : Yaoundé, Douala et les villes secondaires34. La grève lancée par les syndicalistes du transport bénéficie du soutien des citadins qui vont faire corps avec cette dernière. Dans la ville de Douala, le SDF récupère le motif de grève des syndicalistes du transport pour en faire son combat contre le pouvoir en place. C'est ainsi que le parti lance un préavis de meeting qui devait être sanctionné par une marche dans les artères de la ville. Les organisateurs du meeting retiennent deux points pour meubler les échanges. A savoir : La critique de la révision constitutionnelle survenue un mois plutôt. Et la protestation contre la vie chère. Les autorités préfectorales de la ville de Douala face à l'engouement des populations pour la tenue de ce meeting vont l'interdire. L'annonce de l'interdiction du 31 J. Pierre, " Les » émeutes de la faim» : une lecture (géo-politique) du changement (social)", Politique Etrangère, 2009, p. 1. 32 F. Eboko, "Cameroun : acteurs et logiques des émeutes de 2008", Alternative SUD, n° 53, 2008, p. 8. 33 A. Z. Tamekamta, "Février 2008, 10 ans après ! Retour sur le sens caché des « émeutes de la faim » au Cameroun ", CARPAD, Note d'enquête et de recherche, n° 1, Montréal, 2018, p. 2. 34 F. Eboko., "Cameroun ; acteurs et ", p. 7. 33 meeting et la marche par les autorités préfectorales va mettre de l'huile dans le feu. Le jour prévu pour la manifestation, les leaders du SDF et quelques militants se sont réunis sur le site retenu pour la circonstance. L'objectif était d'informer sur la non-tenue du meeting et de la marche. Au moment où l'annonce est passée les forces de l'ordre font leur apparition. Ils ont pour mission de disperser la foule présente sur le site. Pour remplir cette mission, les forces de l'ordre vont faire usage des bombes lacrymogènes dans un quartier populaire à Douala. Cette situation donne suite à un affrontement entre les forces de l'ordre et les habitants de ce quartier populaire35. C'est l'occasion pour tous ceux qui cherchaient à en découdre de passer à l'acte. L'on assiste à une explosion de la violence entre manifestants et forces de l'ordre dans la ville de Douala. Les forces de l'ordre vont essayer de rétablir l'ordre en faisant recours aux armes à feu. Cela va provoquer la mort de plusieurs personnes dans les rangs des manifestants. En dehors des pertes en vie humaines l'on assiste à des arrestations massives36. La tournure des évènements va susciter de vives critiques auprès de la communauté nationale et internationale. Elles accusent le pouvoir d'employer des méthodes disproportionnelles à la menace afin de se maintenir au pouvoir au détriment de la démocratie. A celles-ci, il faut ajouter la remise en question du niveau capacitaire des forces de l'ordre camerounaises à pouvoir encadrer les nouveaux types de menaces. Les autorités camerounaises qui sont très attachées à l'image du pays vont répondre. La réponse n'est autre que la création quatre mois après les émeutes d'une école internationale de sécurité. Elle devient un instrument de matérialisation des politiques publiques locales dans le domaine sécuritaire. La naissance de cette structure a été influencée par des facteurs endogènes et exogènes. Après avoir présenté les facteurs endogènes de la création de l'EIFORCES. La présentation des mobiles exogènes semble nécessaire car l'EIFORCES est une structure internationale oeuvrant dans la préservation de la paix. Le Cameroun via l'EIFORCES envisage apporter des solutions aux problèmes d'insécurités que vit le monde 35 N° 9046/5245-34 Cameroun tribune, février 28, 2008, p. 7. 36 F. Eboko, "Cameroun : acteurs et ", p. 55. 34 Photo n° 1 : Le traitement des émeutes de la faim de 2008 par la presse camerounaises 37 A. Bernard, "Le 11 septembre 2001 et ses conséquences", Eclairage du Grip, Bruxelles, 1er septembre 2021, p. 1. Source : Cameroun tribune du jeudi, 28 février 2008, n° 9046/5245 -34 année. |
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