§4. Libre-échange et protectionnisme
Il ressort de la brève analyse historique faite ci-haut
que l'application du libre-échange dans les relations commerciales
internationales ne fait pas toujours l'unanimité. Il faut croire que les
bienfaits attribués à la concurrence internationale ne s'imposent
pas à tous de manière évidente, particulièrement
aux groupes sociaux touchés par des importations qui remettent en cause
leur activité ou aux nations déficitaires. Ainsi, on constate que
certaines approchent penchent pour le protectionnisme qui est l'antinomie du
libre-échange84.
Rappelons cependant que le libre-échange ou même
le protectionnisme ne peuvent en aucun cas être considérés
comme des fins en soi. Il ne s'agit en effet que d'instruments à la
disposition des Etats pour atteindre leurs grands objectifs
macroéconomiques (plein emploi, stabilité des prix et croissance
économique). Le choix de l'une des politiques par rapport à
l'autre dépendra de l'orientation politique du gouvernement en place et
de ses priorités macroéconomiques. Depuis plusieurs
siècles, la controverse fait rage entre les économistes sur les
mérites supposés de la libéralisation des échanges
internationaux ou, au contraire, de la protection des marchés. Cette
querelle est d'une importance capitale pour le sujet qui nous intéresse.
Elle conditionne en effet les décisions prises par les gouvernements,
soit unilatéralement, soit au sein des organisations internationales de
coopération
économique85.
83 Raphael WINTREBERT, op. cit, page 5.
84 Michel RAINELLI, op cit, page 67.
85 Vincent P, op cit, page 14.
Sachant qu'avec le libre-échange, les échanges
commerciaux sont libres de toute entrave douanière ou d'autres
règlementations commerciales
restrictives86, le protectionnisme
vise à protéger les marchés intérieurs et
à limiter les importations par la mise en place des barrières aux
échanges. Ces barrières se présentent sous diverses formes
dont87 :
? Les barrières tarifaires qui consistent à
prélever des droits de douane ou d'autres taxes à l'importation
;
? Les restrictions quantitatives, ou quotas qui consistent
à imposer des limitations au volume des importations pouvant être
effectuées pendant une certaine période l'objectif de ces mesures
est de cadenasser les parts du marché national ouvertes à
l'importation. Les contingents tarifaires, qui consiste à accorder des
réductions de droits de douane sur une certaine quantité de
produits importés, avec rétablissement du droit de douane normal
lorsque le contingent est atteint, ne peuvent être assimilés aux
restrictions quantitatives, car ils n'empêchent pas les importations une
fois les contingents épuisés ;
? Les barrières non tarifaires. Ceux-ci sont des
obstacles aux échanges qui ne constituent ni droits de douane ni des
restrictions quantitatives. Elles peuvent concerner aussi bien la
présentation (emballage, étiquetage...) que le contenu du produit
importé, ou consister en des démarches administratives inutiles
et dilatoires88.
1. Approche libre-échangiste
Pour Ricardo, considéré comme l'un des
précurseurs de la théorie du libre-échange, cette
dernière présente les avantages suivant : les entreprises
disposant des marchés plus large pourront faire des économies
d'échelle, réduisant par-là leurs coûts de
production ; les entreprises doivent se montrer plus efficaces pour
concurrencer les importations et investir sans cesse dans la recherche ; les
consommateurs du pays importateur peuvent se procurer des marchandises à
meilleur compte ; le libre-échange entrainera une égalisation du
coût des facteurs (notamment salariaux), augmentant le bien-être et
le pouvoir d'achat de toutes les nations participant au commerce
international89.
86 J. SALMON, Dictionnaire de droit international
public, Bruylant, Bruxelles, 2001, page 662.
87 Ibidem, page 905.
88 Vincent P, op cit, page 15.
89 Ibidem, page 18.
Il sied également de présenter les failles du
protectionnisme soulevées par les protagonistes du libre-échange
pour décourager son application au profit de la libéralisation du
commerce international. Ainsi, on prétend que le protectionnisme
engendre entre autres90 :
? L'accroissement du coût des importations dans
le cadre d'une politique protectionniste : les consommateurs doivent
payer plus cher les marchandises importées, ce qui réduit leur
niveau de vie ; l'accroissement du coût des inputs
importés se répercute sur les industries les utilisant, le
produit fini sera plus cher, le rendant moins compétitif sur la
scène internationale ;
? Le maintien des secteurs d'activité non
concurrentiels : le protectionnisme aurait pour conséquence le
maintien des secteurs d'activité non concurrentiels,
préjudiciable à l'économie générale de
l'Etat. Les entreprises, assurées d'écouler leur production sur
le marché national, ne sont pas incitées à investir dans
la recherche et le développement, ce qui cause la limitation du
progrès technique. Les marchandises produites ne sont plus
concurrentielles qualitativement sur le marché international, entrainant
une baisse des exportations.
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