4.3.2. Agro-business - sécurité
foncière - sécurité alimentaire : un mariage forcé
?
Pour les pays africains et particulièrement le Burkina
Faso, l'agro-business est une pratique de mode. Vu comme tel et les Programmes
d'Ajustement Structurel aidant, l'agrobusiness sera adopté de force par
les pays africains car seule voie pour payer les dettes contractées
auprès des institutions de Brettons Wood (Banque Mondiale et Fond
Monétaire international), surtout que l'agriculture familiale est
qualifiée d'incompétitive. Le choix n'est pas laissé
à ces pays pour voir de si cette pratique est plus appropriée
pour l'Afrique et le Burkina Faso surtout. Ne paraît-il de fait comme un
mariage forcé ? Le retard industriel et l'incohérence dans la
politique d'agrobusiness seraient la cause.
En effet, l'agro-business va de pair avec le
développement industriel. Ce secteur reste pourtant embryonnaire car ne
représente que 18,5% du PIB du Burkina Faso en 1997, n'emploie que 11%
de la population active et ne contribue qu'à 1% aux recettes
d'exportation (Atlas du Burkina,
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(2006 : pp198-199). Elle n'est pas capable de mettre à
la disposition des producteurs agricoles des semences et des engrais de
qualité et moins chers. En ce qui concerne l'importation et l'achat des
semences d'oignons, ils concernent 69,3% des agro-businessmen. La recherche
développement sur les semences améliorées d'oignon n'a pas
suivi l'implantation de l'agro-business, le libéralisme
économique oblige. Cela les rend inaccessibles. S'agissant des engrais,
c'est l'autre facteur de production. Pour ce qui est de la mécanisation
de l'agriculture, les agro-businessmen qui ont un équipement performant
répondant aux critères d'agro-business sont quasi-inexistant. La
force animale et la force humaine étant encore plus utilisées
respectivement 15,4% à 38,4 % et 38,4 à 92 ,30% alors que l'usage
de tracteurs et butteurs varie de 7,7% à 23,1%. La mécanisation
agricole n'a pas non plus suivi l'avènement de l'agrobusiness. Les
conditions d'application de l'agro-business au Sourou sont précaires.
Cela constitue à la fois un obstacle à la sécurité
foncière et à la sécurité alimentaire. Ces
problèmes se sont accentués avec la liquidation de l'Office
National des Céréales (OFNACER) en 1994. La Société
Nationale de Collecte de Riz (SONACOR) en l'Office National des Barrages et des
Aménagements Hydrauliques (ONBAH) ont été successivement
liquidés entre 1996 et 2001. Les deux premières structures
permettaient d'avoir des stocks de sécurité et la dernière
avait pour rôle de maîtriser les coûts des
aménagements et de les orienter vers les besoins nationaux. Sans
résoudre ces problèmes, avant l'avènement de
l'agro-business, il a été imposé comme solution alors que
les conditions favorables n'ont pas suivi son implantation. En effet,
l'agro-business a été appliqué en amont sans
entrepôt de conditionnement. Cela fait que si la production n'a pas de
preneur après les récoltes, elle perd de la valeur marchande et
elle est vite avariée. Aussi, il n'y a non plus des usines de
transformation de ces produits agricoles pour leur ajouter de la plus value.
Ces produits sont vendus à l'état brut et à bord champ
dans des conditions précaires. En aval, il n'y a aucune structure de
contrôle des prix et de commercialisation de ces produits. Après
avoir supporté les dépenses liées à la production,
l'agro-businessman doit subir la dépréciation des cours
régionaux et mondiaux de la vente des produits agricoles. La
libéralisation de l'économie avec ses répercutions dans
tous les secteurs est la cause. Au niveau agricole, le PASA a
désorganisé le monde rural.
Enfin, l'agro-business au Sourou, est entré dans le
marché mondial en situation de faiblesse. Avec la division
internationale du travail, (pays producteurs/exportateurs et pays
industrialisés/ transformateurs) des produits agricoles qui fixent les
prix au niveau international, tout laisse à penser que non seulement
l'agro-business appliqué au Burkina Faso et particulièrement au
Sourou a pris un mauvais départ en sautant les étapes. Il y a de
fait une incohérence dans la politique d'agrobusiness au Burkina Faso et
la sécurisation alimentaire. Dans notre zone d'étude
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cela s'est manifesté à travers les
problèmes de production d'agro-business. Ce sont le manque d'eau, le
coût de la redevance eau, le manque de terre, l'appauvrissement des
parcelles, la mauvaise organisation, le problème d'accès aux
crédits et aux équipements, la mauvaise qualité des semis,
la fonte des semis, la mauvaise qualité des engrais et la mauvaise
application des engrais, leur coût élevé. Tous ces
problèmes sont liés à l'orientation des objectifs des
périmètres aménagés puisqu'on produit plus pour
payer la dette que pour assurer la sécurité alimentaire. Si,
à ces problèmes s'ajoute le désengagement de l'Etat du
secteur agricole, la sécurité alimentaire est devenue une affaire
privée. Mais, l'objectif n'est pas encore atteint et même devenu
hypothétique. La ville devient alors leur lieu de refuge ou d'expression
au regard des publicités et des conceptions.
Les politiques agricoles, toutes confondues, n'ont pas encore
permis d'atteindre les objectifs confiés à elles par l'Etat ;
surtout avec le démantèlement des offices de
céréales, les sociétés de collecte de riz et
autres, le dérèglement du système agricole. Il y a donc eu
un mariage forcé entre agro-business - sécurité
foncière et alimentaire. Beaucoup de personnes investissent dans la
terre parce que c'est le capital qui a de l'avenir. Le graphique n°4.4
tiré d'une étude réalisée par GRAIN et
publiée en 2011 est illustrative :
Graphique n°4.2: L'intérêt du secteur
financier pour la terre
Source: GRAIN.(2011)
Ce graphique montre que la terre est le capital le plus
productif devant l'or, l'immobilier et la bourse. Il n'est donc pas
étonnant qu'elle constitue l'un des plus grand enjeu de notre
siècle.
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