4.3. Agro-business-sécurité
foncière-sécurité alimentaire : un lien de
causalité ou un
mariage forcé?
Dans le contexte de l'économie libérale tout est
un bien marchand. La terre et la production agricole peuvent être
utilisées pour faire du business. Or dans «la loi du tout
marchand» un bien n'est jamais définitivement acquis car il peut
être objet d'une autre spéculation, son état peut aussi
changer. Ainsi le propriétaire d'aujourd'hui pourrait ne pas être
celui de demain car tout est une question de pouvoir financier. Dans ce
mouvement de cession, d'acquisition et de redistribution, la
sécurité foncière est affectée et la
sécurité alimentaire aussi. Peut-on donc faire du business avec
la terre et la production agricole et assurer en même temps la
sécurité foncière et la sécurité alimentaire
de tous les acteurs de la production d'agro-business ?
Ce questionnement est une tentative d'analyse de façon
verticale des concepts qui tout au long de notre document ont été
utilisés. C'est aussi une démarcation avec les
préjugés.
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4.3.1. Agro-business-sécurité
foncière-sécurité alimentaire : un lien de
causalité ?
La sécurité foncière suppose une
stabilité, une constance dans la jouissance des droits fonciers. Peu
importe les changements qui interviendront, ils ne doivent pas la remettre en
cause. Ici, elle a un caractère définitif. On n'est pas
propriétaire par circonstance. On est propriétaire tout le temps.
Et même le décès du premier propriétaire ne change
pas fondamentalement cette donne car c'est la famille du défunt qui est
héritière. Pour le Burkina, à travers la Reforme Agraire
et Foncière, l'Etat est le propriétaire de la terre. Il peut
faire et défaire les acteurs qui sont dans la plupart des cas
attributaire, locataires, métayers. Les périmètres
aménagés et les périmètres agricoles ne
dérogent pas à cette règle surtout que l'Etat compte
rentabiliser ce capital. Alors la priorité est au plus offrant. Comment
pourrait-on assurer sa propre sécurité alimentaire et celle des
autres dans un tel contexte ? Pour assurer sa sécurité
alimentaire et celle des autres, il faut que chacun soit propriétaire et
produise avec ses propres moyens. Il n'a pas à supporter les coûts
des aménagements sinon la destination de sa production peut être
facilement réorientée. Ainsi, n'étant pas inquiet qu'il ne
sera pas du jour au lendemain dépossédé de sa terre, il ne
va plus produire uniquement pour vendre. Pour le cas des agro-businessmen, la
situation est toute autre. Etant attributaires et donc pas
propriétaires, le maintien sur les périmètres
aménagés et agricoles est conditionné, la
sécurité alimentaire aussi. Liée au marché
international, la sécurité alimentaire
«s'achète». Elle peut aussi être confisquée par
un autre agro-businessman ou même par l'Etat car c'est le seul vrai
acteur capable de l'assurer. Pour que la relation entre agro-business-
sécurité foncière -alimentaire, soit un lien de
causalité, il faut que l'Etat soit l'agro-business pour assurer la
sécurité foncière et la sécurité
alimentaire. Sinon, ce sera un mariage forcé, ou le divorce n'est qu'une
question de temps où l'insécurité foncière et
l'insécurité sont à l'ordre du jour du divorce.
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