Conclusion partielle
Au regard de tout ce qui a été analysé
dans les chapitres 3 et 4, l'agro-business au Sourou n'a pas encore connu le
décollage tant promis. Ses problèmes sont nombreux bien qu'il
jouisse de certaines faveurs que les autres producteurs de la chaîne
agricole n'ont pas : superficies larges, nouveaux acteurs sur qui l'Etat compte
pour rentabiliser les périmètres, acteur de la bourgeoisie
locale. Ce dernier aspect a permis à l'agro-businessman d'établir
des relations socio - foncières avec la population locale, les
coopérateurs qui le considèrent comme un modèle
d'exploitant agricole qui a réussi et qui attire certains vers lui.
Mais, vite désenchantés car tout comme eux, l'agro- businessman
n'est pas à l'abri de l'insécurité foncière. Pour
atténuer ces risques, il la mutualise avec des modes d'exploitation
mixtes de ces parcelles et maintient des parcelles au sein des
coopératives, finance la production de certaines spéculations.
Alors, l'insécurité foncière va conduire à
l'insécurité alimentaire car la disposition spatio - temporel des
produits agricoles d'agro-business au Sourou n'est pas encore effective. Les
principales raisons de l'inaccessibilité aux produits agricoles
d'agro-business comme ceux des coopérateurs sont le marché et la
pauvreté de la population locale. La pratique des cultures
maraîchères n'a pas été accompagnée par le
développement des marchés locaux. La richesse qu'elles devaient
assurer n'est pas encore effective au regard du niveau de pauvreté de la
région et sa profondeur. En effet, la région est l'une des plus
pauvres du Burkina Faso pourtant réputée être celle des
cultures de rente. Cette insécurité alimentaire aura pour
conséquences sanitaires, l'insuffisance pondérale, les maladies
de sous alimentation. Il y a donc un faux mariage entre agrobusiness -
sécurité foncière - sécurité alimentaire.
Face à tous les problèmes de production des agro businessmen il y
a lieu de concilier autosuffisance alimentaire, souveraineté et la
sécurité alimentaire.
88
Conclusion générale
Le présent mémoire a permis de présenter
l'agro-business au Sourou, d'analyser ses implications dans la
sécurité foncière et la sécurité
alimentaire. La méthodologie utilisée pour aboutir aux
résultats comprend deux parties : la recherche documentaire qui
été utile pour l'élaboration du cadre théorique et
conceptuel et les enquêtes de terrain pour collecter les données
relatives à notre thème. Il ressort de l'analyse de ces
données que l'angle d'appropriation du concept de l'agro-business par
l'Etat n'a pas encore favorisé le décollage de ce modèle
agricole auquel il a été confié plusieurs missions
sensées être des alternatives aux multiples problèmes
agricoles. Les hypothèses secondaires s'inscrivent aussi dans ces
résultats. Ainsi, les résultats sont les suivants:
En comparant la production agricole du Sourou, des parcelles
agricoles, et surtout celle des agro-businessmen, il est ressorti qu'il y a une
différence de production entre acteur agricole. Chaque agro-businessman
produit plus qu'un exploitant familial ou un coopérateur grâce
à la superficie qui lui est attribuée qui varie de 10 ha et au
plus 50 ha alors que les coopérateurs ont entre 0,6 à 3 ha au
maximum. Mais, l'agro-business pratiqué au Sourou reste un agro-business
de nom. Sur les 3818 ha aménagés dans la vallée du Sourou
seulement 275,5 ha soit 7,21% sont exploités en agro-business. Le reste
pour les coopératives (la petite paysannerie). Aussi, si la production
individuelle des agro-businessmen dépasse celle des autres acteurs,
individuellement pris, de la production agricole au Sourou, elle reste minime
par rapport à la production totale des autres acteurs :
coopérateurs et population locale. L'agro-business a contribué en
2011 à 14,86% de la production de maïs de la vallée du
Sourou, 24,2% de la production d'oignon, 28,2% de la production de pomme de
terre. Notre première hypothèse selon laquelle : la place de
l'agro-business dans la production agricole des localités de Niassan,
Di, Débé et Gouran au Sourou est faible comparativement à
celle du reste de la petite paysannerie est vérifiée.
Malgré les lois qui favorisent plus les
agro-businessmen, 69,2% d'entre eux affirment qu'ils sont en
insécurité sur leurs parcelles. A cause de cette
insécurité foncière les opérateurs agro-business
entretiennent des relations socio-foncières avec les autres acteurs de
la production agricole. Comme il n'y a pas un équilibre des forces, cela
insécurise aussi les producteurs dont 58,66% d'entre eux refusent toute
collaboration avec les agro-businessmen car cette relation n'est pas une
garantie de sécurité foncière et 92,3% des
agro-businessmen utilisent le métayage comme mode d'exploitation de
leurs parcelles or, cette méthode n'a aucune garantie de
sécurité foncière. Aussi, 92,3% des opérateurs
agro-business emploient des ouvriers agricoles. Ces derniers n'ont pas aussi
une garantie de sécurité foncière puisqu'ils ne sont pas
attributaires. Notre deuxième hypothèse qui stipulait que
l'agro-business n'est pas encore un modèle agricole offrant à
ses
89
différents acteurs des perspectives de
sécurité foncière à Niassan, Di, Débé
et Gouran est aussi confirmée.
Les produits alimentaires d'agro-business ne sont pas
disponibles en tout temps et en tout lieu dans ces localités. Ils ne
sont pas aussi accessibles aux populations locales au regard de leur niveau de
revenu et des habitudes alimentaires de la population locale. Ces produits
alimentaires d'agrobusiness ne satisfont pas leurs besoins. Ils sont plus
destinés aux marchés extérieurs. C'est seulement 23,1% des
agro-businessmen qui vendent leur maïs sur les marchés locaux ;
61,5% d'entre eux approvisionnent plus les autres centres urbains du pays ou
des pays voisins. Concernant la production d'oignon, c'est seulement 15,4% des
opérateurs agro-business qui s'intéressent au marché
national et 76,9% vendent leur oignon aux grossistes de la sous-région.
Ces résultats permettent de confirmer notre troisième
hypothèse qui était : dans les localités de Niassan, Di,
Débé et Gouran, l'agro-business n'est pas une solution d'atteinte
de la sécurité alimentaire.
Cette solution pourrait passer par la prise en compte des
attentes des différents acteurs :
Au niveau de la population locale, il s'agit pour la
sécurité foncière et alimentaire de tous les acteurs ;
qu'il ait une cohésion et que chacun bénéficie des
retombées des périmètres agricoles (exploitants ou non).
En effet, ces aménagements ont été réalisés
sur des terres qui au départ étaient exploitées par les
populations locales. En ce qui concerne les autorités administratives,
elles sont celles qui peuvent assurer la sécurité foncière
et alimentaire de tous. Comme la terre appartient à l'Etat, le droit de
propriété, la sécurité favoriserait une production
suffisante pour nourrir la population. Aussi, si une politique claire de
l'agro-business est définie avec ses moyens et la production
rachetée par l'Etat pour assurer la sécurité alimentaire ;
cela permettrait de retenir la production et la maintenir au Burkina Faso.
L'AMVS peut donner un contenu juste à l'agro-business en approfondissant
sa connaissance, ces tenants et ses aboutissants, ses avantages et
inconvénients, ses forces et faiblesses. Quant aux agro-businessmen, il
est nécessaire de concilier la recherche de profits et la
sécurité alimentaire par une production massive en saison
sèche destinée prioritairement à la sécurité
alimentaire et d'être animés d'esprit de patriotisme.
L'essai d'analyse relationnelle entre agro-business,
sécurité foncière et alimentaire sur les
périmètres agricoles de Niassan, de Di, de Débé et
de Gouran a permis de mettre en lumière (du moins une lumière
à la hauteur de nos moyens actuels) des liens dont les évidences
trop souvent proclamées sont pourtant à l'épreuve des
réalités de terrain. Le hiatus entre les intentions
attribuées aux «innovations» agricoles (agro-business
notamment) et les réalités des pratiques en
90
cours dans le Sourou peuvent inspirer des cas de recherche
dans d'autres localités du pays. Si on arrivait à répondre
à certaines questions cela pourrait permettre peut-être un
décollage de l'agro-business : la``tropicalisation» de
l'agro-business est-elle en faveur de son décollage ? N'est-il pas
nécessaire de mécaniser l'agriculture familiale pour assurer la
sécurité et la souveraineté alimentaire ? Le
déploiement de l'agriculture moderne dans le monde rural ne conduit-il
pas à l'impasse ?
91
|