o Famille en tant qu'ordre politique à miniature
Dans la perspective biblique, le mot gouvernement ne
s'applique pas en premier lieu au gouvernement de l'état. Les hommes et
les femmes doivent d'abord savoir se gouverner eux-mêmes avant de vouloir
gouverner les autres. Mari et femme peuvent alors s'efforcer de gouverner leur
maisonnée. Puis vient le gouvernement d'organisations plus larges,
telles que l'Église, les entreprises commerciales, et toutes sortes
d'associations volontaires. Et c'est seulement après que l'on parle de
gouvernement en tant que gouvernement de la société au sens
large. On fait bien de se rappeler qu'au début (c'est-à-dire
à la création du monde), la famille biblique constituait le
premier ordre politique. De par sa nature même, elle représente
une société politique indépendante. Elle possède
une autorité présidentielle en la personne du père ; un
gouvernement différentié sous la forme de la direction commune de
la famille par les parents. Et placés comme ils le sont sous
l'autorité suprême de la loi de Dieu, les gouverneurs de la
famille établissent les règles par lesquelles elle fonctionne ;
la famille exerce donc une fonction législative. De plus, au sein de la
famille, les parents constituent une autorité judiciaire qui peut, de
son propre chef, juger les cas où les lois de la famille ont
été violées. Enfin, la famille exerce des fonctions
policières très claires, puisqu'elle possède
l'autorité biblique lui permettant de punir les actes contraires aux
lois de son modeste état.
Voilà les privilèges et devoirs qui, d'une
perspective biblique, font de chaque famille un ordre politique
indépendant. C'est aussi une des fonctions de l'état, tel qu'il
est compris dans la Bible, de veiller à ce que l'indépendance de
ces ordres politiques miniature familiaux soit préservée. Ce que
nous observons de nos jours, c'est l'action persistante de l'état
séculier (i.e. athée), qui cherche à usurper les fonctions
politiques de la famille et donc de les réduire à néant.
L'autorité paternelle est presque légalement abolie au nom d'une
égalité fonctionnelle entre mari et femme,
appelée « Parité » : Il est
évident aujourd'hui que nos nations « postchrétiennes »
ont perdu tout sens de la nature et de la finalité de la famille.
o Famille en tant qu'ordre économique à
miniature
La vision biblique de la famille implique également un
haut degré d'autonomie sur le plan économique. La famille est
essentiellement conçue comme un organisme économique
indépendant. Donc, d'un point de vue chrétien,
l'élément économique de base de la société
est la famille. Dans ce sens, tous les membres de la famille ont un rôle
décisif, mais différencié, à jouer dans
l'économie familiale. Le père porte la responsabilité de
pourvoir aux besoins matériels de la famille. Et en cela, il est
secondé par les activités très variées de son
épouse - de qui le travail touche principalement à la
construction du foyer - mais les enfants aussi, en grandissant, deviennent des
aides de plus en plus utiles. Les domestiques, et dans certaines
sociétés les esclaves, doivent, du point de vue biblique,
être considérés comme faisant partie de la maison et
être traités en conséquence. Bien sûr, en se mariant,
les enfants quittent leurs parents pour constituer leur propre nouvelle famille
indépendante. Mais les liens latéraux qui unissent les familles
restent forts. Ces extensions de la famille originale forment de nouveaux
organismes politiques et économiques, fonctionnant indépendamment
des parents mais non oublieux des responsabilités qu'ils gardent envers
ceux-ci. Mais ce n'est pas tout. Une vision aussi hautement fonctionnelle de la
famille implique une attitude positive à l'égard de la naissance
des enfants. Dans la perspective biblique, la naissance d'un enfant est
toujours vue comme une grande bénédiction et la croissance de la
famille perçue comme un accroissement de pouvoir. En effet, une famille
bien organisée, hiérarchique et disciplinée, est une
organisation très puissante. Et c'est bien pour cela que l'État
moderne athée s'acharne à la détruire. Car une telle
famille est non seulement une institution très productive, mais elle
constitue en plus un élément fondamental et extrêmement
efficace dans l'exercice de l'assistance sociale.
o Famille en tant qu'ordre culturel et
éducationnel
Le monde, considère comme normal que la famille ne soit
pas directement impliquée dans l'éducation scolaire des enfants.
En général, cette tâche est déléguée
au système éducationnel de l'état. Mais l'enseignement
biblique à ce sujet est très clair : cette tâche est un
devoir incombant aux parents, qui sont responsables devant Dieu de
l'éducation religieuse, morale, intellectuelle et pratique donnée
à leurs enfants. Les parents peuvent décider de
déléguer leur autorité à des organisations externes
à la famille, à des écoles privées par exemple, qui
enseignent leurs enfants dans un cadre qu'ils approuvent, ces parents n'en
demeurent pas moins personnellement responsables de l'éducation
donnée à leurs enfants. Le mouvement Christian Home
School (École chrétienne à la maison) qui a pris
tant d'ampleur depuis sa création aux États-Unis il y a à
peu près vingt ans et qui a aujourd'hui pris racine dans plusieurs
autres pays, a beaucoup contribué à la restauration de cette
fonction éducationnelle vitale pour la famille 14. Les
résultats académiques et éducationnels en ont
été remarquables. Mais ce n'est pas tout ; la restauration de
cette fonction parentale a aussi eu des effets exceptionnels sur la vie
même, la structure et la cohésion des familles impliquées.
Le retour des parents à cet aspect d'obéissance active aux
conditions de l'alliance biblique a amené avec lui de grandes
bénédictions. Non seulement, les enfants sont
élevés dans la foi chrétienne de leurs parents, mais les
parents eux-mêmes redécouvrent les richesses immenses et
inattendues de l'institution que Dieu leur a confiée. Ce chemin
mène à la restauration de la famille en tant qu'institution
fondatrice de la société et au détrônement des
prétentions religieuses - dans ce cas culturelles et
éducationnelles - de l'état et de sa domination arrogante et
contre nature sur les institutions de la société. Le retour
à ce chemin d'obéissance à Dieu ne peut que mener à
la construction de structures sociales saines dans nos pays.
o Famille en tant qu'une institution
ecclésiastique en miniature
Il n'est évidemment pas possible de parler
du rôle de la famille dans le christianisme sans
mentionner son rôle religieux. Comme nous l'avons déjà fait
remarquer, la famille est indestructible, car en tant qu'institution
créationnelle, elle porte l'image de la Famille Céleste : Un
Dieu en Trois Personnes divines, Père, Fils et Saint Esprit. Nous avons
vu aussi que la relation tendrement autoritaire et soumise entre mari et femme
constitue une image vivante de la relation qui unit Jésus-Christ
à son Église. La famille est donc vue comme une institution
placée sous la protection spéciale de Dieu. Depuis la fin du
XVIIe siècle ce caractère allianciel de la famille a
été remplacé en Occident par la notion
séculière que la famille ne serait qu'une institution
contractuelle, et tant que telle, dissoluble à volonté.
L'Occident a donc abandonné toute perception du caractère
sacré de la famille. Aujourd'hui, avec la reconnaissance légale
des soi-disant « mariages homosexuels », nous avons franchi un seuil
de plus. Nous ne reconnaissons même plus la normativité du
caractère naturel de la famille.
En tant qu'institution religieuse, la famille a la
priorité temporelle et pratique (sinon spirituelle) sur l'Église.
Au commencement, et en la personne de nos premiers parents, Adam et Ève,
la famille représentait l'Église. Il est intéressant de
remarquer que les premiers sacrifices, ceux de Caïn et d'Abel, ont
été offerts dans le cadre de la famille. Ce qui vaut aussi pour
Noé aux temps du déluge, et pour les sacrifices offerts par
Abraham, Isaac et Jacob. Cet état de choses changea quelque peu avec
l'instauration des cérémonies de la loi mosaïque et bien
plus tard avec la forme ecclésiastique d'adoration pratiquée dans
l'église apostolique. Dans l'église apostolique des premiers
temps, la maisonnée biblique servait souvent de noyau pour
l'établissement de nouvelles églises locales. Mais même
aujourd'hui dans la famille chrétienne, le père garde une
autorité spirituelle qui fait de lui non seulement le chef politique,
judiciaire et économique de son microcosme social, mais qui en fait
également le chef religieux. Nous avons vu que dans la perspective
chrétienne, le gouvernement est d'abord personnel ; puis le gouvernement
est celui de la famille par les parents ; et pour finir, nous arrivons au
gouvernement politique de la nation. De même, la relation du
chrétien avec Dieu est tout d'abord intimement personnelle ; puis elle
s'exprime dans le contexte plus large du culte de famille ; enfin, elle est
officiellement ecclésiastique. Nous avons découvert, pas à
pas, à quel point, dans la perspective chrétienne, la
famille naturelle représente l'élément social
fondamental. Nous voyons maintenant que cela est vrai aussi dans la
sphère religieuse. Car si la famille est spirituellement en
désordre, la communauté religieuse souffrira des mêmes
troubles. Et à leur tour, de tels désordres religieux auront des
conséquences très fâcheuses sur la société
tout entière.
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