CHAPITRE III
ATOUTS ET CONTRAINTES LIES A L'ADOPTION DE LA
MOTORISATION AGRICOLE DANS LA COMMUNE DE COPARGO
Le troisième chapitre aborde les atouts, les
contraintes et suggestions pour la bonne marche de l'agriculture dans la
commune.
3-1. Atouts de la motorisation
De grands espoirs sont mis dans la motorisation agricole qui
devient progressivement le principal mot d'ordre de développement rural.
Il est encore possible d'avancer quelques autres raisons favorables à
l'introduction de la motorisation agricole.
-Sur le plan technique :
La motorisation diminue la peine du paysan en le soulageant
des gros travaux, ce qui rend son travail plus humain et lui donne la
possibilité de mieux se consacrer aux travaux d'entretiens. En
améliorant les conditions de vie, cette innovation permet de freiner
l'exode rural et les migrations de la savane vers la forêt. Le
défrichement à l'avantage d'être exécuté
totalement et rapidement ce qui permet de respecter le calendrier cultural. Le
résultat premier de la motorisation est bien de faire diminuer les temps
de travaux par unité de surface, donc d'augmenter les surfaces des
superficies cultivées (17173ha entre 2010-2011 à 19649ha entre
2014-2015)
-Sur le plan socio-démographique:
La population de Copargo est majoritairement jeune et
essentiellement agricole, ce qui constitue une main d'oeuvre pour
l'agriculture. La scolarisation des enfants surtout celle des filles est une
préoccupation de l'autorité centrale, pour cette raison l'Etat a
pourvu la Commune d'infrastructures scolaires. Les données
collectées à la Circonscription Scolaire révèlent
que la Commune dispose de 58 écoles primaires avec un effectif de 7830
écoliers dont 3355 filles en 2005-2006. Au niveau secondaire, en dehors
des collèges d'enseignement généraux privés la
Commun dispose d'un collège d'enseignement général public
par arrondissement. Il faut aussi noter l'existence de deux centres de
promotion rurale dont un à Pabégou et le second à
Anandana. Cette volonté politique qui vise à promouvoir le
système éducatif n'est pas sans impact sur l'agriculture. Elle
engendre la rareté et la cherté de la main d'oeuvre, surtout que
le taux de scolarisation dans la Commune ne cesse de croître, ce qui
contraint les agriculteurs à faire recours à la motorisation des
pratiques agricoles.
-Au plan politico-économique :
Comme atouts donnant une pousse à la modernisation de
l'agriculture on peut noter entre autres : le redressement
opéré par l'Etat Béninois ces dernières
années dans la filière coton et la place de choix qu'occupent
les produits exportés par le Bénin sur le marché
international (coton fibre, coton graine, noix d'acajou, du karité), La
volonté de l'administration centrale à sécuriser les
terres à travers l'introduction à
L'Assemblée d'une loi sécurisant l'accès
au foncier. La motorisation participe au changement du système de
production, ce qui par ricochet permet de maximiser les intérêts
au terme de la vente des produits issus de la récolte.
L'utilisation des machines profite plus aux producteurs ;
ceci s'explique par le tableau III suivant :
Tableau III : Evaluation du coût
de la production motorisée par rapport au coût de la production
manuelle
|
Temps d'exécution rudimentaire / ha /j
|
Temps d'exécution par les engins / ha /j
|
Nbres de pers
|
ha / j
|
Coût
(FCFA)
|
Nbre de tracteurs
|
ha / j
|
Coût / subv / ha (FCFA)
|
Prest privée/ ha (FCFA)
|
Prest Mairie / ha (FCFA)
|
Labour
|
30
|
1
|
30000
|
1
|
4
|
13000
|
40000
|
30000/35000
|
Premier sarclage
|
20
|
1
|
13000
|
-
|
-
|
-
|
10000
|
-
|
Deuxième sarclage
|
15
|
1
|
10000
|
-
|
-
|
-
|
10000
|
-
|
Brûlis
|
2
|
1
|
5000
|
-
|
-
|
-
|
5000
|
-
|
Défrichement
|
5
|
1
|
8000
|
1
|
4
|
3000
|
5000
|
4000
|
Semence
|
10
|
1
|
16000
|
-
|
-
|
-
|
10000
|
-
|
Engrais
|
10
|
1
|
30000
|
-
|
-
|
-
|
30000
|
-
|
Total
|
-
|
-
|
112000
|
-
|
-
|
|
110000
|
-
|
Source : enquête de terrain, septembre 2014.
Nbre de pers = Nombre de personne, ha / j =hectare
par jour, Subv / ha = subvention par hectare, Prest = prestation.
La motorisation de l'agriculture est bénéfique
pour les exploitants agricoles. De l'analyse du tableau il ressort que la
motorisation de l'agriculture est bénéfique pour les exploitants
agricoles. En effet, un tracteur labour par jour 4 ha à 40000 FCFA par
un privé, et à 13000 FCFA si l'activité est
subventionnée et 30000 ou 35000 FCFA par la Mairie en fonction du type
de sol. Par contre, avec les outils rudimentaires il faut 30 personnes pour
labourer un ha par jour à 30000 FCFA. Les producteurs
enquêtés ont conscience de l'importance de la motorisation de
l'agriculture mais, soulignent que son acquisition est contraignante.
A la lumière des raisons ci-dessus
énumérées, il est incontestable d'infirmer que la
motorisation est un élément très important dans le
développement d'un pays. Mais son adoption fait face à
d'énormes contraintes qu'il convient de maitriser.
3-2. Contraintes liées à l'adoption de
la motorisation agricole dans la commune de Copargo
Le développement de la motorisation passe par
l'élaboration d'une stratégie nationale cohérente et
rationnelle à court, à moyen et à long terme,
intégrant les différents aspects de tous processus de
motorisation ( technique, économique, juridique, institutionnelle,
politique et social) et associant dans son élaboration et son
opérationnalisation tous les partenaires ayant une relation directe ou
indirecte avec ce secteur. Tel n'est pas le cas puisqu'il ressort de
l'enquête du terrain et des informations mises à disposition par
le MAEP et les structures locales que le degré de motorisation agricole
est hypothéqué par plusieurs difficultés dans les domaines
suivants :
3-2.1. Contraintes d'ordre physique
L'agriculture dans la Commune de Copargo utilise les pratiques
rudimentaires dont la culture itinérante sur brûlis, qui laisse
jonchés dans le sol certaines souches solidement enracinées.
Cette pratique demeure néfaste à la motorisation, car les souches
d'arbres encore dans le sol engendrent la destruction des pneux des engins
agricoles. Elle provoque aussi la destruction des talons de la charrue, des
barres et chaines d'attelage, des brides de fixation de certaines pièces
et des disques ainsi que le roulement des charrues. Contrairement à la
traction animale, les tracteurs ne peuvent se satisfaire d'un essouchage
partiel sous peine de détérioration rapide. C'est pourquoi
l'utilisation des tracteurs concerne principalement les savanes herbeuses, les
fonds de vallées et les plaines inondables dépourvues de souches.
Au cas contraire, un travail préliminaire d'essouchage doit être
réalisé. Si tel n'est pas le cas, les tracteurs au cours du
labour se buttent contre les souches et subissent des pannes techniques.
Photo 2 : Réparation d'un
motoculteur à Anandana
Prise de vue : Gnonhoué septembre, 2014
La photo 2 montre un homme en pleine réparation d'un
motoculteur à Anandana. De l'analyse de cette photo, il ressort que la
technique itinérante sur brûlis est l'une des causes qui freinent
la motorisation agricole dans la Commune de Copargo. Elle est la preuve vivante
de l'une des causes des nombreuses pannes fréquentes dont font face les
agriculteurs, ce qui engendre des dépenses supplémentaires pour
la réparation des machines détériorées et ceci par
le biais d'un prestataire privé très prisé.
3-2.2. Contraintes
socio-économiques
La compétence du personnel chargé d'utiliser et
de gérer les matériels aussi coûteux souffre
d'insuffisance tant quantitative que qualitative. Ces techniciens ont le plus
souvent reçu une formation générale en génie rural
(aménagement, construction et machinisme). Quel que soit la
volonté et la motivation de ces agents et sans tenir compte du manque de
moyens dont ils font état, ils ne peuvent pas répondre aux
besoins techniques à la fois en aménagement, en culture
attelée et en motorisation.L'insuffisance de leur formation se traduit
par une mauvaise utilisation pénalisant la qualité du travail, le
rendement et la durée de vie de la machine. Finalement, elle
génère un coût de fonctionnement exagérément
élevé et une diminution des recettes.
3-2.3. Contraintes techniques
L'inexistence des pièces de rechange sur le
marché béninois oblige les propriétaires de tracteurs
à aller vers les pays voisins comme Ghana et le Nigéria pour s'en
procurer en cas de besoins ce qui revient plus chère et retarde aussi la
réparation de leurs machines. La multiplicité des marques et
modèles, le manque des centres d'entretien et de réparation de
qualité pénalisent le recours à la motorisation. Il existe
aussi le problème de manque de service après-vente de
qualité et l'absence des mesures d'exonération fiscale à
l'importation des pièces détachées et du matériel
agricole.
3-2.4. Contraintes financières
Le financement de la motorisation est relevé comme une
contrainte majeure et prioritaire. L'éloignement des services financiers
des bénéficiaires, les formalités d'accès aux
crédits très contraignantes pour les producteurs
déjà analphabètes, la limitation de crédits
à certaines activités et à certains groupes, le
déséquilibre dans la répartition des crédits entre
les filières, l'insuffisance de connaissance du secteur agricole par
les institutions de financements, les difficultés de payement des
crédits contractés et le surendettement des producteurs montrent
que le marché financier agricole est encore animé par
d'énormes difficultés qui accables les producteurs.
Le tableau suivant illustre les conditions d'accès aux
crédits dans la commune.
TableauIV : Différentes institutions
de micro finance et les conditions d'accès aux crédits dans la
Commune de Copargo.
Arrondissements
|
Structures
|
Conditions d'accès
|
|
Fonctionnelles
|
N/Fonctionnelles
|
Copargo centre
|
CLCAM,
SIA N'SON
CESCA
|
DONGA WOMEN
|
-CLCAM : compte sur livret, une part sociale, 2
photos d'identité, 2 témoins, garantie matérielle et
financière une photo complète du demandeur et de ces
témoins et certificat de résidence.
SIA N'SON : carte d'identité
légalisée ou LEPI ou possession d'Etat, 4 photos pour la
présidente et trois pour les autres membres (crédits
réservés uniquement aux groupements féminins)
CESCA : avoir un compte CESCA, une carte
d'identité, acte de naissance, 4 photos, une attestation du CQ pour ceux
qui n'ont pas de pièce juridique, prêt accordé 3mois
après l'ouverture du compte
|
Anandana
|
-
|
ASF
|
-
|
Pabegou
|
-
|
ASF
|
-
|
Singré
|
-
|
-
|
-
|
Source : Enquête de terrain Septembre, 2014.
NB : N/ Fonctionnelles= non fonctionnelles
Le tableau IV fait le point des structures financières
présentes dans la commune. Nous avons dénombré six
structures financières, dont trois fonctionnelles pour toute la
Communeet concentrée dans l'arrondissement central ce qui crée un
problème de proximité, d'où une dépense
supplémentaire aux producteurs. L'analyse de ce tableau montre une
disparité dans la répartition des structures qui ont toutes des
conditions d'octroi de crédits pénibles auxquelles s'ajoutent des
taux de remboursement trop élevés 8 % et 10 % pour certaines.
L'enquête révèle que la mairie dans son budget ne
prévoit que 1 % pour le volet motorisation agricole. Toute chose qui
n'est pas de nature à promouvoir la filière.
3-3. Suggestions pour une motorisation réussie
dans la commune de Copargo
La Commune de Copargo dispose de beaucoup de
potentialités agricoles (terre-homme-eau). Il est donc évident
que la motorisation de ce secteur d'activité soulage les populations
parce qu'elle favorise le redressement de l'économie voir
l'amélioration des conditions de vie et aussi l'allègement de
leurs peines lors des travaux champêtres. C'est donc pour pallier aux
contraintes qui freinent l'essor de cette technique culturale que nous jugeons
nécessaire de faire certaines suggestions aux différents acteurs
( Etat, autorités communales et producteurs) intervenant dans la
chaîne de production agricole. Les suggestions sont les
suivantes :
Ø En direction de l'Etat
- Faire de la motorisation agricole une priorité, des
priorités ;
- Encourager la création des CUMA ;
-Réduire ou supprimer les frais de douanes sur les
matières premières et les pièces importées
destinées à la fabrication de matériel agricole au niveau
local ;
- Créer un Fond de Garantie auprès des
institutions financières de notre pays afin de leur permettre d'octroyer
aux producteurs le crédit nécessaire à l'acquisition des
matériels et machines agricoles;
- Rapprocher les services financiers des
bénéficiaires et supprimer les formalités d'accès
aux crédits trop contraignantes ;
-Créer un cadre de concertation entre les
différents acteurs du domaine (Etat, ONG(s), Organisation Paysanne et
autres) ;
-Suivre, tester, expérimenter et évaluer les
matériels fabriqués localement en vue de leur
amélioration, de leur homologation et de leur vulgarisation ;
- Rassembler les normes de travail pour chaque
catégorie de matériel en rapport avec les différents types
de sols et procéder aux études technico-économique
subséquentes y compris les études d'impact
environnementales ;
-Organiser au moins une fois par an, une foire d'exposition
des matériels locaux ;
- Evaluer les besoins en matériel de production et de
transformation des produits agricoles, et mettre à jour annuellement la
base de données sur ce matériel ;
- Recenser les fabricants locaux de matériels et
équipements agricoles ;
-Appuyer les entreprises locales existantes par le
développement de l'expertise locale en matière de
mécanisation agricole ;
-Définir et mettre en oeuvre en liaison avec les
services concernés les programmes de formation des utilisateurs de
matériels agricoles et les artisans locaux ;
-Mettre en place des mécanismes participatifs
permettant d'assurer une répartition équitable et une gestion
efficace des dons en équipements et matériels agricoles ;
- Assurer une formation spécifique des artisans dans le
domaine de la maintenance des équipements agricoles ;
- Financer les recherches dans le domaine de la
mécanisation agricole ;
-Normaliser le matériel et adopter le plus petit nombre
possible de modèles et marques ;
-Définir les normes de la formation ; le cahier de
charge que doit remplir une entité publique ou privée pour
exercer la fonction de formation initiale, opérationnelle ou
continue.
Ø En direction des autorités
communales
-Prendre en compte le volet mécanisation dans
l'élaboration du budget de la Commune ;
- S'impliquer dans la mise en place des organisations des
producteurs dans le but de l'utilisation en commun des matériels
agricoles.
Ø En direction des organisateurs des
producteurs (SCDA)
- Généraliser l'organisation
des producteurs en vue de l'utilisation en commun des machines et
matériels agricoles ;
-Assurer la formation technique, le suivie des producteurs et
la vulgarisation des technologies.
Ø En direction des institutions
financières
-Revoir à la baisse le taux d'intérêt
encore à deux chiffres sur les prêts accordés aux
producteurs ;
-Développer un partenariat plus accrue entre les
banques et les institutions de micro-finances ;
-Déconcentrer au mieux le système
bancaire ;
-Mettre au point des mécanismes plus alléchants
pour s'insérer dans le circuit de financement de la motorisation
agricole ;
-Mettre en place un comité restreint chargé
d'étudier avec l'association professionnelle des banques, les voies et
moyens pour la création des départements
spécialisés à vocation agricole et l'adoption des
procédures bancaires à la demande du secteur agricole.
Analyse des résultats selon SWOT
L'utilisation de la méthode d'analyse de SWOT pour
cette activé de recherche dans la Commune de Copargo a permis de
réaliser la figure ci-après :
-Composantes pédologiques :
aptitudes du sol aux activités agricoles
-Paramètres climatiques : la
précipitation répond aux exigences de l'agriculture dans la
commune
-Population majoritairement jeune
-Existence de terres cultivables
SWOT
FORCES
FAIBLESSES
-Faible utilisation des machines --Faible
compétence des tractoristes
-Faibles moyens financiers : manque de
structure de micros finances dans lesarrondissements
OPPORTUNITES
-Installation du SCDA à Copargo : le
suivit des producteurs est garantit -Existence de quelques
structures de financement : pour faciliter l'accès aux
financements des producteurs
MENACES
-Structure de finances concentrées dans Copargo
centre
-Inadaptation des engins aux sols
-Incompétence des tractoristes
Inexistence des centres de maintenances
Figure
9 : Modèle SWOT appliqué
à l'analyse des résultats.
L'installation d'une structure de suivi agricole qui est SCDA
dans la Commune de Copargo est une opportunité pour promouvoir la
motorisation agricole. La Commune dispose d'une potentialité importante
pour la modernisation de l'agriculture. L'agriculture rencontre certaines
menaces avec son outillage plus rudimentaires, le manque de moyens financiers,
incompétence des tractoristes, absence d'un centre de maintenance et
l'inadaptation des engins aux sols ne favorisent pas la motorisation agricole
dans la Commune. Toutefois on note quelques opportunités :
l'installation de la SDCA dans la Commune et l'existence de structures de
financements.
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