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La collecte des données marines et le droit de la mer


par Wafa ZLITNI
Faculté des sciences juridiques, politiques et sociales de Tunis - Master de recherche en Droit international 2021
  

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B. L'exploration des ressources archéologiques

Contrairement à l'activité d'exploration des ressources naturelles, l'archéologie sous-marine ne saurait constituer une activité économique. En vertu de la règle de non exploitation commerciale du patrimoine culturel subaquatique, les vestiges culturels sous-marins sont non commercialisables. En d'autres termes, ils ne peuvent faire l'objet de transactions ni d'opérations de vente, d'achat ou de troc. Ainsi, leur affectation à des fins de spéculation commerciale est interdite en vertu de l'article 2.7 de la Convention de l'UNESCO sur la protection du patrimoine culturel subaquatique202 et la règle 2 de son annexe qui prévoit que «l'exploitation commerciale du patrimoine culturel subaquatique à des fins de transaction ou de spéculation [...] est foncièrement incompatible avec la protection et la bonne gestion de ce patrimoine»203. La protection du patrimoine

200 NOIVILLE (C.), «Aspect juridique: droit d'accès aux ressources biologiques et partage des avantages», in GUEZENNEC (J.), (dir.) MORETTI (C.) (dir.) et SIMON (J.) (dir.), Substances naturelles en Polynésie française, Marseille, Institut de Recherche pour le Développement, 2006, pp.178-209, [en ligne]: https://books.openedition.org/irdeditions/831 (consulté le 15-022021).

201 Ibidem.

202 L'article 2.7 de la Convention de l'UNESCO sur la protection du patrimoine culturel subaquatique signée à Paris le 2 novembre 2001 prévoit: «Le patrimoine culturel subaquatique ne doit faire l'objet d'aucune exploitation commerciale», disponible sur le site de l'UNESCO

au lien suivant: http://portal.unesco.org/fr/ev.php-
URL_ID=13520&URL_DO=DO_TOPIC&URL_SECTION=201.html (consulté le 21-022021).

203 La règle 2 de l'annexe de la Convention de l'UNESCO sur la protection du patrimoine culturel subaquatique prévoit: «L'exploitation commerciale du patrimoine culturel subaquatique à des fins de transaction ou de spéculation ou sa dispersion irrémédiable est

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culturel subaquatique qui nous apprend des informations essentielles sur l'Histoire de l'Humanité nécessite en effet d'interdire son exploitation commerciale afin d'éviter «sa dispersion irrémédiable»204.

L'archéologie sous-marine consiste à effectuer des fouilles archéologiques, des «recherches tendant à la découverte d'objets à caractère archéologique»205 dans le milieu marin. L'objet d'étude de cette activité de collecte des données marines est le patrimoine culturel subaquatique qui est composé de «toutes les traces d'existence humaine présentant un caractère culturel, historique ou archéologique, [...] immergés, partiellement ou totalement, périodiquement ou en permanence, depuis cent ans au moins»206.

foncièrement incompatible avec la protection et la bonne gestion de ce patrimoine. Les éléments du patrimoine culturel subaquatique ne peuvent faire l'objet de transactions ni d'opérations de vente, d'achat ou de troc en tant qu'articles de nature commerciale.

La présente règle ne peut être interprétée comme empêchant: (a) la fourniture de services archéologiques professionnels ou de services connexes nécessaires dont la nature et le but sont pleinement conformes à la présente Convention, sous réserve de l'autorisation des services compétents ; (b) le dépôt d'éléments du patrimoine culturel subaquatique, récupérés dans le cadre d'un projet de recherche conduit en conformité avec la présente Convention, pourvu que ce dépôt ne porte pas atteinte à l'intérêt scientifique ou culturel ou à l'intégrité des éléments récupérés ni n'entraîne leur dispersion irrémédiable, qu'il soit conforme aux dispositions des règles 33 et 34 et qu'il soit soumis à l'autorisation des services compétents».

204 Résolution 74/19 de l'AGNU précitée.

205 La règle I.1 de la recommandation de l'UNESCO définissant les principes internationaux à appliquer en matière de fouilles archéologiques signée à New Delhi le 5 novembre 1956 prévoit: «A l'effet de la présente recommandation on entend par fouilles archéologiques toutes recherches tendant à la découverte d'objets de caractère archéologique, que ces recherches comportent un creusement du ' sol ou une exploration systématique de sa surface ou qu'elles soient effectuées sur le lit ou dans le sous-sol des eaux intérieures ou territoriales d'un Etat membre», disponible sur le site de l'UNESCO au lien suivant: http://portal.unesco.org/fr/ev.php-

URL_ID=13062&URL_DO=DO_TOPIC&URL_SECTION=201.html

206 L'article 1.1.a. de la Convention de l'UNESCO sur la protection du patrimoine culturel subaquatique précitée prévoit: «On entend par "patrimoine culturel subaquatique" toutes les traces d'existence humaine présentant un caractère culturel, historique ou archéologique qui sont immergées, partiellement ou totalement, périodiquement ou en permanence, depuis 100 ans au moins, et notamment : (i) les sites, structures, bâtiments, objets et restes humains, ainsi que leur contexte archéologique et naturel ; (ii) les navires, aéronefs, autres véhicules ou toute partie de ceux-ci, avec leur cargaison ou autre contenu, ainsi que leur contexte archéologique et naturel ; et (iii) les objets de caractère préhistorique.

(b) Les pipelines et les câbles, posés sur les fonds marins, ne sont pas considérés comme faisant partie du patrimoine culturel subaquatique.

(c) Les installations autres que les pipelines ou câbles, placées sur les fonds marins et encore en usage, ne sont pas considérées comme faisant partie du patrimoine culturel subaquatique».

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Les données de base du travail de l'archéologue peuvent prendre diverses formes. Les vestiges culturels sous-marins peuvent en effet être des «monuments meubles ou immeubles [présentant] un intérêt du point de vue de l'archéologie»207, c'est-à-dire qui a été plus ou moins façonné ou aménagé par l'Homme: mégalithes, grottes sous-marines ornées ou non recelant les preuves d'une occupation humaine passée, ruines de villages ou de constructions portuaires submergées par la modification des rivages ou la montée des eaux208, épaves de navires ou objets s'y trouvant... Ces biens peuvent aussi être des objets ordinaires devenus exceptionnels du fait de l'histoire et du sinistre209.

L'archéologie sous-marine collectant des données relatives aux vestiges culturels subaquatiques et la recherche scientifique marine étudiant les phénomènes naturels, faire une distinction210 nette entre ces deux activités reste tout de même difficile. En effet, les résultats des travaux archéologiques peuvent révéler des données sur les caractéristiques des fonds marins et leurs sous-sols. Ainsi, des fouilles archéologiques menées le long des côtes de l'Afrique du Sud ont permis d'étudier l'évolution de la distribution de certaines espèces de mollusques sur une période de dix mille ans211 grâce à des fossiles découverts

207 La règle I.2 de la recommandation de l'UNESCO définissant les principes internationaux à appliquer en matière de fouilles archéologiques précitée prévoit: «Les dispositions de la présente recommandation s'appliquent à tout vestige dont la conservation présente un intérêt public du point de vue de l'histoire ou de l'art, chaque État membre pouvant adopter le critère le plus propre à déterminer l'intérêt public des vestiges se trouvant sur son territoire. Devraient notamment être soumis au régime prévu par la présente recommandation les monuments, meubles ou immeubles, qui présentent un intérêt du point de vue de l'archéologie au sens le plus large».

208 Ibidem.

209 GOY (R.), «L'épave du Titanic et le droit des épaves en haute mer», Annuaire français de droit international, volume 35, 1989, pp. 758, [en ligne] www.persee.fr/doc/afdi_0066-3085_1989_num_35_1_2931 (consulté le 15-02-2021)

210 COTRELL (A.), «The Law of the Sea and Marine Archeology: Abandoning Admiralty Law to Protect Historic Shipwrecks», Fordham International Law Journal, volume 17, numéro 3,

1993, p.719, [en ligne]:
https://ir.lawnet.fordham.edu/cgi/viewcontent.cgi?article=1384&context=ilj (consulté le 1502-2021).

211 JERARDINO (A.), «What Archaeology Can Tell us about Sustainability and Climate Change: A South African West Coast Perspective», Journal of Marine Science: Research & Development, volume 2, numéro 1, 2012, [en ligne] https://www.omicsonline.org/what-

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par les archéologues puis analysés par les océanologues. Cependant, le régime de l'archéologie sous-marine n'est pas assimilé à celui de la recherche scientifique marine.

Dans la mer territoriale, l'Etat côtier a le droit exclusif d'autoriser l'ensemble des «interventions»212 sur les ressources archéologiques qui s'y trouvent213 en vertu de l'article 7 de la Convention de l'UNESCO sur la protection du patrimoine culturel subaquatique. L'Etat côtier réglemente ainsi exclusivement cette activité de manière à protéger ces biens culturels214. A cet égard, la CMB fait de la zone contigüe «une zone de protection des ressources archéologiques»215. En effet, l'article 33.1 de ladite Convention prévoit que dans cette zone, l'Etat côtier peut «prévenir [et réprimer] les infractions à ses lois et règlements douaniers, fiscaux, sanitaires ou d'immigration sur son territoire ou dans sa mer territoriale»216. L'article 303.2 de la CMB fait référence à cet article 33 pour assigner à l'Etat côtier «l'obligation de protéger les objets de caractère archéologique ou historique découverts en mer»217. Celui-ci prévoit que «pour

archaeology-can-tell-us-about-sustainability-and-climate-change-a-south-african-west-coast-perspective-2155-9910.1000105.pdf (consultéle 15-02-2021)

212 L'article 1.6 de la Convention de l'UNESCO sur la protection du patrimoine culturel subaquatique précitée prévoit: «On entend par "intervention sur le patrimoine culturel subaquatique" une activité ayant principalement pour objet le patrimoine culturel subaquatique et qui est susceptible de porter matériellement atteinte à ce patrimoine ou de lui causer tout autre dommage, directement ou indirectement».

213 CASSAN (H.) «Le patrimoine culturel subaquatique ou la dialectique de l'objet et du lieu», in Mélanges offerts à Laurent LUCCHINI et Jean-Pierre QUENEUDEC, La mer et son Droit, Paris, Pedone, 2003, p.142.

214L'article 7.2 de la Convention de l'UNESCO sur la protection du patrimoine culturel subaquatique précitée prévoit: «Sans préjudice des autres accords internationaux et règles du droit international applicables à la protection du patrimoine culturel subaquatique, les États parties prescrivent l'application des Règles aux interventions sur le patrimoine culturel subaquatique présent dans leurs eaux intérieures, leurs eaux archipélagiques et leur mer territoriale».

215 Ibidem.

216 L'article 33.1 de la CMB précitée prévoit: «dans une zone contigüe à sa mer territoriale, désignée sous le nom de zone contigüe, l'Etat côtier peut exercer le contrôle nécessaire en vue de a) prévenir les infractions à ses lois et règlements douaniers, fiscaux, sanitaires ou d'immigration sur son territoire ou dans sa mer territoriale,

b) réprimer les infractions à ses lois et règlements commises sur son territoire ou dans sa mer territoriale».

217 L'article 303.1 de la CMB précitée prévoit: «Les Etats ont l'obligation de protéger les objets de caractère archéologique ou historique découverts en mer et coopèrent à cette fin».

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contrôler le commerce de ces objets, l'Etat côtier peut [...] considérer que leur enlèvement du fond de la mer dans la zone [contigüe] sans son approbation, serait cause d'une infraction sur son territoire ou dans sa mer territoriale, [à ses] lois et règlements»218.

L'Etat côtier doit également protéger le patrimoine culturel subaquatique dans sa ZEE et sur son plateau continental219, au moyen d'une procédure de déclaration, de notification220 et de consultation221 prévue par les articles 9 et 10

218 L'article 303.2 de la CMB prévoit: «Pour contrôler le commerce de ces objets, l'Etat côtier peut, en faisant application de l'article 33, considérer que leur enlèvement du fond de la mer dans la zone visée à cet article, sans son approbation, serait cause d'une infraction sur son territoire ou dans sa mer territoriale, aux lois et règlements de l'Etat côtier visés à ce même article».

219 L'article 9.1 de la Convention de l'UNESCO sur la protection du patrimoine culturel subaquatique précitée prévoit: «Il incombe à tous les États parties de protéger le patrimoine culturel subaquatique dans la zone économique exclusive et sur le plateau continental conformément à la présente Convention».

220 L'article 9 de la Convention de l'UNESCO sur la protection du patrimoine culturel subaquatique précitée prévoit : «Il incombe à tous les États parties de protéger le patrimoine culturel subaquatique dans la zone économique exclusive et sur le plateau continental

conformément à la présente Convention. En conséquence :

(a) un État partie exige, lorsqu'un de ses nationaux ou un navire battant son pavillon fait une découverte ou envisage une intervention sur le patrimoine culturel subaquatique situé dans sa zone économique exclusive ou sur son plateau continental, que le national ou le capitaine du

navire lui déclare cette découverte ou intervention.

(b) dans la zone économique exclusive ou sur le plateau continental d'un autre État partie :

(i) les États parties exigent que le national ou le capitaine du navire leur déclare cette

découverte ou intervention ainsi qu'à l'autre État partie ;

(ii) ou le cas échéant, un État partie exige que le national ou le capitaine du navire lui déclare cette découverte ou intervention et assure la transmission rapide et efficace de ces déclarations

à tous les autres États parties.

2. En déposant son instrument de ratification, d'acceptation, d'approbation ou d'adhésion, un État partie précise la manière dont il transmettra les déclarations au titre du paragraphe 1(b) du

présent article.

3. Un État partie notifie au Directeur général les découvertes ou interventions sur le patrimoine culturel subaquatique qui lui sont notifiées au titre du paragraphe 1 du présent article.

4. Le Directeur général met sans délai à la disposition de tous les États parties les informations qui lui sont notifiées en vertu du paragraphe 3 du présent article.

5. Tout État partie peut faire savoir à l'État partie dans la zone économique exclusive ou sur le plateau continental duquel se trouve le patrimoine culturel subaquatique qu'il souhaite être consulté sur la manière d'assurer la protection effective de ce patrimoine. Cette déclaration doit être fondée sur un lien vérifiable, en particulier un lien culturel, historique ou archéologique, avec le patrimoine culturel subaquatique considéré».

221 L'article 10 de la Convention de l'UNESCO sur la protection du patrimoine culturel subaquatique précitée prévoit : « 1. Une autorisation ne peut être délivrée pour une intervention sur le patrimoine culturel subaquatique situé dans la zone économique exclusive ou sur le plateau continental que conformément aux dispositions du présent article.

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de la Convention de l'UNESCO précitée. Dans sa ZEE, afin de prévenir toute atteinte à ses droits souverains et à sa juridiction222, l'Etat côtier a en effet le droit d'autoriser et d'interdire toute intervention sur le patrimoine culturel subaquatique.

2. Un État partie dans la zone économique exclusive ou sur le plateau continental duquel se trouve le patrimoine culturel subaquatique a le droit d'interdire ou d'autoriser toute intervention sur ce patrimoine pour empêcher toute atteinte à ses droits souverains ou à sa juridiction tels qu'ils sont reconnus par le droit international, y compris la Convention des Nations Unies sur

le droit de la mer.

3. Lorsqu'une découverte de patrimoine culturel subaquatique est effectuée ou qu'une intervention sur le patrimoine culturel subaquatique est envisagée dans la zone économique exclusive ou sur le plateau continental d'un État partie, cet État partie:

(a) consulte tous les autres États parties qui ont manifesté leur intérêt au titre de l'article 9, paragraphe 5, sur la meilleure façon de protéger le patrimoine culturel subaquatique ;

(b) coordonne ces consultations en qualité d'"État coordonnateur" sauf s'il déclare expressément qu'il ne souhaite pas le faire, auquel cas les États parties qui ont manifesté un intérêt en vertu de l'article 9, paragraphe 5, désignent un État coordonnateur.

4. Sans préjudice des obligations de tous les États parties de protéger le patrimoine culturel subaquatique par l'adoption de toutes mesures opportunes conformes au droit international visant à empêcher tout danger immédiat pour le patrimoine culturel subaquatique, notamment le pillage, l'État coordonnateur peut prendre toutes mesures opportunes et/ou accorder toutes autorisations nécessaires conformément à la présente Convention, et, au besoin, avant toute consultation, afin d'empêcher tout danger immédiat pour le patrimoine culturel subaquatique, du fait de l'activité humaine, ou de toute autre cause, notamment le pillage. Lors de l'adoption de ces mesures, l'assistance d'autres États parties peut être sollicitée.

5. L'État coordonnateur : (a) met en oeuvre les mesures de protection qui ont été convenues par les États participant à la consultation, y compris l'État coordonnateur, à moins que les États participant à la consultation, y compris l'État coordonnateur, ne conviennent que ces mesures

seront mises en oeuvre par un autre État partie ;
(b) délivre toutes les autorisations nécessaires à l'égard des mesures ainsi convenues conformément aux Règles, à moins que les États participant à la consultation, y compris l'État coordonnateur, ne conviennent que ces autorisations seront délivrées par un autre État partie ;

(c) peut conduire toute recherche préliminaire nécessaire sur le patrimoine culturel subaquatique et délivre toutes les autorisations nécessaires en conséquence, et transmet sans retard les résultats de cette recherche au Directeur général, lequel met sans retard ces

informations à la disposition des autres États parties.

6. En coordonnant les consultations, adoptant des mesures, menant toute recherche préliminaire et/ou en délivrant des autorisations en vertu du présent article, l'État coordonnateur agit au nom des États parties dans leur ensemble et non dans son propre intérêt. Une telle action ne peut en soi être invoquée pour revendiquer un quelconque droit préférentiel ou juridictionnel non consacré par le droit international, en particulier par la Convention des

Nations Unies sur le droit de la mer.

7. Sous réserve des dispositions des paragraphes 2 et 4 du présent article, aucune intervention n'est menée sur un navire ou aéronef d'État sans l'accord de l'État du pavillon et la collaboration de l'État coordonnateur».

222CASSAN (H.) , op. cit., pp.144-145.

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Afin d'assurer une meilleure protection du patrimoine culturel subaquatique, la Convention de l'UNESCO précitée apporte un remède aux inconvénients causés par l'article 303.3 de la CMB qui consacre les intérêts privés à l'exploitation commerciale des objets archéologiques trouvés en mer223. Celui-ci prévoit en effet qu'il ne porte pas atteinte au «droit de récupérer des épaves et aux autres règles du droit maritime»224. Cette expression constitue la traduction de «the law of salvage and other rules of admiralty», une règle appliquée dans certains systèmes nationaux de common law et qui ne correspond à aucune notion juridique précise équivalente dans les autres systèmes nationaux et qui signifie que «toute personne qui prend possession d'un objet retrouvé en mer dont on ne connaît pas le propriétaire a titre pour devenir son propriétaire»225.

Ainsi, entre 1988 et 1997, dans le cadre d'un projet de recherche américain financé par la United States National Geographic Society, par l'Office of Naval Research et par le J.M. Kaplan Fund, plus de cent cinquante objets archéologiques relevant des civilisations phénicienne, grecque et romaine furent enlevés d'une zone de la Méditerranée centrale située au-delà de la limite de la mer territoriale de l'Italie et de la Tunisie sans même prévenir ces derniers226.

L'article 303.4 de la CMB qui prévoit que «sans préjudice des autres accords internationaux et règles du droit international concernant la protection des objets

223SCOVAZZI (T.), «La convention de l'UNESCO sur la protection du patrimoine culturel subaquatique», in MOUSSA (F.) (dir.) et LAGHMANI (S.) (dir), La mer Méditerranée entre territorialisation et coopération, colloque organisé du 18 au 20 février 2010 à Tunis, Faculté des sciences juridiques politiques et sociales de Tunis, 2013, pp. 76-77.

224 L'article 303.3 de la CMB précitée prévoit: «Le présent article ne porte atteinte ni aux droits des propriétaires identifiables, au droit de récupérer des épaves et aux autres règles du droit maritime, ni aux lois et pratiques en matière d'échanges culturels.»

225 SCOVAZZI (T.), «La convention de l'UNESCO sur la protection du patrimoine culturel subaquatique», op. cit., pp. 73-74.

226 SCOVAZZI (T.), «L'approche régionale à la protection du patrimoine culturel sous-marin: le cas de la Méditerranée,» Annuaire français de droit international, volume 55, 2009, pp. 579580, [en ligne]: https://www.persee.fr/doc/afdi_0066-3085_2009_num_55_1_4084 (consulté le 15-02-2021).

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de caractère archéologique ou historique»227 celui-ci permet à l'article 4 de la

Convention sur la protection du patrimoine subaquatique précitée d'éliminer les effets indésirables de l'article 303.3 de la CMB. Ce dernier prévoit qu'aucune «activité concernant le patrimoine culturel subaquatique à laquelle [ladite] Convention s'applique n'est soumise au droit de l'assistance ni au droit des trésors»228, une traduction de la version anglaise «the law of salvage and law of

finds».

Enfin, l'article 12 de la Convention sur la protection du patrimoine subaquatique précitée soumet toute «intervention sur le patrimoine culturel subaquatique situé dans la Zone»229 à une autorisation du directeur général de l'UNESCO. De plus,

l'article 149 de la CMB érige tous les objets de caractère archéologique ou historique trouvés dans [ladite] Zone en patrimoine commun de l'Humanité. Ceux-ci sont conservés ou cédés dans l'intérêt de l'Humanité tout entière»230. Ils

doivent alors faire l'objet d'une gestion désintéressée et être destinés à des fins d'intérêt général, telles que la recherche scientifique, le partage des informations dans le milieu des archéologues et des historiens, ou encore la sensibilisation du public231.

227 L'article 303.4 de la CMB précitée prévoit: «Le présent article est sans préjudice des autres accords internationaux et règles du droit international concernant la protection des objets de caractère archéologique ou historique».

228 L'article 4 de la Convention de l'UNESCO sur la protection du patrimoine culturel subaquatique précitée prévoit: «Aucune activité concernant le patrimoine culturel subaquatique à laquelle la présente Convention s'applique n'est soumise au droit de l'assistance ni au droit des trésors, sauf si: (a) elle est autorisée par les services compétents, et (b) elle est pleinement conforme à la présente Convention, et (c) elle assure que la protection maximale du patrimoine culturel subaquatique lors de toute opération de récupération soit garantie».

229 L'article 12.1 de la Convention de l'UNESCO sur la protection du patrimoine culturel subaquatique précitée prévoit: «Une autorisation ne peut être délivrée pour une intervention sur le patrimoine culturel subaquatique situé dans la Zone que conformément aux dispositions du présent article».

230 L'article 149 de la CMB précitée prévoit: «Tous les objets de caractère archéologique ou historique trouvés dans la Zone sont conservés ou cédés dans l'intérêt de l'humanité tout entière, compte tenu en particulier des droits préférentiels de l'Etat ou du pays d'origine, ou de l'Etat d'origine culturelle, ou encore de l'Etat d'origine historique ou archéologique».

231SCOVAZZI (T.), «La Convention sur la protection du patrimoine culturel subaquatique», op. cit., p.72.

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"Aux âmes bien nées, la valeur n'attend point le nombre des années"   Corneille