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Etude des déterminants de la consommation de combustibles pour la cuisson dans le milieu urbain : le cas des ménages de la commune de Carrefour, Haà¯ti


par Wagner Napoléon
IAC/Université des Antilles et de la Guyane Faculté de Droit et d’Economie - Master en gestion et évaluation des entreprises et collectivités territoriales 2011
  

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§SECTION 2. Fondements théorique et empirique

La section précédente nous a permis d'avoir une idée plus ou moins claire de la situation du marché des combustibles pour la cuisson dans le milieu urbain haïtien. Dans la présente section, nous mettrons en exergue un ensemble de théories et de travaux empiriques sur lesquelles s'appuiera notre recherche.

§ Quelques théories de la consommation et du comportement

Dans cette section, nous présenterons deux théories microéconomiques qui traitent de la consommation des ménages sur le marché des biens, quelques théories générales issues de la psychologie sociale visant à expliquer et à prédire les comportements des individus, et la théorie de la transition énergétique qui indique la séquence de cette transition.

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1. Les théories de la consommation

Pascal Corbel (1999/2003) a publié une fiche de synthèse sur les théories de la consommation les plus fréquemment cités dont nous nous proposons de relayer (dans ce travail) deux d'entre-elles traitant de la consommation suivant une approche strictement microéconomique. Il s'agit précisément de la théorie néoclassique et de celle de Friedman.

a) La théorie néoclassique de la consommation

Selon cette théorie le consommateur cherche à maximiser sa satisfaction, mais son pouvoir d'achat lui contraint à faire des choix. Pour faciliter son choix, le consommateur mesure la valeur de chaque bien par l'utilité qu'il retire de la consommation ou de l'utilisation de ce bien. Ainsi, pour deux biens considérés, plusieurs combinaisons peuvent avoir la même utilité cumulée pour le consommateur, c'est-à-dire peuvent lui procurer la même satisfaction. D'où la notion de « courbe d'indifférence » représentant graphiquement l'ensemble des combinaisons pour lesquelles le consommateur est indifférent. A ce stade, le choix entre ces différentes combinaisons (a priori équivalentes) dépend du revenu du consommateur. Ainsi, pour maximiser sa satisfaction, le consommateur choisira la combinaison qui utilise tout son revenu, sans bien sûr le dépasser. Ainsi, l'optimum du consommateur sera atteint à l'intersection entre sa droite de revenu et la courbe d'indifférence la plus haute qu'il lui est accessible.

b) La théorie de Friedman

Selon Friedman, le revenu des agents peut connaître des variations qui peuvent être importantes de période en période. Alors que, les dépenses de consommation présentent dans l'ensemble une relative stabilité. Sur la base de ces constats, Friedman propose de distinguer deux composantes au sein du revenu et de la consommation :

? Revenu du ménage = Revenu permanent (Rp) + revenu transitoire (Rtr). Friedman a réfléchi dans une optique de patrimoine. Selon lui, ce n'est pas le revenu courant qui détermine la consommation du ménage mais la richesse de l'agent et, particulier son revenu permanent. Le revenu permanent représente, en quelque sorte, l'intérêt de la richesse du ménage. Il définit le revenu permanent comme « la somme qu'un consommateur peut consommer en maintenant constante la valeur de son capital ». Quant au revenu transitoire, il est exceptionnel, et peut être positif ou négatif. Le revenu transitoire sera totalement épargné s'il est positif. Il sera financé par l'emprunt s'il est négatif.

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? De même, Consommation du ménage = Consommation permanente (Cp) + consommation transitoire (Ctr). La consommation permanente est une consommation de longue période. La propension à consommer de longue période dépend des préférences des ménages, du caractère plus ou moins aléatoire de leur revenu et du taux d'intérêt sur le marché. Ainsi, Friedman conclut que l'unique relation stable qui existe entre la consommation et le revenu est celle entre la consommation permanente et le revenu permanent.

En fait, l'idée de Friedman repose sur l'hypothèse que les ménages ont une idée bien précise de leur revenu « normal » sur le moyen-long terme. C'est en ce sens qu'il utilise le concept de « revenu permanent », en fonction duquel le consommateur décidera de la part de son revenu à affecter à chaque bien de son panier de consommation. Ainsi, une variation de court-terme du revenu d'un ménage (augmentation due à la réception d'un transfert important ou diminution pour cause de chômage) n'influencera pas forcément le niveau de consommation du ménage.

En effet, cette théorie pourrait être bien adaptée à la réalité économique des ménages haïtiens qui, souvent, consomment une combinaison de combustibles pour la cuisson des aliments. Toutefois, parmi cette combinaison, le ménage n'a aucun doute sur celui qui constitue sa principale source d'énergie, laquelle exprime sa préférence ou encore sa consommation permanente. En toute vraisemblance, ce principal devrait être le combustible qui correspond le mieux au revenu « normal » du ménage mieux encore, à son revenu permanent, pour emprunter le concept de Friedman.

Quoique le revenu soit une variable d'importance dans le choix du ménage urbain d'un combustible pour la cuisson, nous pensons que la consommation de combustibles chez le ménage urbain haïtien ne dépend probablement pas uniquement de son revenu courant ou même de son revenu permanent. Ainsi, les théories néoclassiques et de Friedman susmentionnées nous paraissent insuffisantes pour expliquer le comportement de consommation des ménages urbains haïtiens sur le marché de combustibles pour la cuisson. Nous avons la présomption que cette consommation soit influencée par d'autres facteurs extra-économiques tels que : les caractéristiques du ménage, mais surtout la perception du chef de ménage vis-à-vis des combustibles disponibles. Cette perception est souvent le fruit d'influences environnementale et culturelle. Aussi, sommes-nous amenés à explorer différents modèles théoriques psychosociales.

2. Les théories générales issues de la psychologie sociale

a) La théorie de l'action raisonnée (TAR)

La théorie de l'action raisonnée (TAR) est l'oeuvre d'Ajzen & Fishbein (1980). Elle postule que le comportement de l'individu dépend directement de son intention de réaliser ce comportement. Quant à l'intention de l'individu, elle est alimentée par ses croyances sur les conséquences de l'adoption du comportement (attitude), et des croyances liées à l'opinion d'un groupe de référence par rapport à ce comportement (normes subjectives).

Schéma : d'Ajzen & Fishbein 1975

Croyances quant aux conséquences
associées à l'adoption du
comportement X évaluation des
conséquences.

Variables externes : -caractéristiques individuelles -variation du comportement -variation situationnelle -différences individuelles -situation de l'expérience.

Attitude à l'égard du
comportement

Intention

Comportement

Croyances concernant ce que
pensent les personnes influentes
quant au comportement à
adopter X motivation à se
conformer

Norme subjective

b) La théorie du comportement planifié

Ajzen (1991) à compléter la théorie de l'action raisonnée (TAR) en faisant apparaitre les croyances de contrôle et les facilitations perçues (ressources et opportunités). Ce qui lui a permis de prendre en compte les comportements qui ne dépendent pas que de la volonté de l'individu. Ce modèle

Croyances

Croyances de contrôle et les facilitations perçues

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Norme subjective

Attitude

Norme subjective

Intention

Comportement

Croyances à l'égard du comportement.

Schéma : Ajzen (1991)

c) Le modèle d'acceptation de la technologie

Ce modèle est l'oeuvre de Davis (1989). C'est un modèle basé sur la TAR, lequel ne prend en compte que l'attitude, et destiné à expliquer le comportement des individus dans le domaine spécifique des TIC8. Dans ce modèle, les déterminants de l'adoption sont l'« Utilité perçue (croyance de l'augmentation de la performance grâce à l'utilisation de la Technologie) et la « Facilité d'utilisation perçue » de la technologie par l'individu.

Schéma : Davis (1989)

Utilité

A

Intention

Facil ité

Va
ria

Uti

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d) La théorie des comportements interpersonnels

La théorie des comportements interpersonnels a été développée par Triandis (1980). Ce modèle englobe la plupart des variables présentes dans les modèles précédentes et intègre à la fois des déterminants structurels et des déterminants psychologiques de l'individu (Intention : facteurs sociaux, conséquences perçues, affects ; Habitude ; Conditions facilitatrices)

Schéma : Triandis (1980).

Conséquences perçues

Affect

Habitud

Intention

Conditions

Facteurs

Comportement

8 TIC: Technologie de l'information et de la communication.

e) 19 | P a g e

La théorie de l'influence sociale

L'hypothèse fondamentale de cette théorie est que l'attitude d'un individu est influencée par la société dans laquelle il vit, et surtout, par les gens qui lui sont proches. Cette théorie semble être bien adaptée à la situation de la majorité des ménages urbains haïtiens dont le choix des combustibles pour la cuisson est souvent influencé par les informations qui circulent dans le voisinage.

En effet, tout ce qui est dit dans la communauté (racontars, rumeurs, expériences rapportés...) à propos des combustibles disponibles est de nature à nourrir les perceptions (positives ou négatives) des uns et des autres par rapport à ces produits.

f) La théorie de l'influence interpersonnelle

« La conviction que les interactions entre les hommes structurent les comportements est à la base de la psychologie sociale » (Laurent, 2003 : 1). De multiples influences interpersonnelles sous différentes formes viennent en permanence modifier les attitudes des consommateurs et réorienter leurs comportements (Miniard et Cohen, 1983 : cité par Laurent, 2003, pp. 1). De manière générale, Laurent (2003) distingue deux processus d'influence interpersonnelle :

a. Le processus d'influence informationnelle (Deutsh et Gérard, 1955 ; Park et Lessig, 1977 ; Price et Freick, 1984 : cité par Laurent, 2003, pp. 1) qui est une démarche active de recherche d'information et d'acceptation des conseils et recommandations effectués par certains référents choisis. Ce processus est le suivant : les recommandations prodiguées sont évaluées (internalisation selon Kelman, 1961), puis aboutit à la reconnaissance de la validité et de la pertinence de l'information dans l'optique de ses propres décisions d'achats.

b. Le processus d'influence normative dans lequel le consommateur prend en compte des jugements induits des comportements conformistes. Il rentre dans une démarche d'ajustement de ses choix en fonction de l'anticipation des jugements négatifs ou positifs de référents subis ou choisis.

De nombreux auteurs ont montré que l'influence qu'exercent les réponses des autres sur les jugements d'un individu, dépend de la certitude qu'a cet individu de la validité de son jugement initial. Plus un sujet est certain de ses réponses, plus il « résiste » à l'influence sociale (Kelley et Lamb, 1957 : cité par G. de Montmollin, 1967, pp. 477) ; moins il est sûr de lui et plus il a tendance à adopter la réponse des autres ou à s'en rapprocher (Montmollin, 1967). Certaines études expérimentales ont également montré que plus le stimulus était ambigu ou peu structuré, plus le sujet avait tendance à suivre la majorité et à se rapprocher de la réponse des autres (Sherif, 1935 ; Coffin,

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1941 ; Sherif, 1952 : cité par Montmollin, 1967 pp. 478). Ainsi, tenant compte des graves problèmes d'éducation et d'information dont fait face la population haïtienne, il y a lieu de croire que l'influence sociale soit forte et est de nature à influencer le comportement des ménages sur le marché des combustibles.

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"Je voudrais vivre pour étudier, non pas étudier pour vivre"   Francis Bacon