Responsabilité civile du transporteur aérien au regard du principe de la réparation intégralepar Pascal Claude Muhima Université Libres des Pays des Grands Lacs - Licence 2020 |
B. Assurance obligatoire comme une garantie de la réparation intégraleDans le cadre de ce titre, il est question de placer un mot sur l'assurance obligatoire en tant qu'un argument soutenant la responsabilité intégrale des victimes de dommage du transporteur aérien (B.1), qui malheureusement se heurte à la difficulté liée àl'insolvabilité du transporteur et de l'assureur face à l'impératif de la réparation intégrale (B.2). B. 1. Assurance obligatoire comme argument de tremplin en faveur d'unela responsabilité illimitéeLes partisans de la responsabilité limitée répètent que la responsabilité est inassurable. Mais le professeur Bin Cheng affirme qu'il s'agit d'un argument sans consistance ; car s'il était fondé, alors, la responsabilité encourue par toute autre personne devrait être également selon la loi, toujours limitée, qu'ils s'agissent d'un individu ordinaire, d'un automobiliste, d'un employeur, d'un hôtelier, d'une compagnie d'autobus, d'un propriétaire d'usine et d'industriel155(*). Mais comme ce n'est pas le cas, pourquoi serait-ce le cas du transporteur aérien seul ? Ainsi, ce qui compte pour l'assureur, ce n'est pas le nombre de personnes qui sont tuées en un seul accident, c'est le coût total des sinistres qu'il faut régler en une seule année. Or, les accidents automobilistes sont infiniment plus importants à l'échelle d'une nation ou à l'échelle du monde que les accidents d'avion156(*). Ainsi, il est bien évident que l'accident aérien est spectaculaire, de sorte que tous les médias du monde en parlent alors qu'ils ne peuvent pas parler de tous les accidents d'automobiles précisément parce qu'il faudrait y consacrer la surface entière des journaux. On peut affirmer que l'accident aérien mortel, pour une personne déterminée, à déplacement égal, a douze fois moins de chance de se produire que l'accident de la route en voiture privée157(*).ceci est appuyé par la statistique présenté en 1983 selon laquelle, si un individu quelconque devrait parcourir 16.090km ou soit 10.000 miles par an avant de courir les risques de se faire tuer, il devrait se déplacer pendant 938.000 ans a bord d'un avion régulier, 497.000 ans dans un train, 220.000 à bord d'un vol non régulier, 78.000 ans en voiture privé, 4 500 ans en motocyclette, 19 000 ans en avion privée, 900 ans à bicyclette158(*). Une certaine doctrine estime que ces chiffres sous-estiment la sécurité des avions comparée à celle qu'offrent les voitures, qui provoquent au moins dix fois plus de blessures graves que décès159(*). Ainsi, l'accident aérien mortel, pour une personne déterminée, à déplacement égal, a douze fois moins de chance de se produire que l'accident de la route en voiture privée. Sans doute les accidents de l'aviation générale sont importants mais statistiquement, ils représentent peu de chose par rapport à l'aviation de ligne, de toute façon. A ce même propos, François Legrez montre la différence fantastique entre le risque aérien et le risque de l'automobile, en comparant le prix d'assurance pour chaque engin. Ainsi pour assurer une voiture pour tous risque, il faut à peu près 10% de la valeur marchande de la voiture ; alors qu'une grande compagnie aérienne paye au moins 0,17% de la valeur marchande pour assurer un Boeing 747. Ce qui lui a permis de conclurequ'on est plus en sureté dans l'avion que dans une voiture160(*). L'assurance obligatoire constitue un argument soutenant la réparation intégrale dans le transport aérien du fait que les assurances dommages reposent sur le principe fondamental, qui n'est autre que le principe indemnitaire, selon lequel la prestation de l'assureur ne peut en aucun cas excéder le préjudice réel subit par l'assuré ou la victime161(*). Néanmoins, cet impératif de la réparation intégrale se heurte toujours au problème de l'insolvabilité du transporteur aérien d'une part et celui de l'assureur d'autre part. * 155 Prof. Bin Cheng cité par M. De Juglart, Traité de droit aérien, Tome 2, Paris, LGDJ, 1992, p93 * 156 M. De Juglart, Traité de droit aérien, Tome 2, Paris, LGDJ, 1992, p94 * 157 A. Sampson, les empires du ciel, LGDJ, Paris, 1986, p285. * 158 Ces chiffres ont été trouvé dans dans l'ouvrage de M. De juglart, Op. Cit., T2, p94. * 159 A. Sampon, idem. * 160 IFURTA, Rapport des journées d'études des 9 et 10 juin 1984 du Bouget, sur les responsabilités à l'égard du passager aérien. * 161 J. Bonnard, Droit et pratiques des assurances, 1ère édition, Paris, Delmas, 1997, p12. |
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