II- PROBLÉMATIQUE PRATIQUE DU TRACHOME AU
CAMEROUN
La problématique est la présentation
d'un problème qui soulève une interrogation qu'il faut
résoudre. De façon pratique, elle représente la question
à laquelle l'auteur d'une dissertation doit répondre par une
argumentation étayée.
1. Observations relatives à la lutte contre le
trachome au Cameroun
Au Cameroun, trois régions
(l'Extrême-Nord, le Nord et l'Adamaoua) présentent des similitudes
sur le plan géographique et culturel. Ce sont des zones à climat
chaud et sec avec une faible pluviométrie. L'hygiène individuelle
et celle de l'environnement y sont précaires et une forte influence des
habitudes culturelles dans ces zones entretiennent le cercle vicieux
d'insalubrité qui prédispose au trachome.
Les premières données sur la
prévalence du trachome au Cameroun proviennent de l'enquête
épidémiologique réalisée dans le DS de Kolofata en
2006 par OSF. La prévalence du trachome actif rapportée
était de 31,5% et celle du TT était de 3,5%.
Avec l'appui de USAID et de HKI, des enquêtes
à grande échelle ont été réalisées.
La première en 2010 dans 27 DS de la région de
l'Extrême-Nord, où 13 DS avaient des prévalences de
trachome actif chez les enfants de 1 à 9 ans supérieures à
10%, 4 DS étaient situées entre 5 et 9,9%. La deuxième
enquête a été mise en oeuvre dans 15 DS de la région
du Nord en 2011 où 3 DS (Poli, Rey Bouba, Tcholiré) avaient des
prévalences de trachome actif supérieures à 10%. La
troisième enquête a porté sur les 8 DS de la région
de l'Adamaoua ; le trachome s'y est révélé être non
endémique.
Au total à l'issue de ces enquêtes,
6.546.265 personnes étaient à risque de trachome au Cameroun,
soit le tiers de la population nationale. Il en ressort également qu'il
y aurait 23.387 personnes âgées d'au moins 15 ans atteintes du TT,
et 1.276 personnes de 15 ans et plus aveugles du fait du trachome, soit une
prévalence globale de la cécité de 0,02 %.
Cette forte prévalence du trachome actif a
donc conduit le Cameroun et ses partenaires internationaux (USAID/ITI/HKI,
Pfizer, Sightsavers, UNICEF) à mettre en oeuvre des traitements et des
activités de prévention dans tous les DS endémiques, ceci
par la mise en oeuvre en 2012 du Plan National d'Élimination du Trachome
(PNET).
La vision globale du PNET est de faire du Cameroun un
pays où le trachome n'est plus une cause de cécité, et
où les couches sociales les plus vulnérables vivent dans un
environnement sain, aspirant ainsi à la prospérité. Le but
du PNET était d'éliminer le trachome comme cause de
cécité dans les régions endémiques du Cameroun
d'ici à l'an 2020. Les objectifs spécifiques du PNET était
de deux ordres : réduire la prévalence du TF à moins de
5%, et réduire la prévalence du TT à moins de 0,2%, ceci
dans tous les DS endémiques.
En rapport à l'atteinte des objectifs du PNET,
un ensemble d'actions a été mis en oeuvre notamment :
· l'organisation dès 2011 des traitements
de masse à l'azythromicine dans les DS endémiques ;
· la mise en oeuvre dès 2014 des
enquêtes d'impact dans les DS ayant été traités
;
· l'arrêt en 2016 des activités de
distribution de masse des médicaments à la suite de l'atteinte
des seuils d'élimination lors des enquêtes d'impact ;
· le démarrage des activités de
chirurgie du TT dans les 2 régions endémiques ;
· le lancement des activités de promotion
de l'hygiène individuelle et de l'environnement à travers le
nettoyage du visage et l'assainissement du milieu.
Parallèlement à ces activités,
les 5 DS présentant des discordances lors des enquêtes de base (TF
< 5%, TT > 0,2%) ont bénéficié à partir de
2016 d'une enquête pour la recherche spécifique des cas de TT
(enquête TT only). Il s'agissait des DS suivants : Touboro, Mada,
Meiganga, Garoua 1 et Karhay. Les dernières enquêtes TT only ont
eu lieu dans 2 DS (Garoua 1 et Karhay) au courant de l'année
2019.
Dans la région de l'Est, le Cameroun est
frontalier avec la RCA, où en 2018 des DS étaient
endémiques au trachome. Le trachome étant une maladie
contagieuse, et du fait de la porosité de la frontière dans cette
partie du pays, une enquête sur le trachome a été mise en
oeuvre dans la région de l'Est Cameroun en décembre 2018.
Celle-ci a concerné les 6 DS de cette région qui sont frontaliers
avec ceux de la RCA, ainsi que les camps de réfugiés qui s'y
trouvaient.
Les résultats de cette enquête
rapportaient une prévalence du TF chez les enfants de 1-9
inférieure au seuil recommandé par l'OMS (5%) pour la
planification des traitements de masse. De même, la prévalence du
TT chez les adultes de 15 ans et plus obtenue dans 3 unités
d'évaluation était inférieure au seuil de 0.2%
recommandé pour l'organisation des campagnes de chirurgie de masse. Par
ailleurs, la prévalence de TT de 0.28% obtenue dans les camps
des
Une réflexion est en cours sur la
définition d'un plan d'action afin que les cas résiduels (ou
incidents) de TT soient pris en charge par le système de santé.
Ceci passe par le diagnostic des
réfugiés de Gadobadzere, Lolo, Mbile,
Timangolo et N'Garissongo impliquait l'organisation d'une campagne de prise en
charge chirurgicale des cas de TT dans ces camps. Les données d'une
unité d'évaluation n'avaient pas été
approuvées par Tropical Data du fait du remplacement inadéquat de
8 grappes dans cette unité d'évaluation pour des raisons
d'insécurité et d'inaccessibilité. Une enquête
complémentaire a été organisée pour
déterminer la prévalence dans les 8 grappes qui avaient
été remplacées.
Le Cameroun ayant atteint les critères
d'arrêt de traitement de masse et d'élimination de la maladie, des
activités de surveillance de la maladie ont été mises en
oeuvre. C'est ainsi qu'au courant de l'année 2019 une enquête de
surveillance du trachome s'est déroulée dans les 21 DS
précédemment endémiques. Il résultait de cette
enquête que 2 DS étaient encore endémiques dans la
région de l'Extrême-Nord. Il s'agissait de Goulfey et Makari, avec
des prévalences respectives de TF à 6,91% et 10,0%. Des
activités de distribution de masse d'antibiotiques se sont
déroulées dans ces 2 DS au courant des années 2020 et 2021
; celles ci devraient aboutir à l'atteinte des seuils
d'élimination dans ces 2 DS.
La partie méridionale du Cameroun compte 7
régions. La pluviométrie y est forte, et l'hygiène
individuelle et collective semble davantage maitrisée, par rapport aux 3
régions septentrionales. Les informations cliniques disponibles ne
rapportent pas des cas de trachome. Pour pouvoir affirmer l'élimination
du trachome dans tout le pays, il faudra démontrer la non
résurgence de la maladie dans les DS précédemment
endémiques, et la non existence de la maladie dans les 7 autres
régions. Pour ce faire, une enquête documentaire devra être
organisée dans ces régions. Celle-ci va consister en une revue
des registres de consultations et de soins dans les centres de soins
oculaires.
Dans le cadre de la définition d'une
stratégie de transition post élimination, un groupe de travail
sur le trachome, constitué des experts de la lutte contre le trachome a
été mis sur pied. Les objectifs de ce groupe de travail sont en
rapport avec le suivi et l'évaluation des différentes
activités de lutte contre le trachome, la proposition d'une approche
pour la mobilisation du financement des activités, et
la rédaction du document narratif sur les progrès accomplis par
le pays vers l'atteinte des cibles d'élimination de la
maladie.
cas, l'existence des structures sanitaires et des
intrants pour la prise en charge des cas, et le maintien d'une ressource
humaine compétente dans les DS précédemment
endémiques.
Rendu à ce stade, les challenges majeurs pour
l'atteinte de l'objectif d'élimination du trachome comme problème
de santé publique au Cameroun sont les suivants :
- Chirurgie du TT : arriérés des cas,
prise en charge des cas, TT post opératoires, cas incidents, maintien
d'une ressource humaine compétente.
- DS Kolofata : cartographie,
épidémiologie (incidence, prévalence) de la maladie,
insécurité, risques humains, déplacement des
populations.
- Enquête documentaire dans les 7 régions
méridionales.
Au Cameroun, la lutte contre le trachome et les autres
causes de cécité est assurée par le Ministère de la
Santé Publique à travers le Programme National de Lutte contre la
Cécité.
La cécité due au trachome est
évitable, mais une fois installée elle devient définitive.
La cécité est une déficience visuelle totale. Le terme
cécité vient du latin caecitas « perte de la vue ». On
qualifie une personne atteinte de cécité de personne
aveugle.
Le Programme National de Lutte contre la
Cécité (PNLCé)
Le PNLCé a été créé
le 08 janvier 2003 par décision du Ministre de la Santé Publique.
Il s'agit d'un programme prioritaire du Ministère de la Santé
Publique visant à réduire la prévalence de la
cécité et de la malvoyance. La gestion du PNLCé est
assurée au niveau national par le Comité National de Lutte contre
la Cécité (CNLC) et le Groupe Technique Central
Cécité (GTC-C), et au niveau régional par les
unités décentralisées.
Le CNLC a pour mission la définition des
grandes orientations et des objectifs généraux de la lutte contre
la cécité, ainsi que la mobilisation des ressources
nécessaires. À ce titre le CNLC est notamment chargé de
:
- élaborer et mettre en oeuvre la politique
nationale de lutte contre la cécité ;
- apprécier la cohérence de l'ensemble des
interventions des différents partenaires ;
- adopter les plans d'action annuels de lutte contre la
cécité et les budgets y afférents ;
- mobiliser les ressources nécessaires aux
activités de lutte contre la cécité ;
- coordonner et surveiller la mise en oeuvre des
différentes activités du PNLCé.
Les frais de fonctionnement du CNLC et de ses organes
sont supportés par le budget du Ministère de la Santé
Publique et éventuellement les contributions des partenaires. Le
coordonnateur du GTC-C assure le secrétariat du CNLC. Les
procédures internes de fonctionnement du CNLC sont fixées par
décision du Ministre de la Santé Publique.
Le GTC-C est l'organe exécutif du CNLC. A ce titre
il assure :
- la coordination et la gestion du PNLCé sur le
territoire national en collaboration avec
les administrations, les communautés, les
partenaires nationaux et internationaux ;
- la collecte, l'exploitation et la diffusion des
informations sur la cécité ;
- la préparation du plan d'action annuel
budgétisé des activités de lutte contre la
cécité ;
- la préparation des réunions, la
rédaction et la diffusion des procès verbaux ;
- la planification et la mise en oeuvre des
stratégies et activités arrêtées par le CNLC
;
- la gestion des fonds mis à la disposition du
PNLCé par l'État, les partenaires
nationaux et internationaux ;
- la coordination des activités de recherche et de
formation.
Il est en outre chargé :
- d'assurer le suivi-évaluation de la mise en
oeuvre du PNLCé ;
- d'assurer la gestion du personnel mis à la
disposition du Programme ; - de tenir la comptabilité
de ses opérations ;
- de rendre semestriellement compte au CNLC de toutes ses
activités ; - d'instruire tout dossier confié
à lui par le CNLC.
Le GTC-C est dirigé par un Coordonnateur National
assisté de deux Coordonnateurs Adjoints.
L'organisation et le fonctionnement du GTC-C sont
fixés par un texte particulier du Ministre de la Santé
Publique.
|