II.2.REVUE DES TRAVAUX THEORIQUES
Les marchés boursiers deviennent de plus en plus
des acteurs importants sur la scène économique. La crise
financière récente des Subprimes en est la preuve du rôle
joué par le marché financier et son interaction avec
l'économie réelle. Malgré ces faits, à travers
l'histoire, les économistes ne sont pas toujours d'accord sur
cette interaction. Parfois, les opinions sont diamétralement
opposées. Nous exposons, au niveau de cette section, les principaux
travaux théoriques qui se sont intéressés à
l'analyse de la façon avec laquelle l'exercice de ses fonctions par le
marché financier affecte le rythme de croissance économique. Nous
montrons, par ailleurs, l'existence d'une controverse théorique quant au
sens de la relation entre l'expansion du marché boursier et la
croissance économique. Nous étudions, au final, les arguments
théoriques qui plaident en faveur de la présence d'effets de
seuil dans le lien entre le développement financier et le
développement économique.
II.2.1.Des fonctions du marché boursier à la
croissance économique
II.2.1.1.Le modèle
de croissance endogène de Pagano (1993)
Considérer que la croissance économique peut
être fonction du développement financier implique naturellement de
reconnaître son caractère endogène. Car on sait que dans
les modèles « à la Solow », le taux de croissance
à long terme de l'économie ne dépend que du progrès
technique et de l'évolution de la population active, l'un et l'autre
donnés de façon exogène, c'est-à-dire
étrangers au fonctionnement de l'économie (à ses
institutions, à ses conditions de financement...). Pour formaliser de
façon aussi simple que possible les canaux par lesquels la finance peut
interagir avec la croissance, il faut donc écrire un modèle de
croissance endogène. On le fera en s'appuyant sur une contribution
déjà ancienne de Pagano (1993), qui se résume à la
spécification des relations suivantes :
- tout d'abord une fonction de production de type :
Yt = AKt
Cette fonction suppose que le niveau de production
Yt est proportionnel au stock de capital Kt, A
étant un paramètre représentant un facteur de
productivité. On justifie traditionnellement une telle fonction par
l'existence d'externalités (apprentissage, rôle du capital humain
et d'autres formes de capital complémentaires au capital physique,
rôle des institutions, des politiques publiques, du secteur financier...)
qui permettent d'expliquer la présence au niveau macroéconomique
de rendements d'échelle constants.
- On écrit ensuite une équation comptable de
définition de l'investissement I, qui s'interprète aussi comme
décrivant la dynamique de l'accumulation du capital :
It =Kt+1-Kt
(I-ä)
ä représentant le taux
d'amortissement du capital ;
Ø Enfin, on pose l'égalité entre
l'investissement et l'épargne nette des coûts de fonctionnement du
système financier : It = ø St
(1 - ø) représentant le taux de
prélèvement de ces coûts sur l'épargne et pouvant
donc être interprété comme une mesure de l'inefficience du
système financier. On peut alors écrire l'équation du taux
de croissance :
Ce qui revient à dire que le taux de croissance de
l'économie est fonction de trois variables qui traduisent les incidences
exercées par le système financier sur le secteur réel. Le
système financier influe ici de trois façons sur la croissance du
capital et de la production :
ü par sa capacité à sélectionner les
projets d'investissement, il agit sur la productivité du capital ;
ü par le niveau plus ou moins élevé de ses
coûts de fonctionnement, il conditionne le niveau d'épargne mis
à disposition de l'investissement ;
ü par sa capacité à offrir des placements
attractifs (c'est-à-dire bien rémunérés,
présentant une bonne diversification des risques...), il peut induire un
niveau d'épargne plus élevé.
La modification de chacun des paramètres
identifiés influe sur le taux d'accumulation du capital et, en
conséquence, sur le taux de croissance. Une élévation de
la productivité du capital accroît le niveau de revenu, donc de
l'épargne et par conséquent de l'investissement ; tandis qu'une
élévation du taux d'épargne, ou une amélioration de
l'efficience opérationnelle du système financier, augmente le
taux de croissance de l'investissement et donc de la production.
Cela étant, il reste à préciser ce qui
sous-tend ces enchaînements et cela renvoie à la qualité
des services financiers fournis aux utilisateurs. Levine [2005] montre qu'ils
mettent essentiellement en jeu le traitement de l'information et la baisse des
coûts de transaction et identifie cinq fonctions majeures des
systèmes financiers :
Ø La production d'informations ex ante sur les entreprises
cotées et l'allocation de l'épargne
Ø Le suivi des investissements en exécution et
contrôle de la gestion des entreprises
Financées
Ø L'amélioration de la gestion du risque
Ø La facilitation des échanges de biens et de
services
Ø La mobilisation et la collecte de l'épargne
Il appelle « développement financier » le
processus par lequel les instruments, les marchés financiers et les
intermédiaires financiers améliorent le traitement de
l'information, la mise en oeuvre des contrats et la réalisation des
transactions, permettant ainsi au système financier de mieux exercer les
fonctions définies ci-dessus.
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