1.5. L'origine de l'eutrophisation
L'eutrophisation est un phénomène très
lent à l'échelle géologique car il dépend de
facteurs physiques. Toutefois, l'intervention de l'homme sur les bassins
versants et au niveau des lagunes concourt à accélérer ce
processus. La pratique agricole repose sur l'utilisation d'engrais, de
pesticides et de traitements phytosanitaires. Or les engrais sont
constitués de nitrates, de potassium et d'ammonium, ainsi que de
phosphates de potassium (Lacaze, 1996). Ils apportent des
éléments de base et des oligo-éléments. Ces
épandages sont utilisés car ils permettent d'obtenir de meilleurs
rendements. En contre partie, ils sont responsables d'une pollution des sols,
des nappes phréatiques, des cours d'eau et par conséquent de la
lagune. Il faut savoir que lors des épandages, 80 à 90 % de ce
qui a été épandu est perdu et se retrouve mis en
circulation par l'intermédiaire du cycle de l'eau (Carluer et al,
1996). Les eaux de ruissellement lessivent les terres agricoles qui ont
reçu des épandages d'engrais et de traitement phytosanitaire en
trop grande quantité. Composées de matières azotées
et phosphorées, ces eaux issues du bassin-versant vont venir enrichir le
milieu aquatique (figure 3). L'utilisation de manière plus ou moins
importante d'engrais conduit donc à l'eutrophisation de la lagune.
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Figure 3: Schéma représentant le rôle
des épandages pour l'eutrophisation
1.6. Les degrés de trophie
Ces définitions mettent en évidence que
l'eutrophisation est une évolution d'un état du milieu vers un
autre. C'est pour cela qu'il est intégré au sein d'une
échelle caractérisée par divers degrés de trophie.
Ces degrés de trophie symbolisent le niveau de richesse des
éléments qui limitent la production primaire (La Jeunesse, 2001).
On distingue quatre degrés de trophie:
- L'oligotrophie : le milieu est pauvre en matières
nutritives.
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Evaluation de la chaîne trophique d'une aire marine
protégée en relation avec sa physico-chimie : cas
de Gbèzoumè dans la commune de Ouidah.
- La mésotrophie : c'est un stade intermédiaire
où la teneur en matières nutritives est moyenne. Les organismes
aquatiques sont plus nombreux.
- L'eutrophie : c'est le processus qui nous intéresse
et qui qualifie un milieu riche en matières nutritives.
- La dystrophie : elle fait suite à l'eutrophisation,
le milieu est alors excessivement enrichi en matières nutritives et les
teneurs en oxygène dissous dans l'eau sont très basses.
Le passage d'un milieu oligotrophe à eutrophe
s'accompagne de modifications. Les plans d'eau oligotrophes correspondent
à un milieu jeune où les nutriments sont peu présents; les
eaux sont claires et bien oxygénées. En comparaison, les plans
d'eau eutrophes sont caractérisés par des teneurs en nutriments
abondants, des eaux plus turbides, une prolifération de la
végétation et une domination de matières algales qui
entraînent une consommation d'oxygène (Trinquier, 2009).
Cependant, selon Galvez-Cloutier et al (2002) et
Ryding et Rast, (1994), les plans d'eau peuvent être classés en
cinq degrés de trophie. En effet,on distingue les plans d'eau
«oligotrophes» (peu nourris) et « eutrophes » (bien
nourris). Le terme «mésotrophe » est fréquemment
utilisé pour décrire l'état intermédiaire entre les
deux catégories précédentes. Le tableau 1 donne une
description des différents états trophiques d'un plan d'eau.
Cette description n'a pas une signification précise, mais elle est
couramment employée pour désigner le potentiel trophique d'un
plan d'eau. Des efforts ont été réalisés pour
définir ces termes de manière précise en fixant des seuils
numériques pour certains paramètres caractéristiques de la
qualité d'eau : la concentration en phosphore, en chlorophylle-a et la
transparence au disque de Secchi. La quantification de ces paramètres
permet d'établir la qualité d'une eau.
Tableau 1: Valeurs des seuils de l'état trophique
des plans d'eau.
Degré de trophie
|
P total (ug/L)
|
Chlorophylle a moyenne (ug/L
|
Chlorophylle a maximal (ug/L)
|
Transparence (m)
|
Transparence (m)
|
Ultra-oligotrophe
|
< 4
|
< 1
|
< 2,5
|
>12
|
>6
|
Oligotrophe
|
< 10
|
< 2,5
|
2,5 à 8
|
>6
|
>3
|
Mésotrophe
|
10 à 45
|
2,5 à 8
|
8 à 25
|
6 à 3
|
3 à 1,5
|
Eutrophe
|
35 à 100
|
8 à 25
|
25 à 75
|
3 à 1,5
|
1,5 à 0,7
|
Hypereutrophe
|
>100
|
>25
|
>75
|
<1,5
|
<0,7
|
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Evaluation de la chaîne trophique d'une aire marine
protégée en relation avec sa physico-chimie : cas
de Gbèzoumè dans la commune de Ouidah.
Source : Ryding et Rast, 1994.
Selon Ramade (1981), les principales phases de
l'eutrophisation des eaux peuvent être schématisées comme
suit : la pollution croissante, la prolifération des algues, la
décomposition anaérobie, et la dégradation extrême
du milieu avec une simplification des
espèces présentes. On remarque que la
première étape n'est pas forcément négative pour
le milieu, car celui-ci s'enrichit au niveau de chaque maillon de la
chaîne trophique. La seconde étape, par contre, voit une grande
partie de la faune disparaître au profit d'organismes dits
inférieurs.
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Figure 4: Schématisation des 4 étapes de
manifestation de l'eutrophisation
Trinquier, lors de ces recherches sur : «Le risque
d'eutrophisation des lagunes méditerranéennes : Le cas de la
lagune de Thau (Hérault)» en 2009 avait utilisé des grilles
de données pour détermination de l'état trophique.
Après analyse des données de ces différentes grilles, ses
résultats sont synthétisés dans une autre grille globale.
Cette planche de résultats témoigne de l'état
général de l'écosystème lagunaire par rapport
à l'eutrophisation. Cette fiche synthétique de résultats
est essentielle car elle fait office de bilan de l'état de la lagune de
Thau et elle est restituée lors d'une concertation avec les acteurs
institutionnels locaux. Elle peut être à l'origine d'une prise de
conscience et à l'initiative de mesures pour améliorer
15
Evaluation de la chaîne trophique d'une aire marine
protégée en relation avec sa physico-chimie : cas
de Gbèzoumè dans la commune de Ouidah.
la qualité de l'eau. Parmi ces grilles, celles qui
concernent notre étude sont présentées ci-dessous.
Tableau 2: Grille de diagnostic du phytoplancton (Source
: Ifremer, 2000).
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Tableau 3: Grille de lecture de la colonne d'eau (Source
: Ifremer, 2000).
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