1.3.3.1. Analyse des entretiens
D'une manière générale, l'analyse de nos
entretiens apparaît à travers les exemples que nous avons eu
à sélectionner tout au long de cette analyse pour montrer les
différents arguments employés par les acteurs. Les
énoncés pouvaient être affectés, de façon
relativement univoque, dans les différentes catégories, à
savoir :
Énoncés
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Interprétations
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Les limites objectives de l'évaluation consistent dans
le fait que vos évaluateurs sont en Europe,
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La plupart des porteurs de projet se posent la question de la
manière dont
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notamment en Belgique, siège de l'Union
européenne, loin des réalités du terrain
de
l'activité et le plus souvent en ignorant
royalement les réalités du terrain. À
leur décharge, il faut le souligner, ils sont neutres et justes.
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les évaluateurs évaluent les propositions
soumissionnées, certains qu'ils sont neutres, mais le
doute subsiste en eux.
L'intérêt et l'importance de pouvoir
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L'évaluation est une nécessité car elle
permet de
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évaluer, question de mesurer les
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savoir si on atteint nos objectifs de départ, la
pertinence du projet.
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résultats de manière objective.
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Évaluer un projet est une nécessité car
elle nous permettra de savoir si nous sommes sur la bonne voie, si nos
objectifs sont atteints, si les résultats obtenus sont conformes
à notre vision, notre
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Implication par rapport à l'expérience
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mission, nos objectifs.
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en général.
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Les projets la plupart du temps existent déjà,
parfois bien rédigés, parfois schématisés...
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Oui, j'ai soumissionné plusieurs fois au
financement auprès de l'Union européenne en
passant par le programme ACP dans le cadre des
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Le porteur de projet, dans son
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anciens FED. J'ai été retoqué plus d'une
fois.
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interprétation personnelle, se dit être à
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Les raisons ont été toujours l'inadéquation
du
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la hauteur de la tâche, met en cause
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cadre logique, les insuffisances dans le bilan, l'impertinence
dans l'impact du projet. Je me
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parfois, ou en doute, le travail des évaluateurs du
programme. Du fait qu'il
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suis résigné depuis plusieurs années parce
que
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se défend de bien faire son travail, de
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toutes mes activités sont consacrées à
l'international autour des évènements culturels
d'autres partenaires qui vivent la croix et la
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respecter le cadre logique, du coup, c'est de la
résignation.
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bannière pour faire aboutir les convergences de
critère après avoir bénéficié des
financements.
Une partie des interprétations se fonde sur des
éléments pratiques, au départ déterminants,
implicites et plus directs dans la mesure où ils ressortent autant de la
façon de s'exprimer que des contenus.
Énoncés
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Façon de produire le sens
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Sens produit, interprétation en termes
d'implication
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Exemple de résignation : "... Je
me suis résigné depuis plusieurs
années..."
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La résignation pousse les
acteurs culturels à l'abandon, puis parfois ils changent
de cap ou d'action.
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Le discours convoqué est
interprétable comme une norme par rapport à
laquelle se positionne l'acteur.
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Exemple : "Jamais je n'ai
renoncé à mes projets..."
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Prise en charge d'un énoncé pragmatique et
déterminant.
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Illustration d'un
positionnement contradictoire par rapport au premier. Doute +
engagement.
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Une interprétation des données produit du
contenu qui, la plupart du temps, regorge des éléments de
recherche collectés en amont. L'analyse des données a pour
objectif d'établir des faits, de décortiquer des attitudes et de
saisir les réflexions des acteurs prenant part à l'exercice. En
décryptant ou en interprétant les contenus des entretiens,
l'enquêteur se retrouve face à des discours qu'il doit analyser en
tenant compte de ses attentes et de son objectif de recherche. Certain que tout
n'est pas utilisable ni analysable, l'enquêteur prend de la hauteur dans
son analyse et produit un raisonnement selon les données
collectées.
À l'image des quelques énoncés dans les
tableaux ci-dessus, nous avons des perceptions directement liées au sens
produit dans le cadre de nos entretiens. Quand tel porteur de projet pense
avoir mieux réalisé son travail, l'autre pense autrement. Le
raisonnement au niveau de la compréhension du sens de
l'évaluation est partagé par tous, mais à chacun sa
manière de se l'approprier. Les implications ne sont pas les mêmes
en
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actions et en développement de projets. Les ressentis
ne sont pas les mêmes dans l'art de la conception et de la soumission des
propositions.
Ceci ne signifie pas pour autant que nous puissions
interpréter la situation selon notre bon vouloir. L'un des reproches
adressés à l'interprétation qualitative est qu'elle ne
suit pas de procédures constantes, contrairement à l'approche
quantitative qui applique les mêmes formules à l'ensemble des
données. De plus, comme nous l'avons fait valoir dans le cadre de la
partie épistémologique, les faits observés peuvent
être réfutés de la même façon que les faits
symboliques invraisemblables peuvent être rejetés.
Nous pensons ainsi que les interprétations
conceptuelles suivant le cadre logique du programme ne diffèrent pas des
attentes des porteurs de projet.
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