1.3.2.5.2. Les critères d'évaluation
Isabelle Gernet et Christophe Dejours (2009), dans une
communication, expliquent qu'évaluer renvoie à la mesure d'un
objet ou d'une chose produite, mais aussi à des jugements portant sur le
résultat d'une action ou d'un travail. Cette réflexion va de pair
avec notre raisonnement qui consiste à identifier les indicateurs et les
valeurs indicatives d'un projet pour qu'au bout de la chaîne de la
construction discursive, le soumissionnaire du projet puisse mesurer l'objet de
son action et porter un jugement sur les résultats obtenus, afin de
modifier ou d'harmoniser les objectifs fixés en amont de la conception.
Les critères d'évaluation donnés par l'Union
européenne par l'intermédiaire du programme ACP Cultures+ dans la
soumission des projets comprennent des critères de sélection et
d'attribution figurant dans la grille d'évaluation que nous
étudierons un peu plus loin. Sans critère d'évaluation, il
ne peut y avoir de mesure ou de jugement dans le choix des indicateurs. Comme
le déclare G. Scallon (1988, p. 187), le critère
d'évaluation est un point de vue à partir duquel une oeuvre, un
produit ou une performance sont évalués. Pour juger de la
qualité d'une oeuvre, d'un produit ou de sa performance, le porteur de
projet ou le soumissionnaire doit se prononcer sur le choix des indicateurs et
des objectifs du projet en cours d'élaboration. L'objet observé
et évalué doit déterminer sa faisabilité et sa
réalisation.
1.3.2.5.3. Les critères de sélection
Plusieurs étapes sont définies dans un appel
à propositions où le porteur de projet ou le soumissionnaire doit
respecter la démarche et répondre aux normes établies pour
voir la recevabilité de sa proposition. Aux critères
d'éligibilité et aux critères d'évaluation
s'ajoutent les critères de sélection et d'attribution. C'est une
démarche évaluative caractérisée par la recherche
d'une synergie entre une exigence de qualité scientifique et des
finalités de régulation (Leca, 1994). Les critères de
sélection permettent d'évaluer d'une part la capacité
financière du demandeur, et de l'autre sa capacité
opérationnelle à mettre en oeuvre l'action proposée, et
celle de ses entités affiliées (Idem, 2012),
dans le cadre de la proposition d'un projet ou d'une action. En effet,
soumettre un projet, c'est justifier des capacités possibles et des
moyens nécessaires pour mener à bien le projet, comme cité
en amont. Un porteur de projet doit prouver sa bonne foi dans la conduite d'un
projet, un soutien financier externe
75
suffisant par rapport à l'aide sollicitée
auprès de l'Union européenne par l'intermédiaire du
programme ACP Cultures+ afin de démontrer la faisabilité et la
réalisation de son action.
Cette vérification est effectuée sur la base des
pièces justificatives requises. « Ces dernières peuvent
inclure un rapport d'audit du demandeur, le compte de pertes et profits et le
bilan comptable pour la dernière année financière pour
laquelle les comptes sont clos. En cas de doute sur la capacité
financière du demandeur, le comité d'évaluation peut
demander des pièces complémentaires (Idem, 2012) ».
Parmi les critères de sélection proposés dans le PRAG,
« le demandeur doit disposer de sources de financement stables et
suffisantes pour maintenir son activité pendant la période de
mise en oeuvre de l'action et, le cas échéant, pour participer
à son financement. De même, les entités affiliées
à la proposition du demandeur doivent disposer ensemble de
l'expérience, des compétences et des qualifications
professionnelles requises pour mener à bien l'action proposée
(Idem, 2012». Jean Leca (1994) qualifie ce genre de
critère de « norme » puisque c'est une excellence à
viser quand on doit juger la qualité d'une évaluation.
- Les critères d'attribution
Attribuer une subvention pour l'administration contractante
est la démonstration du succès d'un projet au niveau de ses
objectifs, ses résultats, sa finalité, sa performance, son
efficacité et sa capacité à mobiliser des moyens
supplémentaires pour la réussite de l'action à mener.
« Il existe des règles strictes en ce qui concerne l'attribution de
subventions. L'attribution de subventions est sujette aux principes de
programmation, transparence et égalité de traitement. Les
subventions ne peuvent être cumulées ou attribuées
rétroactivement et doivent en règle générale
être cofinancées. Le montant éligible au financement, tel
que spécifié au contrat de subvention, ne peut pas être
dépassé (Idem, 2012)».
Dans le cadre de ce programme, les critères
d'attribution permettent d'évaluer la qualité des propositions
soumises au regard des objectifs et des priorités fixés, et
d'octroyer des subventions aux actions qui optimisent l'efficacité
globale de l'appel à propositions. Une évaluation de la
fiabilité reposant sur le « digne de confiance (Idem,
2012)», explique Jean Leca (1994). Le porteur de projet ou le
soumissionnaire a en face de lui, dans la conception de son projet, des enjeux
déterminants dans le respect des normes et des règles d'une
soumission de projet suffisante pour se voir attribuer une subvention. Aucun
détail ne doit être négligé dans
l'élaboration préalable de son projet, car « les
critères d'attribution concernent,
76
notamment, la pertinence de l'action et sa cohérence
avec les objectifs du programme dans le cadre duquel l'appel à
propositions est financé, la qualité, l'impact attendu et la
durabilité de l'action, ainsi que son efficacité par rapport au
coût (Idem, 2012)». Durant l'évaluation
préalable dans l'élaboration des objectifs, des résultats
et des indicateurs du projet, le porteur de projet se doit d'être
entouré de professionnels ou d'experts susceptibles de l'accompagner
dans l'écriture du projet, dans la vérification des postulats et
des observables de terrain. Objectif rime avec résultat, qualité
avec faisabilité et performance avec réalisation.
Cette démarche fait appel à un bilan
informationnel et communicationnel, un bilan sur la technicité et les
compétences du porteur de projet, un bilan sur les performances
personnelles et intellectuelles dans l'acquisition de savoir-faire ou de
connaissances (Screven, 1990, p. 38), résultat d'une évaluation
préalable respectant les critères établis. Joëlle Le
Marec (1996) considère l'objectif de l'évaluation
préalable comme un instrument et un indicateur permettant
d'éviter les erreurs. Les critères d'attribution «
permettent de retenir les propositions qui assurent à l'administration
contractante le respect de ses objectifs et priorités et garantissent la
visibilité du financement de l'Union Européenne (Idem,
2012) ».
1.4. Les grilles d'évaluation
L'institutionnalisation des normes et des règles par
les organismes qui octroient des subventions laisse à comprendre,
l'importance d'un contrôle strict du financement à attribuer
à un porteur de projet. Une norme appelle le respect des intentions et
des conditions bien qu'elle ne soit ni asservissante ni libératrice
(Hadji, 1997), mais une réalité spécifique pour des
résultats sûrs. L'institutionnalisation d'outils de contrôle
ou de vérification dans le cadre d'une action qui nécessite une
aide financière publique l'exigence de transparence dans la gestion de
l'action ou du projet est au centre des obligations d'une évaluation des
résultats. Pour obtenir la subvention d'un projet ou d'une action dans
le cadre du programme ACP Cultures+, l'obligation de respecter la
réglementation établie et fixée par l'administration
contractante est au coeur de la décision de l'octroi du financement aux
soumissionnaires.
Savoir évaluer (Cf. 1.2. du chapitre premier de la
première partie) son projet ou son action préalablement
à sa soumission pour une subvention va avoir des conséquences
positives sur la réussite d'une demande concernant
l'éligibilité de cette action. Une évaluation
répond à des normes et des règles, sans penser comme
Michel Vial (2001) qu'une bonne évaluation est une chimère,
exceptée dans le cas du programme ACP Cultures+. Ainsi, pour
77
éviter de l'ambigüité et des doutes
auprès des porteurs de projet, l'administration contractante a mis en
place une grille d'évaluation de toutes les propositions
soumissionnées. Ses critères cadrent les propositions, sachant
que le contenu d'une évaluation doit être précisé
(De Perrot, Wodiunig, 2008, p.16) comme l'indiquent les deux auteurs. Si les
porteurs de projet ou les soumissionnaires doivent rendre compte des
subventions obtenues dans le développement de leurs projets ou actions,
l'administration contractante a aussi mandat de rendre compte de l'argent
public aux contribuables. Ainsi, tout le monde finit par rendre des comptes
à quelqu'un (Martucceli, 2010, p. 31) quand il s'agit d'une action
nécessitant un contrôle et une vérification. L'analyse de
la grille d'évaluation représente pour l'évaluateur
l'outil pour évaluer la proposition du porteur de projet. Les porteurs
de projet saisissent-ils le discours évaluatif et le cadre
théorique d'éligibilité de l'administration contractante ?
La grille d'évaluation suffit-elle à évaluer une
proposition de projet ?
1.4.1. Évaluation et sélection des
demandes
Une proposition de projet soumise à évaluation
dans le cadre du dispositif ACP Cultures+ doit respecter la
réglementation fixée par l'administration contractante, en charge
de l'octroi de la subvention. Évaluer, c'est juger les capacités
pour une action ou pour un projet à respecter les objectifs fixés
en amont dans l'obtention des résultats attendus. Ainsi, « les
demandes reçues dans le cadre du programme sont examinées et
évaluées par l'administration contractante avec l'aide, le cas
échéant, d'experts extérieurs (assesseurs) (Idem,
2012) » et confirment la transparence dans l'administration des
fonds publics et dans la sélection des propositions à
subventionner.
La sélection et l'évaluation des demandes
suivent un processus de programmation qui permet à l'administration
contractante d'avancer dans le choix des propositions, dans le respect des
étapes de sélection. Afin de mieux traiter toutes les demandes et
propositions, la sélection se déroule en trois étapes
(Idem, 2012, p. 18-20, p. 28) , à savoir : l'ouverture, la
vérification administrative et l'évaluation des notes succinctes
de présentation (1re étape), l'évaluation des
demandes complètes (2e étape) et la
vérification de l'éligibilité des demandeurs et de leurs
partenaires (3e étape), une manière de contrôler
le travail professionnel des porteurs de projet dans la gestion de leurs
soumissions. Pour citer Bouquin et Pesqueux (1999), le contrôleur de
gestion s'assurera de la fiabilité des informations et du respect des
échéances afin de mieux cadrer son évaluation.
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