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La coopération policière dans la zone CEMAC.

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par Platon Papin DONGMO TIODON
Université de Dschang- CAMEROUN - Master 2 en Droit 2013
  

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CHAPITRE II : LES LACUNES DE LA POLITIQUE GENERALE DE COOPERATION POLICIERE DANS LA CEMAC ET LES SOLUTIONS ENVISAGEABLES

Le constat est clair vu de près : La politique générale de coopération policière au sein de la CEMAC est opaque et timide (section 1). Des perspectives et solutions existent toutefois en vue de son amélioration (section 2).

Section 1 : L'opacité et le manque d'anticipation de la politique générale de coopération policière dans la CEMAC

Examinons dans un premier temps l'opacité et la timidité des textes (paragraphe 1), et dans un second le grand manque d'anticipation (paragraphe 2).

Paragraphe 1 : L'opacité et la timidité des textes de coopération policière dans la CEMAC

Dans ce cadre, il sera question de l'interprétation et l'application difficultueuse de certains textes (A), et du laconisme coupable des textes (B).

A. L'interprétation et l'application difficultueuse de certains textes: Le problème de la remise des suspects de police à police

Cette procédure a été prévue par l'accord de coopération en matière de police criminelle entre les Etats de l'Afrique Centrale et la convention relative à la lutte contre le terrorisme en Afrique Centrale. Bien qu'il s'agisse là aussi d'une innovation et que certains280(*)y voient même un moyen de simplification de la procédure pour plus d'efficacité, au contraire et avec d'autres auteurs281(*), nous y voyons une procédure qui peut être dangereuse pour le respect des droits et libertés de l'Homme, parce que source potentielle d'arbitraire.

En effet, l'article 12 de l'accord de coopération en matière de police criminelle entre les Etats de l'Afrique centrale dispose: «Les personnes appréhendées dans le cadre d'une mission d'enquête, peuvent, au terme de celle-ci être remises aux fonctionnaires de police de l'Etat requérant, s'il s'agit des nationaux, avec l'accord des autorités judiciaires compétentes de l'Etat requis.

Les autres personnes, sur la base de la même procédure, doivent être présentées aux parquets compétents de l'Etat requis ».

L'article 4 alinéa 5 de la convention relative à la lutte contre le terrorisme en Afrique centrale prévoit quant à lui de «remettre de police à police, sous réserve de l'accord des autorités judiciaires compétentes, les personnes arrêtées pour terrorisme ainsi que les objets (armes, munitions, explosifs, véhicules, les dossiers ou documents de procédure, d'actes ou décisions judiciaires) saisis dans le cadre d'une telle procédure, conformément aux dispositions pertinentes de l'accord de coopération en matière de police criminelle entre les Etats de l'Afrique centrale, ainsi qu'aux dispositions de l'accord d'extradition entre les Etats membres de la CEMAC et de l'accord de coopération judiciaire entre les Etats membres de la CEMAC ».

Comme on peut le constater, la différence entre ces deux textes est que le premier (accord de coopération ...) ne prévoit la remise de police à police que lorsque le suspect est un national de l'Etat requérant, quelle que soit l'infraction objet des poursuites ; tandis que le second (convention contre le terrorisme) prévoit la remise de police à police de tous les suspects qu'elle qu'en soit leur nationalité aux autorités de l'Etat requérant, dans le cadre de la lutte contre le terrorisme. Le point commun entre les deux est qu'ils prévoient tous la remise des suspects de police à police pendant la phase d'enquête et sous réserve de l'accord des autorités judiciaires compétentes de l'Etat requis. C'est là que se situe en fait le problème, car même si on a mis en exergue l'accord des autorités judiciaires pour donner à cette mesure un certain degré de crédibilité au sujet de la protection des droits et libertés individuelles, il n'en demeure pas moins qu'elle suscite tout de même quelques interrogations: Sous quelle forme les autorités judiciaires de l'Etat requis doivent-elles donner leur accord; Ont-elles seulement connaissance des éléments du dossier; doivent-elles prendre connaissance du dossier avant de se prononcer, si oui dans quel délai; ou alors doivent-elles donner leur accord uniquement sur la base des procès verbaux de police ? Ne serait ce pas arbitraire dans ce cas282(*) ?

Il est bon de rappeler à ce niveau qu'on se situe encore à la phase de l'enquête, ce qui signifie que seuls des soupçons pèsent sur la personne mise en cause relativement à la commission de l'infraction. Il s'agit d'un suspect, pourquoi donc se comporter comme si sa culpabilité avait déjà été prononcée ? Même si la remise de la police à police semble viser une certaine célérité et efficacité283(*), elle peut être une grande source d'arbitraire et de violation des droits et libertés individuelles, pourtant la répression de la criminalité transnationale doit se faire avec les moyens et les méthodes de l'Etat de droit.

Dans ce cas pourquoi ne pas rester à la procédure plus conventionnelle de l'extradition qui parce que beaucoup mieux réglementée est plus à même de garantir les droits et libertés des personnes mises en cause. Ceci nous parait plus judicieux en ce sens que paradoxalement et de manière très contradictoire, d'autres dispositions contenues dans les mêmes textes précités préconisent plus tôt l'extradition. Dans l'Accord de coopération en matière de police, l'article 11 qui précède pourtant l'article 12, prévoit bien que les parties contractantes sont encouragées à utiliser les instruments d'INTERPOL « ...destinés à la recherche internationale, d'une personne en vue de son arrestation et de son extradition... ». L'article 4 alinéa 4 de la convention relative à la lutte contre le terrorisme, dispose pour sa part que, dans le but de combattre efficacement les infractions à caractère terroriste, les Etats parties conformément à leurs droits et procédures internes s'engagent à « extrader vers l'Etat requérant les auteurs d'infractions à caractère terroriste, conformément à la convention d'extradition de la CEMAC ou de tout autres accords auxquels l'Etat requérant et l'Etat requis sont parties ; ». En outre, au Chapitre 3 de ladite convention intitulé « Entraide judiciaire », l'article 5 réglemente « l'extradition des malfaiteurs ». Plus loin, il est stipulé à l'article 14 de l'Accord de coopération en matière de police que «toutefois l'application des dispositions des articles 12 (remise de police à police) et 13 précédents ne doivent porter préjudice ni aux législations nationales, ni aux accords existant entre les parties contractantes »284(*).

On comprend ainsi que la remise des suspects de police à police est une mesure qui entre en contradiction avec l'article 2 intitulé «obligation d'extrader» de l'Accord d'extradition entre les Etats membres de la CEMAC qui stipule que «chaque Etat partie s'engage à extrader, selon les règles et sous les conditions déterminées par le présent accord, les individus qui sont poursuivis pour des infractions, des peines ou des mesures de sûreté par les juridictions compétentes de l'un d'eux dénommée partie requérante ».

Une relecture et un toilettage des textes communautaires s'impose donc et devrait aboutir à la suppression pure et simple de la procédure de remise des suspects de police à police, et ne conserver que celle de l'extradition, même s'il faudrait pour cela alléger et simplifier la procédure285(*).Par ailleurs si l'objectif est réellement de créer une procédure légère et simple qui viendra compléter ou alors remplacer celle de l'extradition, encore faudrait-il qu'elle puisse garantir les droits et libertés des personnes. Il faudrait par conséquent instaurer une procédure semblable à celle du mandat d'arrêt européen, qui depuis le 1er Janvier 2004 remplace la quasi-totalité des textes de L' UE en matière d'extradition286(*). Rappelons que le mandat d'arrêt européen est une «décision judiciaire émise par un Etat membre en vue de l'arrestation et la remise par un autre Etat membre d'une personne recherchée pour l'exercice de poursuites pénales ou pour l'exécution d'une peine ou d'une mesure de sûreté privative de liberté »287(*). L'originalité du mandat d'arrêt européen concerne essentiellement la simplification de sa procédure d'exécution, le volet politique et administratif de la procédure d'extradition ayant disparu, l'autorité judiciaire d'émission communique directement le mandat d'arrêt européen à l'autorité judiciaire d'exécution288(*). Il va sans dire que le mandat d'arrêt européen obéit lui aussi à des conditions de fond et de forme.

L'autre aspect de cette politique générale de coopération policière CEMAC est sa grande timidité, se traduisant par des textes au laconisme coupable.

* 280 Voir NGAPA (T.), op. cit., p. 80 ; MEMBILE DIMALE, op. cit., pp. 25-27.

* 281 Voir KEUBOU (P.), cours magistral polycopié de Droit Pénal International, dispensé à l'Université de Dschang, Master I Droit et carrières judiciaires, année académique 2008-2009, pp. 62-63, inédit.

* 282 KEUBOU (P.), cours magistral polycopié de Droit Pénal International, op. cit., p. 62.

* 283 Affaire Patrice NKOLLO MENYE. Ex secrétaire particulier du Ministre des finances de la République du Cameroun, le Sieur NKOLLO MENYE était suspect au sujet du cambriolage du cabinet du Ministre des finances survenu en Septembre 2010 à Yaoundé. Ayant fait l'objet d'un mandat de détention provisoire à la prison centrale de KONDENGUI à Yaoundé quelques semaines plus tard, il réussit à s'échapper «miraculeusement » alors qu'il bénéficiait d'une sortie pour le cabinet du juge d'instruction en Octobre 2010. Avec l'appui d'INTERPOL, sollicité par la police camerounaise, l'adjudant de gendarmerie Patrice NKOLLO MENYE, a finalement été appréhendé à l'Aéroport international LEON MBA de Libreville au Gabon alors qu'il s'apprêtait à prendre un vol pour Paris en France. Remis immédiatement aux autorités camerounaises dans des conditions inconnues, puisqu'officiellement aucune procédure d'extradition n'était en cours, il était présenté devant le Procureur de la République près le tribunal de grande instance du Mfoundi (Yaoundé) dès le 10 Novembre 2010.

Voir l'article de Jean François CHANNON, paru dans le quotidien camerounais «Le Messager », n°3225 du vendredi 12 Novembre 2010.

* 284 Pour ne s'en tenir qu'au respect des législations nationales prévu par cet article, et par l'article 4, alinéa 4 de la Convention relative à la lutte contre le terrorisme précité, nous verrons que cette procédure de remise des suspects de police à police n'a vraiment pas lieu d'être. La procédure d'extradition demeure toujours utilisée par les Etats, seuls les statuts des Tribunaux pénaux internationaux ad hoc prévoient des procédures de remise dérogatoires au droit commun de l'extradition. Et aussi la procédure du mandat d'arrêt européen en vigueur dans l' U E .

* 285,KEUBOU (P.), cours magistral polycopié de Droit Pénal International, op. cit.,p. 63.

* 286 En l'occurrence : La convention européenne d'extradition de 1957 ;

- la convention sur la procédure simplifiée d'extradition de 1995 ;

- la convention d'extradition de 1996 ;

- les dispositions de l'accord de Schengen ayant trait à l'extradition.

* 287 Article 1er de la décision cadre de l'UE n°2002/584/JAL du 13 juin 2002 relative au mandat d'arrêt européen.

* 288 Article 9 de la décision cadre de l'UE, Ibid..

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"Le doute est le commencement de la sagesse"   Aristote