III.2 Acteurs et rôles.
Cette section traite des acteurs (de même que leur
rôle) intervenant dans la filière manioc dans le groupement de
Buzi. Comme signalé dans le chapitre précèdent, il existe
plusieurs catégories d'acteurs dans la filière manioc. Selon
Sodjinou, et al. (2011) ces acteurs peuvent être regroupés en deux
(2) groupes selon leurs fonctions :
y' Les acteurs intervenant dans les fonctions de production et
d'échange. Ce sont les producteurs (individuels et groupements
socioprofessionnels), les transformateurs, les commerçants locaux
(collecteurs, grossistes et semi-grossistes) et les distributeurs (restaurants,
gargote, etc.) de produits dérivés de manioc.
y' Les acteurs assurant des fonctions de facilitation, de
soutien et d'appui à la filière. Ce sont les structures de l'Etat
assurant les fonctions d'encadrement technique (recherche, vulgarisation,
projets). Il y a également les privés (fournisseurs d'intrants,
ONG et associations), les associations socioprofessionnelles.
50
1°) Acteurs intervenant dans les fonctions de
production et d'échange
a) Producteurs et organisations de
producteurs
Les producteurs de manioc se situent sur toute
l'étendue du groupement de Buzi et sont constitués
essentiellement d'homme. Les exploitations sont souvent de petites tailles :
souvent moins de 1ha. Il existe aussi des individus qui peuvent être
considérés comme des leaders car ils emblavent des superficies
comprises entre 1 et 3 hectares, respectent plus ou moins les
itinéraires techniques et sont parfois producteurs, transformateur et
commerçants en même temps.
En plus des producteurs individuels, on retrouve aussi
quelques groupements de producteurs. En particulier, sur émanation des
actions d'intervation de World Vision (WV), des petits producteurs se sont
regroupés en Groupements d'Intérêt Economique (GIE) ayant
des structures fédératrices. Selon le rapport de WV sur le compte
rendu des intervenants des chaines de valeur organisée à Minova
du 25 au 26 mars 2015, les groupements de producteurs sont souvent peu viables
à cause des conflits en internes.
Les deux (2) principales contraintes auxquelles les
producteurs sont confrontés sont relatives à l'accès au
foncier et aux semences. Il importe de souligner cependant que le
problème d'accès à la terre arable soit le plus majeur et
généralisé. Cela est d'autant plus justifié par le
fait que certaines personnes se sont accaparées au détriment des
autres, des vastes étendues des terres (plantation) et en ont fait des
petits domaines. C'est pourquoi l'accès à cette terre est
axé à des conditions plus contraignantes et d'exploitation. On
note par ailleurs, un manque d'encadrement technique et de plaidoirie de la
part des producteurs
b) Commerçants
Les commerçants du manioc sont constitués
essentiellement des femmes. Ces femmes achètent du manioc frais et/ou
des cossettes de manioc dans les plantations ou les marchés de
proximité des zones de production pour les revendre (spéculation)
avec ou sans transformation sur les marchés locaux (marché de
Minova, Kalungu, Bulenga) ou urbain (Goma ou Bukavu). Les prix sont
déterminés surtout par les commerçants à cause du
caractère périssable et/ou de la décomposition physique
des tubercules de manioc et de l'impossibilité pour le producteur
à le stocker. Le transport des zones de production vers les centres
commerciaux locaux se fait
51
essentiellement par portage6; ce qui occasionne un
coût de transaction énorme dans le chef des contractants.
Le manioc est une denrée périssable et il
n'existe pas au niveau des producteurs ou de ces commerçants, des
dispositifs pouvant assurer le transport rapide de manioc frais depuis les
champs de production jusqu'aux marchés primaires pour certaines zones
lointaines des marchés. Aux grossistes et aux semi grossistes,
s'ajoutent d'autres acteurs tels que les transporteurs, les manutentionnaires
et les détaillants dont les rôles ne sont pas négligeables
dans la régularité des flux.
c) Transformateurs
Deux (2) sous-produits sont obtenus à base du manioc
séché (cossette de manioc), il s'agit de la farine puis de
foufou. La chikwangue est obtenue après la décomposition physique
de manioc frais. Au Buzi, on note l'apparition au cours de ces dernières
années d'un grand nombre d'unités de transformation de manioc
à caractère artisanal ou semi-industriel produisant une gamme de
produits tels que la chikwangue, le foufou et la farine. Les transformateurs
artisanaux mettent sur le marché des chikwangues et autres
dérivés tels que le foufou. Ces produits sont
généralement distribués dans les restaurants (foufou) et
le long des routes vers les grands centres (chikwangue). Les producteurs de
chikwangue sont très nombreux et se concentrent au bord du lac et des
rivières dans les localités (Minova, Kalungu, kasunyu, etc.).
On dénombre plusieurs unités individuelles de
production de foufou. Les principales contraintes liées à la
transformation en foufou sont essentiellement : la contrainte de tout vendre au
même jour pour éviter des pertes, le coût
élevé d'autres aliments complémentaires, les
difficultés d'approvisionnement en matières premières dans
certaine période de l'année rendant des coûts de
transactions énormes.
De plus il existe plusieurs unités de production
semi-industrielle (moulin) de farine. Malheureusement pour eux, l'ONG WV a
distribué des moulins pour leurs groupes des contacts et qui concurrence
les meuniers qui existaient sur le marché.
d) Distributeurs de produits dérivés
de manioc
Plus de produits dérivés de manioc sont
commercialisé sur le marché local et urbain (Goma et Bukavu). On
peut citer les maniocs frais, le manioc séché (cossette de
manioc), la farine de
6 Au dos ou sur la tête de la personne.
52
manioc, et le chikwangue. Le manioc séché est la
principale forme de vente de manioc, suivi de farine, de manioc frais, de
chikwangue et de foufou.
Les distributeurs des produits dérivés de manioc
comprennent les restaurants, les gargotes et les vendeuses ambulantes etc. La
farine de manioc est souvent vendue dans des sacs pour la vente en gros et des
sachets pour la vente en détail. Les chikwangues sont vendue le long de
routes pour attirer la clientèle.
e) Consommateurs
La consommation de manioc concerne beaucoup plus le foufou et
le chikwangue. Par ailleurs, les maniocs frais et la farine de manioc font
l'objet d'une importante commercialisation le long des voies et dans les
marchés. Il existe aussi des vendeurs ambulants de manioc frais. Une
grande partie des maniocs frais et séché est exportée vers
les villes voisines (Goma et bukavu) par des mamans qui viennent dans la plus
part de cas dans ces villes.
L'offre de manioc est étalée tout au long de
l'année bien que la grande période d'activité de
production de manioc soit située entre août et novembre. Mais, la
demande des produits de manioc est surtout forte pendant les périodes
des festivités de fin d'année.
J) Transporteurs
Pour l'évacuation des produits vers les lieux de vente,
les producteurs et/ou les commerçants sollicitent les mamans pour
acheminer leur marchandise vers les centres de vente aux consommateurs locaux.
Les commerçants des produits dérivés de manioc doivent
transporter la marchandise du champ jusqu'au lieu de transformation ou de
revente (les marchés) au dos et/ou par tête car actuellement, les
routes des dessertes agricole sont en état de délabrement total
ne permettant aucun moyen de transport de joindre les zones de production.
Cette situation engendre des coûts de transactions énormes et
réduisent la marge bénéficiaire du vendeur. Quant à
la population riveraine du lac, utilise le boat pour amener leurs marchandises
vers les marchés urbains (Goma et Bukavu).
2°) Les acteurs assurant des fonctions de
facilitation, de soutien et d'appui à la filière
Différents acteurs interviennent au niveau de la
filière à travers les fonctions de facilitation, de soutien et
d'appui à la filière manioc. Parmi ces acteurs, on distingue les
projets de développement et structures de vulgarisation de l'Etat (MAPE,
etc.), les institutions de crédit, les organisations
socioprofessionnelles et privées, les ONG etc.
53
b) Organisations professionnelles Agricoles et
associations
Le mouvement associatif est caractérisé par une
multitude d'organisations aux niveaux d'arrondissement ou village. Il y a par
exemple, GALA, le Groupement des Producteurs de la Commune Rurale de Buhamba,
etc.
Au niveau de chaque localité, il existe un groupement
représentant les producteurs des produits vivriers. Avec les
sensibilisations des ONGs en 2007, il y a eu une nouvelle dynamique autour de
l'organisation des producteurs. En effet, les premiers mois de cette
année ont été marqués par la création du
Réseau des Producteurs des Produits agricoles. Les objectifs du
réseau sont la promotion de la production quantitative et qualitative,
la défense des intérêts matériels et moraux des
producteurs adhérés, l'apport de services comme l'organisation de
la commercialisation, l'approvisionnement des semences et la distribution
d'intrants spécifiques, la recherche de sources de financement et l'aide
des indigents à travers une mutuelle.
c) Projets
Plusieurs projets et programmes, sociétés et
offices ont inscrit dans leurs plans d'action le manioc comme une
filière à développer prioritairement (MAEP, 2006). Pour le
développement des filières, le gouvernement a instauré en
2004, la Direction de la Promotion des Filières Agricoles et de la
Sécurité Alimentaire (DPFSA). Sa mission est de :
A assurer la promotion et le développement des
filières végétales (cultures annuelles et
pérennes), animales et halieutiques en tenant compte des
spécialités régionales et d'engager de concert avec les
autres directions techniques et les acteurs des autres secteurs, des actions
appropriées pour assurer la sécurité alimentaire et
nutritionnelle ;
A contribuer à la mise en oeuvre en concertation avec
tous les acteurs, des stratégies nécessaires au
développement des filières prioritaires ;
A veiller à l'élaboration et la mise en oeuvre
des paquets techniques en matière de production et de conservation ;
A assurer le suivi-évaluation des projets et
programmes (actions) liés au développement des filières
dans le ressort territorial de sa compétence.
d) Institutions de crédit
Les institutions de micro crédit sont presque
inexistantes et de plus inadaptées aux conditions des acteurs surtout
pour les producteurs. Seule la Mecrego/Minova continue à fonctionner
dans le milieu et n'offre pas de crédit agricole à cause des
risques que sont exposés les activités agricoles, son revenu
aléatoire et de sa période de récolte qui s'étend
sur une durée qui soit longue ne respectant pas de ce fait la condition
selon laquelle les rembourrements de crédit se font mensuellement. C'est
avec la caution solidaire des tontines et d'autres créditeurs
privés que les paysans arrivent eux-mêmes à
répondent à leurs besoins de financement.
54
Les relations entre ces différents acteurs ainsi que leurs
différents rôles qui animent la filière manioc sont
résumés dans le graphique ci-après :
Figure 3.1 Relations et Cartographie de la filière
manioc dans le groupement de Buzi
Transformateurs
Transporteurs
Fournisseurs
d?intrants
Producteurs
Approvisionneme
Production
Transformation
Distribution
Distributeurs Grossistes Détaillants
Conditionnement Râpeuse, Moulin
Transportation TRAITEMENT -rouissage
Cette figure fait remarquer les différents acteurs qui
animent la filière manioc dans le groupement de Buzi, leurs rôles
ainsi que la manière dont ils opèrent pour créer une
valeur au manioc. Dans cette étude, nous allons nous concentrer sur les
acteurs qui exercent les activités primaires c'est-à-dire qui
interviennent dans les fonctions de production et d'échange pour qui, le
calcul de la rentabilité est possible.
snI
Ins m c
g
Consommateurs locaux et Urbain
Source : notre confection.
|