2.14.2. DAS LIES AUX TELEPHONES MOBILES
Le DAS peut être mesuré pour tous les appareils
utilisés à proximité du corps. Concernant les
téléphones mobiles, les DAS sont très variables selon les
modèles (de 0,05 à 1,8 W/kg). Une étude ayant
mesuré les DAS liés à l'utilisation de 124
téléphones montre qu'ils sont tous inférieurs à la
valeur réglementaire de2 W/kg et que l'utilisation d'un kit mains libres
ou d'une oreillette Bluetooth permet de réduire l'exposition de la
tête de l'utilisateur (respectivement d'un facteur de l'ordre 5 et
400)115.
Par ailleurs, la puissance émise par un
téléphone mobile variant au cours d'une communication, le DAS
indiqué par le constructeur est un DAS maximal. Des mesures montrent
qu'en moyenne, la puissance à laquelle un utilisateur est exposé
équivaut à 40 % du DAS constructeur dans le cas du
GSM116. Toutes les études épidémiologiques sont
confrontées à des difficultés pour évaluer
l'exposition aux radiofréquences, puisque des données de mesures
ne sont pas toujours disponibles, notamment lorsqu'il s'agit d'expositions
passées. Certaines études utilisent des indicateurs indirects
(par exemple, la distance entre le domicile et l'antenne-relais la plus
proche), mais cela ne permet pas d'étudier l'ensemble des sources de
radiofréquences et ces indicateurs peuvent se révéler
très approximatifs.
115Picard, 2009
116(Fouquet et al.2009)
271
2.14.3. EFFETS POTENTIELS DES RADIOFREQUENCES SUR
LA SANTE
Lorsqu'une onde électromagnétique entre en
contact avec la matière, plusieurs types d'interaction se produisent :
réflexion, réfraction, diffraction, diffusion ou encore
absorption. Ces interactions sont fonction du rapport entre la longueur d'onde
et la taille de l'objet rencontré par le rayonnement, ainsi que des
caractéristiques physiques de cet objet (dimensions, forme, position,
orientation, propriétés électriques). La matière
vivante, en raison de la structure des membranes cellulaires (bicouche
lipidique), a la capacité de stocker de l'énergie et de la
dissiper. Le corps absorbe ainsi environ 50 % de l'énergie de l'onde
émise lors de l'utilisation d'un téléphone portable.
Une exposition aux radiofréquences en termes d'effets
biologiques se traduit par des courants induits et des échauffements
localisés, naturellement régulés par l'organisme en dehors
de situation d'exposition exceptionnelle. À ce titre, une exposition
à un champ électromagnétique intense, par exemple à
proximité de radars ou d'émetteurs radio de forte puissance, est
en effet susceptible de provoquer de graves brûlures. En revanche, les
effets potentiels d'une exposition aux fréquences et la durée des
appels. Les données sont parfois plus détaillées (types de
téléphone...).
272
Quelques études ont utilisé les données
provenant des opérateurs. Chaque méthode a ses avantages et ses
inconvénients. Le recueil d'informations auprès des utilisateurs
permet d'avoir des données plus détaillées, mais se heurte
à un problème de mémorisation pour les expositions
anciennes et à des risques de biais. En effet, des études
semblent montrer que les « gros » utilisateurs de
téléphones mobiles ont tendance à surestimer leur
utilisation, de même que les personnes atteintes de tumeurs
cérébrales, ces dernières surestimant d'autant plus leur
utilisation qu'elle remonte à une période ancienne. Les
données des opérateurs, quant à elles, peuvent être
plus précises et objectives, mais aussi manquer de
validité117. S'agissant des expositions liées
spécifiquement aux ondes émises par les systèmes de type
Wi-Fi, aucune étude épidémiologique n'a été
recensée.
En effet, pour ce type d'exposition, la mesure directe
constituerait l'approche la plus pertinente, or la sensibilité des
appareils de mesures s'avère insuffisante compte tenu de la faiblesse
des niveaux rencontrés. En conclusion, si l'évaluation de
l'exposition aux radiofréquences doit se faire de manière aussi
précise que possible pour pouvoir étudier les potentiels effets
sanitaires, elle est confrontée à de nombreuses limites. En
dehors de la précision des niveaux estimés, des questions plus
fondamentales se posent. Comment estimer une exposition globale à des
ondes émises par des sources proches du corps d'une part et loin du
corps d'autre part, qui plus est se caractérisant par des
fréquences différentes ?
117Ahlbom et al., 2009
273
Par ailleurs, les ondes se propageant différemment
selon les parties du corps, faut-il considérer une exposition corps
entier ou bien cibler une partie du corps, ou encore certains tissus ? Les
radiofréquences de faible niveau sont moins bien connus. Encore
appelés « effets non thermiques », ils sont susceptibles de
répondre à d'autres mécanismes d'interaction avec la
cellule. Les inquiétudes s'orientent vers différentes
catégories d'affections : cancers, atteintes du système nerveux,
troubles de la reproduction ou encore symptômes subjectifs réunis
sous le terme« hypersensibilité électromagnétique
».
Les mécanismes biologiques envisagés comme
pouvant être à l'origine de ces effets sont les suivants :
génération de radicaux libres de l'oxygène, stress
oxydant, génotoxicité, cogénotoxicité,
mutagénèse, apoptose, atteintes des cellules du système
immunitaire, atteintes de la barrière hémato-encéphalique,
sécrétion de mélatonine118. En l'état
des connaissances telles que développées ci-après, aucun
effet n'a pu être relié aux expositions aux radiofréquences
et aucun de ces mécanismes biologiques n'a été
confirmé. Le développement massif de la téléphonie
mobile depuis le début des années 90 a justifié nombre de
travaux de recherche afin de s'assurer de l'innocuité de cette
technologie. Ces travaux relèvent soit d'une approche
expérimentale (sur l'animal, sur cultures cellulaires...), soit
épidémiologique, fondée sur des études
castémoins.
118SCENIHR, 2009 ; Afsset, 2009
274
À la fin des années 90, des travaux
coordonnés dans 13pays ont été initiés sous
l'égide du Centre international de recherche sur le cancer (étude
INTERPHONE). Ces études ciblent les tumeurs situées au niveau de
la tête (gliomes, méningiomes, tumeurs du nerf acoustique et de la
glande parotide), celle-ci étant plus particulièrement
exposée aux ondes des téléphones mobiles. L'ensemble de
ces travaux n'a pas permis de mettre en évidence des liens entre
exposition aux radiofréquences liées à l'utilisation de
téléphones mobiles et cancer119.
Malgré la volonté d'harmoniser les protocoles de
ces études, leur mise en oeuvre est susceptible de différer.
Ainsi parmi les résultats, une étude relevant un risque
significatif se distingue120, mais elle ne permet pas
d'infléchir la conclusion actuelle quant aux liens entre exposition et
cancer. Toutefois, l'existence d'un risque faible ne peut être
écartée, compte tenu des limites des études
épidémiologiques, ainsi, les recherches doivent être
poursuivies121. S'agissant des antennes-relais, les niveaux
d'exposition attribuables sont beaucoup plus faibles que ceux liés
à l'utilisation d'un téléphone mobile. Ainsi, les
études épidémiologiques portant sur les antennes-relais
sont rares.
119Ahlbom et al., 2009 ; Moulder et al.,2005
120Hardell et al., 2006
121SCENIHR, 2009
275
Elles sont aussi sujettes à caution du fait de biais
méthodologiques importants, tant au niveau de la définition des
populations d'étude, de la prise en compte des éventuels facteurs
de confusion que de l'estimation de l'exposition qui ne peut se déduire
simplement de la distance à l'émetteur. Néanmoins, les
résultats de ces travaux ne sont pas en faveur d'un risque accru de
cancer en lien avec une exposition aux radiofréquences émises par
les antennes de téléphonie mobile122.
L'épidémiologie se heurte à de nombreuses
difficultés méthodologiques. Dans le cas de l'étude d'un
effet potentiel d'une exposition aux radiofréquences, les
résultats et leur interprétation sont notamment influencés
par les aspects suivants :
? La définition des cas de cancer n'est pas
standardisée et peut englober des tumeurs à des stades de
développement ou des situations anatomiques différents, ce qui
n'exclut pas la présence de faux-positifs oude faux-négatifs dans
les études. Ceci contribue à diminuer la puissance des
études et, d'une étude à l'autre, les résultats ne
sont pas toujours comparables.
? La sélection des témoins se traduit souvent
par une sous-représentassions des non-utilisateurs de
téléphone mobile susceptible
de minimiser les risques, l'erreur estimée est de l'ordre
de 10 %123.
122Afsse, 2005
123Ahlbom et al.,2009
276
? L'estimation de l'exposition peut être basée
sur des approches différentes telles que détaillées dans
le chapitre précédent. Chacune présente ses limites,
certaines étant susceptibles de biaiser les
estimations124.
? Les temps de latence d'apparition des cancers peuvent aller
jusqu'à 40 ans. Dans les études publiées actuellement, les
plus longues fenêtres d'exposition sont de 10 ans et en moyenne de 4
ans125. Il est donc fort probable que l'apparition des tumeurs soit
antérieure à l'utilisation des téléphones mobiles,
hormis peut-être pour des tumeurs à croissance rapide telles que
les gliomes et dans l'hypothèse où les radiofréquences
agissent en tant que facteur de promotion, accélérant ainsi la
survenue de la pathologie.
? La taille des échantillons limite la puissance des
études, ainsi les risques les plus faibles ne peuvent pas être mis
en évidence.
En parallèle de ces travaux
épidémiologiques, de nombreuses études
expérimentales visant à expliciter les mécanismes
biologiques susceptibles d'être impliqué sont été
conduites. Les travaux les plus récents ont été
recensés et critiqués dans le dernier rapport de
l'Afsset126.
124Ahlbom et al., 2009 125Kundi, 2009
126Afsset, 2009
127SCENIHR, 2009
277
Ainsi, à ce jour, même si des résultats
isolés mettent en évidence certains effets biologiques, ces
études ne permettent pas de démontrer de lien causal entre
expositions aux radiofréquences et cancer, tant du point de vue de
l'induction (ni effet mutagène, ni génotoxique) que de la
promotion de la pathologie (absence d'effet cancérogène). Par
ailleurs, aucune altération du fonctionnement de la cellule (expression
génique, production de radicaux libres, apoptose...) n'a pu être
reliée à une exposition aux radiofréquences qui, en dehors
des effets thermiques, ne semble pas représenter un facteur de stress
pour la cellule.
Le système nerveux, dont le cerveau constitue
l'élément central, contrôle toutes les fonctions du corps
humain. Une atteinte de ce système est susceptible d'entraîner
toutes sortes de troubles. Suite à une exposition aux
radiofréquences, certaines manifestations telles que modification de
l'activité électrique du cerveau, troubles du sommeil ont pu
être observées, mais les résultats des différentes
études sont trop discordants pour conduire à un consensus,
d'autant plus qu'aucune explication physiologique à ces
phénomènes n'a pu être fournie127. Ainsi, il n'a
pas pu être montré d'effet délétère d'une
exposition aux radiofréquences, à des niveaux habituellement
rencontrés, sur le système nerveux ou le fonctionnement
cérébral général, ni en termes de cognition, ni de
bien-être.
278
Il a par ailleurs été envisagé qu'une
exposition aux radiofréquences puisse entraîner une modification
de la barrière hémato-encéphalique, qui constitue une
protection indispensable pour le cerveau. Cependant, aucune preuve convaincante
d'un effet des radiofréquences sur l'intégrité de cette
barrière n'a pu être apportée128. Les travaux
menés sur ce sujet visent à identifier une potentielle
altération de la reproduction ou du développement des individus
à tout stade de la croissance jusqu'à l'âge adulte
(embryon, foetus, nourrisson, enfants, adolescents). En effet, avant
d'atteindre l'âge adulte, les organes ne sont pas encore matures et
généralement plus sensibles aux agents toxiques. Les
résultats de ces travaux, peu nombreux en l'occurrence, ne sont pas
homogènes et ne permettent pas d'identifier un impact d'une exposition
aux radiofréquences, aux niveaux habituellement rencontrés, sur
la reproduction ou le développement129.
L'hypersensibilité électromagnétique ou «
electromagnetic hypersensibility » (EHS) qualifie les personnes sujettes
à des symptômes subjectifs non spécifiques dont elles
attribuent la cause à une exposition à des champs
électromagnétiques. Cette définition fait office de
critère de diagnostic alors qu'il n'existe pas de description
précise des symptômes évoqués. Pour progresser dans
la compréhension de ce phénomène, une standardisation des
méthodes de diagnostic serait souhaitable.
128Afsset, 2009
129Afsset, 2009 ; SCENIHR, 2009 ;SCENIHR, 2007
279
En effet, il peut s'agir d'irritations cutanées, de
fatigue, de maux de tête, de douleurs ostéo musculaires, de
troubles de la mémoire, du sommeil, d'irritabilité, de
difficultés de concentration ou encore de symptômes oculaires, de
palpitations...Ces symptômes présentent une grande
hétérogénéité, il en est de même des
sources d'exposition incriminées: écrans (TV, ordinateur),
téléphones sans fil, téléphones mobiles,
antennes-relais, et pour ne citer que cela.
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