C- L'Etat
L'historicité de la violence conjugale à
Madagascar est liée aux attitudes tolérantes de l'Etat
vis-à-vis de la violence conjugale pendant des siècles. Dans le
temps, la femme était inférieure à l'homme, elle
était une incapable et une incompétente. Elle est réduite
au rang des enfants comme le confirme l'expression «Ny zaza
amam-behivavy». Sa principale mission a été la gardienne de
la maison et de ses enfants, elle était privée de presque tous
ses droits
1- La lacune au principe de l'égalité
à Madagascar
De l'indépendance jusqu'à nos jour le principe
de l'égalité des droits n'existait pas entre l'homme et la femme.
Pourtant la constitution Malagasy ait connu depuis la première
République jusqu'aujourd'hui, et a prônée
l'égalité des tous les individus sans distinction sur le sexe. Le
statut privilégié du mari serait la principale source
d'inégalité entre les sexes, non seulement au sein des familles
mais aussi au niveau d'autres institutions. Il crée des conditions
psychologiques de soumission des femmes dans la société qui
entrainent des obstacles à la participation des femmes à la vie
politique et économique. A cette époque, ce sont les hommes qui
occupaient le pouvoir, dans la pratique la participation des femmes au niveau
politique est en régression par rapport à l'homme.
43Articles a publié par NIR du Lundi, 27 Mai
2013 à 08:20 dans le «journal online» La gazette
Martino Herbert RAZAFINDRADIA
2- L'implication de l'Etat dans les causes de la violence
envers les femmes
Parmi les causes du déséquilibre, on
relève le faible niveau d'instruction des femmes, les rapports entre les
genres en termes de pouvoir de décision, de responsabilité,
d'accès aux ressources en justice et de leur contrôle. Au titre de
l'éducation, les disparités de niveau d'instruction entre hommes
et femmes sont significatives. Tandis que l'article 24 de la Constitution
Malagasy actuelle dit que: «L'Etat organise un enseignement public,
gratuit et accessible à tous. L'enseignement primaire est obligatoire
pour tous». La femme ne pouvait pas apprendre une profession de son
choix car auparavant on faisait la répartition des professions; cela se
faisait par le rôle de l'homme et de la femme dans la
société de la structure des familles Malagasy. De plus, les lois
sur le travail à Madagascar renferment des dispositions qui restreignent
les heures de travail de la femme dont certaines marquent une différence
entre eux. Cela implique que la législation (Etat) favorise
l'inégalité au niveau du couple, mais par exemple la loi
no2003-044 du 28/07/04, prévue par l'article 92 du code de
travail régit l'interdiction aux femmes de travailler la nuit dans les
manufactures. Par ailleurs le repos quotidien des femmes et des enfants doit
avoir une durée de 12 heures consécutives, ce qui implique une
restriction de leur durée de travail. Alors qu'elles sont largement
employées dans le secteur textile des zones franches (y compris la nuit)
et acceptent généralement de travailler la nuit à cause du
chômage. Pourquoi l'Etat Malagasy acceptait cette situation? Or, les
textes protégeant les droits des travailleuses.
L'article 17 de cette Constitution confirmait:
«L'Etat protège et garantit l'exercice des droits qui assurent
à l'individu son intégrité et la dignité de sa
personne, son plein épanouissement physique, intellectuel et
moral.», à vrai dire la femme en
générale n'avait pas la jouissance de ces droits civils. Le code
pénal et le code civil Malagasy font d'elle une incapable, une mineure,
elle devait obéissance à son mari et n'avait pour seul droit de
se soumettre. L'article 54 de la loi n°2007-022 du 20 Août 2007
relative au mariage et aux régimes matrimoniaux dispose que:
«Le mari est le Chef de famille. Toutefois, les époux
concourent ensemble à l'administration matérielle et morale de la
famille et à élever les enfants». Dans le même
ordre d'idées, l'article 60 de la loi no61-025 du 09 octobre
1961 relative aux actes d'état civil affirme que le livret de famille
est remis à l'époux. La femme ne peut en obtenir une copie qu'en
cas de divorce, L'homme est également le tuteur des enfants du vivant
des parents selon les dispositions de l'article 54 de la loi
précédent. Elle ne pouvait pas administrer ses propres biens,
ester quelqu'un en justice sans le consentement préalable de son mari,
c'est l'activité du mari qui prévalait. De même, pour le
code de la nationalité ne permettant pas à la femme
mariée, à un étranger de transmettre sa nationalité
à son enfant.
Martino Herbert RAZAFINDRADIA
Une demande de nationalité doit alors être
adressée aux autorités afin que l'enfant puisse acquérir
la nationalité Malagasy, ou bien de naturalisation lorsqu'il a atteint
l'âge adulte. De plus, si une femme Malagasy quitte le pays après
son mariage avec un étranger, elle risque de perdre sa
nationalité (article 48 du code de nationalité Malagasy), ce qui
n'est pas le cas pour un homme Malagasy marié avec une femme
étrangère et qui quitterait le pays. Enfin, cette femme
mariée à un étranger ne peut pas lui transmettre sa
nationalité alors que l'article 22 de même code prévoit une
telle procédure pour la femme étrangère mariée
à un homme Malagasy, ce qui se fait d'office lorsqu'elle est
apatride.
Ces dispositions reflètent la conviction d'une certaine
primauté du mari sur l'épouse ou tout simplement de l'homme sur
la femme. Ceci ne se conforme pas à l'article 08 de notre constitution
et est contraire à l'esprit des articles 03, 23 et 26 de PIDCP (Pacte
Internationale relatif aux Droits Civils et Politiques).
3- La législation Malagasy vis à vis de la
pratique discriminatoire à l'égard des femmes
Nous déplorons le fait que l'Etat ne traite pas le
problème de la violence conjugale avec ses lois existantes. En effet, il
a permis aux chefs traditionnels et religieux, aux responsables du
«Fokontany»44 de résoudre cette délit par un
arrangement à l'amiable. Il s'agit d'un sujet tabou dans la
société Malagasy. L'article 332 du code pénal Malagasy,
punit sévèrement aussi bien le viol que la tentative et
l'attentat à la pudeur, ce qui implique que notre loi ne précise
pas le viol conjugal de manière explicite dans le code pénal. Une
dimension de la violence exercée à l'encontre des femmes,
notamment au sein de couple et qui reste totalement absente de l'arsenal
juridique de Madagascar est la violence psychologique et émotionnelle
ainsi que la violence morale.
Dans la pratique, l'application des lois, les peines
prévues par les textes sont rarement appliquées et pas
suffisamment dissuasives pour éradiquer le phénomène. Nous
remarquons que par la méconnaissance des textes en vigueur ou à
cause des tabous qui entourent la violence conjugale, les victimes n'osent pas
porter plainte. Lorsqu'elles le font, c'est au niveau de leaders traditionnels,
religieux et le chef du quartier qui applique le droit coutumier, qui permet
à la femme de quitter le domicile conjugale pendant quelque temps ou
l'utilisation de principe de conciliation ou l'arrangement à l'amiable
et sans une diffusion de droits humains relative aux violences envers la femme.
Cependant le mari a le droit de faire revenir
44Secteur sous réserve à la commune,
appeler aussi QUARTIER
Martino Herbert RAZAFINDRADIA
son épouse quand il le souhaite. Ce droit coutumier a
été consacré dans la loi sur le mariage dont l'article 51
de la loi 2007-022 stipulant que: «Néanmoins, pour des motifs
graves, la femme peut quitter temporairement le domicile conjugal dans les
formes et conditions prévues par les articles 52» et par la
tradition.
D'après cet article, la mesure juridique pour
résoudre ces problèmes conjugaux encourage l'auteur à
accomplir ces actes; il n'est donc pas question d'éloigner un mari
violent, ou de la priver de la garde des enfants, d'autant plus que les femmes
ne demandent en aucun cas le divorce car la femme divorcée ou
mère célibataire est souvent rejetée par la
société Malagasy, commençant par sa propre famille. De
plus, l'Etat Malagasy en général n'a pas de centre d'accueil pour
les femmes victimes et aucun texte n'en prévoit la création.
4- Les textes internationaux et ses garanties
Un coup d'oeil de l'histoire international, si la convention
des Nations unies du 18 décembre 1979 sur l'élimination de toute
forme de discrimination à l'égard des femmes, ne vise pas
expressément les violences conjugale. Elle réaffirme le principe
de l'égalité entre les hommes et les femmes, elles demandent
aussi aux Etats parties de prendre «toutes les mesures
appropriées, y compris les mesures législatives pour assurer le
plein épanouissement, le progrès des femmes en vue de leurs
garantir l'exercice, la jouissance des droits de l'homme et des libertés
fondamentales sur la base de l'égalité avec les hommes»
(article 03).
Plus récemment, l'Assemblée
générale des Nations Unies a adoptée le 20 décembre
1993, une déclaration sur l'élimination de la violence à
l'égard des femmes. Aux termes de cette déclaration,
l'Assemblée Générale encourage «les Etats
devraient condamner la violence à l'égard des femmes et ne pas
invoquer de considérations de coutume, de tradition ou de religion pour
se soustraire à l'obligation de l'éliminer» (article
04).
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