CHAPITRE I : LA RESPONSABILITE
PENALE DU COMMISSAIRE AUX COMPTES
La responsabilité pénale est une autre forme de
responsabilité qui se distingue de la responsabilité civile.
La responsabilité pénale n'a pas pour objet, la
réparation d'un préjudice quelconque, mais a pour fonction de
ramener l'individu dans la norme fixée par l'autorité publique
représentant la société dans son ensemble1.
Si la responsabilité civile a pour objectif la
réparation du préjudice, la responsabilité pénale
en revanche cherche à punir le coupable.
Ces deux types de responsabilités se distinguent
également au niveau des effets, la responsabilité civile peut
octroyer des dommages-intérêts en guise de réparation du
préjudice, en revanche la responsabilité pénale inflige
une peine comme sanction à l'infraction commise.2
A la différence de la responsabilité civile, les
circonstances aux cours desquelles, le commissaire aux comptes dans le cadre de
son exercice professionnel, peut voir sa responsabilité pénale
engagée sont limitées. 3
Ces cas limités, sont la conséquence du principe
de légalité en droit pénal en vertu duquel : il ne peut y
avoir de poursuites sans un texte précis.
La mise en oeuvre de la responsabilité pénale
suppose le respect des principes généraux relatifs à toute
poursuite pénale à savoir :
- Le principe de la légalité des délits
et des peines : nullum crimen, nulla poena
sine lege qui exige la présence d'un texte
- Le principe de l'interprétation stricte de la loi
pénale
- Le principe de la non rétroactivité de la loi
pénale
1 N.Maccario, Gestion juridique de l'entreprise,
Pearson Education France, 2006, 279
2 J. Pagés, De la responsabilité
ministérielle, Bechet, 1818, p 48
3 F. Collasson, Le patrimoine professionnel, Presses
Univ. Limoges, 2006, p 360
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comptes
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Cependant s'agissant du fondement de la responsabilité
pénale du commissaire aux comptes, en effet celle-ci trouve sa source
dans plusieurs textes légaux :
- Loi 17-95 relative aux sociétés anonymes,
promulguée par le dahir n° 1-96-124
du 14 rabii II 1417 (30 août 1996), telle qu'elle a
été modifiée et complétée par la loi n°
20-05 promulguée, par le dahir n° 1-08-18 du 17 joumada I 1429 (23
mai 2008) ((Bulletin officiel n° 5640 du jeudi 19 juin 2008) ;
- Loi 15-89 réglementant la profession d'expert comptable
et instituant un ordre
des experts comptables, promulguée par le dahir n°
1-92-139 du 14 rejeb 1413 ( 8 janvier 1993) (Bulletin officiel n° 4188 du
11 chaabane 1413 \(3 février 1993\)
- Dahir n° 1-59-413 du 28 Joumada II 1382, ( 26 Novembre
1962) portant
approbation du code pénal. (BO n° 2640 bis du
mercredi 5 juin 1963)
La responsabilité pénale du commissaire aux
comptes peut se trouver engagée soit pour des infractions de droit
commun, soit en raison de délits spéciaux. 1Or compte
tenu de la diversité des infractions de droit commun et qu'ils
n'appellent des remarques particulières2, on va limiter notre
étude aux infractions propres à la qualité de commissaire
aux comptes, - qu'elles soient relatives à la mission du commissaire aux
comptes (Section I) ou à son statut professionnel (Section II),- ainsi
que la situation du commissaire aux complice d'une infraction pénale
3(Section III).
1 Monéger et T. Granier, Le Commissaire aux
comptes, Dalloz, 1995, p 180
2 Y. Guyon, Le commissariat aux comptes, Librairies
techniques, 1971,p 294
3 3 3 A. Robert, Responsabilité des commissaires aux
comptes, « Dalloz Référence », 2008, p 124
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comptes
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Section I- Infractions relatives à la mission du
commissaire aux comptes
Toutes les infractions susceptibles d'être
reprochées, au commissaire aux comptes, en relation avec sa mission,
constitue des délits, voire même des délits de police,
puisque le maximum de peine prévu pour ces infractions est de 2 ans.
Il s'agit de distinguer dans ce cas, entre trois infractions :
- Délits de confirmation d'informations
mensongères
- Délits de non-révélation des faits
délictueux
- Violation du secret professionnel
§ /I : Délit de confirmation d'information
mensongère
L'obligation principale incombant au commissaire aux comptes,
est de certifier la régularité, la sincérité, et
l'image fidèle des comptes annuels. 1Il est donc le gardien
de cette sincérité, de cette régularité, juridique,
comptable et financière dont il rend compte à l'assemblée
générale annuelle dans le rapport
général.2
En faveur de cette conception de gardien de la
sincérité, et garant de confiance, le juge pénal adopte
une interprétation stricte des éléments constitutifs du
délit, sanctionnant ainsi de manière sévère le
contrôle défaillant du commissaire aux comptes, qui portent
atteinte à la crédibilité et la réputation de la
société objet de son contrôle. 3
Conformément, aux principes généraux du
droit pénal, la poursuite pour toute infraction, nécessite en ce
que cette dernière contient tous ses éléments constitutifs
à savoir :
- L'élément légal
- L'élément matériel
- L'élément moral
1 S. Guérard, Regards croisés sur
l'économie mixte, L'harmattan, 2006, p 36
2 2 P. Moulin, L'alerte en période de crise,
PLInformatique, 2005,p 25
3 N. Véron, L'information
financière en crise : comptabilité et capitalisme, Odile
Jacob, 2004, p 67
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comptes
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A. L'élément légal :
Cette infraction est régie par l'article 405 de la loi
n° 17-951 relative à la société anonyme,
qui dispose : « sera puni d'un emprisonnement de 6 mois à deux ans
et d'une amende de 10 000 à 100 000 dirhams ou de l'une de ces deux
peines seulement, tout commissaire aux comptes qui, soit en son nom personnel,
soit au titre d'associé dans une société de commissaire
aux comptes, aura, sciemment donné ou confirmé des informations
mensongères sur la situation de la société ... ».
Il découle des dispositions de cet article et surtout
au niveau des peines prévues, que l'infraction qui peut être
reprochée au commissaire aux comptes constitue un délit de
police, puisque conformément aux dispositions de l'article 111 du code
pénal al 3 :
« ... L'infraction que la loi punit d'une peine
d'emprisonnement dont elle fixe le maximum à deux ans ou moins de deux
ans, ou d'une amende de plus de 200 dirhams est un délit de police ...
»
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