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Les stratégies politico-économiques du football professionnel dépassent-elles celles des terrains ?

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par Victor PORCHER
Université Pantheon Assas Paris II - Master 2 Commerce et Management International 2016
  

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Partie III - Entre rêve et désarroi, quel est l'avenir du football africain ?

3.1 Le bilan du football africain.

« On dit parfois que le football est un sport né en Europe dont l'Amérique du Sud a fait un art et l'Afrique une religion »79

Cette phrase pleine de sens tire sa source de l'article d'Ufolep, dédié à l'histoire du football Africain et de son évolution. Sport inventé par les britanniques et exporté au cours du 18ème siècles en Afrique, le football reflétait en premier lieu un désir d'affiliation à un mode de vie à l'européenne puis donna lieu à de nombreuses ségrégations raciales entre colonisateurs et colonisés. C'est en partie la raison pour laquelle, le football est devenu un moyen d'affirmation d'identité nationale.

Aujourd'hui, le football occupe une place importante dans le coeur des Africains puisqu'il représente un symbole fort pour la lutte en faveur l'indépendance. Comme l'observait Paul Dietschy80, auteur du livre - le Football et l'Afrique - « les histoires de la décolonisation négligent le fait que le sport ait pu être un instrument de diffusion de la conscience nationale. Or c'est un lieu où un combat symbolique peut être livré, alors même que la domination coloniale empêche toute autre forme de lutte dans le reste de la société ».

Actuellement constituée de 54 Etats souverains et d'une superficie totale de 30 415 873 km2, l'Afrique est incontestablement une terre du football. En dépit d'une ferveur sans précédent pour ce sport, qui a marqué l'histoire du continent Africain, le continent souffre d'un retard dans presque tous les domaines, excepté celui de la production de matière première. Malheureusement, le football africain n'échappe guère à cette règle.

Le continent est en mal d'investissement et manque cruellement de ressources. Ces carences en infrastructures et en équipements empêchent le football africain d'évoluer durablement. Ce fait que l'on ne peut nier explique en partie l'exil de nombreux jeunes africains vers l'Europe où l'enseignement du football est de meilleure qualité

79 GRAVILLON Isabelle, « Le football, une histoire africaine », En jeu une autre idée du sport, n° 437, Juin 2010, p. 10

80 Historien français, spécialisé dans le domaine du football.

79

Malgré un amour infaillible envers le football, le sport de haut niveau nécessite des capacités de financement que le continent peine à trouver, hormis quelques efforts financiers de la part de certains Etats (nous pouvons citer par exemple l'Afrique du Sud). En tout état de cause, les clubs ne peuvent subvenir à leurs besoins tant les « recettes de billetterie » sont faibles voire inexistantes pour certains pays.

En tout et pour tout, les ventes de billet constituent au maximum 25% des recettes des « grands clubs » du continent. Cette insuffisance financière combinée à un manque évident de management implique de nombreuses conséquences désastreuses. Parmi les plus importantes, on note :

- Une insécurité globale dans lors des rencontres sportives 81 . L'exemple le plus marquant est sans doute la mésaventure vécue par la sélection nationale du Togo lors de la préparation à la Coupe d'Afrique des Nations lorsque le bus fut pris d'assaut par des assaillants à main armée. L'insécurité pourrait en partie s'expliquer par le manque d'investissement dans les modes de transports. D'après la revue de l'Union française des oeuvres laïques d'éducation sportive (Ufolep)82, le continent Africain est celui qui enregistre le plus d'incidents aux stades et aux abords dû à des rencontres de football. Entre 1991 et 2001 plus des 3/4 des incidents se sont déroulés en Afrique. En 2007 en Zambie, une rencontre a fait près de douze morts. On dénombre treize morts en 2008 au Congo et dix-neuf morts en 2009 en Côte d'ivoire. La première cause de ces évènements tragiques provient du fait que la plupart des stades sont non conformes aux règles de sécurité, mal entretenus, un service d'ordre inadapté ou en sous-effectif face à l'ampleur des certains évènements. Dans un constat général, les stades africains n'ont pas été construits et pensés pour des matchs de football. Ils se rapprochent plutôt des stades omnisports. A titre d'exemple, le stade du Cameroun, construit pour la dernière CAN en 1972, n'est aujourd'hui plus du tout adapté pour accueillir des rencontres footballistiques.

81 LOROT PASCAL et DAGUZAN JEAN-FRANCOIS, « Football, puissance, influence », Géoéconomie, vol n°54, été 2010, P. 27

82 GRAVILLON ISABELLE, « Le football, une histoire africaine », Union française des oeuvres laïques d'éducation sportive, vol n° 437 P. 11- 12.

80

Les autres conséquences importantes sont les suivantes :

- Le fléau de la corruption83 (voir chapitre 3, partie III). La corruption est monnaie courante dans la plupart des pays du continent : matchs truqués, volatilisation de subventions, fausses factures, trafic de jeunes joueurs de football sont les pratiques que l'on retrouve très souvent dans la plupart des pays africains, empêchant le continent d'y développer un football sain. De surcroît, nombreux sont les dirigeants des Etats d'Afrique qui semblent réfractaires à tout effort dans ce domaine, minimisant pour quelques-uns d'entre eux, certains évènements tragiques qui se déroulent au sein de ces stades. En dépit d'actions visant à inverser la tendance, beaucoup de délégations africaines ferment les yeux sur des pratiques on ne peut plus calamiteuses.

- Le non-professionnalisme des équipes nationales et des clubs. En effet, « la tutelle politique » au sein des équipes est un fléau incessant dans le football africain. Le football est devenu « une arme de contrôle sociale et de mobilisation nationales ». Pour preuve, nombreuses sont les fédérations africaines où les dirigeants sont issus du pouvoir politique. Le football est donc devenu un moyen d'instrumentaliser un régime autoritaire. On se souvient bien évidemment du sort de la sélection nationale ivoirienne en 2000, lors d'une mauvaise prestation des joueurs, condamnés par le sulfureux président Robert Guei, à effectuer un séjour de quatre jours dans une caserne militaire. Cette peine disproportionnée, n'était que la sanction des contre-performances de l'équipe.

- Enfin, on dénote en Afrique très peu d'agents sportifs. Ceci trouve son explication dans la « quasi » non existence de cadres juridiques solides. De surcroît, les championnats africains ne permettent pas aux joueurs de se doter d'une protection, ce qui décourage bien évidemment les investisseurs et impacte sur le long terme la santé financière des clubs.

Ces conséquences aussi déplorables soient-elles, impliquent un phénomène récent et récurrent qui met en péril le football en Afrique. Il s'agit du « muscle drain », autrement dit l'exode des nouveaux talents africains.

83 LOROT PASCAL et DAGUZAN JEAN-FRANCOIS, « Football, puissance, influence », Géoéconomie, vol n°54, été 2010, P. 27

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"Je ne pense pas qu'un écrivain puisse avoir de profondes assises s'il n'a pas ressenti avec amertume les injustices de la société ou il vit"   Thomas Lanier dit Tennessie Williams