Chapitre I : Etat des connaissances
L'érosion est un phénomène de
société. Dans la nature tant que les sols sont couverts,
l'érosion est lente (1 mètre en 100 000 ans). Mais dès que
le sol est dénudé, le ruissellement et l'érosion
s'emballent .On observe alors une ablation intense sur pentes fortes et une
squelettisation des sols sur pentes faibles (ROOSE, 1981 ; ROOSE, 1991). BUFALO
et OLIVEROS (1990) distinguent une phase de production d'éléments
dissous ou de particules solides et une phase de transport.
L'érosion hydrique est causée principalement par
la pluie et le ruissellement. Ces deux agents interagissent avec plusieurs
facteurs pour conférer une certaine dynamique au phénomène
et moduler le type de morphogenèse.
I.1. Sur les agents et facteurs de l'érosion
hydrique
En Afrique tropicale, les précipitations pluviales,
caractérisées par leur grande pluviosité (volume d'eau qui
tombe), leur durée et intensité (caractéristique la plus
déterminante) sont avec le ruissellement les principaux agents
responsables de l'érosion hydrique. Lors d'une averse, "l'effet splash"
ou l'impact des gouttes d'eau à la surface du sol pulvérise les
agrégats et détache les éléments du sol. Il se
forme une pellicule de battance peu perméable génératrice
du ruissellement (ROOSE, 1981 ; LOUEMBE et TCHICAYA, 1993).
Quand le ruissellement commence, il est dans un premier temps
diffus. Il transporte les éléments détachés par le
splash. Lorsque la quantité d'eau ruisselante devient épaisse, le
coefficient de frottement de la lame d'eau et de la surface du sol augmente
puis le ruissellement devient abrasif (ROOSE, 1981 ; GUILLOBEZ, 1990).
A Brazzaville les études de LOUEMBE et TCHICAYA (1993),
NGABAKA-KOUBANGO (2004), MBOUNGOU-SOMPI (2006) et MAYIMA (2007) confirment que
l'agressivité des pluies et leur fréquence demeurent les
principales causes de l'érosion hydrique.
Le degré d'exploitation du sol par l'homme, la
topographie et la nature du sol constituent les principaux facteurs qui
interagissent et régissent l'ampleur de l'érosion pluviale.
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Sous forêt secondaire à Adiopodoumé, ROOSE
(1981) a montré que l'érosion augmente avec la pente : de 17
à 455 kg/ha/an pour 7 à 65% de pente. Sur les Padza (sols
dénudés et pentus de Mayotte), du 2/12/03 au 11/03/04, SARRAILH
et FERET (2005) ont mis en évidence des départs de 150 t/ha sur
pentes comprises entre 10 et 20% et 250 t/ha pour les pentes supérieures
à 20%. Les pertes en terre croissent de façon exponentielle avec
l'inclinaison des terrains (ROOSE ,1981). A Brazzaville, NGABAKA- KOUBANGO
(2004) a montré que les pentes faibles et longues et les pentes courtes
et fortes augmentent respectivement le débit et la vitesse
d'écoulement de la nappe d'eau. MBOUNGOU-SOMPI (2006), affirme
également que plus la pente augmente, plus les pertes en terres
croissent.
La texture, la structure, le couvert végétal, la
composition chimique et le degré d'humidité du sol interagissent
et modulent le phénomène d'érosion hydrique :
- pendant la phase d'imbibition, le retard d'apparition du
ruissellement est d'autant plus considérable que la rugosité et
la porosité sont plus importantes. Ces deux éléments du
sol conditionnent l'arrivée à un régime permanent et la
durée de la phase de vidange après l'arrêt de la pluie
(VIGIUER, 1991) ;
- la végétation du sol intercepte les gouttes
d'eau et diminue le splash. De 1 à 4% de pente sous savane
dégradée par le feu, ROOSE (1981) a quantifié des pertes
de 50 à 700 kg/ha/an ;
- les sols argileux par exemple sont peu perméables.
Une teneur considérable en colloïdes (argileux et organiques) dans
le sol augmente la cohésion des particules et diminue leur
détachement sous l'effet du splash. L'eau, par sa teneur associée
aux colloïdes contrôle la stabilité physique du sol (TESSIER,
1994). Lors de deux pluies successives, quand le ressuyage n'est pas
terminé après la première pluie, la phase d'imbibition est
relativement brève dans le deuxième cas.
A Brazzaville, les terrains sableux dénudés par
l'activité des citoyens, pauvres en argile et également en
matière organique ont une texture favorable à leur mise en
mouvement par l'impact des gouttes d'eau et par le ruissellement des eaux
(LOUEMBE et TCHICAYA, 1993 ; NGABAKA-KOUBANGO, 2004 ; MBOUNGOU-SOMPI, 2006 ;
MAYIMA, 2007).
L'intensification des activités humaines sur les sites
urbains est responsable du déséquilibre des différents
éléments du milieu qui se traduit par la destruction de la
couverture végétale, l'imperméabilisation du sol par les
dalles et les toitures des maisons, la pollution physique du sol par les
déchets plastiques... Voila ce qui justifie la rupture morphodynamique
de ces dernières décennies (LOUEMBE et TCHICAYA, 1993 ; GNONGBO,
2003 ; M. TCHOTSOUA ;
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MABONDZO-MANKOU, 2005). En milieu urbain par exemple, les
voiries produites par le lotissement concentrent les eaux lors des forts abats.
Le ruissellement ainsi généré devient agressif. Les
ravinements commencent en aval des principaux collecteurs d'eau et finissent
parfois à devenir spectaculaires au fil des temps (GNONGBO, 2003;
LOUEMBE et TCHICAYA, 1993 ; NGABAKA-KOUBANGO, 2004 ; MBOUNGOU-SOMPI, 2006 ;
MAYIMA, 2007).
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