2. Atouts et obstacles du cadre
réglementaire
En plus de la simple autorisation à opérer les
programmes de microcrédit, la loi 18-97 comporte certains avantages pour
les associations de microcrédit. Ces avantages impactent positivement le
volet de leur financement comme suit :
- la loi restreint le champ d'action des AMC à des
activités de microcrédit (art. 3 de la loi 18-97), cela a permis
aux AMC de se concentrer davantage sur le microcrédit et de
développer leur professionnalisme dans le domaine. Cette
spécialisation a donné ses fruits avec l'existence d'AMC
performantes techniquement et financièrement, et dont la
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Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)
reconnaissance est mondiale. Les AMC ne peuvent faire que le
microcrédit et les opérations qui lui sont directement
liées, ce qui a nécessité, au moins pour certaines d'entre
elles, la création de nouvelles associations
spécialisées171 ;
- La loi oblige les AMC à présenter des
projections financières garantissant leur viabilité au terme
d'une période n'excédant pas cinq ans, à compter de la
date de leur autorisation. Cette obligation a été favorable
à l'émergence d'institutions viables172 plus
attractives à l'égard des différentes sources de
financement ;
- L'approbation du plan comptable du MC par le Conseil
National de la Comptabilité (CNC) (le 26/05/2006 ; devenu
opérationnel à partir de 2008) a permis aux AMC de disposer d'un
tableau de bord composé de ratios prudentiels173, ce qui a
renforcé leur transparence174 à l'égard des
bailleurs de fonds. De même, la supervision du secteur a
été confiée à Bank Al Maghreb qui a défini,
en concertation avec la FNAM, des règles prudentielles
spécifiques au secteur ;
- La loi autorise le Ministère des Finances à
fixer les taux d'intérêts propres au secteur. Ceci démontre
que le gouvernement observe le microcrédit en tant que domaine
spécialisé et distinct des opérations bancaires
classiques. En plus, il est prévu que ces taux seront fixés en
consultation avec le conseil consultatif du microcrédit (CCMC) ;
- La loi exige des audits externes annuels, et ce pour assurer
plus de transparence au niveau du secteur et aider les associations à
capter d'autres sources de financement ;
- La loi prévoit aussi la mise en place des structures
et procédures importantes pour l'encadrement du secteur en
général pour améliorer la coordination et la supervision
du secteur.
En dépit de ses apports, la loi relative au
microcrédit souffre de certains obstacles qui peuvent limiter le
développement des AMC et du secteur. Citons-en les aspects suivants :
- le statut d'association sans but lucratif des AMC entrave
l'accès à certaines sources de financement;
- la loi ne permet pas encore aux AMC de mobiliser
l'épargne;
171 La majorité des programmes de microcrédit
était administré au départ comme un programme parmi
d'autres programmes de développement opérés par les
associations
172 La loi 18-97 impose aux AMC un délai de 5 ans pour
réaliser leur autonomie opérationnelle (couverture des charges
administratives par les produits nets) et financière (couverture des
charges administratives et des charges liées aux risques (provisions)
par les produits nets).
173« Nouvelle loi bancaire : ça bouge dans le
microcrédit ». L'Economiste, 20 février 2005.
174 Pour plus de détails voir l'article « Grosse mise
à niveau comptable », L'Economiste, n°2030.
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- le taux d'intérêt maximum applicable aux
opérations de microcrédit devrait en principe être
fixé175 par arrêté du Ministre chargé des
Finances sur avis du CCMC. Dans la pratique, à ce jour ce taux n'est pas
encore déterminé et les taux d'intérêt
appliqués sont parfois jugés élevés.
Il ressort donc que le cadre réglementaire
régissant les activités de microcrédit contient des
avantages et des entraves au développement des AMC. Les atouts doivent
être renforcés et les entraves endiguées. L'objectif
étant de créer des AMC viables et performantes
financièrement sans pour autant s'éloigner de la finalité
sociale de leur action.
Point 2 : Cadre institutionnel du MC
La loi 18-97 relative au microcrédit a prévu et
mis en place trois structures pour assurer le suivi, l'encadrement et la
supervision du secteur : un comité de suivi des activités de
microcrédit, un conseil consultatif et une entité
fédératrice des AMC. Ce texte de loi a doté le secteur de
deux structures d'encadrement : La Fédération Nationale des
Associations de Microcrédit (FNAM) où toutes les associations de
microcrédit sont tenues d'adhérer. Elle a vu le jour le 4 octobre
2001176. C'est l'organe de concertation, de coordination interne et
de représentation du secteur dont le rôle consiste à
organiser l'activité des associations de microcrédit et y assurer
leur représentation. Toutefois cette organisation (FNAM) ne peut
afficher « qu'une expérience institutionnelle relativement
brève, marquée des désaccords provoqués par la
nature hétérogène de ses membres » 177.
Elle ne dispose pas des moyens humains nécessaires dans la mesure
où elle ne compte qu'un seul poste permanent (Responsable administratif
et financier). Et pour de nombreuses questions de gouvernance « les 7
membres de taille moins importante ont fait bloc pour voter, privant ainsi de
véritable représentation les quatre membres plus importants en
taille »178 .
Quant au Conseil Consultatif pour le Microcrédit
(CCMC), il est consulté sur toutes les questions liées au
développement du secteur. Ce Conseil est présidé par le
Ministre des
175 Article 8 de la loi 18-97 relative au microcrédit.
176 LAMRINI, Rida. (2009). Les chevaliers de l'infortune,
Microcrédit au Maroc : la genèse. Editions Marsam. p.73
177 XAVIER, Reille. et TIMOTHY. R. Lyman, op . cit.
178 Idem.
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Finances et composé de 15179
membres180 représentant l'ensemble des organismes pouvant
contribuer au développement du microcrédit, dont seulement 3 du
secteur de microcrédit (nommés par la Fédération).
Egalement, il donne son avis au Ministre des Finances sur l'octroi et le
retrait d'agrément, sur les règles comptables et prudentielles,
sur le montant maximum de microcrédit et sur les taux
d'intérêt à appliquer par les associations de
microcrédit.
Dans le but d'assurer une transparence au niveau de la gestion
des AMC, la loi prévoit la création d'un Comité de Suivi
des activités des AMC qui veillera au respect des dispositions de la
loi. Ce comité est composé des représentants de trois
départements ministériels (Finances, Intérieur, Emploi)
chargé de veiller au respect par les associations de microcrédit
des dispositions de la loi régissant le microcrédit et des textes
pris pour son application.
Concernant le contrôle sur pièces et sur place
des associations de microcrédit, la loi n° 3403 (loi bancaire de
2006) a transféré cette attribution à Bank Al-Maghreb. Les
résultats des contrôles effectués par cette structure de
supervision sont adressés au Comité de suivi pour
instruction.
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