Section 4. PRINCIPAUX DROITS FONDAMENTAUX DU
SALARIE
§1. La rémunération du travailleur
salarié a. Définition et intérêt de
la rémunération
L'une des obligations essentielles mises à la charge de
l'employeur consiste à rémunérer le travail fourni par le
travailleur. Par nature on ne conçoit pas un contrat de travail à
titre gratuit. D'après le code du travail, la rémunération
désigne la somme représentative de l'ensemble des gains
susceptible d'être évalués en espèce et fixé
par accord ou par les dispositions légales et réglementaires qui
sont dues en vertu d'un contrat de travail par un employeur à un
travailleur.
L'Article 86 du code du travail précise que: «
A conditions égales de travail, de qualification professionnelle et
de rendement, le salaire est égal pour tous les travailleurs, quels que
soient leur origine, leur sexe et leur âge. La rémunération
d'un travail à la tâche ou aux pièces doit être
calculée de telle sorte qu'elle procure au travailleur de
capacité moyenne et travaillant normalement, un salaire au moins
égal à celui du travailleur rémunéré au
temps et effectuant un travail analogue. »25
La rémunération peut s'entendre selon un sens
large, elle désigne le salaire de base ou traitement minimum et tous les
avantages et accessoires payés en raison de l'exécution par le
travailleur d'une certaine prestation.
25 Article 86 du code du travail
17
Ces différents avantages peuvent être
procurés directement ou indirectement. Au sens restreint, strict, c'est
le prix de base du travail fourni par le travailleur.
Le salaire présente un caractère alimentaire et
cela qui caractérise le travail, il constitue pour beaucoup des cas le
seul revenu du salarié.
La perception d'un salaire suffisant passe par un besoin vital
pour le salarié. Le salaire présente également un
caractère forfaitaire dans la mesure où la créance des
salaires est indépendante de la prospérité de l'Entreprise
(le travailleur ne court aucun risque dans l'entreprise, il n'à
supporter aucune perte).
Le droit à la rémunération est
consacré par la constitution de la RDC et divers instruments
internationaux (DUDH,...) il est un droit fondamental. L'article 23 du DUDH
garantit le droit à une rémunération qui permette aux
travailleurs et à leurs familles de vivre dans des conditions
dignes.26 L'OIT a adopté des conventions qui régulent
la mise en place d'un salaire minimum.
Malgré la Convention 100 de l'Organisation
Internationale du Travail et les progrès faits en mettant en avant le
principe de non-discrimination, de nombreux obstacles barrent le chemin qui
conduit à la jouissance de ce droit dans de nombreux pays. Même
si, dans de nombreux pays la législation nationale prône le
principe d'une rémunération égale pour un travail de
valeur égale, en pratique la discrimination dans les salaires persiste.
La discrimination dans les salaires n'affecte pas seulement les femmes. Elle
peut aussi toucher n'importe quel critère interdit par cette Convention
de l'OIT.
En principe, le montant du salaire est librement
discuté entre les parties, dans le cadre du contrat individuel de
travail. Mais la loi et les conventions collectives apportent des restrictions
à cette règle.
b. Eléments de la rémunération
Enumération des éléments de la
rémunération ; Selon le code du travail, la
rémunération comprend notamment le salaire ou le traitement, les
commissions, l'indemnité de vie chère, la participation aux
bénéfices, les sommes versées à titre de
gratification de mois complémentaires, les sommes versées pour
les prestations complémentaires, valeurs des avantages en nature,
allocation de congé ou indemnité compensatoire de congé,
sommes payées par l'employeur pendant l'incapacité de travail
et
26 Article 23 de la Déclaration Universelle des
Droits de l'Homme
18
pendant la période précédent et suivant
l'accouchement. Il ressort que l'article 7 du code du travail que
l'énumération faite par le législateur n'est
qu'exemplative, elle n'est pas limitative.
c. Analyse des quelques éléments
1) La gratification 27 : elle consiste normalement en une
somme d'argent remise par un employeur pour montrer au personnel sa
satisfaction du travail accompli pour la prospérité de
l'entreprise ou alors à l'occasion d'événements familiaux
intéressant directement le salarié tel que le mariage, ou la
naissance d'un enfant. Elle constitue un acte de
générosité et à titre gratuit. Elle connue en
politique sous plusieurs noms : treizième mois, prime de bilan, prime de
fin d'année, prime exceptionnelle, prime de vacance,...
2) Primes28 : on distingue différentes
sorte de prime parmi lesquels les primes de rendement consistant en
suppléant proportionnel à l'évaluation de la production et
manifeste une survivance partielle du salaire au rendement. Les primes
d'ancienneté sont des primes accordées en fonctions des
temps passés dans l'entreprise et sont destinés à
encourager la stabilité du travailleur. Les primes
d'assiduité sont destinées à combattre
l'absentéisme des salariés travailleur. Elles sont
considérées par le syndicat ouvrier comme des primes
antigrèves.
3) Les indemnités : le terme générique
d'indemnité revêt plusieurs significations en matière du
travail. Les indemnités désignent des éléments du
salaire ou des substituts à celui-ci. Tel est le cas de
l'indemnité de congé payé, indemnité du
préavis, les indemnités rémunératoires,
compensatrices, représentatives des frais,...
4) Les commissions 29: la commission est un
salaire sous la forme d'un pourcentage sur des commandes obtenues par les
salariés, ce mode de rémunération est fréquemment
employé pour les représentants de commerce. Le droit aux
commissions sur vente est acquis de l'instant où les commandes sont
exécutées par l'employeur.30
5) La participation aux bénéfices : En
intégrant la participation aux bénéfices dans la
rémunération, le législateur n'a voulu, qu'un
accroissement entre le travailleur et l'employeur.
27 Yves-Junior Manzanza Lumingu, Droit du travail
congolais : Analyse critique des retenues légales sur la
rémunération en RDC, Editions Universitaire Européennes,
s.l., 2012 p28
28 idem
29 Paul Orban, Droit civil du Congo belge. 2.,
Contrats et obligations, Larcier, Bruxelles 1956 p93
30 Article 93, al.2 du code du travail
19
Le montant du salaire est fixé soit à l'heure,
soit à la journée, soit à la semaine, soit au mois, soit
à la pièce, soit à la tâche. On distingue ainsi deux
sortes de rémunération à savoir : la
rémunération au temps et au rendement. La loi prévoit que
les salaires peuvent être fixés par la convention collective du
travail. Si tel est le cas, cette convention ne peut déroger au SMIG
selon l'ordonnance de 2008, dans le sens défavorable du travailleur.
Pour ce qui est du paiement de la rémunération,
en ce qui concerne la forme, sauf exception légale, il est interdit de
payer tout ou partie de la rémunération en nature. La loi exclu
ainsi la dation en paiement, la rémunération doit être
payée en espèce sous déduction éventuelle de la
contrevaleur des avantages dus par l'employeur et remis en nature au
travailleur.
Le salaire doit être stipulé en monnaie ayant
court légal en RDC, et il est remis au travailleur salarié
lui-même ou à un mandataire muni d'un pouvoir spécial.
Les sanctions, en cas de paiement tardif de la
rémunération, peuvent consister pour le travailleur
salarié à demander le paiement des dommages intérêts
moratoires
d. Le taux journalier du salaire minimum interprofessionnel
garanti (SMIG)31
Le salaire minimum interprofessionnel garanti, Smig, est
conçu par le gouvernement de la République démocratique du
Congo comme un élément de sa politique macroéconomique
(sous son volet politique salariale) afin de relever les salaires
déprimés pendant plus de trois décennies.
Le SMIG est considéré comme étant un
salaire auquel aucune convention collective, aucun contrat de travail ne peut
apporter une dérogation en fixant un salaire inférieur. Ce
salaire à donc un caractère impératif et il en ressort que
sa fixation de la rémunération n'est plus laissée à
la liberté des volontés, à la volonté des
parties.
L'autorité l'investit dans la
rémunération pour des intérêts
économico-social, dans la protection des travailleurs en vue de
permettre de satisfaire ses besoins élémentaires et de sa famille
(père, mère, enfants, épouse...). La loi institue une zone
unique pour le SMIG. Il est fixé au niveau national et
interprofessionnel : s'applique à toutes professions confondues.
On établit dans le SMIG une certaine
hiérarchisation des salaires réalisée en fonction de la
classification de différents emplois, et de la qualification
31 SMIG : salaire minimum interprofessionnel
garanti
20
professionnelle. Il est établit particulièrement
en partant de la catégorie la plus inférieure (celle des
manoeuvres ordinaires) dont le salaire est fixé en fonction des besoins
essentiels de la famille du salarié. Il est aussi ajusté en
fonction de l'indice de prix à la consommation. Cette disposition vise
à sauvegarder le pouvoir d'achat du travailleur.
Il est prévu à cet effet que le gouvernement de
province et l'inspection du travail devraient examiner son niveau par rapport
au prix de la consommation.
Aucun salaire, quel que soit son mode de calcul, ne peut
être inférieur au SMIG. L'évolution du montant du SMIG est
fonction :
-- du coût de la vie (inflation)
-- de la croissance économique.
§2. Les droits du salarié relatifs à la
durée du travail
Depuis la révolution industrielle au XIXe
siècle, la durée annuelle effective moyenne du travail des
salariés n'a cessé de diminuer.
Cette durée annuelle effective moyenne du travail
dépend de la durée hebdomadaire du travail, mais également
du nombre de jours fériés, de la durée des congés
payés, etc.32
Mais en RDC dans tous les établissements publics ou
privés, même d'enseignement ou de bienfaisance, la durée
légale du travail des employés ou ouvriers de l'un ou de l'autre
sexe, quelle que soit la forme dans laquelle est exécuté le
travail, ne peut excéder quarante-cinq heures par semaine et neuf heures
par jour.33
2.1 La durée globale hebdomadaire
La durée légale hebdomadaire du travail est
fixée en RDC à quarante-cinq heures depuis 2002. Elle doit se
calculer à partir du moment où le travailleur se tient sur les
lieux du travail à la disposition de l'employeur jusqu'au moment
où les prestations cessent, conformément aux horaires
arrêtés par l'employeur et reproduits au règlement
d'entreprise.
Elle ne comprend pas le temps nécessaire au travailleur
pour se rendre au lieu du travail ou pour en revenir, sauf si ce temps est
inhérent au travail.
32 Histoire du droit du travail De la fin de la
seconde Guerre Mondiale à aujourd'hui par Bénédicte
BALLOUHEY-McQUEEN cours de Droit du Travail 27 juillet 2006 Avignon
33 Code du travail congolais Art.119
21
Les heures effectuées au-delà de la durée
légale du travail sont considérées comme heures
supplémentaires et donnent droit à une majoration de salaire.
2.2 Durée de travail des enfants
L'article 55 de la loi portant protection de l'enfance stipule
que : « l'enfant ne doit pas travailler plus de quatre heures par jour. Le
travail de nuit d'un enfant soit de dix-huit heures à dix-huit heures
est interdit.34
L'enfant est protégé contre toutes les formes
d'exploitation économique. L'exploitation économique s'entend de
toute forme d'utilisation abusive de l'enfant à des fins
économiques. L'abus concerne notamment le poids du travail par rapport
à l'âge de l'enfant, le temps et la durée de travail,
l'insuffisance ou l'absence de la rémunération, l'entrave du
travail par rapport à l'accès à l'éducation, au
développement physique, mental, moral, spirituel et social de
l'enfant.
1. Les heures supplémentaires
L'employeur est autorisé à recourir aux heures
supplémentaires dans la limite de deux cent vingt heures par an et par
salarié. Depuis certains temps il peut dépasser ce contingent
annuel d'heures supplémentaires après avoir demandé l'avis
du comité d'entreprise, ou à défaut, des
délégués du personnel s'il en existe et sans avoir
à obtenir l'autorisation de l'inspecteur du travail.
Les heures supplémentaires ne doivent pas avoir pour
effet d'entraîner un dépassement de la durée maximale du
travail : quarante-huit heures par semaine et quarante-quatre heures en moyenne
sur douze semaines. La durée quotidienne de travail effectif d'un
salarié ne peut excéder dix heures.
2. les jours fériés légaux
Tout travailleur doit jouir, au cours de chaque période
de sept jours, d'un repos comprenant au minimum 48 heures
consécutives.
Ce repos doit être accordé autant que possible,
en même temps à tout le personnel. Il a lieu en principe le samedi
et le dimanche.35
34 Article 55 loi portant protection de l'enfance
35 Art. 121 Code du Travail congolais
22
Pour avoir droit aux congés payés, il faut avoir
travaillé au moins un mois chez le même employeur. La durée
totale des congés est proportionnelle au temps de travail
effectué dans l'entreprise pendant la période de
référence
3. L'hygiène et la
sécurité
L'employeur doit prendre toutes les mesures nécessaires
pour assurer la sécurité (éviter les accidents du travail)
et protéger la santé de ses salariés (respect des
règles d'hygiène...), actions de prévention des risques
professionnels, information, formation, mise en place des moyens de protection
adaptés, etc.
La responsabilité civile et pénale de
l'employeur peut être engagée en cas d'accident du travail dont il
est établi qu'il trouve son origine dans le non-respect par l'entreprise
de la réglementation en matière d'hygiène et de
sécurité.
- la responsabilité civile de l'employeur
Le Code du travail en matière de la
Sécurité sociale prévoit une indemnisation forfaitaire
pour les victimes (ou leurs ayants droit) d'un accident du travail ou d'une
maladie professionnelle. Il exclut la responsabilité de droit commun de
l'employeur, sauf en cas de faute inexcusable, c'est-à-dire lorsque
l'employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel
était exposé le salarié et qu'il n'a pas pris les mesures
nécessaires pour l'en préserver. La responsabilité civile
peut alors être engagée pour le préjudice personnel subi
par la victime (préjudice physique). L'employeur peut s'assurer contre
ce risque.
- la responsabilité pénale de l'employeur
Le Code du travail prévoit que les infractions aux
règles d'hygiène et de sécurité sont des
délits punis de peines correctionnelles qui dépendront des cas
soient ; homicide involontaire, incapacité totale de travail,... La
sanction frappe le chef d'entreprise ou le collaborateur à qui il a
consenti une délégation de pouvoir en matière
d'hygiène et de sécurité. Cette délégation
suppose que le collaborateur ait reçu la compétence et
l'autorité nécessaire à son exercice.
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