§2. Une prérogative réglementée
pour protéger les salariés
2.1 Les sanctions interdites par la loi et la
Jurisprudence
*Les sanctions discriminatoires
Selon le Code du Travail aucun salarié ne peut
être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure
discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de
rémunération, de mesures d'intéressement ou de
distribution d'actions, de formation, de reclassement, d'affectation, de
qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou
de renouvellement de contrat en raison de son origine, de son sexe, de ses
moeurs, de son orientation sexuelle, de son âge, de sa situation de
famille ou de sa grossesse, de ses caractéristiques
génétiques, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie
ou supposée, à une ethnie, une nation ou une race, de ses
opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de ses
convictions religieuses, de son apparence physique, de son nom de famille ou en
raison de son état de santé ou de son handicap. » (Article
64 al.2 du Code du Travail).
Il s'agit d'éléments appartenant à la vie
privée du salarié qui ne doivent pas entrer dans le champ
professionnel.
46 Art.54 code du travail
33
L'employeur ne peut donc pas fonder sa sanction sur un de ces
éléments. Il ne peut pas, par ailleurs, apporter des restrictions
aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives
qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à
accomplir ni proportionnées au but recherché.47
*Les sanctions pécuniaires
L'Article 111 du Code du Travail énonce : «- Les
amendes ou autres sanctions pécuniaires sont interdites.»
Toute disposition ou stipulation contraire est
réputée non écrite. La sanction pécuniaire est
prohibée mais la sanction disciplinaire ayant des répercussions
pécuniaires est légale.
L'employeur ne peut pas prévoir dans le contrat de
travail ou dans le règlement intérieur de son entreprise une
interdiction générale visant toute forme de retenue sur salaire
en raison d'une faute du salarié ou d'un exécution volontairement
défectueuse de sa prestation de travail.
*Le non-cumul des sanctions Cela signifie donc qu'une sanction
antérieure de plus de trois ans à l'engagement de nouvelles
poursuites disciplinaires ne peut pas être invoquées, par
l'employeur, pour sanctionner plus gravement les faits reprochés au
salarié.
2.2 Une procédure disciplinaire à
respecter
La procédure disciplinaire est valable pour les
sanctions décidées par l'employeur. Elle peut être
conventionnelle, c'est-à-dire prévue par le
règlement intérieur de l'entreprise, ou
légale. Il faut noter que ce n'est pas parce que la procédure
est prévue par le règlement intérieur qu'elle ne doit pas
respecter les principes de base énoncé par la loi. Cette
procédure comporte deux phases : l'entretien préalable et la
notification de la sanction.
*L'entretien préalable
L'entretien préalable est une obligation légale
: si le règlement intérieur de l'entreprise ne la prévoit
pas, elle devra quand même avoir lieu. Avant la notification de la
sanction, un entretien préalable doit avoir lieu sauf si la sanction
envisagée est « un avertissement ou une sanction de
47 MAINGAIN, B., Le droit social et la crise de
l'emploi, tome I, Paris et Bruxelles, De Boeck et Larcier s.a., 1996. p44-45
34
même nature qui n'a pas d'incidence, immédiate ou
non, sur la présence dans l'entreprise, la fonction, la carrière
ou la rémunération du salarié ». L'avertissement est,
par exemple, une sanction mineure n'ayant pas d'incidence immédiate sur
la place du salarié dans l'entreprise. Il ne nécessite donc pas
la mise en oeuvre d'un entretien préalable contrairement au blâme,
à la rétrogradation, la mutation ou le licenciement.
Le salarié est donc convoqué par écrit
à l'entretien dans les deux mois de
la connaissance des faits.
Pour être licite, il est nécessaire que la
convocation, remise en main
propre contre décharge ou envoyée en
recommandé comporte les
informations suivantes :
- l'objet de l'entretien,
- la date,
- l'heure,
- le lieu de l'entretien,
- et la possibilité pour le salarié de se faire
assister par une personne
appartenant à l'entreprise.48
Au cours de l'entretien, l'employeur indique le motif de la
sanction et le salarié peut se défendre, apporter des
explications concernant les faits qui lui sont reprochés.
*La notification de la sanction
Une fois l'entretien passé dans les conditions voulues
par les deux parties, l'employeur doit notifier au salarié le motif de
la sanction et la sanction elle-même.
Pour les sanctions mineures qui n'ont pas fait l'objet
d'entretien préalable, il n'y a pas de délai pour la notification
de la sanction. Par contre, pour les sanctions qui ont été
infligées suite à un entretien préalable, elles ne peuvent
intervenir moins d'un jour franc ni plus d'un mois après le jour
fixé pour l'entretien.
48 Droit du travail
Contrats de travail, licenciement, démission, formation
professionnelle, salaire, santé et sécurité,
représentants du personnel, conflits individuels et collectifs,
chômage
25e édition B. Hess-Fallon, S.
Maillard-Pinon, A.-M. Simon
35
§3. Une prérogative
contrôlée par le juge 3.1 L'appréciation
judiciaire
Le salarié sanctionné a la possibilité de
contester la sanction disciplinaire devant les tribunaux du travail.
Le juge va contrôler le bien-fondé de la
sanction.
Il vérifie si cette sanction n'est pas :
- injustifiée (les faits reprochés au
salarié ne sont pas établis) ;
- disproportionnée par rapport à la faute commise
;
- irrégulière : non-respect de la procédure,
non-respect des délais.
C'est l'employeur qui fournit la preuve que la sanction
était régulière,
justifiée, proportionnée.
Si un doute subsiste, il profite au salarié. 49
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