7.2 Modèles explicatifs de l'amorçage
Il existe plusieurs modèles qui permettraient
d'expliquer le phénomène d'amorçage. Le premier que nous
présenterons est héritédu modèle de Collins et
Loftus (1975) et de la psychologie computationnelle, il reste encore
utiliséde nos jours du fait de sa facilitéde compréhension
et se place au niveau des représentations. Le second (Masson, 1995)
rompt totalement avec le premier et est tirédes théories du
connexionnisme qui se placent à un niveau sub-représentationnel
et proposent un modèle plus proche de la neurophysiologie
théorique et des réseaux de neurones que de la psychologie
cognitive. Enfin le troisième développépar Ratcliff et
McKoon (1988) se base sur le concept de familiaritéet fait appel aux
relations entre mémoire à court terme (MCT) et mémoire
à long terme (MLT).
7.2.1 Diffusion de l'activation
Le modèle de propagation de l'activation ou diffusion
de l'activation (spreading activation theory) est particulièrement
utiliséen psychologie cognitive pour expliquer ce
phénomène. Un concept activépar un input interne ou
externe activerait tout un réseau de concepts voisins. Dans notre cas,
le mot »café» pourrait alors activer »sucre»,
»lait», »cappuccino», mais aussi »terrasse»,
»cigarette». Ainsi, après activation d'un premier concept,
tous les autres gravitant autour de ce dernier, seraient
pré-activés (Collins et Loftus, 1975). Ce modèle suppose
donc à la base, que les idées seraient agencées selon un
réseau de noeuds interconnectés et communicants. Contrairement au
modèle
7.2 Modèles explicatifs de l'amorçage 85
de Quillian (1969), l'ensemble de ces noeuds-concepts ne
seraient pas organisés hiérarchiquement mais plutôt selon
une distance et un poids sémantique.
Ce modèle se base sur plusieurs hypothèses :
| (i)Lorsqu'un concept est stimulé, l'activation irait
diffuser sur l'ensemble du réseau selon un gradient décroissant.
Ainsi, les concepts les plus éloignés du concept
stimuléseraient activés à moindre degréque
86 7 Amorçage, traces mnésiques et intuition
Figure 7.1. Exemple d'un réseau
sémantique réaliséà partir des amorces
utilisées dans l'expérience : tasse de caféet affiches
utilisées pendant l'expérimentation. Il y aurait diffusion de
l'activation à partir des amorces, et il existerait un gradient
d'activation représentée dans l'exemple par l'épaisseur
des lignes. Plus les représentations sont proches des amorces et plus
elles auraient un degréd'activation élevé. Et, plus il y
aurait d'amorces activatrices de la même représentation, plus la
représentation serait activée.
les concepts jouxtant le concept stimulé. Il serait
donc plus facile pour un expérimentateur d'activer »sucre» en
amorçant le mot »café», que »soucoupe» ou
»confiture».
(ii) Selon ce même modèle, plus l'activation
est répétée dans le temps, et selon plusieurs
modalités (sémantique, sensorielle), et plus l'activation
durerait dans le temps. Dans le cas de notre expérience, les
participants étaient amorcés grâce aux affiches de terrasse
de cafés avant l'entrée dans la salle d'expérimentation,
puis l'amorçage continua pendant toute la passation du test d'intuition
et selon une modalitévisuelle (affiches, gobelets) et olfactive (odeur
du café).
(iii) L'activation est une variable quantitative qui
nécessiterait d'atteindre un seuil d'activation afin d'activer un
certain concept cible. Cette quantitéd'énergie serait directement
proportionnelle à la somme des stimuli et à la
diversitédes modalités utilisées. Ainsi comme vu
précédemment, dans le but d'activer la solution au
problème posé(cafés), nous avons utiliséplusieurs
amorces, toutes reliées de façon conceptuelle et perceptive
à la cible afin de maximiser l'énergie d'activation
diffusée.
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