I.1.4 Les parties prenantes aux risques
Les risques sont souvent le contrecoup de l'activité
humaine. Même les risques dits naturels peuvent avoir pour germe l'action
de l'homme sur son écosystème. Par conséquent,
l'être humain est certainement le premier danger pour lui-même et
en même temps celui qui peut mieux se prémunir contre ses propres
actions.
Remarquons que même dans l'action de protection, l'homme
peut abuser de son statut de protecteur pour nuire, ce qui conduisit le
philosophe latin Juvénal à se poser la question suivante :
quis custodiet ipsos custodes, c'est-à-dire qui garde les
gardiens ? En d'autres
9 G. KIMBWANYI, Gestion des ressources
humaines, Cours dispensé en 3ème année de graduat,
ULPGL/GOMA, Année Acad. 2015-2016, inédit.
8
termes, que ce soit dans notre société en
général, ou dans les entreprises en particulier, l'individu peut
être protecteur ou les deux à la fois10.
Or, pour combattre le risque, il s`agit non seulement de
définir les risques, ce que nous avons déjà fait dans la
première sous-section de cette section, mais aussi évaluer quels
en sont les producteurs et les gestionnaires de l'autre. Ainsi nous avons :
A) LES PRODUCTEURS DE RISQUES ? Leur profil :
Les producteurs de risques peuvent avoir trois profils
différents. Ils peuvent être délinquants
avérés, spéculateurs ou encore être
négligents. A cet effet :
a) Les délinquants
Est délinquant, celui qui agit contre l'entreprise de
manière illégale. Par exemple, avec le développement
informatique, trois profils de délinquance sont identifiés : les
hackers, cordaires et les phreakers.
b) Le spéculateur
Celui-ci est un amoureux du risque. Son comportement est
à l'opposé de celui du gestionnaire du risque. Il n'agit pas
forcément de manière illégale, mais il peut agir au
détriment de l'entreprise. Ainsi, les décideurs d'une firme
peuvent par exemple être tentés d'investir de manière
massive dans les domaines d'activités, alors que le potentiel de ces
activités est mal connu et mal estimé, en espérant que
leur stratégie soit payante à long terme, cela peut entrainer des
pertes à l'entreprise.
c) Le négligent
Est celui qui met d'autres personnes en danger sans en avoir
eu l'intention. C'est le cas par exemple d'un fumeur qui laisse tomber son
mégot à proximité d'une Station-service et qui
créée une incendie.
? Leur provenance :
Cette provenance est double. Le risque peut venir des membres
de l'organisation. Dans ce cadre, tout salarié d'une entreprise est nous
le rappelons, potentiellement un risque pour celle-ci. Le risque peut
également résulter d'agissements extérieurs à
l'entreprise et dans ce cas, il peut être le produit d'un individu
isolé ou d'organisations concurrentes.
10 O. HASSID, op. cit. p.37
9
a) Les producteurs internes de
l'organisation
L'entreprise est constituée de trois partenaires : Les
dirigeants, les salariés et les actionnaires.
En 1932, deux gestionnaires Berle et Means, cités par
Olivier HASSID dans : « le management des risques et des crises » ont
constaté que les objectifs de partenaires précédemment
cités sont vraiment diversifiés : car les premiers
privilégient la maximisation des profits tandis que les seconds
cherchent à maximiser les ventes globales de la firme afin d'augmenter
leur propre revenu et leur prestige. De même, il existe une
différence d'objectifs entre les dirigeants et les actionnaires. Les uns
essayent d'obtenir un meilleur rendement de leurs salariés à
partir d'un système d'incitations et de contrôles, les autres
essayent d'optimiser leur effort en fonction de leur espoir
d'avancement11.
Dans cette perspective, les dirigeants, employés et
actionnaires, sont susceptibles de produire des risques différents
volontairement ou involontairement. En effet, les dirigeants ayant en charge la
stratégie de l'entreprise et sa survie sont sollicités pour
prendre de risques de nature parfois illégale. Par exemple, et
paradoxalement, d'un coté, les managers de grandes firmes
internationales établissent des codes de conduite internes pour faire
face à la corruption, et de l'autre, afin de se développer, ils
sont eux-mêmes tentés de corrompre les représentants
d'autorités étrangères pour remporter les parts de
marché. Rappeler vous que les poursuites pénales pour corruption
à l'étranger (comme au pays) constituent un risque
sérieux.
Si les cadres dirigeants sont susceptibles de mettre en
péril l'équilibre de l'entreprise, il en va de même pour
l'ensemble des salariés qui peuvent chercher à tirer un profit
personnel de l'entreprise. Or, ces actes malveillants additionnés,
peuvent être couteux pour l'entreprise.
b) Les producteurs de risques externes à
l'entreprise12
Les opérations de malveillance ne sont pas
évidemment pas le seul fait des membres de l'entreprise. Du consommateur
qui vole à l'étalage, à l'agent de renseignement qui vole
un secret au profit d'une autre entreprise ; des producteurs des risques
multiples et variés.
Signalons les catégories d'acteurs n'appartenant pas
à l'entreprise et pouvant lui causer du tort :
- Les consommateurs ;
- Les médias ;
- Les administrations ;
- Les citoyens ;
- Les agences de notation ;
- La concurrence ;
11 A.A. Berle ,G.C. Means, The Modern Corporation
and Private Property, New York, Mac Millain, 1932
12 O. HASSID, op. cit. ,p.45
10
- Les fournisseurs ;
- Les sous-traitants ;
- Les clients distributeurs, etc.
Toutes ces entités sont devenues, au cours de la
dernière décennie, des sources de risques extraordinaires. Par
exemple, le pouvoir de chacune de ces entités s'est renforcé avec
l'importance prise par l'information. A ce titre, dès que les
médias ou les agences de notation divulguent une information
négative sur une entreprise, les conséquences sont souvent
néfastes alors même que la véracité de l'information
n'a pas été établie.
B) LES GESTIONNAIRES DU RISQUE
Face à cette diversité de producteurs des
risques, se constitue depuis une trentaine d'années un système de
réseau d'acteurs de la prévention des risques. Pour que le risque
ne se réalise, ni ne se traduise en crise, il est nécessaire que
le réseau d'acteurs s'organise.
Mais avant même que la question de l'efficacité
de l'organisation de ce réseau ne se pose, il est nécessaire de
connaitre les différentes catégories d'acteurs en mesure de
participer à lutter contre le risque. C'est dans cette perspective que
nous sommes entrain d'évoquer cinq types d'acteurs en mesure de
participer à la prévention des risques : les entreprises
elles-mêmes, les experts du risque, le secteur de la
sécurité privée et d'assurance, les institutions de
contrôle et les citoyens.
Mais, sans le cadre de ce travail, trois seulement des
intervenants ci-haut vont plus nous intéresser : les entreprises, le
secteur de la sécurité privée & d'assurance et enfin
les institutions de contrôle.
? Les entreprises :
Dans le cadre d'une enquête européenne
réalisée par la société Marsh & McClennan
Compagnies, auprès de 600 chefs d'entreprise, l'importance du risque est
unanimement reconnu par les sondés et un nombre croissant d'entre eux le
considère comme un sujet de préoccupation
prioritaire13.
Certaines entreprises considèrent la notion de risque
comme suffisamment importante pour créer un « poste de risk
management » à plein temps, avec des responsabilités
étendues et une équipe de quelques gens ; Ce sont surtout des
firmes de grande taille, de dimension internationale (elles gèrent des
risques massifs, fréquents et graves).
D'autres entreprises disposent d'une division «gestion de
risques », susceptible d'être rattachée à la division
chargée des problèmes d'assurances sans qu'elle soit mise
particulièrement en avant. Dans d'autres cas encore, le risque peut
être géré par la division, qui a plus à gérer
le risque au quotidien.
13 O. HASSID, op. cit. ,p.45
11
Enfin, certaines entreprises se sentent peu concernées
par rapport à cette question. Celles-ci n'ont généralement
pas la taille, suffisante pour employer un gestionnaire de risques à
temps complet. C'est le cas notamment des nombreuses PME-PMI. Dans ce cadre,
elles privilégient la sous-traitance. Et c'est le directeur
administratif et financier qui reste le principal interlocuteur avec lequel la
gestion de risques est abordée.
? Le secteur de la sécurité privée
et de l'assurance :
Il existe à ce jour deux catégories
d'entreprises qui assurent des activités de gestion de risques : d'un
coté, des entreprises qui garantissent la sécurité des
actifs physiques (locaux, ordinateurs, etc.), humains et immatériels
(logiciel, brevet, base de données) et de l'autre coté, des
entreprises qui proposent des couvertures d'assurance.
Pour le premier type d'entreprises, il s'agit essentiellement
d'assurer des missions de maintenance, de surveillance et de protection
auprès des clients privés ou publics. Dans ce cadre, l'entreprise
est guidée par une philosophie de la prévention des risques de
perte ou de dommage.
Pour le second type d'entreprises, il s'agit de courir les
risques d'entreprises : risques commerciaux, responsabilité civile,
assurance biens. Dans ce contexte, les entreprises d'assurance obligent depuis
une dizaine d'années leurs clients, à intégrer la
nécessité de se protéger, ce qui profite aux entreprises
de sécurité privée. Pour les mêmes raisons
historiques, les assureurs participent depuis le début des années
1980 à un effort de certification des équipements de
sécurité. Si le marché de la sécurité est
encore jeune, le marché d'assurance est quant à lui arriver
à sa maturité.
? L'Etat :
Dans ce contexte, l'Etat est plus que jamais le principal
gestionnaire de risques, comme l'on démontré Guilhem Bentoglio et
Jean-Paul Betbéze (l'Etat et l'assurance des risques nouveaux, la
documentation française, 2005).
A cet effet, l'Etat a quatre fonctions principales dans ce
domaine :
- Sa première fonction est d'être un «
éclaireur des risques ». Dans cette perspective, l'Etat
détient un rôle de producteur, centralisateur et diffuseur des
informations. L'enjeu est d'identifier les espaces qui sont
particulièrement concerné par les risques graves ou le
développement des nouveaux risques ;
- Sa deuxième fonction est celle de « veilleur
». Face à ces risques prévisibles, vigilance et anticipation
sont nécessaires. Si l'on ne peut prévoir l'avenir, une
façon de se préparer à des à des crises nouvelles
consiste à tirer les leçons des crises originales qui ont eu lieu
dans le passé, par l'exercice du retour d'expériences ;
- Sa troisième fonction est d'être un Etat «
Superviseur ». Qu'il s'agisse de la crise des « subprimes » ou
d'autres crises, la coopération internationale en matière de
contrôle est devenue cruciale. Les Etats ont un rôle très
important afin de s'assurer de l'absence d'irrégularités ;
12
- Sa dernière fonction est une fonction de sanction.
Afin d'éviter que les producteurs de risques ne réitèrent,
il convient de mettre en place des institutions de sanction. Ces institutions
que sont les institutions policières et judiciaires n'ont cessé
de croitre en fonction du caractère de plus en plus multidimensionnel du
risque.
|