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Les pratiques foncières locales en milieu rural et leur impact sur le développement agricole: cas de la chefferie de Ngweshe.

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par Isaac BUBALA
Institut Superieur de Développement Rural (ISDR-BUKAVU) - Licencié en Planication Régionale 2015
  

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§3 pluralité des instances d'intervention au niveau local

Comme nous venons de le voir, l'ambiguïté de la législation ne permet pas d'unifier l'interprétation des textes législatifs. La pluralité des instances de mise en oeuvre de la législation foncière ne permet pas non plus d'unifier les pratiques. Ainsi peut-on observer des trajectoires différentes pour l'acquisition des terres d'une concession rurale ou la résolution d'un conflit s'y apportant.

En ce qui concerne l'acquisition des terres rurales, on voit intervenir divers autorités locales, régionales, ou nationales dans un ordre qui diffère, en fonction de la nature des terres à enregistrer (terres coutumières ou « domaine de l'état »), de l'envergure sociale ou politique du demandeur de l'enregistrement, de Sa solvabilité ou de ses relations personnelles avec les membres de l'appareil administratif ou judiciaire, plus spécialement des agents des services des titres fonciers.

§4 les facteurs qui empêchent l'enregistrement du sol par les paysans

Le récit de l'existence du parc national de kahuzi biega nous a révélé que les populations concernées, au point de vue foncier, par cette extension, n'ont été informées de

21 KALAMBAY, G., Le droit foncier zaïrois et son unification, thèse, Louvain-la-Neuve, UCL, 1973, 641 p. Cité par MUGANGU MATABARO Séverin, thèse, op cit, p.6

22 MUGANGU MATABARO Séverin, op cit, p.6-7.

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l'existence de la dite loi que onze ans après. Si à ce moment-là, ces populations n'avaient pas concrètement été menacées d'exploitation, il est évident qu'elles n'auraient jamais été au courant de l'existence de la dite loi.

Les lois, en effet, sont portées à la connaissance du public en RD Congo Par la publication au journal officiel. Le service qui s'en charge est rattaché à la présidence de la république et n'est pas doté des structures-relais dans les provinces. Par conséquent, les lois ne sont pas physiquement à la portée de tous les citoyens. Au demeurant le vocabulaire très technique des lois exclut déjà de sa connaissance une fonction importante de la population.

En interrogeant certains paysans d'ikoma à walungu/ chefferie de ngweshe sur la connaissance de l'existence de la loi foncière, nous n'avons guère été surpris se savoir que la plupart (21/23) n'en n'avait jamais entendu parler. Nous pouvons ainsi supposer qu'un facteur des facteurs qui empêchent l'enregistrement des terres par les paysans serait la méconnaissance de l'existence de la législation et, à plus forte raison, la méconnaissance de son contenu.

Nous avons également analysé que les paysans du Bushi cherchait avant tout à sécuriser sa terre. N'étant pas conscient des garanties qu'offre la loi foncière, il se contente des solutions (fragiles) qui lui sont offertes par l'autorité coutumière qu'il considère comme légitime (le « contrat de délimitation », le « bugule ») ou en invente d'autres à l'ombre de celles-ci (les ventes des terres avec l'accord des chefs locaux). Et quand bien même il en serait conscient, deux types de facteurs pourraient encore l'arrêter : la procédure d'enregistrement des terres rurale et le cout des opérations.

En effet, l'enregistrement par les paysans de sa terre, pour être conforme à la loi, doit souscrire à la formalité de l'enquête préalable, la quelle « a pour but de constater la nature et l'étendue des droits que de tiers pourraient avoir sur les terres demandées en concession ». (Article 193, §2).

Il se fait justement, comme nous l'avons déjà mentionné, que différents individus exercent sur la terre du Bushi des droits différenciés. Il faudrait par conséquent que les paysans désintéressent tous ceux qui auraient les droits à revendiquer sur le terrain ; encore faut-il que ces derniers consentent à être désintéressés. En effet, en demandant l'enregistrement, le paysan cherche à sortir la terre de son contexte social et juridique spécifique et, par conséquent, menace de rompre la « chaine de solidarité » dont la terre est support au niveau du terroir. Autant donc il ne peut se permettre de compromettre son intégration sociale du fait de la tentative de faire enregistrer, autant les hiérarchies sociales

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locales dont il essaierait de s'affranchir, pourraient multiplier les obstacles pour faire échec à sa démarche.

Nous savons du reste que les chefs coutumiers du Bushi ont eux-mêmes crée préalablement à l'introduction de la demande de concession, une série des procédures qui semblent avoir été validé par l'administration foncière. A ces procédures déjà fortes onéreuses, succèderait alors la phase de l'enregistrement qui met en scène le géomètre du cadastre (Art.191, 4B, a et b), le commissaire sous régional, le commissaire de zone et le conservateur des titres immobiliers (Art.190, 193,195). Outre que ces autorités sont physiquement hors de portée du paysan, les couts, surtout informel (corruption et autres) de l'enregistrement sont tels que le paysans du Bushi ne trouverait guère d'intérêt à initier la procédure.

On sait par ailleurs que les rapports entre l'administration et le paysan au Bushi, comme peut-être partout en RDC, sont encore marqués par le souvenir colonial de la contrainte et de l'exploitation. Les paysans évitent par conséquent d'avoir affaire à l'administration de façon générale. Celle-ci est perçue comme une structure parasitaire et tout à fait inapte à apporter des réponses aux problèmes de la société rurale. On a, du reste, d'autant moins de raisons de chercher sa protection, en ce qui concerne la protection des biens, que l'on a vu des concessionnaires exciper des titres légaux sans pouvoir jouir de leurs de fond et que des solutions (« titres fonciers coutumiers ») sont offertes aux paysans contre ceux qui les menacent potentiellement : les voisins et les chefs.23

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