§4 les Rapports entre l'administration foncière
et les ayants-droit coutumiers en matière d'enregistrement des
terres
En dépit de l'existence d'une législation
foncière, la coutume continue à jouer un rôle
prépondérant dans la gestion des terres rurales dans les milieux
ruraux du Bushi, à walungu dans la chefferie de ngweshe par exemple, les
ayants droits coutumiers ont un droit et les
31 MUGANGU MATABARO Séverin, op cit, p.
38-40.
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obligations envers l'administration foncière et ceci se
fait selon chaque type de contrat foncier.
1. Pour le terrain obtenu en « Bwassa » : au cas
où un locateur quitte d'abord le fief pour
y revenir après, le contrat continue à sortir
ses effets en ce qui concerne le droit à la totalité de la
récolte. Le chef foncier n'a aucun droit d'attribution de ce terrain
sous quelque forme que ce soit avant l'achèvement de la récolte.
Il peut cependant réserver ce terrain à un tiers mais avec
obligation pour le second utilisateur d'attendre la récolte
préalable du premier. Certaines formes d'utilisations (ou
d'activité) du sol, du sous-sol ou des eaux sont absolument libre et ne
postulent de la part de l'utilisateur aucune demande préalable, ni de la
part de l'autorité foncière coutumière. Il s'agit par
exemple des végétaux de construction (Mushadu ou Mushushu), terre
saline pour les bétails (Muloba), « pemba », Kaolin «
Ibumba » terre à poterie,....
Le locateur est nominalement désigné par le
bailleur ; cependant lui-même possède du fait de l'accord et pour
toute la durée de celui-ci un droit de répartition du fond obtenu
ou des bénéfices entre tous tiers de son choix descendants,
collatéraux aux amis à condition, toutefois, de ne pas modifier
le caractère de l'accord initial. En ce qui concerne les
étrangers, une restriction existe cependant en ce cas, le préteur
est tenu d'avertir l'autorité foncière qui lui est
immédiatement supérieur, de la présence de
l'étranger dans son fief, mais nullement du fait de l'accord foncier
qu'il a pris ou compte prendre avec cet étranger. Le locataire a donc le
droit d'accorder ou de sous louer en Bwassa sans avis du Bailleur,) tout
frère de clan, tout étranger au sens tribal. Si pendant la
durée du bail, le produit du fonds est détruit en totalité
par cas fortuit, le bail est résilié de plein droit et le
locataire n'est tenu à aucun paiement à posteriori. Si c'est
détruit partie toujours par cas fortuit, le bail ne peut résilier
complètement, mais il peut réduire le paiement
proportionnellement aux dégâts et aux bénéfices. Le
décès du locateur atteint le droit d'utilisation
ultérieure du fonds pour les héritiers. Un nouvel accord devra se
créer pour que l'utilisation puisse être poursuivie. Le
décès du locataire n'atteint par contre jamais le droit des
héritiers sur le produit du fond ; ils peuvent donc, sans avis du
bailleur ; récolter la totalité, mais ce droit ne leur est
accordée que pour une seule récolte.
2. Pour le terrain le « Bwigwarhire » : cette forme
d'autorisation d'usage ne nait pas de la requête individuelle de
l'emprunteur mais se crée à l'initiative de l'autorité
coutumière elle-même. L'attribution se fait collectivement et non
nominalement.
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L'usage s'étend à une grande superficie de
terrain (marais ou colline). Après sa mise en valeur par le
bénéficiaire, ce terrain s'appelle : « Kandalwe ».
Cette forme d'attribution est essentiellement gratuite et
aucune délimitation ou restriction de superficie n'est prévue
pour chacun des bénéficiaires.
En principe, tout citoyen participant à la vie active
de la communauté peut jouir du « bwigwarhire ». Nul
étranger au sen clanique ou tribal ne peut jouir de l'autorisation
d'usage.
La condition de résidence dans le fief n'étant
plus remplie par le bénéficiaire, il perd tout droit aux
bénéfices réalisés sur le fond sauf ceux de la
récolte qui suit immédiatement son départ. A partir de ce
moment ; les fonds, tout ce qui s'y incorpore ou s'y unit et n'a pas
été enlevé par le bénéficiaire, revient le
droit à l'autorité foncière qui pourra soit le conserver
pour son usage personnel, soit une nouvelle attribution sous toute forme de
contrat qui lui est agrée.
Le fait du retour au fief après un départ de
longue ou de courte durée donne automatiquement le droit à une
réutilisation du terrain « Bwigwarhire » si aucune nouvelle
attribution de ce terrain n'a été entre-temps par
l'autorité foncière ; le bénéficiaire peut prendre
toute autre parcelle libre sur le terrain accordé en «Bwigwarhire
», mais ne peut plus prétendre sur son ancienne parcelle. Un simple
cultivateur ne disposera jamais d'un terrain assez important pour faire une
attribution collective sous cette forme. Si théoriquement, le cas se
présentait, il n'aurait pas le droit d'y avoir recours parce qu'il ne
poserait pas un acte à caractère semi-politique.
Il ne peut être conclu d'accord « bwigwarhire' pour
la plantation des cultures pérenne pour des boisements artificiels ou
pour l'installation des huttes destinées à une résidence
permanente. On reconnait au bénéficiaire le droit d'utilisation
du sol et des eaux et la cueillette des produits spontanés
autorisés. Celui qui a mis le terrain en valeur peut, sans avis
préalable du chef foncier, en faire profiter tout tiers de son choix. Le
« Bwigwarhire » est accordé, suivant les cas soit pour une
durée déterminée, soit pour une durée
indéterminée, mais révocable à tout moment. Toute
extension sur cette vierge est autorisée dans les limites du terrain
accordé sans avis de l'autorité foncier. En cas de départ
du terrain d'une parcelle aucun autre habitant du fief ne pourra occuper
celle-ci sans en avertir d'abord l'autorité foncière.
3. Pour le Kalinzi : la condition de Base pour l'obtention
d'un « Kalinzi » est
L'assujettissement politique, social et administratif
vis-à-vis de l'autorité foncière. Tout étranger au
Bushi peut obtenir un « kalinzi » à condition d'accepter le
«Kashiga ». la condition de résidence dans le fief est
absolument requise pour l'obtention d'un kalinzi, parce
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que : « OKUBOKO KUGUMA KURHARIMBA NGOMA IBIRHI »,
« MPANGA NGUMA ERHA RHULA BAMI BABIRHI » c'est-à-dire parce
« on ne peut servir deux maitres à la fois ». Tout citoyen
résidant dans le fief ou il possède déjà un «
kalinzi » ne peut en principe, en solliciter un second dans autre fief. La
possession de deux « kalinzi » dans de fiefs différent est
cependant admise dans le cas où un descendant, installé dans un
fief distinct de celui de son père vient à hériter du
« kalinzi » de celui-ci. Cependant en ce cas, il est tenu d'assurer
le gardiennage sur celui des deux « kalinzi » ou il ne peut pas
résider. Le fait de quitter le fief sans assurer le gardiennage de sa
parcelle « kalinzi », entraine déchéance du droit dans
un délai suffisant pour que soit la preuve de l'abandon
définitif. Dans le cas où le premier preneur, après avoir
quitté son fief d'origine pendant plus de deux ans et sans laisser le
gardien revient dans ce fief, il peut reprendre la possession de son ancienne
parcelle à condition d'effectuer un nouveau paiement « kalinzi
», si ladite parcelle n'a pas encore été attribuée
à un tiers. L'attribution de fonds « kalinzi » se fait suivant
la pyramide sociale : le Mwami attribue au Murhambo, le Murhambo au Mushamuka,
le Mushamuka à ses administrés et chaque individus à tous
tiers jusqu'au morcellement individuel. Cependant, à aucun
échelon de la pyramide sociale, il n'est permis d'attribuer en «
kalinzi » la totalité du fonds que l'on possède
soi-même sous cette forme. Le « kalinzi » est toujours dû
mai le versement peut se faire avec des grands délais. L'acompte et le
crédit par versement fractionnées sont admis par la coutume qui
ne fixe toutefois pas l'importance des frais à verser. Le paiement n'a
jamais eu lieu lors de la requête. Généralement il se fait
après la délimitation par les baganda, s'il `agit d'un terrain
déjà mis en valeur et après la première mise en
valeur s'il s'agit d'un terrain « bulambo ». le paiement étant
effectué, le bénéficiaire n'est plus tenu à des
payements d'aucune sorte dans les années qui suivent, mais il reste
toujours soumis au « kushiga ». sont considérées comme
de résolutions d'un accord kalinzi les faits suivants : esprit
séditieux, sorcellerie prouvée, refus de « kushiga » ou
de « kurhabala » répétés, adultères
commis avec l'épouse de l'autorité foncière, vol
incorrigible, esprit d'insociabilité,...
Seul le conseil de chefferie peut décider de la
révocation d'un kalinzi, la demande collective de kalinzi n'est pas
admise, toutefois, les associations de développement bien
organisées avec statut et règlement d'ordre intérieur
peuvent demander le kalinzi, un fond kalinzi n'est jamais saisissable suite
à une décision judiciaire allouant des dommages et
intérêts ou condamnant à une amende. On n'exécute
que sur les produits meubles, bétail culture,...) et le "bafanshizo
»'existe plus, un veuve (avec ou sans enfants) peut disposer du fonds de
son mari défunt. Le testament est connu : il sert principalement,
à modifier l'ordre coutumier de la
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succession appelé « KUBONA » ; le nouveau
chef foncier, peut exiger après sa succession, un supplément de
kalinzi appelé « Mushigo ». Tous les vassaux doivent en
principe le Mushigo ; le nouveau suzerain a le droit moral d'exiger le Mushigo
de tous ses vassaux mais en général il ne l'exige pas
verbalement, les vassaux s'exécutant d'eux-mêmes. Dans le cas d'un
fief passant en succession de père à fils le suzerain ne peut
citer en justice le vassal en défaut de payer.32
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