CONCLUSION DU CHAPITRE
On a pu constater, dans les développements qui
précèdent, que dans biens des cas, les ordonnances sur
requête rendues par le président de la juridiction
compétente peuvent s'apparenter à des actes non
juridictionnels. Pour les professeurs VINCENT et GUINCHARD63 la
confusion et la difficulté dans la détermination du
caractère juridictionnel des décisions gracieuses proviennent en
grande partie « du fait que des considérations de pure
théorie juridique (...) ont été occultées par des
considérations d'ordre pratique » ; ainsi, disent-ils, il
était commode de confier aux tribunaux créés par l'Etat
pour juger, des tâches, des fonctions non juridictionnelles - à
l'origine - mais pour lesquelles le besoin de l'intervention d'une
autorité publique était nécessaire.
Toutefois, la doctrine considère que, dans l'ensemble,
les ordonnances sur requête sont toujours des décisions
gracieuses64. Elle est confortée dans cette position par
l'article 493 du Code de procédure civile français qui dispose
que « l'ordonnance sur requête est une décision
provisoire rendue non contradictoirement dans les cas où le
requérant est fondé à ne pas appeler de partie adverse
».
Mais, il arrive qu'une procédure sur requête se
situe à la croisée des chemins entre gracieux et contentieux.
Car, même si la requête est introduite par une partie (le plus
souvent le créancier) l'autre n'étant pas appelée,
l'ordonnance qui en procède
61 Article 210 AUPCAP.
62 Article 217 AUPCAP. Les délais d'exercice
des voies de recours et leur computation sont prévus par les articles
218 à 225 AUPCAP.
63 J. VINCENT, S. GUINCHARD, Procédure
civile, op. cit., p 192.
64 J. VINCENT, S. GUINCHARD, Procédure
civile, op. cit. p. 210.
peut donner lieu à une opposition de la partie «
adverse » (il s'agit plus souvent d'un référé en
rétractation d'ordonnance) et aboutir à une instance
contradictoire, c'est-à-dire, à une instance contentieuse (c'est
le cas des mesures conservatoires et des procédures simplifiées
de recouvrement). Ainsi, l'acte juridictionnel posé par le
Président d'une juridiction peut être aussi bien gracieux que
contentieux.
Toutes choses qui confirment que la matière gracieuse
n'est qu'une fraction du domaine de la compétence - exclusive - de la
juridiction présidentielle en droit OHADA.
Chapitre 2 - LA JURIDICTION PRESIDENTIELLE EN MATIERE
CONTENTIEUSE
Le législateur OHADA attribue à la juridiction
présidentielle, la compétence exclusive en matière
gracieuse. Ce choix est certainement dicté par la
célérité qui s'impose à certaines
procédures. Mais en matière contentieuse, certaines
procédures peuvent nécessiter un traitement rapide par la
juridiction saisie. C'est pourquoi le législateur OHADA a
réservé de nombreuses matières contentieuses à la
connaissance du président de la juridiction compétente statuant
à bref délai ou en urgence. Cette option du législateur
nous amène à nous poser la question de savoir quelle casquette
porte le président de la juridiction compétente lorsqu'il statue
à bref délai ou en urgence ?
Considérant que la juridiction statuant en urgence est
généralement le juge des
référés65, il est loisible de penser que dans
l'esprit du législateur OHADA, lorsque le président de la
juridiction compétente statue à bref délai ou en urgence,
il est saisi en qualité de juge des référés. En
effet, dans certaines - rares - hypothèses66, le
législateur OHADA consacre explicitement la compétence du juge
des référés.
Cependant, on peut - être surpris de - remarquer que le
législateur OHADA confie certaines matières qui semblent relever
de la procédure gracieuse (dans la mesure où elles semblent ne
pas nécessiter de contradiction) non pas à la juridiction
présidentielle saisie sur requête, mais au président de la
juridiction compétente statuant à bref délai (ou en
urgence). On peut clairement conclure que dans certaines situations,
législateur OHADA a voulu que toutes les parties concernées
puissent être entendues avant que le président de la juridiction
compétente ne rende son ordonnance.
Cette recherche du contradictoire amène à penser
que, en droit OHADA, la juridiction présidentielle peut trancher au fond
d'un litige. En effet, force est de constater que nombreux sont les cas dans
lesquels la juridiction présidentielle est amenée à
trancher sur une contestation sérieuse : c'est notamment le cas lorsque
le président de la juridiction compétente, est saisi pour statuer
sur les difficultés d'exécution. Dans ces cas, la
compétence que le législateur attribue à la juridiction
65 Articles 182 et suivants du Code de
Procédure Civile Camerounais. Voir aussi : J. VINCENT, S. GUINCHARD,
Procédure civile, op. cit., n° 236s, n°791s.
66 Articles 398, 617, 708 et 732 de l'AUSC.
présidentielle dépasse le cadre des ordonnances
de référés, en ce que ces ordonnances ne doivent en
principe faire aucun préjudice au fond.
Aussi, la nature de telles ordonnances contentieuses reste
donc floue du fait de l'imprécision du législateur. Toutefois,
elles peuvent être regroupées selon que le président de la
juridiction compétente est saisi pour connaitre de litiges entre
commerçants (I), entre associés (II), ou des difficultés
d'exécution (III).
I- LA JURIDICTION PRESIDENTIELLE EN MATIERE DE LITIGES
ENTRE
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