A. L'adoption des lois essentielles à l'organisation
des élections
Les institutions de la transition sont assujetties à
des objectifs visant à restaurer la paix et l'ordre constitutionnel
normal. La Constitution de la transition de la RDC n'en fait pas exception.
Traduction et instrument juridiques d'un accord politique sur
la base duquel elle a été élaborée, cette
Constitution vise à concrétiser les objectifs assignés aux
institutions de la
233 Les 4 commissions gouvernementales sont:
-- La Commission politique, défense et sécurité,
présidée par RUBERWA Azarias, le
Secrétaire général du RCD, s'occupe de toutes les
questions politiques et celles relatives à la défense du
territoire national et à la sécurité des personnes et des
biens; -- La Commission Economique et Financière placée sous
l'autorité de BEMBA Jean Pierre (MLC) assume la
responsabilité des problèmes relatifs à l'économie,
aux finances et à la monnaie nationale; -- La Commission pour la
Reconstruction et le développement dirigée par Abdoulaye
Yerodia NDOMBASI (PPRD) nommé par la composante «
Gouvernement» veille sur les infrastructures; -- La Commission sociale et
culturelle présidée par Zahidi NGOMA de la
composante « Opposition politique» s'occupe de tous les affaires
afférentes au développement éducatif, sanitaire, social et
culturel de la RDC.
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Afrique : essai de réflexion à partir des exemples de la
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la Tunisie et du Togo.
transition notamment la mise en place de conditions juridiques
et matérielles permettant l'organisation d'élections
transparentes et sincères. La feuille de route imposait donc à
ces institutions de la transition, l'adoption de lois essentielles devant
être mises en oeuvre durant la transition afin d'éviter un vide
constitutionnel à l'expiration de cette période.
Au terme du processus, les institutions de la transition se
sont révélées performantes dans leur ensemble en ce sens
que toutes les lois essentielles234, à
l'opposé d'autres lois non essentielles à l'organisation des
élections 235 ont été
laborieusement votées par le Parlement et promulguées par le
Président de la République.
Toutes ces lois participent à la mise en place d'un
dispositif permettant à la République Démocratique du
Congo de faire un grand bond en avant en direction de la modernisation de son
système politique.
L'autre objectif primordial de la Constitution de la
transition portait sur la durée même de la transition. Cette
question est vitale car l'Accord global et inclusif et la Constitution de la
transition avaient prévu une période à l'expiration de
laquelle toutes les dispositions arrêtées devraient logiquement
tomber caduques.
B. La sortie de crise
La durée de la transition est fixée par l'Accord
global et inclusif et l'article 196 de la Constitution de la transition qui
posent un principe assorti d'une exception.
Conformément aux stipulations combinées du point
IV de l'Accord de Pretoria et l'article 196, alinéa 1er de la
Constitution de la transition, la durée de la transition est
fixée à 24 mois. Elle court à compter de l'investiture du
gouvernement de la transition et prend
234 Ces lois essentielles sont: la loi
organique no 04/009 du 5 juin 2004 portant organisation,
attributions et fonctionnement de la Commission Électorale
Indépendante, la loi organique no 04/24 du 12 novembre 2004
relative à la nationalité congolaise, la Loi no 04/028
du 24 décembre 2004. portant identification et enrôlement des
électeurs, le projet de Constitution, la loi no 05/010 du 22
juin 2005 portant organisation du Référendum constitutionnel en
République Démocratique du Congo, la loi no 006 du 9
mars 2006 portant organisation des élections présidentielle,
législatives, provinciales, urbaines, municipales et locales en
République Démocratique du Congo.
235 Ainsi, en dehors de la Haute
Autorité des Médias qui intervient dans la régulation de
la couverture médiatique des campagnes référendaires et
électorales, les autres institutions d'appui à la
démocratie ont été quasiment marginalisées et
d'ailleurs elles n'ont pas été reconduites dans la nouvelle
Constitution.
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fin à l'investiture du Président de la
République élu à l'issue des élections marquant la
fin de la période transitoire en RDC.
Ces stipulations appellent un certain nombre de remarques
concernant la computation du délai de la transition. Le délai
court à compter du 30 juin 2003, correspondant à l'installation
du gouvernement de la transition236, et expire le
30 juin 2005. Seulement, la date d'expiration n'était pas rigide en ce
sens que les négociateurs avaient prévu une possibilité de
prolongation dans les conditions fixées par l'article 196, alinéa
2 de la Constitution de la transition.
Tout l'édifice de la transition s'écroule alors
si, après trente-six mois de transition au maximum, le nouvel ordre
constitutionnel n'est pas installé. Il en résulterait un vide
juridique. Cependant, toutes les parties étaient conscientes que le
calendrier prévisionnel de tenue des élections ne pouvait
être rigoureusement respecté pour sortir le pays de la transition
à la date du 30 juin 2005. Il fallait alors faire « avaler la
pilule» de la prolongation à une population sceptique par une
série d'actes posés en direction des élections de sortie
de crise. La confiance au processus de sortie de crise tel qu'il se
déroulait avec le soutien de la communauté internationale a
amené l'Assemblée nationale et le Sénat à voter une
décision conjointe de prolongeant la transition jusqu'au 30 juin
2006.
D'ailleurs, la Constitution de transition avait
aménagé elle-même les conditions de son
dépérissement en son article 205 au terme duquel « la
Constitution de la Transition cesse de produire ses effets à
l'entrée en vigueur de la Constitution adoptée à l'issue
de la transition ». La transition a définitivement pris fin avec
l'installation des sénateurs, après celle de l'assemblée
nationale et celle du Président de la République, contrairement
au scénario envisagé par l'Accord global et inclusif et la
Constitution de la transition.
236 Si la désignation des 3
Vice-présidents émanant des formations combattantes n'avaient pas
soulevé de difficultés particulières majeures, même
si au RCD le Secrétaire général RUBERWA
avait été désigné Vice-président
à la place du Docteur ONUSUMBA qui était en ce
moment le président du RCD, il en fut autrement de l'opposition civique
où face au refus de TSHISEKEDI d'intégrer le
processus de transition, Arthur Zaïdi NGOMA fut
porté à la Vice-présidence. Les 500 députés
et les 120 sénateurs furent cooptés par leurs composantes
conformément au tableau de répartition figurant à l'Annexe
I de l'AGI. Après moult tractations, le gouvernement de la transition
fut nommé et investi le 30 juin 2003 marquant l'entrée en vigueur
du régime de la transition en RDC.
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La petite constitution de la RDC a donc permis de
résoudre un problème en prescrivant une thérapie
très efficace, à savoir le recours au droit
considéré par les signataires d'un accord politique comme une
valeur refuge pour sortir le pays de ses crises récurrentes. La
Constitution de la transition « légalise en quelque sorte un
état de fait qui résulte de l'équilibre existant à
un moment donné »237 entre les
forces combattantes et non combattantes de la RDC.
237 Cf. BURDEAU
(G.), « Une survivance: la notion de
Constitution », in L'évolution du droit public, Etudes en
l'honneur d'Achille MESTRE, Sirey 1956, p. 53.
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