B- L'étendue du phénomène
Les motivations des migrants sont certes multiples et
variées, mais il apparaît toutefois que les causes de ces
mouvements migratoires sont essentiellement économiques : les
populations se déplacent pour chercher une activité
économique rémunératrice, notamment l'emploi
salarié, le commerce ou le travail de la terre, en vue
d'améliorer leurs conditions d'existence.
Jusqu'à un passé récent, les Africains
ont essentiellement migré à l'intérieur de leur continent.
Selon une étude réalisée par le BIT sur les conditions de
vie et de travail des femmes et hommes migrants d'Afrique de l'Ouest en
Mauritanie en avril 2009, les chiffres publiés dans l'Atlas des
Migrants font état de 17 millions de migrants internes et, en
Afrique de l'Ouest, 7,5 millions de personnes vivraient dans un pays
différent de celui où elles sont nées. Parmi elles, un
nombre croissant de femmes.
La Conférence internationale sur
l'égalité hommes-femmes, les migrations et le
développement tenue à Manille les 25 et 26 septembre 2008 a mis
en exergue le fait que les femmes représentent actuellement presque la
moitié de la population migrante mondiale. La majorité d'entre
elles s'expatrient pour travailler, étudier ou pour profiter des
opportunités offertes par la migration. Mais beaucoup d'entre elles sont
victimes de traite, d'abus divers, de violences et d'exploitations. Subissant
régression professionnelle et déqualification, elles se
retrouvent cantonnées dans une gamme d'emplois très restreints :
travail manuel dans l'agriculture, prestations de soins, emplois domestiques ou
restauration, hôtellerie ou spectacle.
La carte qui suit illustre les flux migratoires
internationaux, les axes migratoires et les villes de départ vers les
Canaries.
Le rapport de l'enquête sur la main d'oeuvre
étrangère (l'EMOE) 2007/2008 a fait ressortir l'intensification
des flux d'entrée en Mauritanie au cours des années 2006 et 2007.
(Voir le graphique suivant qui tracent les flux annuels d'entrée des
étrangers).
A- Proximité géographique avec
l'Europe
Sources : Rapport de l'EMOE 2007/2008, pages 17
La migration de transit est un phénomène
transnational. La Mauritanie du fait de sa position géographique attire
de plus en plus de migrants.
Paragraphe 2 : Facteurs attractifs pour les migrants de
transit
La République Islamique de Mauritanie est un pays
saharo-sahélien d'Afrique de l'Ouest de 1.030.000 km2
doté d'une façade atlantique de 700 km. Peuplé de
«3,5 millions d'habitants (projection sur la base du recensement de
2006/2007), le pays a pour principales ressources le poisson, le fer et, depuis
peu, le pétrole et le gaz.
La Mauritanie est à cause de sa position
stratégique entre le Maghreb et l'Afrique subsaharienne, un pays de plus
en plus emprunté par les migrants comme raccourci pour atteindre
l'Europe.
Ce choix est justifié par sa proximité
avec l'Europe (A) et par l'existence d'opportunités d'emploi
(B).
La Mauritanie jadis pratiquement ignorée par les
migrants qui préféraient d'autres itinéraires de transit
tels que ceux du Sahara central, est devenue aujourd'hui de plus en plus
prisée pour les migrations transsahariennes vers l'Europe
C'est ainsi que dans le rapport 2008-2009 sur les Migrations
méditerranéennes paru en octobre 2009, M. Sidna Ndah
Mohamed-Saleh et M. Ali Ben Saâd expliquent que la ville de
Nouadhibou fonctionnait plutôt comme un goulot d'étranglement
laissant passer parcimonieusement des flux ténus qui s'embarquaient
clandestinement par petits groupes dans les bateaux de pêche. Et si, en
fin 2005, la Mauritanie et particulièrement Nouadhibou se retrouvent
propulsées comme plateforme de transit vers l'Europe, ce n'est pas
seulement le durcissement de la répression des flux migratoires
subsahariens au Maroc et leur rabattement vers le Sud qui l'expliquent. C'est
plutôt l'aboutissement d'un long processus de désenclavement avec
l'achèvement de la route transsaharienne atlantique (Tanger- Dakar en
passant par Nouadhibou, Nouakchott et Rosso) commencée en 2002 pour sa
portion mauritanienne et celui auparavant de la «route de l'espoir»
reliant le Mali à Nouakchott. C'est ce qui explique cette
intégration progressive de la Mauritanie dans le dispositif migratoire.
Le redéploiement vers et par la Mauritanie avait commencé depuis
au moins deux ans. Avant même qu'il n'y ait cette «redescente»
des flux migratoires depuis le nord du Maroc vers le sud, la Mauritanie, et de
fait le Sahara occidental, étaient devenus une des principales voies
d'accès vers le nord du Maroc alors que ce dernier continuait à
être le lieu privilégié des tentatives de passage vers
l'Europe et ses enclaves sud. Aussi, le passage de Nouadhibou au rôle de
plateforme de connexion avec l'Europe, était déjà inscrit
dans les transformations de l'espace mauritanien, en dehors des conjonctures
qui l'ont révélé tel le durcissement de la politique de
répression marocaine et le glissement du cordon sanitaire
européen de plus en plus au sud. Il procédait d'un mouvement plus
global de «retour» du Sahara et de son «irruption» dans le
système relationnel international, au travers de son
développement, avec comme conséquence principale le
développement de la circulation et la jonction (re)nouée entre sa
rive sahélienne et sa rive maghrébine. Ce processus est intervenu
plus tardivement en Mauritanie en raison de la faiblesse de ses ressources,
d'une politique socio-économique moins volontariste et des tensions
liées à la guerre du Sahara occidental. La baisse des tensions
dans la région en même temps que les bouleversements connus
à ses limites septentrionales par une région (Sahara occidental)
où le Maroc voulait ancrer spatialement ses revendications
territoriales, impulseront ce processus dans l'axe saharien atlantique et y
développeront la circulation. La Mauritanie (re)devenait donc un espace
de transit vers la Méditerranée.1
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