Première partie : Le défi de la migration
de transit
Aujourd'hui la question de la migration, sous
toutes ses formes, est au centre des préoccupations
nationales et internationales. La migration devient de plus en plus une
question majeure à l'heure de la mondialisation à la fois pour
les pays d'accueil, pour les pays de transit et les pays d'origine.
Les migrations de transit renvoient à ce
phénomène migratoire d'Africains subsahariens pour la plupart,
qui passent par des pays du Maghreb en vue de gagner l'Europe. Mais le terme
«migrants de transit» pour designer ces personnes est quelque peu
inexact, non seulement parce que certains migrants considèrent l'Afrique
du Nord -et en particulier la Libye ou le Maroc comme leur destination finale,
mais aussi parce qu'une proportion considérable des migrants qui
échouent ou qui n'ont pas le courage de continuer vers l'Europe
préfèrent rester en Afrique du Nord comme second option,
plutôt que de retourner vers leurs pays d'origine plus instables, plus
dangereux ou plus pauvres.
En Afrique aussi, sous la pression de la pauvreté
rurale, de l'instabilité politico-économique et de la
mondialisation de l'économie, les migrations ont pris une réelle
ampleur tant à l'intérieur du continent qu'en direction de
l'Europe. Ainsi, de nombreuses personnes,
en quête de meilleures conditions de vie et de travail,
quittent l'Afrique de l'Ouest pour se rendre au Maghreb, en vue de rejoindre
l'Europe, transitant notamment par la Mauritanie.
Pour analyser le défi de la migration de
transit nous tenterons de dégager une définition de la migration
(Chapitre 1) pour voir ensuite les conséquences de la migration de
transit irrégulier (Chapitre 2)
Chapitre 1er : Définition de la migration
La notion de migration signifie le déplacement d'une
personne ou d'un groupe de personnes, soit d'un pays à un autre, soit
à l'intérieur d'un pays d'une région à une autre.
Elle englobe tous les types de mouvements de population impliquant un
changement du lieu de résidence habituelle, quelles que soient leur
cause, leur composition, leur durée, incluant ainsi notamment les
mouvements des travailleurs, des réfugiés, des personnes
déplacées.
Dans le contexte de notre étude cette approche permet
justement de rendre compte de manière assez fine de la
réalité des migrations de transit ; en effet elle permet de
capter la complexité des phénomènes migratoires, qui ne
sont plus forcément linéaires, d'Etat à Etat. Elle apporte
de surcroît une vision dynamique, qui dépasse ainsi la position
statique habituellement adoptée sur les migrations, à savoir un
déplacement entre deux «sédentarités».
Dans ce présent chapitre nous verrons d'abord
la dimension historique des mouvements migratoires en Mauritanie (Section 1),
avant de voir la dimension socio-économique de ce
phénomène (Section 2).
Section 1ère : Dimension historique des mouvements
migratoires
Du début de années 1950 jusqu'à la fin
des années 70, la Mauritanie recevait essentiellement des travailleuses
et travailleurs migrants sénégalais pour combler son grand besoin
de main d'oeuvre qualifiée causé par le départ des
français suite à l'acquisition de son indépendance.
Ce pays a également accueilli durant cette
période, des peulhs guinéens ayant fui le régime en place,
à l'époque dans leur pays. Puis les Maliens sont entrés en
masse en Mauritanie, suite aux événements de 1989 ayant conduit
un grand nombre de Sénégalais à retourner dans leur pays.
L'arrivée d'autres nationalités est récente et l'on a
assisté à un renversement de cette tendance ces dernières
décennies.
Pour avoir une idée de la dimension historique
des mouvements migratoires, nous verrons successivement la genèse de
cette migration en Mauritanie (Paragraphe 1) et les facteurs attractifs pour
les migrants de transit (Paragraphe 2)
Paragraphe 1er : Genèse de la migration
Nous constatons que l'historique de la migration en
République Islamique de la Mauritanie remonte à plusieurs
décennies et ceci est la conséquence de l'aggravation des
problèmes économiques et des troubles sociopolitiques en Afrique
subsaharienne, des nouvelles découvertes pétrolières et de
leur début d'exploitation, et surtout du durcissement des
contrôles dans les pays du Maghreb, lieux habituels de transit des
migrant(e)s clandestins vers l'Europe, ce qui fait de la Mauritanie un point de
transit quasi-obligé ces dernières années.
A cela il faudrait ajouter la possibilité offerte
à tous les ressortissants de la Communauté Economique des Etats
de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO) d'entrer en Mauritanie avec un passeport ou
toute autre pièce d'identité, sans visa ; ce qui favorise
l'immigration dans ce pays.
En effet, malgré le retrait de la Mauritanie de cette
organisation sous régionale en 1999, la clause de libre circulation des
biens et des personnes, de même que le droit de résidence et
d'établissement, entre la Mauritanie et les quinze (15) pays de la
CEDEAO sont maintenus et observés de fait. Les quinze autres Etats
membres n'ayant pas encore entériné le retrait
irréversible de la Mauritanie, appliquent et/ou tolèrent la
règle de réciprocité.
Ainsi, la Mauritanie connaît aujourd'hui trois types de
migrant(e)s originaires d'Afrique de l'Ouest :
1. Celles ou ceux dont la destination était la Mauritanie
et qui y sont installé(e)s ;
2. Celles ou ceux en situation de transit, qui arrivent en
Mauritanie sans aucune intention d'y résider et dont le souhait reste la
migration vers d'autres horizons plus prometteurs, qui se fixent temporairement
dans les principales villes mauritaniennes juste pour préparer le voyage
qui constitue leur ultime objectif ;
3. Celles ou ceux dans les deux premiers cas qui finissent
par demander asile.
Vue la complexité de la migration, nous
tenterons de donner une description de ce phénomène (A) pour
analyser ensuite son ampleur (B).
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