1.7 Les freins :
Le métier d'acheteur est, comme nous l'avons vu, un
métier relativement nouveau dans le monde de l'entreprise qui peine bien
souvent à se faire apprécier à sa juste valeur. Les
prescripteurs ont encore aujourd'hui tendance à tenir l'acheteur, qu'ils
perçoivent comme un frein, à l'écart des projets. Pour
gagner en légitimité l'acheteur responsable devra faire preuve
d'initiatives, devra être force de proposition et prouver par des
résultats concrets les bénéfices de son action.
Les achats responsables sont pour beaucoup synonymes de couts
supplémentaires, et le manque d'indicateurs de mesures reste l'un des
principaux freins à la démarche. Le secteur public est
également un secteur qui, d'une manière générale, a
du mal à se projeter sur le long-terme lorsqu'il s'agit des coûts,
freinant ainsi l'utilisation d'outils tels que le TCO pour l'évaluation
du prix global d'un marché.
En 2009, le baromètre HEC-EcoVadis référence
ainsi les principaux freins au déploiement d'initiatives Achats
Durables. A l'époque les principaux freins sont ainsi les suivants :
1- Contraintes budgétaires : 48%
2- Objectifs contradictoires Court Terme / Long Terme : 44%
3- Manque d'indicateurs de mesure : 43%
4- Manque d'outils : 27%
5- Responsabilités non définies clairement :
22%
6- Résistance des fournisseurs : 21%
7- Absence de soutien de la Direction : 17%
8- Manque d'expertise interne : 8%
9- Autres : 5%
Dans le dernier Baromètre des Achats Responsables ObsAR /
OpinionWay de 2016 le constat est sensiblement le même : si les
contraintes budgétaires tendent à être de moins en moins
problématiques, le manque d'indicateurs de mesure reste le frein
principal lors de la mise en place d'Achats Responsables.
![](Achats-publics--MOP-responsables5.png)
![](Achats-publics--MOP-responsables6.png)
ESTP Mathieu PACAUD
Marchés Publics de travaux - Achats Responsables Page
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Le Baromètre HEC EcoVadis de 2013 faisait quant à
lui apparaitre en tout premier plan un manque de soutien de la part des
Directions en amont. L'aspect contradictoire des objectifs CT/LT faisait
également parti freins qualifiés de « critiques » dans
la mise en place et le développement d'une politique d'Achats
Durables.
Il est intéressant de noter que cette problématique
d'objectifs contradictoires tend à garder la même importance au
fil des années alors que la maturité des entreprises en termes de
développement durable évolue (43% des Directeurs Achats
interrogés en 2013 considérait les objectifs contradictoires
comme un frein « critique » contre 40% en 2007). On voit d'ailleurs
bien dans le Baromètre ObsAR Opinionway de 2016 (cf. graphique
précédent) que ce facteur reste toujours aussi important bien
qu'une nette amélioration puisse être constatée entre 2015
et 2016.
Ci-dessous les freins principaux au développement d'une
politique d'achat responsable (Baromètre HEC EcoVadis 2013 «
Time to measure value creation ! ») :
![](Achats-publics--MOP-responsables7.png)
ESTP Mathieu PACAUD
Marchés Publics de travaux - Achats Responsables Page
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Ci-dessous l'évolution des freins principaux en fonction
du niveau de maturité d'une entreprise (Baromètre HEC EcoVadis
2013 « Time to measure value creation ! ») :
![](Achats-publics--MOP-responsables8.png)
Ainsi, si l'on a bien conscience qu'il est de temps de passer du
stade de management du risque à celui de création de valeur, les
objectifs d'économies à court terme contradictoires avec les
notions de coût global et d'action sur le long terme du
développement durable font également partie des problèmes
majeurs. A cela s'ajoute de toute façon le manque de modèles TCO
simples et facilement applicables, par exemple pour le calcul du prix dans les
critères de sélection.
Se pose également la question de la bonne diffusion des
pratiques, du partage des informations entre les différents acteurs pour
une mise en commun d'une base de connaissances, de données et d'outils.
En effet, dès lors qu'une société prend conscience de la
potentielle valeur ajoutée des achats responsables dans sa
stratégie, se pose le problème de la concurrence (Il m'a
semblé en particulier très difficile d'obtenir des informations
provenant du secteur privé) qui freine le partage de pratiques
innovantes. Si la règlementation impose aux sociétés
cotées en bourse une parfaite transparence quant à la
communication de leurs résultats liés au développement
durable, rien ne les oblige à rendre public les procédés
mis en oeuvre ou les outils utilisés dans un processus d'achat
responsable.
Nous tacherons dans la suite de ce mémoire de
préciser la problématique dans le cadre des marchés
publics de travaux et en particulier concernant le groupe Radio France. Nous
tâcherons ainsi d'établir un certain nombre de processus / outils
à mettre en place afin d'intégrer pleinement les enjeux du
développement durable dans le cadre d'un chantier de rénovation
de grande envergure ou plus généralement dans le cadre d'une
stratégie immobilière globale. L'objectif étant d'aller
vers une politique d'Achat Responsable non plus basée sur un simple
management du risque, mais vers une véritable création de valeur,
démontrée et quantifiée.
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