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La place de la Chine dans le commerce international

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par Hope&Fiston MATABARO MASUMBUKO Hope,MATABARO SAFARI,MALOANI MUSAFIRI,BYE
Institut Supérieur Pédagogique de Bukavu - licence en informatique de gestion 2015
  

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2. LES PRODUITS « MADE IN CHINA » DE LA PERIODE 1980-2007

Depuis les années 1980, le monde a connu de profonds bouleversements économiques, technologiques, politiques et sociaux. « Mondialisation », « globalisation », « internationalisation » sont autant de termes qui tentent d'isoler les traits saillants de cette évolution complexe et contradictoire du monde. Selon le FMI, la mondialisation signifie « l'interdépendance de l'économie croissante des pays du monde via le volume et la variété croissants des transactions frontalières en marchandises et en services, de mouvements de capitaux internationaux libres, et de diffusion plus rapide et plus répandue de la technologie ». Près de 300 ans plus tôt, deux illustres économistes, Adam Smith et David Ricardo, prônaient déjà les échanges et la division internationale du travail entre pays susceptibles de générer, selon eux, une situation « gagnant-gagnant » sous certaines conditions. Les deux guerres mondiales ainsi que la bipolarisation de la planète au cours de la Guerre froide du siècle dernier ont considérablement limité le commerce mondial. Cependant, au cours de ces dernières années, deux phénomènes ont été observés dans le contexte de la mondialisation : on a pu constater, d'une part, l'internationalisation de l'activité économique et de la mobilité des facteurs de production dans un monde de plus en plus dépourvu de frontières, à tel point que certains n'hésitent plus à annoncer une prochaine disparition de l'État souverain classique. D'autre part, on a assisté à l'intensification de la croissance économique d'un certain nombre de pays, notamment des pays qualifiés d'« émergents », reconnus comme les moteurs de la prospérité mondiale et qui donnent lieu à une recomposition de la hiérarchie des espaces productifs (Ohmae,1996). En effet, sur le plan international, on assiste depuis les années 1980 à une forte mutation des conditions de production, de compétition et d'interdépendance qui est caractérisée avant tout par le développement d'une nouvelle division internationale du travail. Selon Anil K. Gupta et al. (2008), la mondialisation désigne une nouvelle configuration qui marque une rupture par rapport aux étapes précédentes de l'économie internationale : « ... autrefois la mondialisation pouvait être considérée comme des échanges transfrontaliers de matières premières ou de produits finis - c'est-à-dire de biens situés à chaque

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extrémité de la chaîne de valeur. Au contraire, ... la mondialisation d'aujourd'hui est caractérisée par la dispersion géographique des activités de la chaîne de valeur de la compagnie, avec l'objectif de localiser chaque activité (ou sous-activité) de la manière la plus optimale. Par conséquent, on constate aujourd'hui une importante proportion grandissante d'échanges transfrontaliers qui est composée de marchandises et de services intermédiaires - c'est-à-dire, de composants et de services situés au milieu de la chaîne de valeur » (voir la Figure 1). Suzanne Berger (2006) constate que « dans le monde de la production fragmentaire, les enjeux sont ce qu'ils ont toujours été: bénéfices, pouvoir, sécurité et nouvelles opportunités. Ce qui a changé, c'est qu'il est désormais possible d'atteindre ces objectifs en se positionnant à n'importe quel point de la chaîne de valeur. Il y a vingt ans, les entreprises intégrées dominaient encore. Aujourd'hui, un fabricant de composants, une entreprise de design, une marque sans fabrication, un fabricant sans marque, et bien d'autres combinaisons encore, proposent de nouvelles manières de rester compétitif ».

Ainsi, à la différence de la division internationale du travail classique, la nouvelle division internationale du travail repose essentiellement sur la notion de chaine de valeur (Porter, 1985). Elle se réalise non seulement entre les différentes industries, mais surtout entre les différents produits d'une même industrie et entre les différentes étapes et activités de la chaine de valeur d'un même produit. Autrement dit, dans le contexte actuel de la mondialisation, la définition classique de l'industrie intensive en main d'oeuvre, de l'industrie intensive en capitaux et de celle intensive en savoir n'est plus la seule référence pour appliquer la division internationale du travail. Cette dernière se fait de plus en plus en fonction de la valeur ajoutée générée par les différentes étapes et activités (qui sont soit intensives en main d'oeuvre, en capitaux ou en savoir) de la chaine de valeur d'un même produit. De ce fait, la situation des produits « made in China » doit être examinée sous l'angle de cette nouvelle réalité. Il convient de constater d'abord que, bien que la Chine ait réalisé une percée spectaculaire sur le marché international au cours de ces trente dernières années (voir le Tableau 1 et la Figure 2), les produits « made in China » sont, dans bien des cas, le résultat d'une production organisée globalement, faisant intervenir des éléments réalisés dans différents pays. Pensons par exemple aux 12 millions de portatifs vendus en 2005 par la Chine aux États-Unis : la majorité des pièces clés (écrans, logiciels, cartes son, disques durs, etc.) sont en réalité importées de partout dans le monde pour être assemblées en Chine. La véritable contribution chinoise dans ce cas ne dépasse même pas 30% de la valeur finale du produit transigé. La Chine est aujourd'hui un grand fabricant du

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téléphone mobile dans le monde. Cependant, le processus manufacturier du téléphone mobile dans le monde est complètement désintégré : le design est souvent assumé par les firmes coréennes et japonaises, la production de pièces clés par des multinationales telles que TI et Philips, les normes techniques et les logiciels sont fournis par les firmes américaines comme Qualcomm, la distribution par Bird, alors que seul l'assemblage est réalisé en général en Chine. Il en va de même pour ce nouveau produit technologique américain qu'est l'iPhone qui porte également l'étiquette « made in China ». Exceptés le design et le logiciel, la compagnie Apple s'est contentée en fait de jouer un rôle de chef d'orchestre visant l'intégration des innovations réalisées dans d'autres pays : l'écran du iPhone est japonais, la mémoire flash, coréenne et l'assemblage, chinois2.

Une analyse plus poussée nous permet de constater que la majorité des productions destinées à l'exportation sont des opérations d'assemblage et de réexportations. En fait, depuis le milieu des années 1990, plus de 50% de l'exportation chinoise a été réalisée sous forme de « perfectionnement passif » pour le compte d'entreprises étrangères : 50% en 1995, 55% en 2000, 53% en 20063, alors que les achats nécessaires à l'assemblage ont dépassé 50% des importations de la Chine4. La Figure 3 illustre la place actuelle des produits « made in China » dans la nouvelle division internationale du travail. Cette célèbre « courbe sourire » indique que les pays développés maîtrisent les étapes les plus valorisantes, telles que la conception et la distribution des produits, alors que les produits « made in China » sont essentiellement situés au niveau des opérations d'assemblage à faible valeur ajoutée.

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Il est vrai que la place des produits « made in China » sur cette « courbe sourire » a connu une amélioration constante au cours de ces trente dernières années : la part des produits finis et semi-finis est passée de 46% à 93,6% pour l'ensemble des exportations chinoises et celle des produits de haute technologie, de moins de 1% à 29%5. En fait, la Chine est même officiellement devenue en 2005 le plus important pays exportateur de produits de haute technologie (voir le Tableau 2). Force est de constater, cependant, qu'une forte majorité de ces produits de haute technologie exportés par la Chine sont soit le résultat du travail d'assemblage, soit les produits considérés comme les moins intensifs en savoir dans la chaine de valeur du secteur technologique. Par ailleurs, il s'agit avant tout de la production des multinationales étrangères implantées en Chine : globalement, leur part est passée de 59% en 1996 à 81% en 2000, et a même atteint 91% pour le cas des exportations des équipements électroniques de la Chine (Zhang et ali., 2008). En 2006, la Chine a enregistré un surplus commercial de 41 milliards USD dans ses échanges de produits de haute technologie avec les États-Unis. Cependant, les entreprises à capitaux étrangers en Chine ont contribué pour 90% de ces exportations et 97% des exportations chinoises de produits de haute technologie vers les États-Unis ont été réalisées sous forme de « perfectionnement passif ».

Tableau 2. La Chine mène la barque dans l'exportation de produits de haute technologie

Top 10 des exportateurs de produits de haute technologie - 1996 En million USD 1997

Top 10 des exportateurs de produits de haute technologie - 2005 En million USD 1997

1. États-Unis : 65$

1. Chine : 406$

2. Japon : 53$

2. États-Unis : 284$

3. Allemagne : 31$

3. Japon : 212$

 

4. Royaume-Uni : 24$

4. Allemagne : 183$

5. France : 14$

5. Corée du sud : 167$

6. Pays-Bas : 9$

6. Hong Kong : 157$

7. Italie : 8$

7. Taiwan : 145$

8. Suisse : 8$

8. Singapour : 126$

9. Taiwan : 7$

9. Malaisie : 99$

10. Corée du sud : 7$

10. Royaume-Uni : 95$

Source : Global Insight, Inc., 2007.

En fait, bien que cela puisse paraitre contradictoire, la Chine n'est pas le principal maître des produits « made in China ». À cet égard, il convient de faire une distinction entre les produits des entreprises chinoises (made by China) et ceux des filiales des entreprises étrangères implantées en Chine (made in

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China). En fait, l'ouverture vers l'extérieur est un élément majeur de la réorientation idéologique chinoise depuis 1978. Auparavant, comptant essentiellement sur elle-même, la Chine a décidé de multiplier ses partenaires commerciaux et de créer un climat propice aux affaires. Par le biais des investissements directs étrangers, la Chine recherche avant tout des capitaux, des marchés extérieurs, des technologies et un savoir-faire managérial étranger. Ainsi, les gouvernements chinois locaux se font concurrence pour attirer les investisseurs étrangers en offrant des installations et des ressources à un coût parfois dérisoire. Au cours de ces trente dernières années, la Chine a absorbé plus de 800 milliards USD d'investissements directs étrangers, ce qui la place en deuxième position mondiale, juste derrière les États-Unis. Les investissements directs étrangers ont tout autant permis à la Chine de se développer que d'accéder aux marchés mondiaux. Comme le soulignent Julien Chaisse et Philippe Gugler dans ce cahier, malgré leurs excédents courants, les pays émergents continuent d'importer massivement des capitaux étrangers pour assurer leur croissance. La Chine en est le parangon. En ayant un intérêt pour ce pays comme lieu de transformation et de fabrication à des fins de réexportation, les investissements directs étrangers contribuent aussi grandement à la forte croissance des exportations chinoises. Selon les statistiques du gouvernement chinois, 635 000 entreprises à capitaux étrangers se sont implantées en Chine et 480 des 500 plus grandes compagnies du monde ont réalisé des investissements importants dans ce pays depuis trente ans. Ces entreprises contribuent aujourd'hui à plus de 33,4% de la production industrielle chinoise et à environ 60% des exportations de la Chine (voir la Figure 4). En 2006, parmi les 500 entreprises les plus importantes dans le commerce international de la Chine, 60,8% étaient des entreprises à capitaux étrangers; parmi les 200 plus grandes entreprises exportatrices en Chine, les entreprises à capitaux étrangers représentaient 62,5% (Zhang et ali., 2008).

Le développement des produits « made in China » a été, à bien des égards, très bénéfique pour la Chine où la pauvreté et la pression pour l'emploi sont particulièrement importantes. L'exportation est depuis longtemps un moteur majeur de la croissance économique chinoise, au même titre que l'investissement et la consommation. En fait, elle est responsable de 20% de la croissance économique, contribue à 17% de la recette fiscale de l'État et crée plus de 100 millions d'emplois 7 . Selon le vice-ministre du commerce du gouvernement chinois, Jianguo Wei, il y aurait aujourd'hui entre 30 et 40 millions d'emplois en Chine qui sont directement reliés aux activités de la sous-traitance internationale et 50 à 60 millions de manière indirecte8. Par ailleurs, le travail de sous-

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traitance pour le compte d'entreprises des pays développés a permis à plusieurs entreprises chinoises de réaliser un apprentissage technologique et managérial. Il faut souligner que la participation active de la Chine à la nouvelle division internationale du travail a grandement contribué à l'ouverture du pays, à l'avancement de la réforme et au changement de la mentalité des Chinois (Zou, 2008). Cependant, il convient de préciser que les Chinois ne sont pas les seuls bénéficiaires des produits « made in China ». Au contraire, ils ne retiennent souvent qu'une faible partie des valeurs créées. Bien que la quantité exportée soit importante, la Chine perd en réalité énormément en termes d'échange (voir le Tableau 3), car 90% des « made in China » sont destinés à des marques étrangères. Ainsi, pour acheter un Airbus 380, la Chine doit exporter 800 millions de chemises et une poupée Barbie, produite à 2 USD en Chine, sera vendue en moyenne à 16 USD aux États-Unis. La Chine a exporté en 2005 plus de 60 milliards USD de portatifs. Elle n'a cependant retiré qu'une faible part de 5% de l'ensemble du profit réalisé, une forte majorité du profit étant attribuée aux designers, aux développeurs de logiciels ainsi qu'aux distributeurs occidentaux tels qu'Intel, AMD, Microsoft, etc.

La Chine occupe aujourd'hui une place importante dans l'économie mondiale, cela tient tant à son poids économique relatif qu'aux impacts engendrés par son essor rapide. Toutefois, il est exagéré de la qualifier déjà d' « usine mondiale » au même titre que les quelques empires industriels du passé et du présent (Angleterre, États-Unis, Japon). En fait, la capacité chinoise à alimenter le marché international demeure plutôt limitée. Selon M. Anderson du cabinet Godman, afin de comprendre l'importance de l'industrie manufacturière chinoise sur le marché mondial, il faut mesurer son excédent net par rapport à la capacité manufacturière mondiale. Alors que la part de la production industrielle chinoise est passée de 2,4% à 5% entre 1993 et 2002, celle de ses importations dans le même secteur atteignait 4,6 %. L'excédent net de la Chine dans l'industrie manufacturière a été de l'ordre de 50 milliards USD, soit seulement 0,18% de la capacité de production industrielle mondiale. Cette position chinoise, assez faible par rapport au statut d'une usine mondiale, demeure quasiment inchangée depuis 199710. Ainsi, il convient de reconnaitre que la Chine est présente sur le marché à la fois en tant que producteur, exportateur et consommateur. Si tout le monde redoute aujourd'hui la montée en flèche des exportations chinoises, il faut garder à l'esprit que les importations chinoises augmentent dans les quasi-mêmes proportions. Globalement, la Chine n'occupe pas aujourd'hui une place dominante dans l'industrie manufacturière mondiale. En effet, bien que la Chine soit actuellement le premier producteur d'une centaine de produits dont 80 biens manufacturiers répartis dans plus de 10 secteurs, elle ne réalise que 5% de la production industrielle mondiale, loin derrière

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les États-Unis (20%), le Japon (15%) et l'Allemagne (Lu, 2003). La Chine est particulièrement faible dans les industries liées aux équipements où la valeur ajoutée est beaucoup plus importante (une part de 30% de l'ensemble des industries manufacturières chinoises contre 42% aux États-Unis, 44% au Japon et 46% en Allemagne). Par ailleurs, la Chine n'a actuellement pas le niveau technologique nécessaire pour devenir un centre manufacturier mondial car elle est très dépendante des technologies avancées provenant de l'étranger, et ce, dans la quasi-totalité de ses industries. Par ailleurs, « l'usine mondiale » est une terminologie inventée par le passé afin de désigner les pays considérés comme des empires industriels. L'Angleterre, dans le courant du 19e siècle, méritait tout particulièrement cette appellation. En effet, ne représentant que 2% de la population mondiale, l'Angleterre produisait 53% de la production mondiale de fer et 50% de la production mondiale de charbon ; elle réalisait, entre 1800 et 1870, 53% de la production manufacturière mondiale et 1/3 des exportations de la planète (Hudson, 2001). De même, à compter des années 1880 et ce, pour une longue période, les États-Unis ont été considérés comme « une usine mondiale » et « un centre de gravité économique mondial », résultat de leur domination et de leur leadership dans les industries manufacturières. Par la suite, au cours des années 1970 et 1980, le Japon a, lui aussi, été désigné par certains sous le terme d'« usine mondiale », occupant une place importante dans plusieurs secteurs industriels sur la scène internationale. Cependant, de la désignation de la domination absolue anglaise à la description de l'essor chinois en passant par la démonstration de la puissance des Américains et de l'importance relative des Japonais, le terme d'« usine mondiale » apparaît comme une notion très relative, très imprécise et donc, non scientifique. Aussi, dans le contexte actuel de la mondialisation où aucun pays ne peut se targuer d'être aussi puissant que l'ont été l'Angleterre ou les États-Unis dans leur temps, ainsi qu'en l'absence d'un ensemble de critères susceptibles d'être universellement acceptés, ce terme ne peut servir aujourd'hui que pour souligner l'importance relative d'un pays dans son intégration au marché international et plus particulièrement, pour signaler les bouleversements importants qui se produisent dans le monde du fait du développement économique rapide d'un pays. La croissance rapide des produits « made in China » a grandement contribué au développement du commerce mondial et ce, avec un taux de contribution actuel de 11%11. Pourtant, elle a créé sur son chemin des bouleversements majeurs sur la structure et l'ordre économique mondial et ce, aussi bien au niveau de l'emploi et des prix des produits qu'au niveau de la dynamique de la compétition internationale. Ainsi, bien que la Chine demeure encore davantage un atelier d'assemblage mondial dans la nouvelle division internationale du travail, le « facteur chinois » est aujourd'hui incontestablement devenu un des éléments fondamentaux à considérer par tous dans le développement et la compétition sur le marché international.

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"Il y a des temps ou l'on doit dispenser son mépris qu'avec économie à cause du grand nombre de nécessiteux"   Chateaubriand