B. Les innovations opérées par la loi 017
portant répression du grand banditisme
En 2009, à l'issue d'une concertation initiée
par le premier ministère entre les personnels magistrats et OPJ, il a
été suggéré, l'adoption d'une loi qui modifie la
procédure ordinaire afin de parer à la situation36.
Cette loi apporte des innovations par une définition légale des
actes de grand banditisme (1) et une modification substantielle de la
procédure et des compétences (2).
1. La notion d'actes de grand banditisme et leurs
sanctions
Aux termes de l'article 3 de la loi, les actes de grand
banditisme sont des vols commis dans des circonstances particulières.
Le vol est une infraction courante définie à
l'article 449 du CP : « est coupable de vol, quiconque soustrait
frauduleusement une chose appartenant à autrui». .Du point de vue
des éléments constitutifs, pour que le vol soit constitué,
il faut un acte matériel de soustraction, une chose objet de la
soustraction, et une intention frauduleuse. Commis dans certaines circonstances
de fait ou de droit, le vol devient une infraction aggravée punie de la
peine criminelle.
Partant de cette infraction classique, la nouvelle loi va
regrouper un ensemble de types de vol auxquels elle donne la qualification
d'actes de grand banditisme. L'article 3 en effet dispose que « les actes
de grand banditisme s'entendent des vols caractérisés par l'usage
d'armes quelconques, de toutes formes de violences sur les personnes ou de tous
autres procédés mécaniques ou chimiques
»37. Et sont notamment considérés comme actes de
grand banditisme,
? le vol, lorsqu'il a été commis sur les chemins
publics ou dans les véhicules particuliers ou servant de transport de
voyageurs, de correspondances ou de bagages, dans les circonstances
prévues à l'article 3 ;
? le vol, lorsqu'il a été
précédé, accompagné ou suivi d'autre crime ; ? le
vol commis avec usage d'arme ;
? le vol commis avec port d'arme apparente ou cachée ;
36 Témoignages recueillis des acteurs de la
justice sur enquête qualitative.
37 Article 3.
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? le vol commis avec violence ou accompagné de tout
acte de barbarie ou de torture ; ? le vol commis en faisant usage de
procédés mécaniques ou chimiques.
Les peines prévues au grand banditisme vont de
l'emprisonnement de cinq ans avec amende à l'emprisonnement à
vie. Et la moitié de cette peine est nécessairement assortie
d'une période de sûreté tandis que le reste est
incompressible.38
2. La compétence juridictionnelle dans la
répression des actes de grand banditisme
Aux termes de l'article 58 du code pénal, les
infractions punies d'une peine minimale de cinq (05) ans d'emprisonnement et/ou
amende sont des crimes ; celles punies d'une peine, au moins égale
à un (01) an et/ou amende sont des délits et enfin celles dont
les peines se résumant en amende ne sauraient excéder 50 000 F
sont des contraventions.
Suivant cette classification tripartite, le tribunal
correctionnel est la juridiction compétente pour juger les
délits, le tribunal de simple police pour connaitre des contraventions.
Quant aux crimes, ils relèvent de la compétence de la chambre
criminelle de la cour. Au regard de cette répartition des
compétences, le vol aggravé ressortissait de la compétence
de la chambre criminelle eu égard à sa nature criminelle. Mais,
sous la loi 017, les actes de grand banditisme sont désormais
révolus à la connaissance de la chambre correctionnelle du TGI.
En effet, aux termes de l'article 9 de la loi portant répression du
grand banditisme, « le tribunal correctionnel est la juridiction
compétente pour connaître des infractions relevant de la
présente loi ». C'est donc dire que la compétence du
tribunal correctionnel pour juger les actes de grand banditisme constitue une
exception notable à la répartition habituelle des
compétences. Ce qui peut susciter des inquiétudes quant aux
garanties des droits des personnes poursuivies39.
Cet allègement procédural au plan juridictionnel
est doublé de l'accroissement des pouvoirs de la police judiciaire dans
la lutte contre le grand banditisme.
Paragraphe II : Le rôle de la police judiciaire
dans la
répression du grand banditisme
La police judiciaire constitue l'un des rouages indispensables
de la procédure pénale. Au Burkina Faso et dans la lutte contre
le grand banditisme, elle joue un rôle de premier plan. C'est d'ailleurs
au nom d'elle que la loi portant répression du grand banditisme a
été prise dans le but
38 Article 16 et suivants de la loi.
39 Infra (2ème partie)
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de faciliter les opérations. La police judiciaire est
chargée des enquêtes de flagrance dans les actes de grand
banditisme (A) et à ce titre, opère sous le contrôle des
magistrats (B).
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