III-2 : ACCUEIL ET ETABLISSEMENT DES REFUGIES LIBERIENS A
ACCRA
Au Ghana, comme en Guinée, les autorités
n'étaient pas prêtes à accueillir les
réfugiés. Le pays avait bien accueilli des militants africains
indépendantistes et anti- apartheid mais ces « freedom
fighters » n'ont jamais représenté des milliers de
personnes. Il s'agissait surtout d'étudiants qui ont été
hébergés dans des Foreign Students' Hotels mis en place
notamment près de l'université d'Accra par la politique
panafricaniste de Kwame N'krumah entre 1957 et 1996 (ADJAKRA A.D.Y, 1990 ;
ALIFO N.M.K, 1999). C'est le gouvernement militaire de John. J. Rawlings au
pouvoir depuis le coup d'état de 1981, qui a ouvert un camp à une
quarantaine de kilomètres à l'Ouest d'Accra, dans le village de
Gomoa-Buduburam (communément appelé Buduburam) pour les
réfugiés libériens en nombre croissant en Septembre
2000.
III-2-1 : LE MODELE D'ACCUEIL GHANAEEN : UN ENCADREMENT
DES REFUGIES
Les premiers libériens arrivés au port de Tema
ont été accueillis par le Ghana Immigration Service
(GIS) comme l'atteste la photo 1. Au nombre d'une centaine, ils ont
d'abord été hébergés à Afienya, une
localité au Nord-est de Tema, dans une école transformée
par l'Etat en centre de transit (OKAE-MENSAH K, 1997). D'autres
réfugiés arrivés plus tard ont emprunté les lignes
aériennes régulières et ont bénéficié
de l'aide de l'armée ghanéenne, empruntant les avions, et surtout
les bateaux militaires ghanéens. A partir de la création du camp
de Buduburam, le GIS a orienté les réfugiés arrivant
à Accra vers ce lieu d'accueil où ils étaient
estimés à 9000 en 1990 et 15 000 en 1996. Toutefois, le
gouvernement ghanéen n'a jamais obligé les libériens
à s'installer à Buduburam et ESSUMAN-JONHSON A, 1992b
précise ainsi qu'environ 2000 libériens s'étaient
installés par leurs propres moyens à Accra ou ailleurs tout en
ajoutant que certains ont par la suite cherché à rejoindre le
camp où le degré d'aide était important (Ghanaian Times,
05/10/1990). Le camp a également servi de lieu de transit, avant qu'ils
ne rejoignent leur pays d'origine, à des centaines de ressortissants
africains, nigérians par exemple, fuyant la guerre civile
libérienne. Dans ce grand camp d'accueil, les réfugiés ont
été hébergés dans des maisons préexistantes
sur le terrain ainsi que sous des tentes données par l'armée.
IMPACTS ENVIRONNEMENTAUX DES REFUGIES AUTOUR DES ZONES
CONFLICTUELLES EN AFRIQUE DE L'OUEST
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Photo 1 : extraits de presse ghanéenne montrant
l'arrivée des réfugiés libériens à Accra
Source : Ghanaian Times, 09/10/1990
Ces extraits de presse ghanéenne en anglais montrent
que les premiers arrivants à
Accra n'ont pas été accueillis à bras
ouverts par la société civile, mais ont été pris en
charge par le gouvernement.
Le camp de Buduburam, situé à 45 km d'Accra,
peut être considéré comme une centralité
libérienne au Ghana, au sens où il concentre une forte population
de réfugiés et de services proposés par et pour eux, et
où il entraine des mobilités particulières de la part des
libériens installés ailleurs. Le camp est en effet pour eux un
point de repère et un lieu de sociabilité important, mais
à des degrés divers, selon l'éloignement
géographique, le capital socio-économique et l'histoire
personnelle des individus (ASARE V.N.B, 2000). Point d'ancrage non
résidentiel pour ces derniers, le camp est surtout le signe d'une
reterritorialisation des libériens au Ghana (AGIER M, 2013). La
majorité des réfugiés libériens rencontrés
au Ghana, soit 44 sur 50, vivaient ou avaient vécu dans le camp de
Buduburam. A l'échelle de l'agglomération d'Accra, DICK S
(2002a), proposait de distinguer les « camps refugees » des «
town refugees » et observait elle aussi de nombreux allers et retours
entre le camp et la ville.
IMPACTS ENVIRONNEMENTAUX DES REFUGIES AUTOUR DES ZONES
CONFLICTUELLES EN AFRIQUE DE L'OUEST
39
A l'instar du camp urbain de Buduburam, le camp de Krisan
visible sur la carte 5, situé en milieu rural, à 80 km de
l'agglomération de Sekondi-Takoradi, a également accueilli un
petit nombre de réfugiés à partir de 1996. Le camp de
Krisan a hébergé des libériens et de petits groupes de
réfugiés sierra-léonais, soudanais ou encore
centrafricains. Les arrivées de libériens au Ghana ont
été ponctuelles et diffuses comme en Guinée et la lenteur
des rapatriements étaient visible.
Carte 5 : Plan du camp de Buduburam et répartition
inégale des libériens à Accra
L'analyse de cette carte dévoile que l'installation
des réfugiés s'est faite le long de la zone côtière
à Accra et que les trois localités qui concentraient le plus de
réfugiés libériens étaient respectivement
Buduburam, Tema, Kasao.
Outre ces réfugiés, le Ghana a surtout
été marqué entre 1993-1995 par la présence de
réfugiés togolais en nombre irrégulière comme le
montre la figure 2, dans la partie Est du pays qui fuyaient les troubles
politiques de leur patrie. A l'Ouest, ce sont les réfugiés en
provenance de la Côte d'Ivoire qui ont franchi la frontière
ghanéenne dans les années 2000. Le nombre total de
réfugiés dépassait les 40 000 en 2003 (ASARE V.N.B,
2000).
En plus de ces effectifs, le Ghana a aussi enregistré
le retour de ses ressortissants fuyant la guerre civile du Libéria. Le
Ghana Immigration Service (GIS) s'est chargé de séparer
les libériens des ghanéens grâce à l'absence
d'ethnies communes entre le Libéria et le Ghana et surtout le broken
english des libériens. Le gouvernement ghanéen, via le GIS,
a aidé
financièrement au retour de ces nationaux vers leurs
villages d'origine, mais ne leur a pas octroyé d'aide spécifique.
Ces ghanéens ont d'abord séjourné dans le camp de
Buduburam avant de choisir un lieu spécifique pour leur
réintégration lorsqu'ils n'avaient pas de villages d'origine. Ces
15 000 ghanéens d'origine rurale, sont revenus les mains vides
entrainant une réinsertion difficile comme à Senya Beraku, un
village proche de Buduburam (DEKKER R, 1995). Ils ont néanmoins obtenu
des micros crédits de l'ONG Assemblies of God Relief and Development
Services qui est également intervenue dans le camp de Buduburam.
Figure 2 : arrivées des différents
réfugiés de conflits et exilés ghanéens à
Accra entre 1990 et 2009
Ce graphique atteste que de 1990 à 2009, l'accueil
du plus grand nombre de réfugiés au Ghana a eu lieu de 1993
à 1996, constitué à majorité de
réfugiés togolais fuyant les troubles électoraux au Togo.
L'arrivée du deuxième contingent important de
réfugiés s'est déroulée de 2002 à 2007 et
dominée par les réfugiés libériens issus de la
deuxième guerre civile de leur pays.
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