§.3. Fondements du principe évoqués par la
commission
Les rédacteurs du principe de la responsabilité
de protéger ont fondé ce principe directeur de la
communauté internationale sur :
- Les obligations inhérentes à la notion de
souveraineté ;
- L'article 24 de la charte de l'ONU, qui confère au
Conseil de sécurité la responsabilité du maintien de la
paix et la sécurité internationales ;
- Les impératifs juridiques particuliers
énoncés dans les déclarations, pactes et traités
relatifs aux droits de l'homme et à la protection des populations, le
droit international humanitaire, et la législation nationale ;
- La pratique croissante des Etats et des organisations
régionales, ainsi que du conseil de sécurité
lui-même.
S'agissant des obligations inhérentes à la
notion de souveraineté qui fondent le principe de la
responsabilité de protéger, il sied de noter que la perception
nouvelle de la notion de la souveraineté renvoi à la
responsabilité de l'Etat sur la protection de sa population. Il s'agit
pour nous d'un fondement interne qui découle des missions
traditionnelles de l'Etat en tant que titulaire de la souveraineté.
Concernant l'article 24 de la charte de l'ONU, qui selon la
commission constitue aussi un fondement au principe de la responsabilité
de protéger. Cet article attribue au conseil de sécurité
la responsabilité principale du maintien de la paix et de la
sécurité internationales. La commission trouve ici la base
juridique nécessaire pour légitimer les décisions et
actions du conseil de sécurité dans la mise en oeuvre de la
responsabilité de protéger, particulièrement les
interventions militaires.
Ce socle recèle de notre point de vue quelques lourds
dangers. Subordonner la mise en application de la responsabilité de
protéger au conseil de sécurité dans le cadre du maintien
de la paix et de la sécurité internationales est une bonne
démarche, mais les aléas qui caractérisent cet organe
politique de l'ONU, et le concept-valise que constitue aujourd'hui la notion de
la paix et de la sécurité internationales ne rassure pas sur le
déclenchement de la responsabilité de protéger en cas de
péril grave pour les populations civiles.
La commission évoque ensuite les impératifs
particuliers énoncés dans les déclarations, pactes et
traités relatifs aux droits de l'homme et à la protection des
populations, le droit international humanitaire, et la législation
nationale. La commission veut ici faire allusion à toutes les
dispositions qui donnent à l'Etat la charge de veiller au respect des
droits de l'homme et du droit international humanitaire autant sur le plan
international qu'interne. A titre exemplatif, nous pouvons citer l'article 1
commun des conventions de Genève, l'article 2 de la convention sur
l'imprescriptibilité des crimes de guerre et des crimes contre
l'humanité, l'article 1 de la convention sur la répression du
crime de génocide, l'article 1 du pacte international relatif aux droits
civils et politiques, l'article 16 de la constitution de la République
Démocratique du Congo, etc.
En dernier lieu, la commission appuie l'existence du
principe de la responsabilité de protéger sur la pratique
croissante des Etats, des organisations régionales, ainsi que du conseil
de sécurité lui-même. En effet au cours de ces deux
dernières décennies le monde a connu plusieurs interventions
à des fins de protection humaine, mais contestée suite à
l'absence de couverture juridique. Nous avons l'intervention de l'OTAN au
Kosovo en 1999, l'intervention de l'ONU en Irak sur décision du conseil
de sécurité en 1991, les différentes résolutions de
l'ONU sur la protection des civils en période de conflit armé et
la création des missions de maintien de paix (Darfour), ...
Les fondements évoqués par la commission
semblent rechercher en réalité un point d'appui pour chaque
aspect de la R2P, et sont par conséquent éparses et ambigus. Une
révision du principe s'avère nécessaire pour corriger ces
malformations congénitales. Voyons à présent le contenu et
la portée du principe.
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