A/ Les débuts de la Beatlemania (1963) et l'essor de
partenariats médiatiques
Ainsi, avec l'arrivée de la
télévision, les années
d'après-guerre amplifient ces partenariats multimédias et vont
permettre de construire des succès discographiques extraordinairement
rapides, à l'échelle nationale mais aussi internationale. La
beatlemania est un exemple significatif qui montre jusqu'à quel
point la télévision est devenue un élément
décisif dans le lancement des carrières discographiques. Si les
quatre garçons de Liverpool connaissent leurs premiers succès en
1962, grâce au travail de promotion lancé par George Martin, c'est
à partir de 1963 que le phénomène s'oriente vers une
logique propre au show
280 CLOONAN, Martin, « Politiques publiques et musiques
populaires au Royaume-Uni » in DAUNCEY, Hugh, LE GUERN, Philippe
(Dir.), Stéréo : sociologie comparée des musiques
populaires : France/G.-B., Paris, Irma éditions, Puceul,
Mélanie Séteun, coll. « Musique et société
», 2008, p. 74.
281 LESUEUR, Daniel, L'histoire des radios pirates : de
Radio Caroline à la bande FM, Rosières en Haye, Camion
Blanc, 2011, p. 173.
business, à la suite de passages successifs à la
télévision nationale dont le point culminant, après
quelques émissions pour les jeunes (Thank You Lucky Stars
et Ready Steady Go ! sur ITV), est la participation du groupe, le
13 octobre, à l'émission familiale Sunday Night at the London
Palladium, qui leur permet de toucher plus de 15 millions de foyers
britanniques et constitue le véritable point de départ de la
folie Beatles (le lendemain, le Daily Mirror parle de
Beatle-Mania). Le passage à la Royal Variety Performance,
où ils jouent le 4 novembre 1963 devant une partie de la famille royale
et de l'Establishment (25 millions de téléspectateurs), amplifie
le phénomène à partir de 1964 : désormais, la
Beatlemania s'étend à la plupart des pays d'Europe et aux
États-Unis où le groupe devient le phénomène
musical, économique et médiatique le plus considérable de
l'après-guerre. Avec quelques mois décalage, les Rolling Stones
effectueront le même parcours, ainsi que de nombreux autres
groupes vedettes de la pop britannique des années 1960. Ce
phénomène évoque les prémices de «
stratégies multimédias » qui connaîtront leur
apogée durant les années 1980, à l'heure où les
majors présentes dans l'industrie de la musique enregistrée
développèrent des activités dans des industries voisines
ou complémentaires du disque (radio, cinéma,
télévision, vidéo, livre), cherchant à favoriser la
commercialisation d'un programme enregistré sur plusieurs
supports282. C'est justement cette force des alliances entre les
interprètes et leurs « agents non humains »283
(radio, cinéma, juke-box) qui permet au star-system de se lancer,
d'autant plus que, ne l'oublions pas, l'industrie a besoin de plus en plus de
« rendre la musique reconnaissable, pour rendre plus familier ce qui
n'a pas de visibilité ou ce qui n'a pas été entendu
»284.
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