La primauté du droit communautaire de l'UEMOA ( Union Economique et Monétaire Ouest Africaine ) sur le droit des états membres( Télécharger le fichier original )par Ahmed Rémi OUOBA Université Saint Thomas d'Aquin de Ouagadougou Burkina Faso - Mémoire de maitrise en droit public 2012 |
§II: LE JUGE NATIONAL, GARANT DE LA PRIMAUTE DU DROITCOMMUNAUTAIRELe juge national doit comprendre et appliquer le droit communautaire (A) comme il doit comprendre et appliquer le droit national, en parfaite cohérence avec le système juridique crée par le droit communautaire sinon il peut se heurter à d'éventuelles conséquences (B). A: APPLICATION DU DROIT COMMUNAUTAIREL'application signifie que dans les matières où les actes de l'UEMOA sont intervenus, il n'y a pas de place pour des dispositions contraires de droit interne ayant les mêmes objets109(*). C'est ce qu'exprime l'article 6 du Traité en posant le principe de la primauté des actes de l'Union. Ces dispositions contraires doivent être écartées et considérées comme abrogées et celles en cours d'élaboration doivent être purement et simplement abandonnées110(*). Le juge national chargé d'appliquer dans le cadre de sa compétence les dispositions du droit communautaire, a l'obligation d'assurer le plein effet de ces normes en laissant au besoin inappliquée, de sa propre autorité, toute disposition contraire de la législation nationale, même postérieure, sans qu'il ait à demander ou à attendre l'élimination préalable de celle-ci par voie législative ou par tout autre procédé constitutionnel111(*). Lorsque la règle de droit communautaire est d'application directe, on demande au juge national de la faire appliquer directement. Cependant, l'effet direct n'est pas une exigence indispensable pour qu'un justiciable puisse se prévaloir d'une règle de droit communautaire devant le juge national. Comparativement au droit communautaire européen, la CJCE reconnait le caractère d'effet direct aux directives pour, d'une part que l'exclusion de toute invocabilité en justice des directives soit incompatible avec l'effet contraignant que le Traité leur attribue et d'autre part du fait que l'effet utile d'une directive serait affaiblie si les justiciables ne pouvaient pas s'en prévaloir112(*). Face aux critiques suscitées par cette jurisprudence, la CJCE a, dans une autre affaire, soutenue qu'il faut apprécier l'applicabilité d'une directive et ses effets dans 2 hypothèses différentes : - en cas de transposition, il est normal qu'un justiciable invoque une directive pour faire observer que le droit national ne respecte pas les objectifs de la directive. - en cas de non transposition, et que le délai dans lequel l'Etat devait prendre des mesures pour transposer la directive est arrivé à terme, un justiciable peut se prévaloir de la directive. Par contre, il n'est pas possible de se prévaloir d'une directive non transposée si le délai de transposition court encore.113(*) Le délai de transposition est donc l'élément déterminant de l'effet direct d'une directive. L'application du droit communautaire étant l'oeuvre des juridictions nationales, elle s'accompagne de l'autonomie institutionnelle afin de faciliter le travail du juge national mais aussi des justiciables. L'UEMOA reconnait ainsi une autonomie institutionnelle aux différents Etats dans la sanction du droit communautaire. Cette autonomie institutionnelle signifie : « la reconnaissance du pouvoir des Etats membres de répartir les compétences entre leurs différents organes juridictionnels. En d'autres termes, il appartient aux différents Etats d'organiser les compétences et les procédures destinées à sanctionner le droit communautaire ou commun et notamment à sanctionner les droits que les particuliers peuvent tirer de l'effet direct des normes communautaires. En assurant l'application du droit commun ou communautaire, les institutions juridictionnelles nationales font ainsi l'objet d'une «communautarisation ».114(*) Maintenant que l'on sait que les juridictions nationales sont impliquées au système communautaire, quelle(s) conséquence(s) peuvent découler d'une mauvaise exécution de ses obligations ? * 109 Pour la notion des dispositions contraires ayant le même objet voir avis de la CCJA n°1/2001/EP du 30 Avril 2001, recueil de jurisprudence de la CCJA, numéro spécial Janvier 2003, p.74 ; ohadata.com/jurisprudence/ohadata J-02-04, obs. J. I. SAYEGH. * 110 Cf. CJUEMOA avis n° 003/2000 du 27 JUIN 2000, ohada.com/jurisprudence/ohadata J-02-3, observations de J. I. SAYEGH et F. M. SAWADOGO. * 111 Cf. CJCE, arrêt Simmenthal, op. cit. * 112 CJCE, arrêt Franz Grad, 06 Octobre 1970. * 113 CJCE, arrêt Ratti, 05 février 1979. * 114 P. MEYER, « Les confits de juridictions dans l'espace OHADA, UEMOA, CEDEAO », op cit., p. 180. |
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