La primauté du droit communautaire de l'UEMOA ( Union Economique et Monétaire Ouest Africaine ) sur le droit des états membres( Télécharger le fichier original )par Ahmed Rémi OUOBA Université Saint Thomas d'Aquin de Ouagadougou Burkina Faso - Mémoire de maitrise en droit public 2012 |
B: LE MECANISME DU RENVOI PREJUDICIELLe juge national doit prendre des précautions pour restituer une interprétation cohérente avec le droit communautaire. C'est pourquoi il va solliciter le concours du juge communautaire à travers le renvoi préjudiciel. La question préjudicielle est une demande adressée par un juge à une juridiction plus compétente. Une question préjudicielle oblige le juge à surseoir à statuer jusqu' à ce que la juridiction compétente ait rendu sa décision. Le renvoi préjudiciel est un mécanisme de coopération judiciaire entre la CJUEMOA et les juridictions nationales. Ce mécanisme assure l'application uniforme du droit communautaire dans l'ensemble des Etats membres de l'Union105(*). Il s'agit d'une procédure par laquelle une juridiction nationale ou une autorité à fonction juridictionnelle pose à la CJUEMOA une question portant sur l'interprétation ou sur l'appréciation de la légalité, c'est-à-dire sur la validité d'une norme communautaire, dans un litige dont elle est saisie. Le fondement du renvoi préjudiciel est prévu à l'article 12 du protocole additionnel n°1 : « la Cour de Justice statue à titre préjudicionnel106(*) sur l'interprétation du Traité de l'Union, sur la légalité et l'interprétation des actes pris par les organes de l'Union, sur la légalité et l'interprétation des statuts des organismes créés par un acte du Conseil, quand une juridiction nationale ou une autorité à fonction juridictionnelle est appelée à en connaître à l'occasion d'un litige. Les juridictions nationales statuant en dernier ressort sont tenues de saisir la Cour de Justice. La saisine de la Cour de Justice par les autres
juridictions nationales ou les autorités à fonction
juridictionnelle est facultative » ; ainsi qu'à
l'article 15 §6 du Règlement n°1/96/CM du 20
Décembre 1996 portant Règlement des procédures de la
Cour de Justice de l'UEMOA : « lorsqu'un problème
d'interprétation du Traité de l'Union, de la
légalité et d'interprétation des actes pris par les
organes de l'Union, de la légalité et d'interprétation des
statuts des organismes créés par un acte du Conseil, se pose
devant une juridiction nationale dont les décisions sont susceptibles de
recours, cette juridiction peut, si elle l'estime nécessaire, poser des
questions préjudicielles à la Cour. Les normes pouvant faire l'objet d'un tel renvoi sont constituées de l'ensemble du droit communautaire, à savoir d'une part les actes de droit primaire c'est-à-dire le Traité de Dakar, les protocoles additionnels et l'accord d'adhésion de la Guinée Bissau qui complète le Traité ; d'autre part il concerne les actes de droit dérivé que sont les règlements, les règlements d'exécutions, les directives, les actes additionnels, les décisions, les avis et recommandations. L'interprétation et l'appréciation en validité lors d'un renvoi préjudiciel s'étend également aux statuts des organismes créés par un acte du Conseil des Ministres comme c'est le cas de la Bourse Régionale des Valeurs Mobilières (BRVM) ou du Conseil Régional de l'Epargne Publique et des Marchés Financiers (CREPMF).108(*) * 105 Y. A. MAHAMAN, « la Cour de Justice de l'UEMOA », Agence Intergouvernementale de la Francophonie, in séminaire sous-régional sur « la sensibilisation du droit communautaire de l'UEMOA », Ouagadougou, 6-10 Octobre 2003, GIRAF Janvier 2004, Collection DTE, p. 141. * 106 Cette expression a été corrigée par le terme préjudiciel par Etienne CEREXHE en affirmant que le terme préjudicionnel n'a pas de portée en droit. Cf. E. CEREXHE et L. Le HARD· de BEAULIEU, op cit, p. 59, note 70. * 107 Cependant force est de remarquer qu'il existe des dispenses par rapport à l'obligation d'utiliser le mécanisme du recours préjudiciel. Il s'agit de « la théorie de l'acte clair » élaborée en droit communautaire et appliquée par le Conseil d'État français. Elle permet l'interprétation des normes internationales par le juge administratif sans renvoi. Selon cette théorie le juge national n'est tenu de renvoyer la question à la Cour de justice que s'il existe une difficulté réelle d'interprétation ou de validité (cf. CJCE, arrêt CILFIT, 6 octobre 1982 et CJCE, arrêt Arcelor du 8 février 2007.) Cette théorie consiste à écarter l'exercice du renvoi préjudiciel, même s'il s'agit d'une obligation qui lie toute juridiction statuant en dernier ressort, dès lors que la disposition de droit communautaire en cause est suffisamment claire, et qu'un sursis à statuer au titre du renvoi préjudiciel devant le juge communautaire serait dépourvu de toute utilité. Ainsi, dans ce cadre l'activation du mécanisme préjudiciel est soumise à sa pertinence au regard du caractère de clarté de la norme communautaire dont il s'agit et ce, à la libre appréciation des juges nationaux de dernier ressort. * 108 R. FOFANA (juge à la CJUEMOA), présentation de la Cour de Justice de l'UEMOA, in Revue de Droit Uniforme Africain n°002/3ème trimestre, Novembre 2010, p. 29. |
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