II. 4. Un secteur abandonné
II. 4. 1. La situation en Mairie de Bujumbura
Selon une enquête effectuée auprès de la
population municipale, les familles rencontrent beaucoup de problèmes
quand elles vont enterrer les leurs. Ces difficultés sont en grande
partie liées à la distance entre les sites funéraires et
les habitations. On est souvent plus d'une dizaine de kilomètres.
Les morts de la Mairie sont principalement inhumés soit
à Mpanda soit à Kanyosha. Avec l'avènement de la crise de
1993, il est né d'autres types de cimetières.
- Cimetières créés anarchiquement par la
population indigente, incapable d'arriver au lieu habituel d'enterrement :
à ce titre, on peut noter le cimetière de Kamenge. Celui-ci a
été mis en place par un père blanc connu sous le nom de
« Buyengero »,
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qui voulait que les indigents qui se faisaient soigner dans son
hôpital puissent, en cas de décès, y être
enterrés sans problèmes.
- Cimetières « inconnus » créés
à la suite de la crise de 1993 et localisés dans des zones
d'affrontement rebelles. Ainsi, par exemple, à Bujumbura rural, au mois
de février 2006, une visite de la Radio publique africaine a
découvert des cimetières105 créés par
des rebelles ou des groupes armés opérant dans la province.
Précisons que des familles dont un membre est enlevé, recourent
à ces lieux pour voir s'il n'y a pas une tombe récente qui
pourrait contenir le disparu.
Ainsi, parmi ces cimetières, on peut en citer trois:
- le cimetière de Bisekuro sur la colline Sororezo
où 19 tombes ont été identifiées,
- le cimetière de Muha sur la colline Rweza où 20
tombes ont été repérées,
- le cimetière de Bugazi, à un lieu
communément appelé "projet", sur la colline
Muhanamboga, au-dessus du campus Kiriri.
Signalons que ces cimetières ne sont pas les seuls qui
existent, il y a d'autres endroits sur le territoire national qui abritent les
corps humains et dont l'identification s'avère nécessaire pour
que les proches des disparus puissent les enterrer avec dignité.
II. 4. 2. Cimetière de Mpanda
Ce cimetière se situe à environ vingt
kilomètres de la capitale Bujumbura, en commune Gihanga ( Bubanza), de
part et d'autre de la route nationale Bujumbura-Cibitoke. La partie qui se
trouve à droite de la route est pleine, ce qui fait que l'enterrement
ait lieu dans la partie gauche, à l'ouest de la route
macadamisée, vers la rivière Rusizi. A l'Est, on a la
rivière Kajeke . Notons qu'au sud du cimetière, on a la
rivière du même nom, Mpanda. Ce site funéraire a d'abord
servi d'enterrement pour les habitants de la zone Buringa ou des environs. Ce
n'est qu'à la suite de la crise d'octobre 1993 que, d'autres personnes
en provenance de la ville de Bujumbura sont venues inhumer là. Il s'agit
d'une des conséquences de la "balkanisation" de la ville, en zones hutu
et en zones tutsi. Ce phénomène a également affecté
les cimetières qui ont été tribalisés à
l'occasion de la guerre civile. Le cimetière est ouvert
généralement à neuf heures et il ferme vers quatorze
heures, à cause de l'insécurité.
105. Enquête réalisée auprès de
Sindayigaya Merveille, journaliste de la RPA, Bujumbura, août 2005.
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En effet, comme toute ville est habitée par des riches
(haut standing) et par des pauvres, Mpanda n'échappe pas à cette
triste réalité. Il y a deux parties observables:
L'une construite à l'image d'un bidonville est rarement
entretenue. On a peur d'y entrer car des herbes y sont abondantes comme
à la forêt. Il n y a pas de constructions et mêmes les rares
qu'on peut y localiser sont envahies par la végétation. Les
tombes sont construites en terre, comme les maisons que les défunts
occupaient de leur vivant. Il n' y a ni pierres sépulcrales ni croix ou
autres signes funéraires sur les tombes, excepté celles qui sont
fraîches où une croix modeste en bois résiste encore au
temps et aux termites. C'est un domaine des pauvres. Ceux -ci ne se
préoccupent pas de son entretien faute de moyens. Cette catégorie
de population ne recourt pas aux services des pompes funèbres. Ils
préparent les places et construisent eux-mêmes des tombes en
terre, sans ciment. C'est un lieu où des inhumations ne respectent
pratiquement aucune réglementation. Selon une enquête
effectuée auprès de la population résidant aux environs
dudit site, certaines personnes démunies y enterrent les leurs sans
permis d'inhumation, sur d'autres tombes et en dehors du temps
réglementaire. La raison principale est que l'on n'a pas des frais pour
s'acheter une place, des habits et de cercueil. D'où, ils
préfèrent enterrer clandestinement.
La deuxième constitue un domaine réservé
aux riches. Les places sont bien aménagées et les fossés
creusés à l'avance. Les tombes sont en matériaux durables
et elles sont clôturées à l'image des parcelles des
quartiers Rohero ou Mutanga. On rivalise dans l'invention des modèles
architecturaux comme si la mort offrait l'occasion d'étaler la richesse
du défunt ou celle de sa famille. Des maçons sont engagés
sur une période d'une semaine pour peaufiner la nouvelle demeure du
défunt.
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