II. 3. LES TYPES DE CIMETIERE
On a eu l'occasion de le voir, l'art d'enterrer les morts a
évolué à travers le temps. Aussi les lieux d'enterrement
ont bougé dans l'espace.
II. 3. 1. Les sépultures familiales
On peut le rappeler ici, avant l'intrusion coloniale, les
Burundais enterraient les leurs soit à l'intérieur de l'enclos
soit dans les champs. Tout dépendait encore une fois du rang social de
la personne morte, mais aussi des époques.
En effet, le père de famille était
enterré dans le rugo, à l'endroit habituellement
réservé au feu pour le bétail (igicaniro). La
femme ou l'enfant étaient inhumés derrière
98 .Art. 6 de l'Ordonnance du G.G. du 4 septembre1909 telle que
modifiée par Ord. n°336/J. du 29 octobre 1947.
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l'enclos. Les Burundais croyaient que le mari défunt,
s'il est mis devant la maison, pouvait continuer à veiller sur le
bétail et sur toute la famille.99 C'est aussi cet endroit
caché qui rendait facile aux Barundi de "pratiquer le culte des
ancêtres".100 Cela constitue le premier choix du site
funéraire.
Le deuxième choix du lieu de conservation des morts
portait sur les champs familiaux. Au décès d'un membre de la
famille, le cadavre qui était enveloppé dans des nattes,
était conservé dans la propriété familiale.
Au-dessus de sa tombe, on y entassait un amas de pierres (igihongo
c'amabuye). Il y a lieu de penser déjà que les
mentalités sur les morts connaissaient une mutation due aux contacts
avec les étrangers, surtout les colonisateurs. Une fois enterrés,
les restes humains étaient considérés comme impurs et tout
contact avec eux risquait de souiller les vivants.
Après, les cimetières familiaux localisés
dans la propriété familiale, une nouvelle innovation s'observe.
Des missionnaires nouvellement arrivés sur le sol burundais inventent
une stratégie pour convertir les gens au catholicisme, ce qui supposait
d'abord la chasse aux pratiques traditionnelles, rapidement jugées
rétrogrades. Les cimetières sont désormais "soumis
à une sorte de consécration (...), regardés comme des
dépendances ecclésiastiques".101 Il s'agit alors
d'"une cléricalisation des funérailles"102 mettant en
vogue la sensibilité religieuse qui a entraîné la
disparition du culte des ancêtres où les devins sont
remplacés par des prêtres, si l'on prend le cas de chez nous. En
outre, les espaces funéraires qui étaient localisés dans
l'enclos familial furent aménagés dans les champs, avant
d'être publics, réglementés et localisés loin des
lieux d'habitation. Autrement dit, on passe des sépultures «
anarchiques » des familles aux cimetières communaux
organisés.
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