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L'exigence démocratique en droit international

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par Zied AYARI
Université Jean Moulin Lyon 3 - Master 2 Droit international public 2012
  

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§3 : Le Commonwealth of Nations

L'organisation du Commonwealth regroupe les anciennes colonies et protectorats de l'empire britannique. Elle fut établieen 1931 comme une association de pays libres et égaux, dont l'adhésion reposait sur une allégeance commune à la couronne britannique. Aujourd'hui encore elle est présidée par la Reine d'Angleterre à titre honorifique.

Le Commonwealth est resté longtemps indifférent à la question des droits de l'homme et de la démocratie. Pendant les années 60 et 70 les seuls aspects des droits de l'homme abordés étaient relatifs à la discrimination raciale, en raison de la situation d'apartheid qu'existait en Afrique du Sud143(*).

La fin des années 70 a enregistré une évolution de l'Organisation par rapport à la question des droits de l'homme avec plusieurs déclarations tel par exemple la déclaration de Lusaka en 1979, de Melbourne en 1981, Kuala Lumpur en 1989.

La Conférence des chefs d'Etats et de Gouvernement de Kuala Lumpur en 1989 marque le point de commencement à l'intérêt porté par l'organisation à la démocratie. Dans le communiqué des Chef d'Etats et de gouvernements, ils demandaient à ce qu'on examine les modalités d'une observation électorale dans le Commonwealth, afin d'aider à la consolidation des institutions démocratiques dans les Etats membres144(*).

Mais c'est avec la Déclaration de Harare du 20 octobre 1991145(*), qu'ait eu lieu un véritable tournant du Commonwealth dans l'établissement d'une exigence démocratique pour ses Etats membres. Le cadre politique était favorable et il y a eu pression de plusieurs Etats membres (en plus de plusieurs ONG). Au cours de la Conférence, Le Premier Ministre du Canada Brian Mulroney déclara que : « Nous avons été unis dans notre opposition à l'apartheid. Maintenant, nous devons nous unir dans le soutien à la démocratie et à la liberté et mettre le Commonwealth au service du consensus sur les droits de l'homme et partager les responsabilités »146(*).

Il est souligné dans le paragraphe 4 de la Déclaration: « we believe in the liberty of the individual under the law, in equal rights for all citizens regardless of gender, race, color, creed or political belief, and in the individual's inalienable right to participate by means of free and democratic political processes in framing the society in which he or she lives ». Le paragraphe 9 prévoit: « (...) we pledge the Commonwealth and our countries to work with renewed vigor, concentrating especially in the following areas: (...) democracy, democratic processes and institutions which reflect national circumstances, the rule of law and the independence of the judiciary, just and honest government ».

Le Communiqué des Chefs d'Etats et de Gouvernements de Harare du 22 octobre 1991 met l'accent lui aussi sur l'engagement en faveur des principes démocratiques. Ces deux textes « représentent des succès indéniables pour ceux qui voulaient d'un rôle substantiel pour le Commonwealth en matière de promotion et de protection des droits de l'homme »147(*).

Cela a crée une nouvelle dynamique au seindu Commonwealth ; « The stress on strengthening global understanding makes it clear that the Commonwealth sees itself not as an introspective and nostalgic old boys (and old girls) club, but as an agent for positive change within the international community »148(*).

En 1995, les Chefs d'Etats et de Gouvernement du Commonwealth on adopté the « Millbrook Commonwealth Action Programme on the Harare Declaration »149(*), qui comme son nom l'indique vise à offrir à l'organisation de moyens tendant à mettre en oeuvre les principes contenus dans la Déclaration de Harare (rôle du Secrétariat dans la promotion de la démocratie, Assistance électorale, etc.).

L'apport majeur du « Millbrook Action Programme », réside dans sa partie I. B intitulé « Measures in Response to Violations of the Harare Principles », et la partie I. C qui prévoit la création du Groupe d'action ministériel du Commonwealth (CMAG)150(*).

S'agissant des mesures à prendre en cas de violations des principes démocratiques, et particulièrement en cas de changement inconstitutionnel d'un Gouvernement démocratiquement élu, il y a une gradation de différentes étapes pour permettre la restauration de la démocratie : une déclaration public du Secrétaire Général du Commonwealth constatant la violation des principes de la Déclaration de Harare, une prise de contact immédiate avec le Gouvernement de fait pour rétablir la démocratie, délai de deux ans en cas d'incapacité des institutions de tenir des élections libres, suspendre la participation de l'Etat au réunions multilatérales du Commonwealth ou la suspension de l'Etat en cause de l'Organisation151(*)

Dans la foulée del'adoption de ce programme d'action, le Nigeria s'est vu suspendre du Commonwealth en 1995 en raison du putsh militaire dirigépar le Général Sani Abacha contre le gouvernement d'intérim « In response to developments in Nigeria which constituted a serious violation of the principles set out in the Harare Commonwealth Declaration, Heads of Government, with the exception of The Gambia, agreed to suspend Nigeria from membership of the Commonwealth pending the return to compliance with the principles of the Harare Declaration »152(*)

Pour ce qui est du CMAG, il est formé du Secrétaire Général et de huit ministres des affaires étrangères (sa composition est revue tous les deux ans lors de la Réunion des Chefs de Gouvernement du Commonwealth), il se réunit au besoin pour discuter de menaces graves et persistantes qui pèsent sur la démocratie dans des pays du Commonwealth. Les Fidji, qui ont été suspendues des conseils du Commonwealth en décembre 2006153(*), sont le seul pays actuellement au programme officiel du CMAG, mais celui-ci discute de manière informelle de la situation qui existe dans d'autres pays.Il y a des critiques concernant cet organe, « CMAG should, as originally foreseen, focus on «serious or persistent» violations of the Commonwealth's democratic principles and not simply concentrate its efforts on the unconstitutional usurpation of power»154(*).

L'attachement du Commonwealth à la démocratie a été rappelé en 2009 par «theAffirmation of Commonwealth Values an Principles» qui prévoit « reaffirming our belief in the inalienable right of the individual to participate by means of free and democratic political processes in shaping the society in which they live; underlining that not only governments but all political parties and civil society also have responsibilities in upholding and promoting democratic culture and practices »155(*)

Le rapport des juristes cité (note n° 148) soutient de revisiter la déclaration de Harare, puisque le Commonwealth « has committed it self to making democracy a«way of life» »157(*), cela implique une compréhension commune de ce que exige la démocratie.

En effet dans certains Etats « Political competition, rather than taking place among political parties, is too often between the state (representing the interests of the ruling party or its leader) and the opposition. In this unequal contest, the incumbent government feels free to employ all the instruments at its disposal to secure victory »157(*). Et les mécanismes dont dispose le Commonwealth pourpromouvoir la démocratie (bons offices, observation des élections), doivent être révisés « to ensure their relevance and their effectiveness, to guarantee heir mutual consistency, to open them up to greater engagement with and scrutiny by civil society, and to ensure that they are adequately resourced»158(*).

Malgré ces imperfections, Cinquante-quatre Etats membres du Commonwealth, ont un engagement démocratique assez rigoureux.

Conclusion Chapitre I :

L'exigence démocratique est une norme clairement établie dans plusieurs organisations régionales ou sous régionales, même si il y a certaines organisations régionales qui sont restées à la marge de l'ère de démocratie tel que l'ASEAN ou la Ligue des Etats arabes.

Au final le nombre des Etats ayant contracté au moins un engagement démocratique159(*)sur le plan régional est de 162. Un nombre assez élevé, mais qui n'a pas conduit à élaborer une convention sur le plan universel érigeant la démocratie comme régime de référence. Ce qui est de nature à animer encore des controverses quant à l'existence de l'exigence démocratique en droit international général.

* 143 ITSOUHOU MBADINGA (M), « Démocratisation des Etats et droit international : Essai sur l'universalité du principe de légitimité démocratique des Gouvernements » Lille, Atelier National de Reproduction des Thèses, 2003, p. 44-45.

* 144Commonwealth Heads of Government Meeting, Kuala Lumpur, Malaysia, 18-24 October 1989, Communiqué, §7.

* 145 Harare Commonwealth Declaration, Harare, Zimbabwe, 20 October 1991.

* 146 ITSOUHOU MBADINGA (M), op cit., p. 48.

* 147Ibid., p. 50.

* 148 AFARI-GYAN (K), JAHANGIR (A), SHEEHY (T), « Democracy in the Commonwealth: A report on democracy in the Commonwealth eighteen years after the adoption of the Harare Commonwealth Declaration », Report of Commonwealth Policy Studies Unit and Electoral Reform International Services, 2009, pp. 123, p. 15. Rapport disponible sur internet :http://www.eris.org.uk/images/userfiles/File/Democracy%20TEXT%20ONLY.pdf

* 149The fourteenth Commonwealth Heads of Government Meeting, Millbrook, New Zealand, 12 November 1995.

* 150 Commonwealth Ministerial Action Group

* 151 Paragraph 3 of Millbrook Commonwealth Action Programme on the Harare Declaration: « Where a member country is perceived to be clearly in violation of the Harare Commonwealth Declaration, and particularly in the event of an unconstitutional overthrow of a democratically elected government, appropriate steps should be taken to express the collective concern of Commonwealth countries and to encourage the restoration of democracy within a reasonable time frame. These include:


·
immediate public expression by the Secretary-General of the Commonwealth's collective disapproval of any such infringement of the Harare principles;


·
early contact by the Secretary-General with the de facto government, followed by continued good offices and appropriate technical assistance to facilitate an early restoration of democracy;


·
encouraging bilateral demarches by member countries, especially those within the region, both to express disapproval and to support early restoration of democracy (...)


·
stipulation of up to two years as the time frame for the restoration of democracy where the institutions are not in place to permit the holding of elections within, say, a maximum of six months;


·
pending restoration of democracy, exclusion of the government concerned from participation at ministerial level meetings of the Commonwealth, including Commonwealth Heads of Government Meetings;


·
suspension of participation at all Commonwealth meetings and of Commonwealth technical assistance if the government does not record acceptable progress concerned after a period of two years (...) ».

* 152Communiqué, Commonwealth Heads of Government Meeting, Auckland, New Zealand, November 1995, § 10.

* 153 Suite au renversement du gouvernement par les militaires le 5 décembre 2006.

* 154 AFARI-GYAN (K), JAHANGIR (A), SHEEHY (T), op cit., p. 15.

* 155Affirmation of Commonwealth Values and Principles, Commonwealth Heads of Government Meeting, Port of Spain, Republic of Trinidad and Tobago,29 November 2009, § 5.

156AFARI-GYAN (K), JAHANGIR (A), SHEEHY (T), op cit., p. 1.

* 157Ibid., p. 2

* 158Ibid.

* 159 Il y a des Etats qui ont plusieurs engagements démocratiques au titre de plusieurs organisations régionales.

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"Il y a des temps ou l'on doit dispenser son mépris qu'avec économie à cause du grand nombre de nécessiteux"   Chateaubriand