IV. Etat de la collaboration avec les bailleurs
sociaux
Malgré des problématiques divergentes auxquelles
sont confrontés les bailleurs sociaux et la
collectivité102 au niveau de la gestion des déchets,
ceux-ci ont su trouver des intérêts communs motivant
l'instauration d'une collaboration étroite. D'une part, en logement
social, la maîtrise de l'augmentation des charges locatives constitue une
preuve de l'efficience du mode de gestion de l'organisme logeur. De ce fait, la
redevance incitative est un argument pertinent pour convaincre le logeur de
s'investir dans la gestion des déchets ménagers comme en
témoigne la gardienne de l'immeuble n°3 : « Ben là,
je dis que ça fait deux ans où c'est plein pot, où on
rencontre quand même des gens comme vous. Le Grand Besançon il
s'intéresse, hein ! Ben je crois qu'on s'intéresse depuis qu'on
sait que c'est pucé. ». D'autre part, la CAGB et les bailleurs
sociaux sont animés par une même stratégie de «
reconquête » du terrain visant à se rapprocher des usagers.
Depuis une quinzaine d'années les organismes logeurs mettent en place
des politiques de décentralisation en réimplantant leurs locaux
administratifs au coeur de leur patrimoine. L'instauration de la redevance
incitative par la CAGB correspond au même désir de traiter les
usagers au cas par cas en individualisant leur facture. Néanmoins, bien
que la collaboration avec les bailleurs sociaux offre des perspectives
prometteuses, elle ne revêt pas encore les traits d'une véritable
coopération puisque les logeurs demeurent dans une position de
destinataires, de bénéficiaires du dispositif d'accompagnement,
ce qui questionne les techniciens de la CAGB sur les moyens à mettre en
oeuvre pour les impliquer davantage.
En effet, plusieurs limites apparaissent quant aux
possibilités d'une collaboration plus poussée. Tout d'abord, les
bailleurs sociaux subissent des contraintes budgétaires qui restreignent
les possibilités d'investissement matériels (réfection des
locaux poubelles) et humains (suivi du taux de présentation, de la
qualité et de la quantité du tri, sensibilisation des locataires)
propices à une meilleure gestion des déchets sur leur parc
locatif. De surcroît, la délégation par certains organismes
logeurs des tâches en rapport avec les ordures ménagères
à des sociétés de nettoyage freine leur implication sur
cette problématique. Aussi, dans certains immeubles la redevance
incitative crée une certaine tension entre les locataires qui prend la
forme d'une « chasse aux mauvais trieurs », ce qui peut faire douter
certains bailleurs des
102 Pour les organismes logeurs, la collectivité doit
avant tout mettre en place d'un service de collecte fiable assurant la
salubrité des locaux et la sécurité des personnes. Ce
point a d'ailleurs fait l'objet de frictions avec la CAGB lorsque la direction
gestion des déchets est passée de deux à une collecte
hebdomadaire avec la mise en place de la collecte sélective. La
réduction des déchets et la réussite de la collecte
sélective ne sont donc pas des priorités pour les bailleurs
sociaux bien que la redevance incitative les pousse de plus en plus à
adhérer à ces objectifs.
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vertus du nouveau système puisqu'ils sont
confrontés à la gestion de conflits supplémentaires. Les
organismes logeurs ont également l'impression d'être
engagés dans une relation schizophrénique avec les services de
l'agglomération en charge de la question des déchets : d'un
côté ces derniers mettent en place un programme d'accompagnement
à leur bénéfice et, de l'autre, ils les rappellent
à l'ordre via des courriers de déclassement lorsqu'un ou
plusieurs bacs jaunes sont mal triés. Enfin, l'évolution de la
répartition des charges d'ordures ménagères vers des plus
petites échelles (tel que la cage d'escalier), préconisée
et mise en place par la CAGB, n'est pas suivie par les bailleurs sociaux. Les
logeurs conservent des clés de répartition sur des
échelles plus grandes pour des raisons pratiques : la répartition
par cage d'escalier des charges d'ordures ménagères
nécessite des calculs complexes alors qu'ils ont pour habitude de
mutualiser l'ensemble des charges sur un groupe d'immeubles. De plus,
l'externalisation des locaux poubelles sur une grande partie du parc HLM des
bailleurs empêche d'opérer un lien direct entre cage d'escalier et
facture puisque les bacs sont partagés entre plusieurs cages, voir
plusieurs immeubles103.
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