2- Essaouira: Une médina en ébullition
Essaouira, l'ancienne Mogador, est une ville
côtière située au bord de l'Atlantique à 175 km
à l'ouest de Marrakech et à 170 km au nord d'Agadir. Sa
médina, au style maroco-portugais s'étend sur une trentaine
d'hectares et communique avec son environnement grâce aux six grandes
portes qui l'entourent et qui assurent son ouverture.
La médina d'Essaouira a vu le jour en 1760 lorsque le
sultan Mohammed Ben Abdellah décida de construire le plus grand port de
son royaume et confie à un architecte français, Théodore
Cornus, la réalisation du plan d'une nouvelle ville selon les principes
de l'architecture militaire européenne de l'époque. Depuis sa
fondation, elle est restée un port de commerce international de premier
plan reliant le Maroc et l'arrière-pays saharien à l'Europe et au
reste du monde.
32 Selon le recensement du ministère du
tourisme.
33
La médina d'Essaouira est petite de taille. Elle ne
représente qu'un dixième de la superficie de la ville et abrite
environ 25 000 habitants sur 70 000 habitants dans l'ensemble de la ville.
Depuis les années 1990, la ville d'Essaouira est
devenue pour le Maroc une destination touristique importante. Proche de
Marrakech et soutenue par une forte médiatisation qui véhicule
l'image d'une ville pittoresque à fort potentiel touristique, Essaouira
étend la gamme des produits touristiques du pays et permet d'en diffuser
les retombées à grande échelle.
Le tourisme à Essaouira est en grande partie
basé sur le volet culturel. Elle renferme un patrimoine architectural et
urbanistique particulier, témoignant d'un riche passé ouvert sur
toutes les civilisations humaines (Européenne, Arabo-musulmane et
Africaine) qui ont contribué chacune pour sa part à la
création de son centre historique. C'est ainsi que la médina
d'Essaouira a été inscrite sur la liste du patrimoine culturel de
l'Humanité par l'UNESCO, depuis décembre 2001.
Les maisons de la médina sont riches en figures
architectoniques qui offrent un exemple d'une ville fortifiée aux
allures européennes mais aux valeurs traditionnelles arabo-musulmanes.
La médina d'Essaouira ne possède pas de riads mais des
dars hautes avec un patio central souvent étroit. Pourtant,
à l'image de Marrakech avec ces grands riads, des
étrangers de différents horizons du monde ont élu domicile
dans la médina d'Essaouira ; peintres, musiciens et écrivains ont
depuis longtemps trouvé dans cette ville un lieu emblématique
pour la création et l'art comme elle a été un haut lieu du
monde hippie (Jimmy Hendrix) dans les années 1960. Cependant, cette
installation s'est démocratisée depuis la fin des années
1990, surtout, puisque des investisseurs étrangers de partout dans le
monde achètent les anciennes demeures de la médina pour y prendre
résidence ou bien pour y diriger une maison d'hôtes. En effet, le
dynamisme d'achat et de restauration de ces anciennes demeures enclenché
chez les propriétaires étrangers s'est beaucoup étendu
pour prendre, plus ou moins, la même allure qu'à Marrakech. Des
travaux de relevés d'évaluation de cette population ont
été menés à Essaouira par l'équipe de
Recherche sur la Région et la Régionalisation de
l'Université Mohammed V-Agdal et qui ont fait état de pas moins
de 200 maisons à propriétaire étranger dans la
médina (Cf. Carte 3).
34
Carte 3.
Source : relevé de terrain
réalisé par l'équipe de Recherche sur la Région et
la Régionalisation de l'Université Mohammed V-Agdal,
Décembre 2003.
35
Ces nouveaux habitants occupent pratiquement tous les
quartiers avec une préférence pour les maisons longeant les
murailles et donnant sur la mer. Ils sont, à l'instar de Marrakech, de
nationalités et de profils très différents.
Le développement de la médina d'Essaouira par la
mise en valeur de son tissu ancien, sa patrimonialisation et le
développement de sa dimension culturelle par le biais du tourisme ont
tous participé à la forte pratique de la médina en tant
qu'espace de séjour par des étrangers d'horizons
différents. Ainsi, à l'instar de Marrakech, le prix de
l'immobilier dans la médina a considérablement augmenté en
l'espace de quelques années, ce qui a considérablement
poussé le phénomène vers d'autres villes qui
étaient encore financièrement accessibles. La médina de
Fès a par conséquent pris la relève grâce à
son offre en riads et anciennes demeures à caractère
particulier. L'arrivée de ce phénomène à Fès
correspond ainsi, à un prolongement de son développement dans les
villes d'Essaouira et Marrakech. Cet élan n'est pas non plus à
dissocier des représentations et des discours médiatiques dont
elles font objet dans différents supports et différents pays et
qui ont beaucoup encouragé leur promotion auprès des
Occidentaux.
|