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Problématique de la fondation épistémologique des sciences de la culture chez Ernst Cassirer

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par Marcellin Tibérius KALOMBO MBUYAMBA
Université catholique du Congo - Master  2011
  

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I.3. Approche méthodologique des sciences de la culture

En cette dernière analyse, il sera question de montrer l'origine dichotomique entre sciences de la culture et sciences de la nature. D'abord, elle est née dans une crise interne entre la philosophie et les sciences et ensuite la dite crise a entrainé dans le milieu allemand la séparation entre les sciences. Les disciples de Kant regroupés au sein des écoles ont orientés leurs idées du coté méthodologique, c'est-à-dire que la différence entre sciences de la nature et sciences de la culture et d'ordre méthodologique.

I.3.1. Crise interne entre philosophie et science

Nous ne pouvons pas ignorer que la philosophie et les sciences sont issues d'un tronc commun historique. Mais, cette histoire était émaillée des conflits, des séparations mutuelles. C'est ainsi que le professeur Akenda affirme qu'il a eu « l'auto-affirmation de l'une à l'égard de l'autre ; une histoire d'émancipation d'un domaine du savoir de la tutelle d'un autre partenaire »55(*). En plus, chacun de ce domaine a pris sa propre direction pour son émancipation scientifique. Nous devons également remarquer que, l'autonomie de chaque domaine du savoir est née à partir de la dite crise, n'était que le résultat tardif de l'époque moderne.

En outre, au début de l'histoire des sciences, la philosophie et les sciences collaboraient au point d'affirmer que les premiers penseurs étaient aussi les hommes des sciences. Par ailleurs, le divorce entre ces deux domaines est intervenu au moment où la crise interne s'est installée entre la philosophie et les sciences56(*). En effet, Cassirer nous renseigne que la crise qui a caractérisé la philosophie et les sciences ne datent qu'après la mort de Goethe et de Hegel. A l'issue de celle-ci, une émergence remarquable s'est fait sentir dans les sciences de la culture et celles de la nature. Il s'agissait du réajustement du contenu et de la méthode dans les sciences.

Ainsi, les sciences ont approfondi leur domaine d'études et ont crée les nouvelles orientations de la connaissance. Par exemple, la biologie a dépassé l'étape de la description et de la classification pures et simples des formes de la nature, pour parvenir à une véritable théorie des formes organiques(...), pour les sciences de la culture, la tâche à accomplir était encore plus importante. Car, il fallait chercher la voie sûre de la science57(*). C'est pourquoi, les sciences comme l'histoire, la philologie, la linguistique, vont renforcer la théorie des sciences de la culture.

Nonobstant cette victoire apparente qui se déployait dans les sciences, elle laissait également couler beaucoup d'encre dans la mesure où, l'unité des sciences a connu un déficit, à tel enseigne qu'elle était remise en question. A cet effet, la philosophie n'était pas à même de garantir une telle unité recherchée. Au contraire, elle a contribué à la division des sciences à partir des conséquences qui ont découlé de la crise. Aux sciences, on demande qu'elles apportent plus les connaissances positives ou objectives dans le sens d'une opérationnalité au bénéfice de tous. Aussi, on leur exige également de prévoir, et le cas échéant de prévenir les risques auxquels nous exposent nos efforts pour maitriser la nature aussi bien en nous-mêmes qu'en dehors de nous58(*).

A la philosophie, l'exigence est d'éclairer la communauté scientifique sur les questions épineuses et ultimes de l'existence tant individuelle que collective. Il s'ensuit qu'on accorde à la philosophie les domaines propres à sa réflexion comme : « la religion, le droit, la politique, l'art et la morale »59(*).

Par ailleurs, tellement que la crise a perduré, tout espoir de réconciliation était tourné vers le système Hégélien, croyant qu'il pouvait apporter des solutions au problème de l'unité des sciences. Mais, le système hégélien n'était pas à mesure d'aboutir à une forme cohérente et unifiée parce que : l'aspiration de Hegel, son ambition philosophique, visait à réconcilier la nature avec l'idée. Or, cela aboutit chez lui, non pas à une réconciliation, mais à la soumission de la nature à l'idée absolue60(*).

Nonobstant la ferme volonté de Hegel de constituer l'unité des sciences, sa distinction de la nature et de l'idée, le conduit à considérer la nature comme la soumission de l'idée absolue. C'est pourquoi, Cassirer dit que la nature chez Hegel n'a pas droit de conservation propre, elle n'a qu'une autonomie apparente(...) finalement, la nature, c'est l'idée elle-même parce qu'elle n'est pas considérée dans son propre être absolu ni dans sa vérité absolue mais dans sa propre aliénation, dans son être-autre61(*).

Eu égard à ce qui précède, le système hégélien n'était pas capable de résoudre la crise interne qui s'est éclatée entre la philosophie et les sciences. Cependant, les sciences de la nature et de la culture ne se sont pas directement tombées dans le fossé du système hégélien. Au contraire, elles ont suivi leur propre voie sans s'intéresser à la philosophie. Et, les différentes voies qu'elles ont suivies, ont renforcé la séparation entre elles. D'ailleurs, la philosophie du XIXe siècle n'était pas à mesure de combler le fossé entre ces deux sciences, elle l'a par contre élargit.

Il faut encore signaler que plusieurs tentatives palliatives n'ont pas abouties à la médiation ou la réconciliation des sciences. C'est ainsi que le dualisme qui s'est manifesté entre la « matière et esprit, entre nature et pensée, découle des méthodes dichotomiques qui marquent aussi bien les sciences que la philosophie »62(*). Il s'ensuit que, la crise a entrainé les discussions dans le milieu allemand à propos de la séparation entre sciences de la nature(Naturwissenschaften) et sciences de la culture (Kulturwissenschaften). C'est la raison pour laquelle, les disciples qui ont voulu défendre la pensée kantienne se sont regroupés au sein des écoles (d'une part, le néokantisme de l'école de Marbourg dont les tenants étaient : Cohen, Natorp et Cassirer qui reste la figure de proue. Et d'autre part, le néokantisme de l'école de Bade dont Windelband est le principal inspirateur et que Rickert est la figure dominante).

Il appert de ce qui précède que, ces penseurs, face à l'échec de l'idéalisme absolu de Hegel dans sa tentative d'unifier le champ de la connaissance scientifique qui échapperait à la philosophie, ont apporté une solution méthodologique et non ontologique. Car, beaucoup d'adversaires se sont refugiés dans la métaphysique parce qu'en cette dernière, il était impossible de les chasser car, chacun bien entendu, pouvait régner en maitre que dans son propre camp, sans pouvoir persuader ou réfuter l'autre63(*). Pendant cette querelle, la philosophie critique est restée fidèle à l'idéal kantien, c'est-à-dire elle a cherché à ramener le problème sur son vrai terrain tout en le dépouillant de la sphère métaphysique et considérer simplement sub specie de la critique de la connaissance64(*). C'est ainsi que les néokantiens comme Windelband, Rickert et les autres abordent le problème vers la direction méthodologique et conceptuelle.

* 55 J-C. AKENDA., Epistémologie structuraliste et comparée, p.16

* 56 E. CASSIRER., Perception des choses et perception de l'expression, dans Logique des

sciences de la culture, p.113

* 57 E. CASSIRER., O.C., P.113

* 58 C. DIMANDJA., Cours de philosophie des sciences. Etude critique de Dominique Lecourt,

UCC, 2008, p.3

* 59 C. DIMANDJA., p.3.

* 60 E. CASSIRER., O.C., p.114

* 61 Ib.O.C., p.114

* 62 J-C. AKENDA., O.C., p.24

* 63 E. CASSIRE., Logique des sciences de la culture, p.115

* 64 E. CASSIRE., O.C., p.115

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"En amour, en art, en politique, il faut nous arranger pour que notre légèreté pèse lourd dans la balance."   Sacha Guitry