CHAPITRE III : LES MODALITES DE DEMOCRATISATION A
MADAGASCAR
Au cours de ce chapitre que nous réservons à la
modalité de démocratisation à Madagascar, nous attacherons
l'étude au processus historique ayant marqué l'avènement
de la démocratie dans le pays, nous continuons l'étude par la
déduction des faits essentiels de ces contextes historiques.
III.1. Le contexte de la décolonisation
Au regard de l'histoire de la politique malgache, la
quête de la démocratie remonte déjà à l'aube
de l'indépendance. Les injustices, l'oppression dans tous les domaines,
l'inexistence de la liberté dans le contexte colonial ont
éveillés les malgaches à chercher la libération.
III.1.1.Une lutte pour la démocratie
Les mouvements de lutte menée par les formations
politiques secrètes et les intellectuels ont débouché sur
l'indépendance. La souveraineté nationale, la libération
du joug colonial, l'accession à l'indépendance étaient les
principales revendications. Des formations politiques ont émergé
portant la dénomination démocratique à savoir UPDN, le
MDRM, UDSM21.
Une fois l'indépendance obtenue, le régime qui
se met en place est proclamé un régime démocratique. Il
convient de rappeler que le premier parti politique arrivé au pouvoir
fut dénommé PSD descendant du PADESM. A cette époque de la
renaissance de l'indépendance, le pays a évolué vers un
régime démocratique structurel, le régime politique est
dominé par le présidentialisme où tout le pouvoir se
concentre aux mains de l'exécutif. Le champ politique est dominé
par le monopartisme. L'économie est ouvertement capitaliste
malgré le slogan social démocrate. La constitution pierre
angulaire de la démocratie est héritée de la
Quatrième République privée de son sens et de son contenu.
Le régime en place a maintenu la relation fidèle avec la France
cristallisée par les accords de coopération, la présence
des français dans l'administration du pays.
Par ailleurs, nous soulignons que le contexte de
l'indépendance dans le pays ne résulte pas de l'action des
leaders politiques nationales, mais aussi par le dynamisme du contexte
international d'alors.
En outre le contexte de la décolonisation a produit de
nombreux critiques jusqu'à aujourd'hui. Il est souvent
évoqué le contenu politique de cette indépendance. Des
auteurs ont insisté que l'indépendance des pays africains y
compris Madagascar n'est qu'une coquille vide. C'est une
21 Randriamamonjy (F), Histoire de Madagascar de
1895, 2002, Trano Printy Loterana Malagasy Antananarivo 2001.
indépendance purement formelle née par les
besoins de la conjoncture mondiale. L'oeuvre de Ziegler mérite
d'être rappelée ici lorsqu'il parle de « protonation »
pour designer l'ensemble des pays d'Afrique nouvellement indépendant.
Ainsi il a résumé en ces termes suivants « la
décolonisation ne marque guère qu'un moment anomique dans le
système de domination planétaire érigé par le
capital financier, les anciennes puissances tutélaires (France,
Angleterre, Belgique), affaiblies par la 2e Guerre Mondiale soumises
au diktat du capital hégémonique nord-américain, sont
obligées d'accorder une indépendance formelle aux bourgeoisies
compradores qu'elles ont mises en place au cours de 50 ans de domination
coloniale. [...], la protonation du grec (protos) « rudimentaire »
« primitif » est aujourd'hui la forme de société la
plus répandue en Afrique. [...], elle est une pure création de
l'impérialisme. La protonation est le produit d'une conjoncture
particulière du devenir de l'impérialisme »22
III.2. De l'ajustement structurel à l'ajustement
démocratique
Comme nous l'avons souligné, l'année 80 et 90
est une époque de remise en question du régime politique marxiste
phénomène cristallisé par la chute du mur de Berlin, et le
triomphe de l'universalisation des valeurs occidentales.
Les pays du tiers monde sous l'expérience marxiste sont
ravagés par une crise économique profonde. La condamnation de ces
échecs économiques, la corruption qui mine l'administration,
l'incohérence de la politique avec la réalité, l'absence
de liberté ont incité les populations locales à une
revendication des libertés, une gestion efficace de l'économie.
De leur coté, les occidentaux poussés par leurs calculs
stratégiques ont lancés les conditions d'aide économique
en faisant croire que l'instauration de la démocratie favorisera le
développement. Le FMI et la Banque mondiale sont devenus le
démiurge du développement. A ce propos, Osvaldo de Rivero
souligne que « au cours des 20 dernières années, en plus
d'une aristocratie mondiale, dont le pouvoir dépasse celui des Etats
nations, une bureaucratie internationale non élue par les peuples est
aussi apparue qui établie les règles du jeu économique
pour la majorité de la population mondiale. Aujourd'hui, le FMI, et la
banque mondiale ont acquis le pouvoir supranational de dicter et de superviser
les politiques économiques de n'importe quel pays pauvre et d'influer
pour le meilleur et pour le pire sur la vie quotidienne de n'importe quel
citoyen sans avoir à rendre de compte à qui que ce soit.
»23.
Si la condition d'aide est au départ économique,
la condition devient politique d'oül'injonction de la
démocratie comme exigence de l'aide. Les bailleurs ont fait croire que
le
22 Ziegler (J), Le pouvoir africain,
éd. Seuil, 1971 et 1979.
23 Rivero (O), Le mythe du développement,
coll. Enjeux et Planète groupe Cérès production,
2003.
développement n'existe pas sans la stabilité
politique, sans les structures des idéaux de la démocratie, le
respect des droits de l'homme. A ce sujet, nous pouvons évoquer
l'exemple du discours du François Mitterrand à la baule en 1990,
qui établit un lien entre démocratie et développement, le
consensus de Washington24 qui donne la priorité à la
libéralisation et l'application de la démocratie, la
conférence de vienne en 1993 qui met en corrélation droits de
l'homme et développement. Ainsi, le programme néolibéral,
libéralisation économique, la décentralisation, l'Etat de
droit, bonne gouvernance, ciblage des politiques sociales, adaptation de la
main d'oeuvre aux TIC est à l'ordre du jour de presque tous les
gouvernements qui veulent démocratiques.
III.2.1. Modalité de l'injonction de la
démocratie à Madagascar
A partir de la fin années 70, Madagascar s'est
engagé par la politique d'investissement à outrance qui s'est
soldé par un échec car elle se traduit par un endettement massif,
la dégradation du niveau de vie de la population générale,
l'ampleur du chômage, une nationalisation mal maîtrisée.
Pour renverser la détérioration de la vie, le pays a
négocié avec les bailleurs de fonds dans le cadre de la mise en
place du PAS. Les objectifs du programme étaient la réduction de
dépenses publiques impliquant la réduction des investissements
publics, la suppression des subventions des produits de PPN,
libéralisation du commerce extérieur et intérieur, la
libéralisation des prix. Le désengagement de l'Etat du secteur
productif en laissant sa place aux initiatives des entreprises privées.
Il revient à l'Etat d'exécuter sa fonction régalienne
à savoir l'éducation, la santé, les infrastructures de
bases. Toutefois, les mesures de redressement de l'économie n'ont pas
produit les résultats escomptés. La vie de la population devient
de plus en plus difficile qui se traduit par la détérioration des
services des bases en raison des restrictions budgétaire accentuant la
pauvreté.
En matière de gouvernance, les bailleurs de fonds ont
exigé la libéralisation de la vie politique, des pratiques de
gouvernances ont été instaurées étant
désormais admis que c'est la pratique malsaine qui a aggravé la
situation.
III.2.2. Le contexte politique nationale
Devant le problème de la pauvreté sans solution,
le mélange incompréhensible entre socialiste et capitaliste et
suite aux critiques de l'élection présidentielle de 1989 qui
ramène Ratsiraka au pouvoir, les foules ont descendu sur la rue. La
situation se prolonge par la marche vers la démocratie le 10 août
1991. Le pouvoir monopolistique de 16 ans de Ratsiraka a été
destitué.
24 Cette expression a été
employée pour la première fois par l'économiste John
Williamson.
Un gouvernement d'insurrectionnel fut crée par le
leader des forces vives de la nation le professeur Zafy Albert. Dans le
même temps, un gouvernement de transition fut institué
dirigé par Guy Willy Razanamasy.
Dans le contexte de la préparation des
conférences nationales en Afrique à l'instar du Bénin,
Madagascar a aussi tenu une conférence nationale du 23 mars au 2 Avril
1992 sous la direction du FFKM. Les grandes lignes de ce forum furent la mise
en place d'un Etat de droit, le pluralisme, respect des droits de l'homme, la
participation, organisation d'une élection libre et transparente, la
décentralisation, les séparations des pouvoirs conformes aux
idéaux démocratiques.
III.3. Un régime politique en crise
Depuis l'octroi de l'indépendance, la vie politique
malgache évolue avec un changement de régime à coup de
force, le pays n'a connu une véritable alternance politique au sens
démocratique du terme.
III.3.1. La crise politique en 1972
En 1972, le régime en place a connu sa première
contestation populaire. Le vide politique qui se matérialise par la
faiblesse de l'état de santé du président Tsiranana, Le
soulèvement des paysans du Sud sont les causes latentes de cette crise.
André Rasolo a souligné que « le caractère explosif
de 1972 est dû en grande partie à l'incohérence politique
et à l'impuissance du régime. Un régime qui confond
l'unité nationale avec un partage dit « équilibré
» des avantages liés au pouvoir entre les notables de
différentes régions. Un régime où l'administration
est à la fois incompétente et répressive.
»25 En outre le soulèvement des lycéens
et étudiants ont favorisé l'élargissement de la crise. La
pauvreté, la contestation de l'école antidémocratique,
combiné par la condamnation du néocolonianisme, et la politique
d'arrangement du pouvoir, ont contribué à la chute du
régime Tsiranana. Le chef d'Etat élu avec un score de 99,7 % est
chassé du pouvoir. Le pays au bord du gouffre oblige le leader du PSD
à transférer le pouvoir aux militaires sous la direction de
Ramanantsoa. La crise se calme avec l'arrivé de l'armée. Un
régime transitoire militaro civil est institué par le referendum
du 8 octobre 1972. La constitution fut adoptée 07 novembre 1972.
Le régime en place est marqué par la rupture de
coopération avec les français, c'est la sortie de la zone
franc. La fermeture de la station américaine de la NASA à
Imerintsiatosika, le lancement d'ouverture diplomatique « tous azimuts
» sur la base d'un engagement auprès des
25 Rasolo (A), « Autour de mai 1972. La question
du pouvoir », Cahiers des sciences sociales, EESDEGS,
Université de Madagascar n° 1, 1984.
non aligné26. L'abolition du système
représentatif. Le changement s'opère également par
l'expérience de la malgachisation, la restructuration de la vie à
base de fokonolona.
Tableau n°03 : Résultat du
referendum du 8 octobre 1972.
Nombre de bureaux de vote
|
11
|
408
|
Nombre d'inscrits
|
3
|
453
|
722
|
Nombre de votants
|
2
|
897
|
819
|
Suffrages exprimés
|
2
|
875
|
988
|
Voix obtenues
|
2
|
773 483 de oui (96 %) et 102 506 de non
|
Source : Cahiers des sciences sociales, 1984
Ramanantsoa qui n'est pas en mesure de dresser le pays
à cause de l'absence de programme politique, une crise de gouvernance,
un pouvoir menacé par l'instabilité militaire, quitte la
direction du pays en donnant le plein pouvoir au colonel Ratsimandrava le 5
février 1975. Après six jours de règne, il est
assassiné à Ambohijatovo. Dans la nuit qui s'ensuit l'assassinat
de Ratsimandrava, le général Gilles Andriamahazo a
constitué un gouvernement de 18 officiers pour continuer
l'activité de l'Etat qui remporte le capitaine de Frégate Didier
Ratsiraka au pouvoir. Le 8 novembre 1975 le président Ratsiraka au cours
d'un discours politique au stade de Mahamasina a déclaré
l'organisation d'un referendum prévu le 21 décembre 1975. La
question posée au peuple était, la mise en place d'une
société nouvelle ou règne la justice et
l'égalité de classe, l'acception de la révolution
socialiste malgache et la constitution qui va l'appliquer et pour la
réaliser, l'élection de Ratsiraka comme président de la
république. La république de Madagascar était donc
construite par la révolution socialiste, l'adoption de la nouvelle
constitution, et l'élection du président de Ratsiraka au
pouvoir27.
III.3.2. Le mouvement pour la démocratie en
1991
En 1991, une autre crise politique s'est reproduite dans le
pays. Le mouvement populaire dirigé par les forces vives de la nation,
la transformation politique initiée par les bailleurs de fonds sans
résultat palpable ont amené les populations à descendre
dans la rue. Le régime socialiste déjà vieux de 16 ans est
tombé par l'action du mouvement populaire.
L'inexistence de la liberté qui se traduit par la
domination de l'AREMA du champ politique, l'assemblée nationale est
constituée de 81 % de l'AREMA, contre 11 % AKFM, et 8 % pour les autres
formations, la restriction de la liberté individuelle, une option
politique
26 Ibid. p. 31.
27 Randriamamonjy (F), Histoire de Madagascar de
1895, 2002. Ed. Trano Printy Loterana Malagasy. 2001.
contradictoire à la fois socialiste et capitaliste, une
misère sans solution sont les éléments donateurs de cette
crise.
Les différentes idées véhiculées
au cours de la manifestation de 91 furent intégrées dans la
nouvelle constitution comme base de la reconstruction de la nouvelle
république démocratique naissante. La nouvelle constitution est
créée le 19 août 1992. Les résultats des
élections étaient de 72,3 % de oui et 27,7 % de non. Dans
l'intervalle, Zafy Albert a gagné l'élection
présidentielle après le second tour le 10 février 1993.
Les résultats de l'élection étaient au premier tour
menés par Zafy remportant 46% de voix contre 29 % de Ratsiraka. Au cours
de la deuxième tour le père de la démocratie a
évincé le père du socialisme 66,76% contre 33,24%. Le
nouveau président était inauguré à Mahamasina le 27
mars 1993.28 Le nouveau régime a fait sa rupture avec les
autres régimes en adoptant un régime de type parlementaire. Les
luttes incessantes entre exécutif et législatif ont amené
Zafy à modifier la constitution en 1995.
En septembre 1996, Zafy est empêché par
l'assemblée nationale. Le régime transitoire a organisé
une élection présidentielle. Zafy et Ratsiraka s'affrontent de
nouveau. Ratsiraka est revenu au pouvoir en ajustant son discours car c'est un
régime humaniste écologique qu'il propose à ses
concitoyens. En 15 mars 1998, Ratsiraka a fait voter une nouvelle constitution.
Le présidentialisme se renforce.
Tableau n° 04 : L'élection
présidentielle en 1996.
|
Ratsiraka
|
Zafy
|
|
Taux d'abstention
|
Bulletin blanc
|
Premier tour
|
36,6
|
%
|
23,4
|
%
|
41,6
|
%
|
4,2
|
%
|
Deuxième tour
|
50,7
|
%
|
49,3
|
%
|
50,3
|
%
|
4,2
|
%
|
Source: PROJET MADIO 1997.
III.3.3. La contestation électorale en
2002
Les controversés des résultats électoraux
en décembre 2001 ont abouti sur une nouvelle crise sociopolitique dans
le pays. C'était la première fois que le résultat de
l'élection n'est pas encore prononcé qu'un candidat annonce sa
victoire au premier tour.
L'argumentation du candidat était de faire une
confrontation entre les résultats détenus de la HCC et celles
détenus par les observateurs de l'élection. Pour la HCC,
Ravalomanana a obtenu 46,44 % et Ratsiraka 40,61 %. Pour le consortium des
observateurs Ravalomanana remportait l'élection 50,49 % contre le
candidat Ratsiraka 37,61 %. Pour le comité de soutien (Komity miaro ny
safidim-bahoaka) de Ravalomanana, ce dernier a obtenu 52,15 % et
28 Ibid.
Ratsiraka 35,67%. Le deuxième tour prévu par la
HCC n'a pas lieu. Après six mois de grève et de conflit
Ravalomanana s'autoproclame président de la république. Deux
investitures l'emportent à la présidence du pays. Le conflit
entre Ratsiraka et Ravalomanana ne s'est terminé qu'à Dakar le 18
mars 2002. Le chef d'Etat est réélu à premier tour en 2006
avec un score de 54,79 %. En 2007, le président a amendé une
nouvelle constitution visant à consolider son pouvoir qui est
approuvée par la population à 75,33 % malgré la faible
participation à 42,78 %, deux ans après celui-ci, est
écarté de son pouvoir par un mouvement populaire sur la place
mythique du 13 mai.
III.3.4. La crise politique de 2009
La vente de la terre à la compagnie Daewoo Logistics,
l'achat du Boeing Air Force One 737- 700, et la fermeture de la
station VIVA appartient à l'ancien maire de la CUA ont été
les éléments pour mobiliser la foule à descendre dans la
rue. Andry Nirina Rajoelina lance un appel au peuple tananarivien pour
descendre à Ambohijatovo, et revendique la démission de certains
ministres du gouvernement Charles Rabemananjara, et l'ouverture de la station
VIVA. La crise a évolué vers l'inauguration de la place de la
démocratie (ex jardin d'Ambohijatovo), il a lancé la
révolution orange en vue de mettre en place une véritable
démocratie à Madagascar le 17 janvier 2009. Le 26 janvier, le
mouvement se dégénère en pillages et de destruction des
entreprises du président au pouvoir, et certaines entreprises
privées (lundi noir du 26 janvier). Le samedi 7 février matin sur
la place du 13 mai, Monja Roindefo est nommé le premier ministre du
mouvement insurrectionnel. L'après-midi le nouveau premier a conduit la
foule à prendre le palais présidentiel Ambohitsorohitra.
L'échec de la médiation dirigé par le
FFKM à l'hôtel le Hintsy a débouché sur une nouvelle
transition dans le pays. Le 17 mars à l'Episcopat Antanimena
l'ordonnance n° 2009-001 par la quelle le president Ravalomanana a remis
les pleins pouvoirs à des directoires militaires. La nuit qui suit les
militaires ont transmis le pouvoir à Andry Nirina Rajoelina par
l'ordonnance n° 2009-002. L'ordonnance n° 2009-003 du 19 mars 2009 a
institué de la transition vers la IVe République.
Dans le cadre de la recherche de sortie de crise, les quatre
mouvances politiques malgaches ont signé successivement l'Accord de
Maputo I et II, l'Accord d'Addis-Abeba, dans le cadre de la mise en place d'une
transition inclusive et consensuelle. Notons qu'à l'issue des assises
nationales d'août 2009, Teny ifampiherana de mars 2010, des
Dinika santatra d'août 2010 et de la conférence nationale
de septembre 2010, il importe à souligner que le referendum
constitutionnel du 17 novembre 2010 s'est déroulé dans des
conditions controversées. La constitution est adoptée le 11
décembre 2010.
Pour la mise en place d'une institution
précédent la IVe République, sous la
médiation de la SADC ; les divers acteurs politiques malgaches ont
signé la feuille de route le 8 mars 2011 selon les critères d'une
transition consensuelle et inclusive. Toutefois, il importe de souligner que
nous sommes loin des résultats attendus. La transition
considérée comme consensuelle et inclusive vit actuellement d'une
crise gouvernementale. Le pays traverse actuellement sa troisième
année de transition, la déception l'emporte sur l'espoir, les
promesses pendant le mouvement à savoir la démocratie,
liberté d'expression, la diminution du coût de la vie, sont
très vîtes oubliées. On assiste à un gouvernement
ingouvernable qui se manifeste par le mélange des attributions des
ministres. Actuellement, le problème majeur de la transition est la
recherche d'une réconciliation internationale, la préparation
d'une élection digne de démocratie.
À partir de ces rappels historiques de la vie politique
malgache nous pouvons en tirer quelques tendances sur l'évolution de la
pratique démocratique dans le pays. C'est toujours l'action des
mouvements de foule qui est au centre du changement de régime politique
dans le pays. Les chefs d'Etat qui inaugurent un régime politique
démocratique sont tour à tour renversés sur la place
mythique du 13 mai. Parmi les présidents qui se succèdent au
pouvoir, d'aucun n'a quitté le pouvoir normalement au terme de son
mandat. Le premier considéré comme le père de
l'indépendance inaugurant un régime social démocrate est
tombé après trois mois de sa réélection. Le
président Ratsiraka qui inaugure un régime socialiste la vraie
démocratie au sens marxiste du terme a suivi le même chemin deux
ans après sa réélection. Le vrai père de la
démocratie à savoir le professeur Zafy Albert est tombé
dans le piège du parlementarisme. Ravalomanana a connu le même
sort après avoir réélu au premier tour de son mandat en
cédant sa place jusqu'à maintenant à l'ancien maire de la
CUA considéré encore jusqu'ici le porteur de la vraie
démocratie.
Le mot démocratie n'est jamais absent du langage
politique de chaque leader politique qui dirige le mouvement de foule. La
faction qui veut récupérer le pouvoir insiste sur ce qu'elle fera
pour le peuple, sur ce qu'on n'a pas fait mais qu'aurait dus faire, sur ce qui
est mal fait et donc à refaire, la faction se proclame comme le vrai
porteur de la démocratie. Elle demande à la population de la
porter au pouvoir.
Chaque chef d'Etat poussé par le peuple et arrive au
pouvoir s'empresse à tailler une constitution à leur mesure force
est de reconnaître que le processus vise à la monopolisation du
pouvoir et verrouille totalement la porte d'entrée pour les autres
qu'à coup de force. La constitution est ensuite confrontée au
referendum pour justifier la prise du pouvoir d'où le recours au
suffrage universel comme acte de légitimation. Dans cette lecture, Weber
n'est pas
absent lorsqu'il avait dit que la domination politique moderne se
repose par le recours sur la légitimation par un acte juridique.
Nous pouvons remarquer également une certaine tendance
dans le processus de la mise en place de la démocratie dans le pays tout
d'abord la création du gouvernement de la rue, la recherche de compromis
entre le contestataire et le pouvoir en place, ensuite la prise des
bâtiments ministériels, l'installation des ministres de
façon musclée.
Au terme de ce chapitre nous tenons à remarquer
quelques faits marquant la modalité de démocratisation à
Madagascar. D'abord le processus de démocratisation a
évolué avec le rythme de la politique interne, il est souvent
dirigé par une minorité de la classe politique accompagnée
par l'appui des foules. L'inexistence de la liberté, la dérive du
pouvoir à la dictature et la pauvreté sans solution sont toujours
au centre de la contestation populaire.
La transformation des paysages politiques de ces 20
dernières années a changé la vie politique malgache sur le
plan formel, les institutions qui se conforment aux idéaux de la
démocratie sont présentes, les séparations de pouvoir sont
maintenus, le multipartisme gagne du terrain, à partir de 1990, le pays
avait 150 partis politiques29, actuellement, on trouve plus de 333
partis politiques dans le pays30. Le foisonnement de la
société civile qui est opérationnelle dans divers
domaines. Il ne faut pas ignorer également le développement de la
presse privée qui commence à trouver de place à la
liberté d'expression qui se manifeste par une presse parfois critique
à l'égard du régime en place.
Ensuite, les enjeux économiques internationaux ont
été favorables au processus de démocratisation dans le
pays, la mise en place des structures conformes aux idéaux
démocratiques a été l'exigence des bailleurs de fonds
comme condition de leur aide économique. Les conditionnalités
démocratiques des années 90 deviennent une arme pour les
bailleurs de fonds, et le pays traversant une difficulté est
obligé d'accepter l'offre des bailleurs. La réalité
économique devient une imposition du réalisme politique.
29 La libéralisation des partis politiques dans
le pays est stipulée par l'ordonnance n° 090-001 du mars 1990.
30 Dernier chiffre donné par le
ministère de l'Intérieur.
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