Contribution à l'étude sociologique de la pratique démocratique dans le contexte malgache( Télécharger le fichier original )par Alain Ranindrianoro Université d'Antananarivo - Maitrise sociologie 2012 |
CONCLUSION GENERALEAu terme de cette contribution portant sur l'étude sociologique de la pratique démocratique malgache, nous avons vu à partir des exemples historiques que la quête de la démocratie est l'oeuvre d'une dynamique interne et externe complémentaire. Au niveau interne, elle est mise en pratique dans le pays par l'action des mouvements de foule dirigés par une minorité qui a voulu accéder au pouvoir. L'instrumentalisation du concept pour les exclus du pouvoir politique est une arme efficace utilisée par cette minorité. Elle dissimule les intérêts d'une classe politique. Les actions de foule pour instaurer la démocratie dans le pays ne sont que le substitut des intérêts particuliers et les luttes démocratiques ne sont que des luttes d'intérêts partisans maquillés de luttes d'intérêts généraux. Dans sa vérité objective, elle n'est autre chose qu'un espace de constitution d'une classe politique qui n'aurait d'autre but que son propre pouvoir et l'enrichissement personnel. Le peuple, qui est théoriquement le lieu du pouvoir politique, se réduit à une simple force légitimante. La mobilisation des instruments d'analyse nous a permis de voir le fonctionnement, le dysfonctionnement et la contradiction de la pratique de la démocratie dans le contexte malgache. Nous avons montré que les institutions matérialisant la participation citoyenne de la démocratie rencontrent des problèmes. L'organisation des élections comme moyen pour instaurer la démocratie souffre de crédibilité et devient une source de conflit sociopolitique à répétition. L'élection est devenue une exclusion sociale du fait que le minimum de conditions requises pour préparer une élection crédible n'est pas rempli à savoir la liste électorale. L'exclusion de la population ne vient pas seulement du problème administratif mais aussi de la méconnaissance de la population de ses droits. Les déterminismes sociaux empêchent l'individu d'exercer ses droits politiques et civils. Nous avons insisté aussi sur le dysfonctionnement des institutions relais entre le peuple et le pouvoir étatique. Nous nous sommes évertués à comprendre les rôles des acteurs essentiels de la démocratie à savoir les partis politiques et les sociétés civiles. En effet, les partis politiques dans l'état actuel des choses ne sont que des machines de recyclage des personnels politiques dont le système démocratique a besoin pour fonctionner. Ils ne jouent pas les rôles qui leur incombent. La prolifération des partis politiques d'aujourd'hui s'explique par les intérêts portés au pouvoir comme moyen d'enrichissement et de bénéficier de l'immunité. En ce qui concerne la société civile, elle ne bénéficie pas encore de confiance de la part du pouvoir en place pour instaurer un véritable débat démocratique. Cette situation se reflète par l'absence des alternatives nationales en laissant le destin du pays par des programmes formatés à l'étranger et des bailleurs de fonds qui ne font que renforcer la pauvreté durable. De nos jours, le processus démocratique est considéré comme un corollaire de la mondialisation qui s'appuie sur l'existence virtuelle d'un village planétaire véhiculé. De ce fait, force est de reconnaître que toute la pratique démocratique malgache relève d'un concept diffusé à travers le monde. L'échec du programme d'ajustement structurel mis en place par les Institutions de Bretton Woods a incité les bailleurs à imposer une démocratisation de façade en escamotant le concept par des notions abstraites comme la bonne gouvernance, l'Etat de droit, le multipartisme et la décentralisation. L'illusion est de croire qu'en démocratisant, le pays s'achemine vers le développement. Pourtant, nous sommes loin du résultat attendu. Le développement tant espéré n'a pas eu lieu. Il s'agit d'une politique pour inciter le pays à orienter vers la logique marchande libérale. La conséquence en est que les dirigeants autochtones en place ont utilisé leur pouvoir pour accaparer les richesses nationales. L'Etat devient un instrument d'enrichissement personnel. L'écart entre riche et pauvre s'amplifie chaque jour davantage. Les marchés mondiaux accentuent les inégalités sociales. Ils produisent des exclus. Le fait dominant est la concentration entre les mains d'une poignée de personnes de toutes les richesses produites. Avec la mondialisation de la démocratie, le gouvernement qui ne respecte pas la règle du jeu démocratique est sanctionné économiquement. C'est l'économie qui dicte les règles du jeu politique et non l'inverse. Nous constatons que le résultat du rapport entre pays riche et pays pauvre est dans l'ensemble négatif. La gestion du pouvoir politique devient une gestion économique et l'adaptation de la société selon les règles établis par les étrangers. L'hypothèse posée au début du travail semble se vérifier dans la mesure où nous avons montré que la pratique de la démocratie laisse peu de chance à la population de prendre part à toute prise de décision commune. Elle est même source d'exclusion sociale. La démocratie telle que nous l'avons pratiquée aujourd'hui n'est autre chose que la défense de l'intérêt des politiciens, d'une classe politique qui veut régner sur le pays. La tentative de la mise en place de la démocratie par la rue n'est qu'une lutte politique entre les classes qui veulent accéder au pouvoir. Les populations mobilisées par ces mouvements sont manipulées parce que c'est insensé de parler de démocratie sans la présence de la population. La quête démocratique n'a fait que profiter les politiciens et pour mieux préserver leurs intérêts. Les classes politiques réduisent le débat démocratique à une question d'ordre juridique et le fonctionnement de l'Etat est source d'insatisfaction et de l'exclusion sociale. Les institutions ou les instruments qui sont censés représenter les peuples dans la sphère de décision sont stériles. Il en découle une crise de représentation et un discrédit de la classe politique. L'instauration de la démocratie ne se fait pas de jour au lendemain et elle ne se réduit pas à un moment circonstanciel de l'histoire du pays. On ne peut pas parler de démocratie à travers l'organisation d'une élection de façade ou poussée par un mouvement de foule. La pratique démocratique ne se limite pas à l'existence des structures purement formelles. De ce constat, nous avons avancé des propositions constructives et des pistes de réflexion. Notre idée est que la démocratie devrait être un espace de dialogue permanent et franc entre la société civile et le pouvoir en place. Nous avons privilégié la société civile comme institution relais qui devrait mobiliser un débat démocratique avec le pouvoir. Il s'agit d'un débat démocratique dans le but de trouver une alternative nationale pour résoudre le problème de fond du pays. C'est d'ailleurs l'avis du grand sociologue Durkheim lorsqu'il a affirmé qu'une nation ne peut être maintenue que si entre Etat et individu s'interpose toute série de groupes secondaires. Les groupes intermédiaires permettraient d'éviter l'anarchie sociale et de rapprocher les hommes d'un Etat toujours distant et contraignant. La société civile n'est pas seulement une organisation relais entre l'Etat et le peuple mais aussi une organisation oeuvrant pour la défense des intérêts communs dans toute la dimension de la société. Nous avons énuméré aussi que la démocratie de proximité dans le cadre d'une décentralisation pourrait être un rempart à la crise de représentation actuelle. La décentralisation ne saura jamais effective. Mais il s'agit de voir les atouts et les limites tout en tenant compte de la réalité sociale. Nous reconnaissons que la grande difficulté dans laquelle nous assistons à l'heure actuelle est le comportement apathique de la population à l'égard de la chose publique. La régression de la participation citoyenne laisse le champ libre aux politiciens. Un effort doit donc être déployé dans ce domaine. Dans le contexte actuel où Madagascar est plongé dans une crise sociopolitique profonde, le débat sur l'élection est soulevé comme moyen de sortie de crise. Tout le monde espère instaurer une démocratie par l'intermédiaire d'une élection libre, transparente et crédible. L'histoire a montré qu'une élection mal préparée prend en otage le pays dans un conflit social. Alors, dans quelle mesure le pays sera-t-il capable de tenir des élections à même de consolider les acquis démocratiques assurant une stabilité politique jalonnée de bonne gouvernance ? L'avenir nous en dira la réponse. ELEMENTS BIBLIOGRAPHIQUES Ouvrages généraux
Ouvrages spécifiques
Publication 1. Cahiers des sciences sociales n° 01, EESS DEGS, Université de Madagascar, 1984 Articles :
Documents officiels
Revue de presse
Webographie : 1- http://www.erudit.org./apropos/utilisation.html TABLE DES MATIERES REMERCIEMENTS SOMMAIRE SOMMAIRE 4 INTRODUCTION GENERALE 1 Tableau n° 01 : groupe d'échantillonnage selon l'âge et le genre. 5 Tableau n° 02 : groupe d'échantillonnage selon le genre et niveau d'étude 5 CHAPITRE I : AUTOUR DE LA DEMOCRATIE 10
I.2.1. Alexis de Tocqueville 13 I.2.2. Raymond Aron 14 I.2.3. La sociologie politique de Max Weber 14 I.2.4. Marx et la démocratie bourgeoise 15 CHAPITRE II : THEORIES ET CONCEPTS 17
II.3.1. Les partis politiques 20 II.3.2. Les sociétés civiles 21 CHAPITRE III : LES MODALITES DE DEMOCRATISATION A MADAGASCAR 24 III.1. Le contexte de la décolonisation 24 III.1.1.Une lutte pour la démocratie 24 III.2. De l'ajustement structurel à l'ajustement démocratique 25 III.2.1. Modalité de l'injonction de la démocratie à Madagascar 26 III.2.2. Le contexte politique nationale 26 III.3. Un régime politique en crise 27 III.3.1. La crise politique en 1972 27 III.3.2. Le mouvement pour la démocratie en 1991 28 III.3.3. La contestation électorale en 2002 29 III.3.4. La crise politique de 2009 30 CHAPITRE IV : REFLEXIONS SUR LA PRATIQUE DEMOCRATIQUE 33
IV.2.1. Des partis politiques absents 40 IV.2.2. Les problèmes de la société civile 43 CHAPITRE V : LA PERCEPTION CITOYENNE 46
V.2.1. Le postulat d'une société libre 52 V.2.2. Le dysfonctionnement de la démocratie 53 V.2.3. participation de la population dans le processus de décision 54 CHAPITRE VI : ELARGISSEMENT DE LA REFLEXION 58
VI.3.1. L'exclusion sociale 64 VI.3.2. L'impact de la mondialisation 64 CHAPITRE VII : APPROCHE PERSPECTIVE 66 VII.2. Pour une démocratie fonctionnelle 66 VII.2.1. Remettre en question le multipartisme 66 VII.2.2. La place de la société civile 68 VII.2.3. La démocratie de proximité 70 VI.2.4. Le rôle de l'Etat 71 CONCLUSION GENERALE 72 ELEMENTS BIBLIOGRAPHIQUES 75 LISTE DES TABLEAUX LISTE DES FIGURES LISTE DES ABREVIATIONS ANNEXES |
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